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02/05/2017 | FRANCE | N°15/05694

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 02 mai 2017, 15/05694


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80C



6e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 25 AVRIL 2017- DEUX MAI 2017



R.G. N° 15/05694



AFFAIRE :



[N] [F]





C/

SNC VEOLIA EAU D'ILE DE FRANCE









Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 23 Novembre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Référé

N° RG : R15/00378r>




Copies exécutoires délivrées à :



SCP BAUMGARTEN - JDS



Me Pauline LOISEAU





Copies certifiées conformes délivrées à :



[N] [F]



SNC VEOLIA EAU D'ILE DE FRANCE







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DEUX M...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 25 AVRIL 2017- DEUX MAI 2017

R.G. N° 15/05694

AFFAIRE :

[N] [F]

C/

SNC VEOLIA EAU D'ILE DE FRANCE

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 23 Novembre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Référé

N° RG : R15/00378

Copies exécutoires délivrées à :

SCP BAUMGARTEN - JDS

Me Pauline LOISEAU

Copies certifiées conformes délivrées à :

[N] [F]

SNC VEOLIA EAU D'ILE DE FRANCE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX MAI DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [N] [F]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Comparante en personne, assistée de Me Emmanuel GAYAT de la SCP BAUMGARTEN - JDS, avocat au barreau de PARIS,

APPELANTE

****************

SNC VEOLIA EAU D'ILE DE FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Comparante en la personne de Mme [U] [A], chargée des relations sociales, à qui pouvoir lui est donné de représenter la société par M. [Q] [Y], directeur général à qui M. [J] [D], gérant, délègue son pouvoir, assistée de Me Pauline LOISEAU, avocat au barreau de PARIS,

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Février 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie BORREL, Conseiller chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, Président,

Madame Sylvie BORREL, Conseiller,

Monsieur Patrice DUSAUSOY, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Mélissa FABRE, greffier en pré-affectation

EXPOSE DU LITIGE

Mme [F], salariée de la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE, a été élue en 2013 comme représentante du personnel CGT et secrétaire du comité d'établissement de l'UES VEOLIA EAU GENERALE DES EAUX.

Un accord collectif sur la diversité et la prévention des discriminations a été conclu au sein de l'UES aux termes duquel: "Dès qu'il a connaissance d'une réclamation, le référent diversité en informe les autres membres de l'instance régionale diversité; une enquête sera alors menée afin d'étudier les faits signalés et la direction de l'établissement prendra si nécessaire les mesures appropriées."

Cet accord prévoit qu'en cas de situation non conforme aux engagements de l'accord diversité ou de présomption de discrimination au sein de l'UES, chaque salarié peut:

- avoir recours à la hiérarchie et au réseau ressources humaines, ou

- saisir les institutions représentatives du personnel notamment le délégué du personnel,

- saisir directement un des membres de l'instance régionale diversité.

Cette instance régionale est composée de deux représentants du personnel et de deux représentants de la direction, à savoir la directrice des ressources humaines et Mme [K].

Le référent diversité au sein de l'établissement VEOLIA EAU ILE DE FRANCE est Mme [K], en sa qualité de représentante de la direction au sein de l'instance.

Fin 2014 cette dernière a été saisie, en sa qualité de référent diversité, d'un courrier de Mme [J], représentante CGT du personnel au sein du comité d'établissement, dénonçant les prétendues malversations de Mme [F] dans la gestion du comité, faisant notamment état de congés supplémentaires accordés aux salariés du comité.

Elle a diligenté une enquête dans le cadre de laquelle elle a convoqué Mme [F] à un entretien qui s'est déroulé le 6 novembre 2014.

Par lettre du 7 avril 2015 adressée à Mme [K], Mme [F] s'étonnait de cette enquête, estimant que la plainte dont elle faisait l'objet n'était pas du ressort de l'instance régionale diversité, puisque cela concernait le fonctionnement du comité d'établissement, et qu'elle n'était pas en mesure de s'expliquer sur les faits reprochés dans la mesure où Mme [K] avait refusé de lui transmettre la lettre de la plaignante, Mme [J], et les documents à l'appui de sa dénonciation.

