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04/05/2017 | FRANCE | N°15/02104

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 04 mai 2017, 15/02104


COUR D'APPEL


DE


VERSAILLES














Code nac : 80A





11e chambre





ARRET N°





CONTRADICTOIRE





DU 04 MAI 2017





R.G. N° 15/02104


SB/AZ





AFFAIRE :





SA ESPACE SAINT GERMAIN








C/


Q... U...


...











Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Avril 2015 par le

Conseil de prud'hommes - Formation de départage de SAINT GERMAIN EN LAYE





N° RG : F14/00159








Copies exécutoires délivrées à :





Me Sylvie LARGER-LANNELONGUE


la SELASU DADI AVOCATS








Copies certifiées conformes délivrées à :





SA ESPACE SAINT GERMAIN





Q... U..., Fédération UNION LOCALE CGT DE CHATOU




...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 MAI 2017

R.G. N° 15/02104

SB/AZ

AFFAIRE :

SA ESPACE SAINT GERMAIN

C/

Q... U...

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Avril 2015 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de SAINT GERMAIN EN LAYE

N° RG : F14/00159

Copies exécutoires délivrées à :

Me Sylvie LARGER-LANNELONGUE

la SELASU DADI AVOCATS

Copies certifiées conformes délivrées à :

SA ESPACE SAINT GERMAIN

Q... U..., Fédération UNION LOCALE CGT DE CHATOU

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE MAI DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SA ESPACE SAINT GERMAIN

[...]

Représentée par Me Sylvie LARGER-LANNELONGUE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1251 - N° du dossier 778

APPELANTE

****************

Monsieur Q... U...

[...]

[...]

Comparant en personne, assisté de Me Ghislain DADI de la SELASU DADI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0257

Fédération UNION LOCALE CGT DE CHATOU

[...]

[...]

Représentée par Me Ghislain DADI de la SELASU DADI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0257

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Février 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie BOSI, Président chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie BOSI, Président,

Madame Marie-Christine PLANTIN, Conseiller,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Brigitte BEUREL,

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Saint Germain en Laye en date du 14 avril 2015 ayant :

- déclaré irrecevable l'action de l'Union Locale CGT de Chatou et en conséquence débouté l'Union de toutes ses demandes,

- dit n'y avoir lieu d'écarter des débats l'attestation de M T...,

- dit que les faits reprochés à Monsieur Q... U... ne sont pas constitutifs d'une faute grave,

annulé le licenciement de Monsieur Q... U...,

- ordonné la réintégration de Monsieur Q... U... dans son emploi ou un emploi similaire,

- dit que la société ESPACE SAINT GERMAIN ne pourra exiger qu'il reprenne son emploi qu'après l'exécution des diligences suivantes :

* délivrance des bulletins de salaire ou d'un bulletin de salaire récapitulatif pour la période du 20 novembre 2013 à la date de la réintégration effective, tenant compte de la médiane des augmentations de salaire intervenues au sein de la société au cours de cette période,

* organisation d'un examen médical par le médecin du travail permettant de vérifier l'aptitude du salarié à occuper son emploi,

- condamné la société ESPACE SAINT GERMAIN à payer à Monsieur Q... U... une indemnité égale aux salaires nets échus du 20 novembre 2013 jusqu'à la date de la réintégration effective, calculée sur la base d'un salaire brut mensuel de 2190 euros outre les congés payés y afférents sous déduction des indemnités perçues de l'organisme d'assurance-maladie pendant cette période,

- dit que Monsieur Q... U... devra justifier dans les deux mois du présent jugement des indemnités perçues de l'organisme d'assurance maladie du 20 novembre 2013 jusqu'à sa réintégration effective,

- débouté Monsieur Q... U... du surplus de ses demandes,

- rappelé les règles de l'exécution provisoire de droit,

- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 2357,63 euros,

- condamné la société ESPACE SAINT GERMAIN à payer à Monsieur Q... U... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société ESPACE SAINT GERMAIN aux dépens de l'instance.

Vu l'appel de la société ESPACE SAINT GERMAIN .

