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23/03/2017 | FRANCE | N°15/01186

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 23 mars 2017, 15/01186


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 78F



16e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 23 MARS 2017



R.G. N° 15/01186



AFFAIRE :



[Z] [G]





C/

SA TOTAL OUTRE - MER...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Janvier 2015 par le Juge de l'exécution de NANTERRE

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 14/12847



Expéditions exécutoires

Expédition

s

Copies

délivrées le :



à :



SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES -



Me Claire RICARD, avocat au barreau de VERSAILLES



REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE VINGT TROIS MARS DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'ap...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 78F

16e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 23 MARS 2017

R.G. N° 15/01186

AFFAIRE :

[Z] [G]

C/

SA TOTAL OUTRE - MER...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Janvier 2015 par le Juge de l'exécution de NANTERRE

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 14/12847

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES -

Me Claire RICARD, avocat au barreau de VERSAILLES

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT TROIS MARS DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [Z] [G]

né le [Date naissance 1] 1939 à [Localité 1] (MAROC) (99)

de nationalité Française

[Adresse 1]

Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 - N° du dossier [G] -

Représentant : Me Marc-Michel LE ROUX, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

APPELANT

****************

SA TOTAL OUTRE - MER Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

N° SIRET : 542 038 716

[Adresse 2]

Représentant : Me Claire RICARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 - N° du dossier 2015103

Représentant : Me Xavier NYSSEN du PARTNERSHIPS DECHERT (Paris) LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J096 -

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Janvier 2017, Madame Odette-Luce BOUVIER, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Odette-Luce BOUVIER, Président,

Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller,

Madame Céline MARILLY, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO

FAITS ET PROCEDURE,

La société anonyme (SA) Total Outre-Mer et M. [Z] [G], actionnaires de la société de droit algérien Total bitumes Algérie, à hauteur respectivement de 55 % et 15 % ont conclu, avec deux autres actionnaires minoritaires, un pacte d'actionnaires donnant à la SA Total Outre-mer la faculté d'acquérir par priorité les actions des minoritaires en cas de désaccord persistant entre les parties.

Selon sentence arbitrale du 12 mars 2009, la Cour internationale d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale a :

- ordonné à M. [G] de céder à la SA Total Outre-Mer les 300 actions qu'il détient dans la société de droit algérien Total bitumes Algérie, sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard pendant 90 jours,

- dit que le prix de cession des actions sera de 890.850 euros pour les 300 actions,

- condamné M. [G] à payer à la SA Total Outre-Mer la somme de 112.000 euros de frais de défense,

- condamné M. [G] à payer à la SA Total Outre-Mer la somme de 60.000 dollars US au titre du coût de l'arbitrage.

Par ordonnance du 2 avril 2009, la sentence arbitrale a fait l'objet d'un exequatur.

Par arrêt du 27 mai 2010 de la cour d'appel de Paris, le recours en annulation de M. [G] contre la sentence a été rejeté.

Le pourvoi en cassation formé à l'encontre de cette décision a été jugé non admis par arrêt du 6 juillet 2011 par la Cour de cassation.

Selon procès-verbal du 13 mai 2014 diligenté entre les mains de la société anonyme BNP Paribas, M. [G] a fait pratiquer une saisie-attribution au préjudice de la SA Total Outre-Mer sur le fondement de la sentence arbitrale, pour un montant de 755.499,22 euros.

Par exploit du 6 juin 2014 la SA Total Outre-Mer a sollicité du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nanterre l'annulation de la saisie-attribution du 13 mai 2014 en l'absence de titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, et, en outre, de prix saisissable avant même la cession des actions, et partant la mainlevée de la mesure et la condamnation de M. [G] à lui payer les sommes de 50.000 euros de dommages -intérêts pour abus de saisie.

