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23/03/2017 | FRANCE | N°15/03963

France | France, Cour d'appel de Versailles, 5e chambre, 23 mars 2017, 15/03963


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

(EW)







5ème Chambre



ARRET N°



contradictoire



DU 23 MARS 2017



R.G. N° 15/03963



AFFAIRE :



UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES ILE DE FRANCE





C/

Me [N] [U] de la Selarl EMJ - Mandataire liquidateur de la SAS PHINEO





Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 02 Juin 2015 par le Tribunal des Affaires de SécuritÃ

© Sociale de NANTERRE

N° RG : 13-00324



Copies exécutoires délivrées à :



UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES ILE DE FRANCE



la AARPI RAVEL





Copies ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

(EW)

5ème Chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 23 MARS 2017

R.G. N° 15/03963

AFFAIRE :

UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES ILE DE FRANCE

C/

Me [N] [U] de la Selarl EMJ - Mandataire liquidateur de la SAS PHINEO

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 02 Juin 2015 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de NANTERRE

N° RG : 13-00324

Copies exécutoires délivrées à :

UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES ILE DE FRANCE

la AARPI RAVEL

Copies certifiées conformes délivrées à :

Me [N] [U] de la Selarl EMJ - Mandataire liquidateur de la SAS PHINEO

le : 24-03-2017

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT TROIS MARS DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES ILE DE FRANCE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par M. [S] [A] (Inspecteur contentieux) en vertu d'un pouvoir général

APPELANT

****************

Me [N] [U] de la Selarl EMJ - Mandataire liquidateur de la SAS PHINEO

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Odile PROT de l'AARPI RAVEL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1801 substituée par Me Nathalie LENFANT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1801

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Janvier 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Elisabeth WATRELOT, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Olivier FOURMY, Président,

Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller,

Madame Elisabeth WATRELOT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Mohamed EL GOUZI,

FAITS ET PROCÉDURE :

L'Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales d'Ile de France (l'URSSAF ci-après) a procédé à un contrôle au sein de la société PHINEO SAS ( la société PHINEO SAS ci-après) portant sur la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010, qui a donné lieu à une lettre d'observations, datée du 3 février 2012, comportant 17 chefs de redressement.

Le montant total des redressements était fixé à la somme créditrice de 292 335 euros.

Le 13 mars 2012, une mise en demeure ' récapitulative ' était notifiée à la société PHINEO SAS pour la somme totale de 100 7547 euros correspondant à des majorations de retard complémentaires et des cotisations pour le mois de février 2012.

Le 23 mars 2012, l'URSSAF adressait à la société PHINEO SAS une lettre l'informant que suite à ses observations du 2 mars 2012, elle maintenait l'ensemble des constatations ayant fait l'objet de la lettre d'observations du 3 février 2012. Ce document fait litige, Me [U], ès qualité de liquidateur de la société PHINEO SAS, estimant qu'il s'agit d'une mise en demeure, ce que l'URSSAF conteste.

Le 29 juin 2012, l'URSSAF établissait une nouvelle lettre d'observations, rédigée dans des termes identiques à la précédente, sauf en ce qui concerne la somme réclamée qui était alors fixée à 67 937 euros.

La société PHINEO SAS transmettait, le 11 juillet 2012, d'autres observations et le 3 août 2012, l'URSSAF informait la société de ce qu'elle maintenait ses observations.

Le 2 juillet 2012, le conseil de la société PHINEO SAS a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'une contestation de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la mise en demeure du 13 mars 2012. Ce recours était enregistré sous le numéro 12-01266/N.

Le 9 juillet 2012, le conseil de la société PHINEO SAS a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'une contestation à l'encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable suite au recours en contestation de la mise en demeure du 23 mars 2012. Cette requête a été enregistrée sous le numéro 12-01315/N.

Le 17 juillet 2012, l'URSSAF notifiait à la société PHINEO SAS une mise en demeure pour la somme de 302 euros correspondant aux majorations relatives à l'année 2010.

Le 26 juillet 2012, le conseil de la société PHINEO SAS a saisi la commission de recours amiable d'une contestation de la mise en demeure du 17 juillet 2012.

Par lettre recommandée du 16 octobre 2012, dont l'avis de réception a été signé le 26 octobre 2012, la société PHINEO SAS a été mise en demeure de payer la somme 8 288 euros. Cette mise en demeure faisait référence à la lettre d'observations du 29 juin 2012.