Vu les conclusions écrites de la société ESPACE SAINT GERMAIN soutenues oralement à l'audience de la cour par son avocat qui demande de :

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- dire le licenciement pour faute grave de Monsieur Q... U... valable et justifié,

- ordonner le remboursement par Monsieur Q... U... de la somme de 3391,20euros payée en exécution du jugement entrepris,

subsidiairement,

- dire que les revenus de remplacement versés à Monsieur Q... U... par la CPAM et Pôle Emploi doivent venir en déduction de l'indemnité égale aux salaires nets échus du 20 novembre 2013 (date de l'accident du travail) au 3 mai 2016 (date de la seconde visite médicale de reprise concluant à l'inaptitude),

- enjoindre à Monsieur Q... U... de justifier des indemnités perçues par l'organisme d'assurance maladie consécutives à sa rechute du 29 juin 2015 et sa nouvelle lésion du 1er septembre 2015,

- dire que le second licenciement pour inaptitude de Monsieur Q... U... du 24 juin 2016 est parfaitement justifié,

- dire que la demande de Monsieur Q... U... en paiement de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité est non fondée,

- débouter Monsieur Q... U... de toutes ses demandes,

- condamner Monsieur Q... U... à payer à la société ESPACE SAINT GERMAIN la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 70à du code de procédure civile,

-le condamner aux entiers dépens.

Vu les conclusions écrites de Monsieur Q... U... soutenues oralement à l'audience de la cour par son avocat qui demande de :

Sur le licenciement du 3 janvier 2014:

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré le licenciement de Monsieur Q... U... nul,

- l'infirmer en ce qu'il a déduit les sommes perçues au titre des IJSS,

- ordonner la réintégration de Monsieur Q... U... sans aucune déduction,

à titre infiniment subsidiaire,

- déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

en conséquence,

- fixer le salaire de Monsieur Q... U... à la somme de 2461,30 euros (moyenne des trois derniers mois de salaire avant accident du travail),

- ordonner à la société ESPACE SAINT GERMAIN de verser à Monsieur Q... U... une indemnité équivalente au salaire de réintégration entre le 20 novembre 2013 et le 30 juin 2015 (6,3x2461,30 euros)

pour la période du 30 juin 2015 au 3 mai 2016, date de la seconde visite (10x2461,30 euros) : 24 643,03 euros bruts

sous la seule déduction de la somme de 3392,20 euros réglée en première instance au titre de la réintégration de Monsieur Q... U...,

Sur le licenciement du 24 juin 2016 :

- condamner la société ESPACE SAINT GERMAIN à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 29 535,60 euros,

En tout état de cause :

- condamner la société ESPACE SAINT GERMAIN au paiement des sommes suivantes :

* rappel de salaire : 1 819,32 euros bruts,

*reliquat d'indemnité compensatrice de préavis : 344,88 euros outre 34,48 euros au titre des congés payés y afférents,

* dommages et intérêts pour méconnaissance de l'obligation de sécurité de résultat : 10 000 euros,

* article 700 du code de procédure civile,

* les entiers dépens.

Vu les observations orales de Me J... qui indique représenter la Fédération Union Locale CGT de Chatou .

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience.

CECI ETANT EXPOSE :

Considérant que la société ESPACE SAINT GERMAIN est concessionnaire Fiat, Alpha Roméo, Lancia ; qu'elle propose un hall d'exposition de véhicules neufs et d'occasion et exploite un atelier et une carrosserie ;

Considérant que par contrat de travail à durée indéterminée, la société ESPACE SAINT GERMAIN a recruté Monsieur Q... U... en tant que mécanicien de maintenance automobile à compter du 4 juin 2009 ;

Considérant que le 20 novembre 2013, des faits de violence ont eu lieu dans l'atelier ;

Que Messieurs U... et H... y sont mêlés ;

Considérant que le 29 novembre 2013, la société ESPACE SAINT GERMAIN a transmis à la caisse d'assurance maladie une déclaration d'accident du travail concernant Monsieur U... et rempli le questionnaire de celle-ci le 8 janvier 2014 ;

Considérant qu'après avoir dans un premier temps refusé de prendre en charge l'accident de Monsieur Q... U... au titre des accidents du travail, l'assurance maladie est revenue sur sa décision et a finalement accepté de le prendre en charge au titre de cette législation, notifiant à Monsieur Q... U... sa décision le 20 novembre 2013 ;

Considérant que par lettre recommandée avec avis de réception du 27 novembre 2013, la société ESPACE SAINT GERMAIN a convoqué Monsieur Q... U... à un entretien préalable à son licenciement fixé au 9 décembre 2013, d'une part, et mis à pied le salarié à titre conservatoire jusqu'à la décision devant découler de cet entretien, d'autre part;

Que par lettre recommandée avec avis de réception du 3 janvier 2014 (reçue par son destinataire le 6 janvier 2014), la société ESPACE SAINT GERMAIN a notifié à Monsieur Q... U... son licenciement pour faute grave dans les termes suivants :

' Le 20 novembre 2013 à 14 heures 15, alors que vous étiez dans l'atelier en présence des deux autres mécaniciens, Messieurs D... T... et F... H... , vous avez traité Monsieur F... H... de 'bon à rien' et de 'larbin.' Ce dernier, qui subit quotidiennement vos insultes avec fatalité, a décidé, cette fois, de riposter oralement.