Par jugement rendu le 23 janvier 2015, le juge de l'exécution a :

-déclaré la demande de la SA Total Outre-Mer recevable en la forme,

-déclaré nulle la saisie-attribution pratiquée le 13 mai 2014, sur le compte bancaire de la SA Total Outre-Mer, à la requête de M. [G],

- rejeté les autres demandes,

- condamné M. [G] à payer à la SA Total Outre-Mer la somme de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné M. [G] aux dépens,

-rappelé que les décisions du juge de l'exécution bénéficient de l'exécution provisoire de droit ;

Le 13 février 2015, M. [G] a formé appel de la décision.

Dans ses conclusions transmises le 18 janvier 2016, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. [G], appelant, demande à la cour de :

- réformer le jugement rendu par le juge de l'exécution près le tribunal de grande instance de Nanterre le 23 janvier 2015,

Statuant a nouveau :

- dire et juger que c'est à bon droit qu'il a fait pratiquer une mesure de saisie-attribution le 13 mai 2014 sur le compte bancaire de la SA Total Outre-Mer pour un montant de 755.499,22 euros sur le fondement de la sentence arbitrale rendue le 12 mars 2009 et revêtue de l'exéquatur le 2 avril 2009,

- rejeter la demande de la SA Total Outre-Mer tendant à l'annulation ainsi qu'à la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 13 mai 2014 auprès de la SA BNP Paribas,

- débouter la SA Total Outre-Mer de toutes ses demandes fins et conclusions (en celle comprise sa demande de condamnation pour saisie abusive),

- condamner la SA Total Outre-Mer au paiement d'une somme de 10.000 euros à son bénéfice pour résistance abusive ;

- condamner la SA Total Outre-Mer au paiement d'une somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SA Total Outre-Mer aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, M. [G], appelant, fait valoir :

- que dès 2008, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a considéré qu'un titre exécutoire pouvait servir de fondement aux poursuites même s'il ne prononçait pas expressément une condamnation à l'encontre des personnes dont les biens faisaient l'objet de mesures d'exécution forcée ;

- que c'est la SA Total Outre-Mer qui a saisi le tribunal arbitral pour lui demander de constater que la procédure de rachat forcée prévue par l'article 8 du Pacte d'actionnaires la liant à lui devait recevoir la qualification de promesse unilatérale de cession d'actions consentie à son profit et que la levée d'option par ses soins rendait « la cession d'actions parfaite » ;

- que c'est bien le principe de l'exécution en nature par lui de son obligation de céder ses actions dans la société Total Bitumes Algérie que la SA Total Outre-Mer a demandé au tribunal arbitral de consacrer et qu'elle a obtenu ainsi qu'en attestent les motifs des paragraphes 137 à 141 de la sentence arbitrale ;

- qu'ainsi que l'a particulièrement relevé l'ordonnance du 11 juin 2015, en ordonnant de céder sous astreinte à la SA Total Outre-Mer les 300 actions qu'il détient dans la société Total Bitumes Algérie et en disposant que le prix de cession des actions sera de 890.850 euros pour les 300 actions, le tribunal n'a pas ordonné la cession concomitante des actions et du paiement du prix ;

- que c'est la SA Total Outre-Mer elle-même qui a expressément conclu dans ses écritures notifiées le 28 juillet 2008 devant le tribunal arbitral, après avoir rappelé qu'elle lui avait adressé le 19 juin 2007 un courrier l'informant de sa décision de lever l'option que le transfert de propriété des parts sociales s'est opéré au moment de l'option et que cette levée d'option dans les conditions prévues dans la clause avait rendu la vente parfaite ;

- qu'il dispose bien d'un titre exécutoire contre la SA Total Outre-Mer au soutien de la saisie-attribution pratiquée le 13 mai 2014, conformément à la disposition de l'article L. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

- qu'aucune argumentation ne peut en conséquence objectivement justifier que la SA Total Outre-Mer ne se soit pas acquittée du prix des actions en exécution de la levée d'option notifiée le 19 juin 2007 à la suite de la fixation du prix par l'expert judiciaire, ainsi qu'en a ensuite disposé le tribunal arbitral dans sa sentence du 12 mars 2009 ;

- que l'attitude actuelle de la SA Total Outre-Mer consiste, de mauvaise foi, à contredire totalement l'ensemble des arguments qu'elle avait elle-même mis en avant devant le tribunal arbitral pour le forcer à lui céder ses actions dans le capital de la société Total Bitumes Algérie; qu'une telle contradiction doit être rejetée en l'état de la jurisprudence actuelle de la Cour de cassation relativement au principe de l''estoppel'.

