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27/04/2017 | FRANCE | N°15/01426

France | France, Cour d'appel de Versailles, 5e chambre, 27 avril 2017, 15/01426


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A



(RND)



5ème Chambre





ARRET N°



contradictoire



DU 27 AVRIL 2017



R.G. N° 15/01426



AFFAIRE :



[J] [N]





C/

SAS VAUBAN MOTORS









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Mars 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MANTES LA JOLIE

Section : Encadrement

N° RG : 14/00195





Copi

es exécutoires délivrées à :



la SELARL AVOXI

Me Béatrice BRUNEAU LATOUCHE





Copies certifiées conformes délivrées à :



[J] [N]



SAS VAUBAN MOTORS







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT SEPT AVRIL DEUX MILLE DIX SEP...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

(RND)

5ème Chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 27 AVRIL 2017

R.G. N° 15/01426

AFFAIRE :

[J] [N]

C/

SAS VAUBAN MOTORS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Mars 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MANTES LA JOLIE

Section : Encadrement

N° RG : 14/00195

Copies exécutoires délivrées à :

la SELARL AVOXI

Me Béatrice BRUNEAU LATOUCHE

Copies certifiées conformes délivrées à :

[J] [N]

SAS VAUBAN MOTORS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SEPT AVRIL DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [J] [N]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Floriane SEMO de la SELARL AVOXI, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 531

APPELANT

****************

SAS VAUBAN MOTORS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par M. [W] [Z] (DAF) en vertu d'un pouvoir général, et assistée de Me Béatrice BRUNEAU LATOUCHE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0344,

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Décembre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller chargé(e) d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé(e) de :

Monsieur Olivier FOURMY, Président,

Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller,

Madame Elisabeth WATRELOT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Mohamed EL GOUZI,

L'affaire a été mise en délibéré au 09 février 2017 puis prorogée au 27 avril 2017

FAITS ET PROCÉDURE :

Selon contrat à durée indéterminée du 02 mai 2002, M. [J] [N] a été embauché, par la société Ellipse Automobile, en qualité de Responsable VN VO, à la position I, indice 72.

Son contrat de travail va faire l'objet de plusieurs modifications.

Le 1er octobre 2005, la société Ellipse Automobile a été rachetée par la société Autodex qui a repris son contrat de travail.

La cour précise que, le 30 janvier 2006, la société Autodex a engagé, en qualité de commerciale sur l'établissement de [Localité 1], Mme [S] [M] qui deviendra l'épouse de M. [N], le 08 mai 2010.

Un avenant au contrat de travail de M. [N], à compter du 1er janvier 2007, lui a accordé un classement de Cadre III A, un salaire fixe annuel de 50 000 euros et un potentiel de rémunération variable annuelle brute de 25 000 euros.

Par avenant du 24 décembre 2009, M. [N] a été promu, à compter du 1er décembre 2010 (sic), en qualité de Responsable du site [Localité 1], statut cadre, avec une rémunération mensuelle brute de base de 4 750 euros, outre des primes variables liées à l'atteinte d'objectifs.

Un avenant du 09 juin 2012, suite au rachat de la société Autodex par la société Vauban Motors, a maintenu sa date d'entrée, son ancienneté et sa situation sociale acquise sur le bulletin de salaire du mois de juin 2012.

Par courrier du 13 novembre 2012, le Directeur de Plaque de la société Vauban Motors a délégué partie de ses pouvoirs à M. [N], notamment en matière de gestion administrative et de gestion du personnel.

Mme [M] a été en arrêt maladie du 08 janvier au 02 avril 2014 puis en mi-temps thérapeutique du 03 avril au 13 mai 2014 puis jusqu'au 14 septembre 2015.

Par lettre recommandée du 17 avril 2014, M. [N] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 30 avril 2014.

Par lettre adressée sous la même forme, le 07 mai 2014, il a été licencié pour cause réelle et sérieuse et dispensé d'exécuter son préavis qui lui a été rémunéré.

Par courrier du 27 mai 2014, M. [N] a contesté les différents griefs qui lui ont été reprochés par son employeur, lequel a maintenu sa décision par lettre du 5 juin 2014.

Contestant son licenciement, M. [N] a saisi, le 10 juin 2014, le conseil de prud'hommes de prud'hommes de Mantes La Jolie (section Encadrement).

Par jugement du 02 mars 2015, le conseil de prud'hommes a débouté M. [N] de l'ensemble de ses demandes et la société Vauban Motors de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile reconventionnelle et mis les entiers dépens à la charge de M. [N].

Par déclaration du 26 mars 2015, M. [N] a interjeté appel de la totalité du jugement et les parties ont été convoquées le 13 décembre 2016.