C'est dans ces conditions que, la protestation inattendue de Monsieur F... H...

vous ayant rendu furieux, vous avez tenté d'en venir aux mains, ce qui a pu être évité par l'intervention de Monsieur D... T... qui vous a séparés.

Malgré cette séparation, vous avez de nouveau tenté de frapper Monsieur F... H... , ce qui a pu, une nouvelle fois, être évité grâce à Monsieur D... T... qui vous a maintenu et retenu.

C'est alors que vous vous êtes échappé pour prendre au sol une barre de fer dans le but de frapper et blesser votre collègue, ce que Monsieur D... T... vous a empêché de faire. Vous avez alors voulu donner un coup de pied à Monsieur F... H... , dans l'action, vous avez malencontreusement perdu l'équilibre, trébuché et vous vous êtes blessé tout seul.

Votre attitude au travail est inacceptable et met en cause le fonctionnement même de ma structure, entreprise de taille humaine, nécessairement fortement impactée par le comportement violent et dangereux d'un salarié.

En outre, je vous rappelle que ma responsabilité d'employeur m'oblige à assurer la sécurité des travailleurs sur le lieu de travail, ce que votre comportement compromet gravement.

Dans ce contexte de travail compte tenu de la gravité des faits, je suis donc contraint de prononcer à votre égard une mesure de licenciement disciplinaire pour faute grave sans préavis, votre maintien dans l'entreprise s'avérant impossible.'

Considérant que le dernier jour travaillé et payé a été le 19 novembre 2013 ;

Considérant que Monsieur Q... U... a contesté son licenciement et saisi le conseil de prud'hommes de Saint Germain en Laye qui, par jugement du 14 mars 2015, a ordonné la réintégration du salarié entre autre ;

Considérant que la société ESPACE SAINT GERMAIN a réintégré le salarié et entamé des démarches auprès du médecin du travail pour vérifier l'aptitude de celui-ci à occuper son emploi de mécanicien de maintenance automobile ;

Considérant qu'à l'issue de deux visites médicales successives des 18 avril et 3 mai 2016, Monsieur Q... U... a été déclaré inapte au poste de mécanicien automobile dans les termes suivants par le médecin du travail :

' Inapte au poste de mécanicien automobile - contre indication médicale aux gestes répétés, aux mouvements de rotation et de flexion extension du poignet gauche, au port de charges lourdes -contre indication médicale à la conduite de véhicule professionnelle. Après étude de poste du 18 avril 2016 pas d'aménagement technique ou organisationnel proposable. Serait médicalement apte à tout poste respectant les contre-indications médicales ci-dessus.'

Considérant que par lettre du 2 juin 2016, la société ESPACE SAINT GERMAIN a averti le médecin du travail de ce qu'elle était dans l'incapacité de reclasser Monsieur Q... U... ;

Considérant que par lettre recommandée avec avis de réception du 10 juin 2016, la société ESPACE SAINT GERMAIN a convoqué Monsieur Q... U... à un entretien préalable à son licenciement fixé au 21 juin 2016 ;

Considérant que par lettre recommandée avec avis de réception du 24 juin 2016, la société ESPACE SAINT GERMAIN a licencié Monsieur Q... U... pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;

SUR LE LICENCIEMENT DU 3 JANVIER 2014 :

Sur la faute :

Considérant que Monsieur Q... U... se prévaut de l'acquiescement au jugement de la société ESPACE SAINT GERMAIN ;

Considérant qu'il ressort de la lettre du 31 mai 2016 communiquée par le salarié que la société envisageait de déposer des conclusions de désistement après avoir rappelé que Monsieur Q... U... devait lui justifier les revenus de remplacement qu'il avait perçus dont ceux de la caisse d'assurance-maladie et qu'une procédure de licenciement pour inaptitude était en cours ;

Considérant que la demande de la société concernant les justificatifs n'a pas été complètement satisfaite ; que la procédure de licenciement pour inaptitude est contestée ; que l'ensemble des échanges intervenus entre les parties après la lettre du 31 mai 2016 ne fait pas ressortir l'existence de l'acquiescement allégué ;