Elle proposait de mettre à l'ordre du jour d'une réunion du comité la gestion de ce comité afin de permettre un débat collectif.

Par lettre du 23 avril 2015, Mme [K] informait Mme [F] que l'enquête était suspendue à la demande de Mme [J].

La direction de la société refusant de communiquer à Mme [F] la lettre de Mme [J] et Mme [F] craignant l'engagement d'une procédure disciplinaire à son égard, cette dernière saisissait en référé le 29 juillet 2015 le conseil de prud'hommes de NANTERRE aux fins de communication des documents remis par Mme [J] à l'appui de sa dénonciation.

Par ordonnance du 23 novembre 2015, dont Mme [F] a interjeté appel, le conseil se déclarait incompétent, tout en condamnant cette dernière à payer à la société la somme de 100 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le conseil estimait que la demande de communication de pièces n'étant pas une demande liée à un litige dans le cadre de la relation de travail entre la société et Mme [F], le litige relevant de la gestion du comité d'établissement, et aucune procédure disciplinaire n'ayant été engagée à son égard en lien avec ce litige.

Par conclusions écrites soutenues oralement à l'audience du 27 février 2017, auxquelles la cour se réfère en application de l'article 455 du code de procédure civile, les parties ont conclu comme suit:

Mme [F] maintient sa demande en appel, sollicitant l'infirmation de l'ordonnance et la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE, ci- après la société, sollicite la confirmation de l'ordonnance, estimant que le litige relève du tribunal de grande instance, s'agissant d'un litige entre membres élus du comité d'établissement.

A titre subsidiaire, elle estime la demande mal fondée et sollicite son rejet.

Elle demande la condamnation de Mme [F] à lui payer la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la compétence du conseil de prud'hommes:

Selon les articles L.1411-1 et L.1411-3 du code du travail, le conseil de prud'hommes est compétent pour régler les litiges pouvant s'élever à l'occasion du tout contrat de travail, tant entre les employeurs et les salariés, qu'entre les salariés.

En l'espèce, Mme [F] soutient que le refus de la direction de la société, qui est son employeur, de lui communiquer des documents sur lesquels elle s'est appuyée pour diligenter une enquête à son égard dans le cadre de l'accord sur la diversité et la prévention des discriminations, constitue un litige entre employeur et salarié, relevant de la compétence du conseil.

La société soutient au contraire qu'il ne s'agit pas d'un litige lié au travail mais au mandat de Mme [F] au sein du comité d'établissement et portant plus particulièrement sur le fonctionnement de ce comité, lequel relèverait du tribunal de grande instance.

Or, il n'est pas contesté qu'il existe un litige, à la fois entre Mme [F] et son employeur d'une part, au sujet de la transmission de documents dans le cadre de l'instance régionale diversité, et entre Mme [F] et Mme [J] d'autre part, au sujet des prétendues malversations de Mme [F] dans la gestion du comité d'établissement dont elle est secrétaire.

Il ressort de la lettre de Mme [F] en date du 7 avril 2015 et adressée à Mme [K] que les reproches, dont cette dernière lui a fait part lors d'un entretien, portent essentiellement sur les faits suivants:

- ne pas fournir à Mme [J] les moyens nécessaires pour exercer ses différents mandats, ce qui est imprécis,

- accorder des congés supplémentaires aux salariés du comité d'établissement,

- accepter qu'un des salariés du comité travaille à son domicile,

- accepter qu'un des salariés du comité bénéficie d'une formation.

Ces faits concernent donc les décisions éventuellement mises en 'uvre par Mme [F] en tant que secrétaire du comité, dans le cadre de l'exécution des décisions du comité.

Il s'agit donc certes d'un litige dans le cadre du fonctionnement du comité d'établissement, mais qui concerne aussi les droits accordés aux salariés du comité, qui auraient plus d'avantages que les autres salariés selon Mme [J]; de ce fait, ce litige relève donc aussi pour partie de l'instance régionale diversité chargée de régler des réclamations de salariés au sujet d'une éventuelle discrimination; or, la question des discriminations entre salariés d'un même établissement dans le cadre de leur contrat de travail relève bien de la compétence du conseil de prud'hommes.