Vu les conclusions écrites déposées et soutenues oralement par son conseil pour M. [N] qui demande à la cour de :

- infirmer le jugement et statuant à nouveau, au visa des articles L. 1332-4 et 1235-1 du code du travail ;

- constater que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamner la société Vauban Motors à lui verser la somme de 186 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- mentionner dans 'le jugement à intervenir' sa moyenne de salaire à 6 349,16 euros bruts ;

- dire que les sommes à caractère salarial porteront intérêt à compter du jour de l'introduction de la demande ;

- condamner la société à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société à tous dépens,

Vu les conclusions écrites déposées et soutenues oralement par son conseil pour la société Vauban Motors qui demande à la cour de :

- dire que le licenciement de M. [N] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

- dire qu'il ne justifie pas avoir subi de préjudice ;

en conséquence,

- le dire non fondé en son appel le débouter de sa demande de dommages et intérêts et à titre subsidiaire, limiter le quantum du préjudice à six mois de salaire ramené à 37 068,96 euros ;

- le débouter de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

reconventionnellement,

- le condamner à lui payer la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Pour un ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ainsi qu'aux explications orales complémentaires rappelées ci-dessus, et aux pièces déposées par les parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION,

Sur la prescription et le licenciement

Il est renvoyé à la lecture de la lettre de licenciement de huit pages qui vise trois griefs principaux :

- le manque de loyauté et manque d'exemplarité dans l'exercice de son contrat de travail ;

- le non-respect des directives ;

- la prise d'intérêt au détriment de l'entreprise.

A l'appui de ces griefs, la société Vauban Motors reproche à M. [N] :

- d'avoir accordé, en avril 2014, à son épouse et à lui-même les deux ponts des 02 et 09 mai 2014 en contrevenant à une note de service et à des courriels de sa hiérarchie, et au mépris de l'équité entre les salariés ;

- d'avoir, dans l'octroi de ces ponts, favorisé son épouse, alors en mi-temps thérapeutique, en lui décomptant deux jours de congés pour 15 jours d'absence ;

- d'avoir tenté de convaincre la direction de laisser travailler son épouse à domicile pendant son arrêt-maladie, en infraction au code de la sécurité sociale ;

- d'avoir manoeuvré pour faire bénéficier son épouse du paiement de commissions sur la vente de véhicules, réalisé par d'autres salariés, dont lui-même, qu'elle n'a pu assurer durant son arrêt maladie en citant deux ventes des 14 janvier et 18 février 2014 ;

- d'avoir acheté, pour son propre compte, en octobre 2013, un véhicule d'occasion de marque Toyota pour la somme de 4 100 euros, soit la moitié de sa valeur marchande de 8 100 euros, sans respecter la procédure de fixation des prix prévue par une note de service du 19 février 2013.

Sur la prescription

A l'appui de son appel, M. [N] soulève la prescription :

- des faits concernant l'achat du véhicule Toyota d'occasion dont M. [W], Directeur de Plaque, a eu connaissance plus de deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement ;

- des faits relatifs au versement des commissions attribuées à Mme [M].

La société Vauban Motors soutient que la convocation à un entretien préalable a vocation à suspendre le délai de prescription de l'action disciplinaire de sorte que les manquements reprochés à M. [N] entre le 17 février et 14 avril 2014 ne sont pas prescrits.

En vertu de l'article L. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; cette disposition ne s'oppose pas à la prise de considération d'un fait antérieur à deux mois dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi dans ce délai et s'il s'agit de faits de même nature.

Lorsqu'un fait fautif a eu lieu plus de deux mois avant le déclenchement des poursuites disciplinaires, il appartient à l'employeur de rapporter lui-même la preuve qu'il n'a eu connaissance de ceux-ci que dans les deux mois ayant précédé l'engagement de la procédure disciplinaire ou de la date à laquelle il a eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés.

La société Vauban Motors, qui a adressé à M. [N], la lettre de convocation à entretien préalable au licenciement, le 17 avril 2014, reproche à son salarié des détournements de commissions au profit de son épouse figurant sur les bulletins de paie de février, mars et avril 2014 et le refus d'appliquer les directives en matière de congés en avril 2014 soit dans le délai de prescription de sorte que l'employeur peut se prévaloir de ces faits antérieurement commis qui ont tous pour objet de favoriser son épouse.

La prescription sera écartée pour ces faits.

En revanche, cette analyse ne vaut pas pour le rachat du véhicule d'occasion en octobre 2013 pour non-respect du protocole en vigueur au sein de la société, qui ne revêt pas la même nature que les faits non prescrits.