Considérant que Monsieur Q... U... fait valoir qu'il a été victime d'un accident du travail et que son contrat de travail était suspendu du fait de 'son arrêt de travail professionnel' lorsqu'il a été licencié le 3 janvier 2014 ; que dans ses circonstances son licenciement est entaché de nullité voire dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Qu'il reproche par ailleurs à l'employeur d'avoir manqué à son obligation de sécurité de résultat en ne prenant aucune mesure pour assurer sa protection ;

Considérant que la société ESPACE SAINT GERMAIN réplique que le salarié ayant commis une faute grave, elle disposait de la possibilité de le licencier ;

Considérant cependant qu'en application des dispositions de l'article L 1226-9 du code du travail, au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce contrat que s'il justifie, soit, d'une faute grave de l'intéressé, soit, de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie ;

Considérant qu'en l'espèce, la société ESPACE SAINT GERMAIN reproche à Monsieur Q... U... d'avoir adopté un comportement violent et dangereux envers l'un de ses collègues de travail, Monsieur F... H... ;

Considérant que le comportement de Monsieur Q... U... tel que rapporté dans la lettre de licenciement est établi par l'attestation de Monsieur T... qui écrit à la main que : 'Comme à son habitude Q... s'en est pris à F... en l'insultant, le traitant de bon à rien et (lui disant) qu'il était son larbin. F... lui a dit (ses) quatre vérités et ils ont voulu en venir aux mains (,) je les ai séparés renvoyant F... de son côté ainsi que Q.... Q... est revenu à la charge, je les ai séparés à nouveau en les maintenant chacun de leur côté. Q... a voulu frapper F... avec une barre de fer, je l'en ai empêché puis il a voulu donner un coup de pied à F... (, il ) a perdu l'équilibre tout seul et est tombé à terre.'

Considérant que les dispositions de l'article 202 du code civil ne sont pas prescrites à peine de nullité ;

Considérant que l'identité du rédacteur de l'attestation est précisée et sa pièce d'identité versée aux débats ;

Considérant que le témoignage de Monsieur T..., produit par l'employeur, ne peut être considéré comme étant de complaisance au seul motif qu'il émane d'un salarié de l'entreprise sans autre élément objectif de nature à faire douter de sa sincérité ;

Considérant que la plainte pour faux témoignage déposée par Monsieur Q... U... contre Monsieur T... a été classée sans suite ;

Considérant que Monsieur U... ne fournit aucun élément objectif extérieur à lui-même pour conforter sa version des faits ;

Considérant dès lors qu'il n'y a pas lieu d'écarter des débats l'attestation claire et circonstanciée de Monsieur T... qui met en évidence que la participation active de Monsieur Q... U... à l'altercation dans la mesure où ce dernier a commencé par agresser verbalement Monsieur F... H... avant que les deux hommes ne s'empoignent physiquement ; que Monsieur U... s'est enfermé dans son agressivité puisque au lieu de se calmer après les interventions du témoin qui avait à deux reprises séparé les protagonistes, il a voulu attaquer de nouveau Monsieur H... ; qu'il ressort également de l'attestation de Monsieur T... que la chute de Monsieur U... résulte de son action personnelle et non d'une attaque de Monsieur H... ;

Considérant cependant que les faits doivent être replacés dans leur contexte ;

Considérant que le comportement de Monsieur Q... U..., qui travaillait dans l'entreprise depuis 2009, n'avait pas appelé de remarque de la part de l'employeur avant le 20 novembre 2013 ;

Qu'en outre, dans sa plainte du 12 février 2014, Monsieur U... a expliqué aux policiers que Monsieur H... était arrivé en apprentissage un peu plus d'un an auparavant et qu'il avait 'un peu de mal avec lui', car il 'le sollicitait beaucoup au travail, lui demandant des choses' ; que 'cela (était) normal vu qu'il ne connaissait pas bien le travail, étant apprenti' ; que par contre dès 'qu'il lui demandait quelque chose, il n'avait pas de retour' ; qu' 'il y (avait) eu quelques accrochages verbaux' ;

Que Monsieur T... - qui travaillait dans le garage comme mécanicien depuis un mois environ selon la plainte- évoque le fait que Monsieur U... s'en prenait habituellement à Monsieur H... ;

Que les difficultés existant entre Monsieur Q... U... et Monsieur H... étaient donc connues dans le garage ;