Par ailleurs, ce litige concerne les relations inter personnelles entre Mme [F] et Mme [J], toutes deux salariées, représentantes du syndicat CGT et membres du comité, ce qui est une autre raison pour juger que le conseil est compétent, au vu des dispositions de l'article L.1411-3 du code du travail.

Il en serait autrement s'il s'agissait d'une contestation sur la validité des décisions du comité d'établissement, qui relèverait alors du tribunal de grande instance.

Dès lors, la cour juge que le conseil était compétent.

Sur la demande de production de pièces:

L'article 145 du code de procédure civile permet à une partie de solliciter sur requête ou en référé des mesures d'instruction, telles que la production d'éléments de preuve pouvant être déterminants dans le cadre d'un procès en cours ou à venir.

Les articles R.1454-1 et R.1454-14 du code du travail permettent aussi au conseil de prud'hommes, tant au stade du bureau de conciliation et d'orientation qu'au stade du bureau de jugement, d'ordonner la production de pièces utiles au procès, et notamment la remise de documents.

Or, en l'espèce, il n'existe aucun commencement de preuve sur une éventuelle sanction disciplinaire que la société envisagerait à l'égard de Mme [F], suite aux accusations de Mme [J]; la société apparaît plutôt se positionner dans une démarche d'apaisement, profitant de la suspension de l'enquête de l'instance régionale diversité, elle- même demandée par Mme [J] il y a désormais deux ans.

A l'audience, Mme [A], chargée des relations sociales de la société, a même précisé qu'une médiation allait se mettre en place au sujet du litige entre Mme [F] et Mme [J], lesquelles sont toujours membres du comité d'établissement.

Enfin, dans le cadre de l'accord sur la diversité et la prévention des discriminations, signé par l'ensemble des organisations syndicales dont la CGT, la procédure mise en place prévoit, au vu du document intitulé "gestion des réclamations pour discrimination", le respect d'une stricte confidentialité du dossier d'instruction des plaintes par l'instance régionale diversité, mais la personne éventuellement mise en cause est toutefois informée lors d'un entretien des éléments précis rapportés par le plaignant, ce qui a été bien le cas de Mme [F], dont l'avis a été recueilli par Mme [K]; comme l'enquête a été ensuite interrompue, à la demande de la plaignante Mme [J], aucune décision n'a été notifiée à Mme [F], Mme [J], et le cas échéant aux autres salariés concernés, au sujet des éventuelles discriminations. Ainsi, l'instance régionale diversité n'a émis aucune décision ou recommandation à l'égard de Mme [F], qui aurait pu nuire aux intérêts de cette dernière, ni préconisé aucune sanction à son encontre.

Si tel devait être le cas ultérieurement, alors Mme [F] pourrait légitimement demander communication des documents utilisés contre elle par la direction, et ce dans le cadre du respect du contradictoire.

Pour l'ensemble de ces raisons, la demande de communication de la lettre de Mme [J] adressée à la référente diversité et des éventuels documents y afférents, n'est pas justifiée en l'état et sera donc rejetée.

Dans le même souci d'apaisement du conflit, la cour ne fera pas application de l'article 700 du code de procédure civile, et laissera chacune des parties assumer la charge de ses propres dépens de première instance et appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement, par arrêt mis à la disposition des parties au greffe:

Infirme l'ordonnance de référé du conseil de prud'hommes de Nanterre en date du 23 novembre 2015, et statuant à nouveau:

Dit que le conseil est compétent pour statuer sur la demande de communication de pièces,

Rejette cette demande ;

Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que chacune des parties assumera la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel.

Prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, Président et par Madame GONORD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 15/05694
Date de la décision : 02/05/2017

Références :

Cour d'appel de Versailles 06, arrêt n°15/05694 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-02;15.05694 ?
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