Contestant le respect du contradictoire du contrôle ainsi que les chefs de redressement relatifs aux redressements opérés au titre des allocations forfaitaires de repas, des remboursement de frais, des indemnités kilométriques et des rappels de salaire, la société PHINEO SAS a saisi la commission de recours amiable qui, par sa décision explicite du 22 octobre 2012, a rejeté les recours de la société.

Le 19 octobre 2012, le conseil de la société PHINEO SAS a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'une requête en contestation de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable suite au recours en contestation de la mise en demeure du 17 juillet 2012. Ce recours était enregistré sous le numéro 12-01988 /N.

Le 22 novembre 2012, le conseil de la société PHINEO SAS a saisi la commission de recours amiable d'une contestation d'un redressement de cotisations et de majorations y afférentes en se référant à la mise en demeure du 16 octobre 2012 dont le bien fondé était contesté.

Le 10 janvier 2013, le conseil de la société PHINEO SAS a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'un recours à l'encontre de la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable en date du 22 octobre 2012, notifiée le 13 novembre 2012, aux fins de contestation de la mise en demeure notifiée le 23 mars 2012. Cette requête a été enregistrée sous le numéro 12-01988/N.

Le 11 février 2013, le conseil de la société PHINEO SAS a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'une contestation de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable à l'encontre de la mise en demeure du 16 octobre 2012. Ce recours était enregistré sous le numéro 13-00324/N.

Par jugement du 2 juin 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts de Seine a :

. prononcé la jonction des recours 12-01266/N, 12-01315/N, 12-01988/N et 13-00324/N ;

. déclaré la société PHINEO SAS recevable et bien fondée en son recours ;

. constaté la nullité des mises en demeure des 23 mars 2012, 17 juillet 2012, 16 octobre 2012 ainsi que de la lettre d'observations du 29 juin 2012 ;

. condamné l'URSSAF à payer à la société PHINEO SAS la somme de 279 505 euros correspondant aux quatre points du redressement du 3 février 2012 qu'elle a contestés avec intérêts au taux légal à compter du 7 avril 2015.

L'URSSAF d'Ile de France a relevé appel de ce jugement.

Par jugement du 14 octobre 2015, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société PHINEO SAS.

L'affaire a été appelée pour être plaidée à l'audience du 5 septembre 2016 à laquelle elle a été renvoyée pour mise en cause du liquidateur. L'affaire a été appelée et plaidée à l'audience du 30 janvier 2017.

Par ses conclusions écrites et soutenues à l'audience, l'URSSAF demande à la cour de :

. infirmer le jugement entrepris ;

. dire et juger valides le contrôle opéré, les lettres d'observations des 3 février et 29 juin 2012, les mises en demeure subséquentes des 17 juillet et 16 octobre 2012 ;

. dire et juger bien fondés les redressements opérés et contestés ;

. confirmer la décision de la commission de recours amiable du 22 octobre 2012 notifiée le 13 novembre 2012 ;

. rejeter l'ensemble des autres demandes.

Par ses conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, la SELARL EMJ, prise en la personne de Me [N] [U], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société PHINEO SAS, demande à la cour:

' à titre principal, de :

. confirmer le jugement sur la nullité des mises en demeure du 23 mars 2012 et le redressement y afférent, et en conséquence, les mises en demeure du 17 juillet et du 16 octobre 2012 ;

. l'infirmer partiellement sur le quantum, en ce qu'il a condamné l'URSSAF à rembourser à la société 279.505 euros ;

. et, statuant à nouveau, condamner l'URSSAF à lui rembourser la somme de 325.318 euros avec intérêts légaux ;

' à titre subsidiaire, si la cour de céans devait infirmer le jugement en considérant la régularité du redressement, de :

* concernant le chef de redressement n°3 frais de repas :

- à titre principal, de :

.dire et juger que la motivation du chef de redressement n°3 étant insuffisamment circonstanciée, elle n'a pas mis la société en mesure de se défendre utilement ;

.prononcer la nullité de ce chef de redressement ;

.condamner l'URSSAF à rembourser le montant de cotisations appelé et payé (235.029 euros) avec intérêts légaux ;

- à titre subsidiaire, si la cour devait considérer la motivation du chef de redressement n°3 comme suffisamment circonstanciée, de :