Dans ses conclusions transmises le 8 février 2016, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SA Total Outre-Mer, intimée, demande à la cour de :

- constater que ni la sentence arbitrale, ni son addendum, ne constate la moindre créance au profit de M. [G],

- constater que la sentence arbitrale et son addendum ne peuvent être interprétés comme la condamnant implicitement à acquérir les actions détenues par M. [G], cette question n'ayant jamais été débattue ni tranchée devant l'arbitre, seul compétent au titre du pacte d'actionnaire,

- en conséquence, confirmer le jugement dont appel et ordonner la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 13 mai 2014,

- condamner M. [G] à lui payer la somme de 50.000 euros pour abus de saisie,

- condamner M. [G] à lui payer la somme de 25.000 euros au titre de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, la SA Total Outre-Mer fait valoir :

- que la sentence arbitrale a été rendue à son seul bénéfice, étant créancière de l'obligation pesant sur M. [G] de lui céder ses titres détenus dans Total Bitumes Algérie ; que le dispositif de la sentence arbitrale et son addendum sont sans ambiguïté : il n'est constaté aucune créance liquide et exigible au profit de M. [G], condition pourtant requise par la loi pour pratiquer une saisie-attribution ;

- qu'il est de jurisprudence constante que le juge de l'exécution n'a pas à interpréter une décision dont le dispositif est dénué d'ambiguïté (Cass. 2e civ., 21 janv. 2010, n° 08-70.442 ; Cass. 2e civ., 11 mars 2010, n° 09-13.636 ) ;

- qu'en l'espèce, M. [G] n'a jamais demandé à l'arbitre qu'il lui fasse injonction d'acquérir ses actions dans Total Bitumes Algérie et de payer le prix fixé par l'expert ; qu'aucun débat n'a donc eu lieu sur le fondement et les conséquences d'une telle demande, notamment s'agissant de l'interférence des règles d'ordre public algériennes ; que la question de la monnaie de paiement des actions détenues par M. [G] n'a pas été débattue ; que si M. [G] avait formulé à son encontre une demande d'injonction d'acquérir ses titres moyennant un prix en euro, elle s'y serait naturellement opposée, un tel paiement étant contraire aux dispositions impératives de droit algérien ;

- que le fait qu'elle ait soutenu, en cours d'arbitrage, avoir levé l'option de la promesse de vente unilatérale stipulée à son profit dans le pacte d'actionnaires ne peut constituer une renonciation ( à contester la saisie litigieuse à défaut de titre exécutoire ;

-qu'en pratiquant la saisie-attribution dont la mainlevée est sollicitée, M. [G] tente de s'affranchir d'un débat essentiel lié aux fondement et conséquences d'un rachat forcé de ses actions par elle, qui ne peut avoir lieu que devant l'arbitre, seul compétent au titre du pacte d'actionnaire ; qu'elle n'a pas pu défendre dans l'arbitrage une position contradictoire à celle qu'elle défend aujourd'hui devant le juge de l'exécution et devant la cour ;

- que M. [G] devra être sanctionné en raison du caractère abusif de la saisie pratiquée, alors même que la sentence arbitrale et son addendum sont sans ambiguïté en ce qu'ils ne lui confèrent pas la moindre créance ; que l'abus est d'autant plus caractérisé en l'espèce que la mesure d'exécution visait à se faire payer le prix d'actions qui n'ont pas été cédées et dont M. [G] est toujours propriétaire.

*****

La clôture de l'instruction a été prononcée le 13 septembre 2016.