La cour, infirmant le jugement, dira ce fait couvert par la prescription

Sur les faits fautifs

Sur le fond, le salarié appelant entend démontrer que les faits reprochés ne sont ni établis ni fautifs, soutenant que la société Vauban Motors cherchait à l'évincer de la société, pour démanteler son équipe.

La société Vauban Motors conclut au caractère répété des fautes commises par le salarié rendant impossible son maintien dans l'entreprise.

L'article L. 1235-1 du code du travail dispose qu'en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles et que si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis, objectifs imputables au salarié et matériellement vérifiables.

Sur le manque de loyauté et d'exemplarité-le non respect des directives

S'agissant de l'octroi des ponts des 02 et 09 mai 2014, M. [N], tirait de la délégation de pouvoirs du 13 novembre 2012 en matière de gestion du personnel, celui d'organiser les congés de son équipe, en restant cependant sous l'autorité du Directeur de Plaque, lui même placée sous celle du Président de la société.

Or le 15 janvier 2014, le Directeur de Plaque avait édicté une note de service transmise aux responsables de sites limitant ' pour des raisons d'équité ', la prise de congés, quelle que soit sa forme (CP, JC, RTT...) pour les deux ponts du mois de mai 2014 (1er et 8 mai) ' à un pont par salarié '(souligné en gras dans la note). La seule marge de manoeuvre qui était laissée au responsable de site était d'opérer le choix entre les deux ponts en fonction des demandes de salarié et des besoins organisationnels de l'entreprise.

Par conséquent, le seul fait pour M. [N] de se positionner, avec son épouse, sur le planning prévisionnel sur les deux ponts de mai contrevenait non seulement à l'obligation de loyauté et d'exemplarité attendues d'un directeur de site mais aussi aux directives reçues.

Ce grief est caractérisé, peu important la discussion du salarié sur l'opportunité de son choix non préjudiciable au bon fonctionnement de la société, ou d'accéder à la demande de M. [F], mécanicien, autre salarié positionné sur les deux ponts ou sur les modalités de calcul utilisées pour en faire bénéficier son épouse en mi-temps thérapeutique et même qu'il ait renoncé à ce choix après un échange de mails avec sa hiérarchie.

S'agissant du versement de commissions à Mme [M], la société Vauban Motors établit que par courriel du 05 février 2014, la direction des ressources humaines du groupe avait bien répondu que la salariée, en arrêt maladie, ne pouvait pas juridiquement travailler à son domicile comme son époux l'avait sollicité le 03 février 2014.

Si son épouse était en arrêt maladie depuis le 08 janvier 2014, M. [N] n'ignorait pas le règlement des ventes applicables aux conseillers commerciaux du 1er janvier au 31 décembre 2014 qui stipulait que le fait générateur entraînant le règlement des commissions était la bonne exécution par lui-même de la livraison du véhicule au client après règlement du véhicule par le client.

Par conséquent, il ne pouvait pas réclamer en son nom le versement de commissions pour des ventes pour des clients qu'elle aurait démarchés dès lors que les livraisons sont intervenues pendant son arrêt maladie, peu important l'opinion de M. [N] sur le caractère équitable ou non du critère d'éligibilité aux commissions retenu par l'employeur (la livraison et non pas la vente du véhicule) et les attestations qu'il a recueillies de clients louant les qualités professionnelles de son épouse et exprimant leur voeu que les commissions lui soient dévolues.

Sans entrer dans le détail du reste de l'argumentation des parties, la cour considère que la société Vauban Motors établit la matérialité et le caractère fautif des griefs visés dans la lettre de licenciement (et non couverts par la prescription) qui justifiaient la rupture du contrat de travail pour cause réelle et sérieuse.

Mérite confirmation le jugement qui a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et a débouté M. [N] de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Devant la cour d'appel, M. [N] ne reprend pas l'argumentation de première instance revendiquant la classification en position III mais effectue un calcul de son salaire moyen, qui est sans intérêt, dans la mesure où il est débouté de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

M. [N], qui succombe en son appel, sera condamné aux entiers dépens, sans nécessité de faire application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et à payer à la partie intimée la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, après en avoir délibéré, par décision contradictoire,

Infirme le jugement en ce qu'il a dit que le fait de rachat de véhicule d'occasion n'était pas prescrit ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions pour le suplus ;

Déboute les parties de leurs demandes, autres, plus amples ou contraires ;

Y ajoutant

Condamne M. [J] [N] à payer à la société Vauban Motors SAS la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [J] [N] aux dépens ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Olivier FOURMY, Président, et par Mademoiselle Delphine HOARAU, Greffier placé en préafffectation, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 15/01426
Date de la décision : 27/04/2017

Références :

Cour d'appel de Versailles 05, arrêt n°15/01426 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-04-27;15.01426 ?
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