.constater que les allocations forfaitaires de repas attribuées aux ingénieurs et consultants en 2009 et 2010 ont valablement été exclues de la base des cotisations ;

.dire et juger le redressement partiellement mal fondé en ce qu'il porte sur les allocations forfaitaires de repas de consultants,

.ordonner à l'URSSAF de recalculer le montant des cotisations effectivement dues au titre des seuls salariés sédentaires ;

.condamner l'URSSAF à rembourser le différentiel entre le montant de cotisations appelé et payé (235.029 euros) et le montant effectivement dû avec intérêts légaux ;

* concernant le chef de redressement n°8 frais de déplacement :

- à titre principal, de :

.dire et juger que la motivation du chef de redressement n°8 étant insuffisamment circonstanciée, elle n'a pas mis la société en mesure de se défendre utilement ;

.prononcer la nullité de ce chef de redressement,

.condamner l'URSSAF à rembourser le montant de cotisations appelé et payé (4764 euros) avec intérêts légaux ;

- à titre subsidiaire, de :

.constater que, concernant les allocations attribuées aux salariés nommément visés, la société apporte les justificatifs requis ;

.constater que concernant les allocations attribuées aux salariés qui ne sont pas identifiées, la motivation du chef de redressement n°8 est insuffisamment circonstanciée, et n'a pas mis la société en mesure de se défendre utilement ;

.annuler le redressement en ce qu'il porte sur des salariés non identifiés ;

.ordonner à l'URSSAF de recalculer le montant des cotisations effectivement dues;

.condamner l'URSSAF à rembourser le différentiel entre le montant de cotisations appelé et payé (4764 euros) et le montant effectivement dû avec intérêts légaux ;

* concernant le chef de redressement n°10 indemnités kilométriques :

- à titre principal, de :

.dire et juger que la motivation du chef de redressement n°8 étant insuffisamment circonstanciée, elle n'a pas mis la Société en mesure de se défendre utilement ;

.prononcer la nullité de ce chef de redressement ;

.condamner l'URSSAF à rembourser le montant de cotisations appelé et payé (38.267 euros) avec intérêts légaux ;

- à titre subsidiaire, de :

.constater que le caractère professionnel des indemnités a été explicitement reconnu, et en conséquence :

.annuler le redressement portant sur les indemnités kilométriques ;

.condamner l'URSSAF à rembourser les cotisations indument payées, soit 38.267 euros avec intérêts légaux ;

* concernant le chef de redressement n°14 rappels de salaire suite à décision de justice :

. constater que les cotisations et contributions ont été régulièrement versées sur les rappels de salaire versés à Madame [N] à hauteur de 627,02 euros ;

.limiter le redressement y afférent au rappel de salaire alloué à Monsieur [G], et au rappel de salaire alloué à Madame [N] à hauteur de 2.846,98 euros ;

.ordonner à l'URSSAF de recalculer le montant des cotisations effectivement dues;

.condamner l'URSSAF à rembourser le différentiel entre le montant de cotisations appelé et payé (1445 euros) et le montant effectivement dû, avec intérêts légaux ;

. condamner l'URSSAF à paver à la Société la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience, ainsi qu'aux pièces déposées par les parties.

Motifs de la décision

A titre liminaire, la cour observe que les parties ne discutent pas de la lettre de mise en demeure du 13 mars 2012 relative à une période qui est postérieure à celle couverte par la lettre d'observations du 3 février 2012.

Sur la nullité de la mise en demeure du 23 mars 2012 et le redressement y afférent

L'URSSAF conteste la nullité de la lettre du 23 mars 2012, en faisant valoir qu'elle ne constitue pas une lettre de mise en demeure, mais seulement un courrier de l'inspecteur informant la société qu'il maintenait l'ensemble des constatations faites par la lettre d'observations du 3 février 2012, conformément à la procédure fixée par l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale.

L'organisme reconnaît que le dernier paragraphe de ce document porte la mention ' mise en demeure ', mais précise que cette mention est justifiée par le fait que le paragraphe qui précède, indiquant habituellement qu'une mise en demeure sera adressée prochainement à défaut de règlement des cotisations redressées et des majorations de retard y afférentes, a été supprimé compte tenu du fait que le contrôle opéré s'est soldé par un crédit de 292 335 euros et qu'aucune mise en demeure ne devait être adressée à la société.