L'audience de plaidoirie a été fixée au 18 janvier 2017 et le délibéré au 23 mars suivant.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la saisie-attribution litigieuse :

En application de l'article L. 111-2 du code des procédures civiles d'exécution, le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l'exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d'exécution.

Selon l'article L. 111-2, 1°, du code des procédures civiles d'exécution, dans sa version applicable au litige, seuls constituent des titres exécutoires les décisions des juridictions de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif lorsqu'elles ont force exécutoire, ainsi que les accords auxquels ces juridictions ont conféré force exécutoire.

En l'espèce, il est constant que la sentence arbitrale rendue le 12 mars 2009 par la Cour internationale d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale et son addendum dans la différend opposant la société Total Outre-mer à M. [G], revêtue de la formule d'exequatur le 3 juillet 2009 et devenu définitive , de nature juridictionnelle constitue un titre exécutoire en application des articles L. 111-2 et L. 111-2, 1°, du code des procédures civiles d'exécution, étant relevé qu'un titre exécutoire peut servir de fondement aux poursuites même s'il ne prononce pas expressément une condamnation au paiement d'une somme à l'encontre des personnes dont les biens font l'objet de mesures d'exécution forcée.

Il est de jurisprudence constante qu'il appartient au juge de l'exécution d'interpréter les titres exécutoires ainsi que celui de statuer sur les suites nécessaires d'une décision de justice dès lors qu'aucune atteinte n'est portée au dispositif de ladite décision et que n'est pas étendue la portée du dispositif à des conséquences non envisagées par le premier juge.

La cour relève qu'aux termes de son dispositif, la Cour internationale d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale, dans sa sentence arbitrale du 12 mars 2009, a :

- ordonné à M. [G] de céder à la SA Total Outre-Mer les 300 actions qu'il détient dans la société de droit algérien Total bitumes Algérie, sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard pendant 90 jours,

- dit que le prix de cession des actions sera de 890.850 euros pour les 300 actions,

- condamné M. [G] à payer à la SA Total Outre-Mer la somme de 112.000 euros de frais de défense,

- condamné M. [G] à payer à la SA Total Outre-Mer la somme de 60.000 dollars US au titre du coût de l'arbitrage.

Il ressort des motifs de la sentence arbitrale que 'conformément à la volonté des parties telle qu'exprimée à l'article 7,2 du Pacte le prix de la cession à intervenir est celui qui a été déterminé par l'expert M. [L], désigné conformément à la procédure sur laquelle les parties se sont accordées ' ; que 'ce prix est de 890.850 euros pour les 300 actions de la société TBA détenues par Monsieur [G][..]' ; qu'enfin, 'les parties ont en effet pris soin de préciser à l'article 7,2 du pacte que 'le prix indiqué dans le rapport de l'expert liera définitivement les parties'.

En outre, la cour relève :

- que l'expert, M. [L], avait précisé dans son rapport déposé le 28 mai 2007, que les parties avaient contradictoirement débattu lors des opérations expertales de la question de la valeur des actions litigieuses au regard de la monnaie de paiement des actions détenues par M. [G], maître Nyssen, avocat de la société Total Outre-Mer indiquant notamment dans un dire du 22 mars 2007 que, le dinar algérient n'étant pas une monnaie accrochée à l'euro, il conviendrait 'après avoir converti les comptes en euros, il conviendrait à tout le moins de prendre en compte les variations entre le dinar algérien et l'euro, donc une dépréciation de l'ordre de 3%',

- que la société Total Outre-Mer a elle-même et expressément indiqué par lettre du 19 juin 2007 adressée à M. [G], qu'elle avait, à la suite de la remise du rapport définitif de l'expert judiciaire, la volonté de procéder à l'acquisition des 300 actions litigieuses au prix ainsi déterminé par l'expert, soit la somme de 'huit cent quatre- vingt-dix mille huit cent cinquante (890.850) euros',