Que pourtant l'employeur n'a pris aucune mesure au cours de la période précédant l'incident du 20 novembre 2013 pour améliorer la situation existant entre Monsieur U... et Monsieur H... ;

Que dès lors le comportement de l'employeur vient atténuer la gravité de la faute commise par Monsieur U..., laquelle sera requalifiée en faute simple ;

Considérant en conséquence que le licenciement du salarié pendant son arrêt maladie pour accident professionnel est nul ;

Que le jugement déféré qui a ordonné sa réintégration sera confirmé ;

Sur les demandes pécuniaires :

Considérant que le licenciement du salarié pour faute simple en période d'arrêt de travail pour accident du travail porte atteinte au droit à la protection de la santé reconnu par le préambule de la Constitution ; que le salarié a droit à une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction et l'avis médical du 3 mai 2016 constatant son inaptitude professionnelle peu important qu'il ait ou non reçu des revenus de remplacement pendant cette période y compris des indemnités de la caisse maladie ;

Considérant que les bulletins de paie font apparaître que Monsieur U... a effectué des heures supplémentaires dont le nombre a varié suivant les mois ;

Considérant qu'il aurait eu droit en tout état de cause à son salaire mensuel brut de base qui s'élève à 2.190 euros ;

Considérant que la cour ne peut statuer au-delà de la demande ; que le salarié ne chiffre sa réclamation que pour la période du 30 juin 2015 au 3 mai 2016 ;

Qu'il y sera fait droit dans la limite de 21 900 euros bruts ;

Que la somme de 3 392,20 euros qui a déjà été payée par l'employeur sera déduite de ce total ;

Que finalement la société ESPACE SAINT GERMAIN sera condamnée à payer à Monsieur Q... U... la somme de 18 507,80 euros en brut de ce chef ;

SUR LE LICENCIEMENT DU 24 JUIN 2016 :

Considérant que conformément au dispositions du jugement déféré, l'employeur a organisé une visite médicale auprès du médecin du travail permettant de vérifier l'aptitude du salarié,

Considérant qu'après l'avis d'inaptitude découlant de la seconde visite médicale du 3 mai 2016, la société ESPACE SAINT GERMAIN justifie par la production des lettres qu'elle a adressées le 9 mai 2016 aux sociétés STCA, BEAUVAIS AUTOMOBILES et GARAGE DE LA PISCINE avoir recherché un poste de reclassement pour Monsieur Q... U..., compatible avec les restrictions posées par le médecin du travail ;

Qu'elle a formulé sa demande en précisant le profil professionnel du salarié et en reproduisant l'avis du médecin du travail ; qu'elle a interrogé les trois destinataires sur l'existence d'un emploi de reclassement aussi comparable que possible à l'emploi de mécanicien de maintenance automobile précédemment occupé par le salarié mais compatible avec les restrictions médicales et à défaut elle leur a demandé de lui transmettre la liste de tous les autres postes disponibles dans leur entreprise de type administratif ou de maintenance;

Que par lettres séparées, sous la signature de Monsieur Y..., également signataire de la lettre de licenciement, les trois sociétés contactées ont répondu qu'elles ne disposaient pas de poste de reclassement existant ou susceptible d'être créé ;

Que par lettre du 2 juin 2016, la société ESPACE SAINT GERMAIN a écrit au médecin du travail qu'elle envisageait de procéder au licenciement de Monsieur U... faute de poste de reclassement chez elle mais aussi au sein de sa société mère, la société STCA, et des filiales BEAUVAIS AUTOMOBILES et GARAGE DE LA PISCINE qui appartiennent au même groupe qu'elle ;

Que dans ces circonstances et en l'absence de tout autre élément contraire, il ne saurait être reproché utilement à la société ESPACE SAINT GERMAIN de ne pas avoir rempli son obligation de recherche de reclassement ;

Considérant que Monsieur Q... U... soutient également qu'il appartient à l'employeur de démontrer qu'il a dressé un procès-verbal de carence ou que son effectif était inférieur à 11 salariés par la production de la déclaration URSSAF et du registre d'entrée et de sortie du personnel ;

Considérant que la cour relève qu'au cours de toute la procédure prud'homale de première instance et d'appel, Monsieur U... n'a pas été constant dans sa contestation du nombre de salariés employés par la société ESPACE SAINT GERMAIN et que par ailleurs la société établit par la production de sa déclaration unifiée de cotisations sociales qu'au mois de mars 2016, elle rémunérait 10 salariés ;