L'URSSAF ajoute que la nouvelle lettre d'observations, adressée le 29 juin 2012, n'avait pas pour but de régulariser une quelconque procédure viciée, mais d'expliciter à l'employeur le montant définitif resté à sa charge après déduction du crédit 'Jeune entreprise innovante' (JEI) et ce, dans le respect des dispositions de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale, afin de lui permettre de communiquer ses observations sur le montant réclamé en définitive, ce que la société a fait, le 11 juillet 2012.

Me [U], ès qualité de liquidateur de la société PHINEO SAS, expose que le contrôle opéré par l'URSSAF sur les années 2009 et 2010 a généré deux procédures de recouvrement successives, au mépris des dispositions de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale alors applicables. Une première lettre d'observations a été rédigée le 3 février 2012 et a été suivie d'une mise en demeure du 23 mars 2012 puis d'une autre du 17 juillet 2012, après que la société PHINEO SAS ait pu formuler des observations, le 2 mars 2012. Une deuxième procédure a donné lieu à une lettre d'observations, le 29 juin 2012, mentionnant une date de fin de contrôle au 29 juin 2012, à laquelle la société a répondu le 11 juillet 2012, et à une mise en demeure, établie le 16 octobre 2012, portant sur les mêmes cotisations que celles appelées par la mise en demeure du 23 mars 2012 à laquelle étaient ajoutées les majorations de retard y afférentes qui n'avaient jamais été notifiées.

Le liquidateur relève que la commission de recours amiable s'est appuyée sur une rédaction de l'article R.243-56 du code de la sécurité sociale qui n'était pas applicable à la présente espèce. Il estime que, l'inspecteur du recouvrement ayant répliqué à la réponse de la société à la lettre d'observations, dans le corps même de la mise en demeure du 23 mars 2012, les dispositions de l'article R.243-59 susvisé n'ont pas été respectées.

L'article R.243-59, alinéas 4 à 7, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-546 du 11 avril 2007, applicable à la présente espèce, était rédigé de la façon suivante :

A l'issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements envisagés. Le cas échéant, il mentionne les motifs qui conduisent à ne pas retenir la bonne foi de l'employeur ou du travailleur indépendant. Ce constat d'absence de bonne foi est contresigné par le directeur de l'organisme chargé du recouvrement. Il indique également au cotisant qu'il dispose d'un délai de trente jours pour répondre par lettre recommandée avec accusé de réception, à ces observations et qu'il a, pour ce faire, la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix.

En l'absence de réponse de l'employeur ou du travailleur indépendant dans le délai de trente jours, l'organisme de recouvrement peut engager la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement.

Lorsque l'employeur ou le travailleur indépendant a répondu aux observations avant la fin du délai imparti, la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement ne peut intervenir avant l'expiration de ce délai et avant qu'il ait été répondu par l'inspecteur du recouvrement aux observations de l'employeur ou du travailleur indépendant (souligné par la cour).

Il résulte de ce texte que la mise en demeure de l'organisme de recouvrement qui entame la procédure de mise en recouvrement des sommes redressées, ne peut être adressée à la personne contrôlée avant que l'inspecteur du recouvrement n'ait répondu aux observations de celle-ci formulées dans le délai de 30 jours qui suit la réception de la lettre d'observations.

La lettre d'observations de l'URSSAF, en date du 3 février 2012, a été reçue par la société PHINEO SAS, le 6 février 2012, ainsi qu'elle l'indique dans sa réponse du 2 mars 2012, envoyée dans les 30 jours de la réception de la lettre d'observations.

La lettre de l'URSSAF du 23 mars 2012, qui fait l'objet du présent litige, est rédigée de la façon suivante :

' Monsieur,

Vos observations formulées par lettre du 02 mars 2012 (Reçu le 06 mars 2012) ont justifié un nouvel examen de votre dossier.

J'ai bien noté que les points .... ne font l'objet d'aucunes observations de votre part.

Par contre, des remarques sont apportées sur les points 8-14-15-10. Au vu de ce courrier, vous m'indiquez que des documents sont transmis pour justifier votre position. A ce jour, nos services n'ont reçu aucun justificatif malgré une relance téléphonique.

Concernant les salariés consultants (point 3), la notion de lieu habituel de travail induit que le lieu où s'exerce l'activité présente un caractère durable. [...]

Je vous précise maintenir l'ensemble de mes constatations ayant fait l'objet de la lettre d'observations du 03/02/2012 conduisant à un redressement de - 292 335 euros au titre des cotisations et contributions de Sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires.

Si vous entendez contester la présente décision, il vous appartient, dans un délai d'un mois suivant la réception de cette mise en demeure, de saisir, en exposant vos motifs, la commission de recours amiable de l'URSSAF de [Localité 2] et de la région parisienne, [Adresse 3] **.

Je reste à votre disposition pour tous renseignements complémentaires. [...]

** article R.142-1 du code de la sécurité sociale'.

Il ne peut être contestée que cette lettre contient non seulement, une réponse aux observations formulées par la société PHINEO SAS, le 2 mars 2012, en informant la société du maintien des constatations effectuées dans le cadre du contrôle litigieux, mais aussi, une mise en demeure explicite portant sur le montant du redressement qui, bien que créditeur, a donné lieu par la suite à des comptes qui se sont révélés débiteurs pour la société. Cette mise en demeure est assortie de la mention de la possibilité de saisir, en cas de contestation, la commission de recours amiable dans le délai d'un mois indiqué et prévu par l'article R.142-1 du code de la sécurité sociale, dont il est fait expressément référence. Si ce courrier n'avait été qu'une simple réponse de l'URSSAF aux observations du cotisant, comme l'organisme le soutient, la mention de la voie de recours n'avait aucune raison d'être.

Dans la mesure où la réponse de l'URSSAF aux observations de la société PHINEO SAS n'a pas été envoyée à celle-ci avant la procédure de mise en recouvrement entamée par la mise en demeure, ainsi que le décret du 11 avril 2007 l'exige, ce qui n'était pas le cas avant sa mise en application, mais en même temps que celle-ci, le principe du contradictoire a été violé et la procédure de recouvrement est entachée de nullité, comme les premiers juges l'ont exactement apprécié.

Par voie de conséquence, toute la suite de la procédure de recouvrement est nulle, en ce compris la lettre d'observations du 29 juin 2012 qui concernait le même contrôle portant sur les mêmes cotisations et la même période et les mises en demeure des 17 juillet 2012, portant sur des majorations relatives à l'année 2010, et celle du 16 octobre 2012 faisant référence à la lettre d'observations du 29 juin 2012, rédigée dans des termes identiques à celle du 3 février 2012, à l'exception de la somme finalement réclamée.

Le jugement sera confirmé à cet égard.

Sur le montant du remboursement

Me [U], ès qualité de liquidateur de la société PHINEO SAS, réclame le remboursement de la somme de 325 318 euros au titre de tous les chefs de redressement contenus dans la lettre d'observations.

L'URSSAF estime, subsidiairement, que le remboursement doit être fixé à la somme de 257 381 euros.

Dans la mesure où c'est l'ensemble du redressement qui est entaché de nullité, la cour ordonnera le remboursement de toutes les sommes réclamées par le liquidateur de la société PHINEO SAS, correspondant à tous les chefs de redressement constatés, soit la somme de 325 318 euros.

L'équité commande de faire droit à la demande formée par le liquidateur de la société PHINEO SAS sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de la somme de 3 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par mise à disposition au greffe, et par décision contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il ordonné la jonction des recours 12-01266/N, 12-01315/N, 12-01988/N et 13-00324/N, déclaré la société PHINEO SAS recevable et bien fondée en son recours et constaté la nullité des mises en demeure des 23 mars 2012, 17 juillet 2012, 16 octobre 2012 ainsi que de la lettre d'observations du 29 juin 2012 ;

Le réforme sur le surplus, et statuant à nouveau,

Condamne l'URSSAF d'Ile de France à payer à la SELARL EMJ, en la personne de Me [N] [U], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société PHINEO SAS, la somme de 325 318 euros, avec intérêt au taux légal à compter de la présente décision, au titre du remboursement des cotisations dues suite au redressement nul ;

Condamne l'URSSAF d'Ile de France à payer à la SELARL EMJ, en la personne de Me [N] [U], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société PHINEO SAS, la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle que la présente procédure est exempte de dépens.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

Signé par Monsieur Olivier FOURMY, Président, et par Monsieur Mohamed EL GOUZI, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 15/03963
Date de la décision : 23/03/2017

Références :

Cour d'appel de Versailles 05, arrêt n°15/03963 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-03-23;15.03963 ?
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