Considérant que la société employant moins de 11 salariés, la consultation des délégués du personnel n'était pas requise ;

Considérant qu'un mois après le second avis médical du 3 mai 2016, le salarié n'était ni reclassé ni licencié pour impossibilité de reclassement ;

Qu'il réclame la somme de 1 819,32 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période du 1er juin au 25 juin 2016 ;

Que d'après les indications figurant sur le bulletin de paie du mois de juin 2016, l'employeur a déduit du salaire de base la somme de 1516,10 euros bruts pour la période comprise entre le 4 juin 2016 et le 25 juin 2016 ;

Que la société ESPACE SAINT GERMAIN sera condamnée à payer cette dernière somme à Monsieur U... ;

SUR LA DEMANDE DE RAPPEL D'INDEMNITE COMPENSATRICE DE PREAVIS ET DE CONGES PAYES :

Considérant que Monsieur U... n'explicite ni ne justifie sa demande de rappel d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés ;

Qu'il sera débouté de ces chefs ;

SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES ET INTERETS POUR MECONNAISSANCE DE L'OBLIGATION DE SECURITE DE RESULTAT :

Considérant qu'il ressort de l'attestation de Monsieur T... que la chute de Monsieur U... n'est pas due à l'intervention d'une autre personne que lui-même ; qu'il s'est déséquilibré en voulant porter un coup à Monsieur H... ;

Considérant que dans sa plainte précitée du 12 février 2014, Monsieur I... a fait part des critiques qu'il élevait contre Monsieur H... et des heurts qui existaient entre eux ;

Considérant qu'il découle de l'attestation de Monsieur T... que les difficultés existant entre Monsieur Q... U... et Monsieur H... étaient connues dans l'entreprise ;

Considérant que la société ESPACE SAINT GERMAIN n'a pris aucune mesure sur la période précédant l'incident du 20 novembre 2013 pour améliorer la situation existant entre Monsieur U... et Monsieur H... ;

Qu'elle a failli aux obligations qui pèsent sur l'employeur en vertu de l'article L 4121-1 du code du travail ;

Que sa carence a été préjudiciable à Monsieur U..., qui n'a pas été aidé dans sa prise en charge du jeune apprenti ;

Que la cour dispose des éléments d'appréciation lui permettant de fixer à la somme de 500euros le montant des dommages et intérêts dus par l'employeur à Monsieur U... de ce chef ;

SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE ET LES DEPENS:

Considérant que la société ESPACE SAINT GERMAIN qui est condamnée au paiement de sommes sera déboutée de sa demande d'indemnité pour frais irrépétibles de procédure et devra supporter les entiers dépens ;

Considérant que Monsieur Q... U... ne chiffre pas la demande d'indemnité pour frais irrépétibles de procédure qu'il présente à la cour ;

Qu'en équité, le conseil de prud'hommes, au visa de l'article 700 du code de procédure civile, a bien apprécié l'indemnité qu'il a accordée de ce chef au salarié pour la première instance ; que la condamnation de la société ESPACE SAINT GERMAIN à verser à Monsieur U... la somme de 1 000 euros sera confirmée ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant contradictoirement,

Dans les limites de l'appel,

Infirme partiellement le jugement déféré,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que les revenus de remplacement perçus par Monsieur Q... U... dont les indemnités perçues de l'organisme d'assurance maladie ne viennent pas en déduction de l'indemnité due pour la période comprise entre son éviction et l'avis médical d'inaptitude du 3 mai 2016,

Condamne la société ESPACE SAINT GERMAIN à payer à Monsieur Q... U... les sommes suivantes :

- 18 507,80 euros bruts à titre d'indemnité pour la période comprise entre le 30 juin 2015 et le 3 mai 2016, déduction faite de la somme de 3 392,20 euros déjà réglée par la société ESPACE SAINT GERMAIN,

- 1 516,10 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période comprise entre le 4 juin 2016 et le 25 juin 2016,

- 500 euros à titre de dommages et intérêts pour méconnaissance de l'obligation de sécurité de résultat,

Confirme le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société ESPACE SAINT GERMAIN aux dépens.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2 ème alinéa de l'art 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Sylvie BOSI, Président, et par Madame Claudine AUBERT, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11e chambre
Numéro d'arrêt : 15/02104
Date de la décision : 04/05/2017

Références :

Cour d'appel de Versailles 11, arrêt n°15/02104 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-04;15.02104 ?
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