- qu'en exécution de la sentence arbitrale, les parties ont échangé de nombreux courriers dans dans le but de déterminer les modalités de la vente des actions et du paiement, un courrier du conseil de la société T.O.M en date du 13 septembre 2010 confirmant l'accord des parties pour que la somme versée à M. [G] soit fixée à 680.934,18 euros après compensation avec celle due au titre des frais de procédure, comme le relève la cour d'appel de Paris dans son arrêt du 10 janvier 2013 confirmant la mainlevée des saisies -attributions pratiquées, au mépris du principe de bonne foi, le 24 mai 2011 par la société Total Outre-Mer pour le montant des condamnations accessoires mises à la charge de M. [G], ledit arrêt constatant que les relations entre les parties s'étaient dégradées entre les parties à la suite de ces premiers échanges quant aux modalités d'exécution de la sentence arbitrale en Algérie, M. [G] ayant refusé d'accepter celles fixées, sans référence à la sentence, par le projet d'acte préparé en février 2011 par le notaire de la société T.O.M. aux termes duquel M. [G] devait céder ses actions à la société de droit française 'Total Africa SA' , pour le prix de trois millions de dinars, sans précision de la contre-valeur de cette somme en euros.

Il ressort de la sentence arbitrale et des éléments de fait et de preuve sus relevés que la société Total Outre-Mer, qui a elle-même saisi le tribunal arbitral afin que soit ordonné à M. [G] de lui transférer ses actions en exécution de la procédure de rachat prévue par l'article 8 du Pacte d'actionnaires en cas de désaccord persistant entre les actionnaires, ne saurait invoquer désormais, sans faire preuve d'une déloyauté procédurale, le respect des dispositions actuelles du droit algérien imposant le dinar comme monnaie de paiement et le fait que la question de la monnaie de paiement des actions détenues par l'appelant n'aurait été ni débattue ni tranchée par la décision arbitrale, pour reporter l'exécution de la partie principale du dispositif de la sentence alors même que le tribunal arbitral a précisé de façon explicite cette modalité dans le dispositif de sa décision en ordonnant à M. [G] de céder ses actions à la partie adverse' au prix de cession de 890.850 euros pour les 300 actions'.

Il est dès lors établi que la société T.O.M fait échec, de façon déloyale, au rachat des actions de l'appelant.

La cour relève enfin que l'obligation de cession ainsi faite à M. [G] par le tribunal arbitral est assortie d'une astreinte et qu'il justifie dès lors de son intérêt à faire pratiquer une saisie-attribution qui s'avère être, dans de telles circonstances, une mesure nécessaire et proportionnée qui ne présente aucun caractère abusif.

Il s'en déduit que sont établies l'exigibilité et la liquidité de la créance de M. [G] telle que fixée par la sentence arbitrale rendue le 12 mars 2009 et revêtue de l'exéquatur le 2 avril 2009 et partant, la régularité de la mesure d'exécution pratiquée.

Il convient, en conséquence, d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et, statuant à nouveau, de déclarer régulière la saisie-attribution réalisée le 13 mai 2014 auprès de la SA BNP Paribas sur le compte bancaire de la SA Total Outre-Mer pour un montant de 755.499,22 euros, de rejeter la demande de la SA Total Outre-Mer tendant à l'annulation ainsi qu'à la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 13 mai 2014 auprès de la SA BNP Paribas, de débouter la SA Total Outre-Mer de toutes ses demandes en ce comprise celle tendant à la condamnation de M. [G] pour saisie abusive et celle fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les dommages-intérêts :

L'exercice d'une action en justice de même que la défense à une telle action constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à l'octroi de dommages-intérêts que lorsqu'est caractérisée une faute en lien de causalité directe avec un préjudice ; en l'espèce, la preuve d'un préjudice résultant de la procédure engagée n'étant pas caractérisé, la demande de dommages-intérêts de l'appelant est rejetée.

Sur les demandes accessoires :

L'équité commande de faire droit à la demande de l'appelant présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; l'intimée est condamnée à lui verser à ce titre la somme visée au dispositif de la présente décision.

Partie perdante, l'intimée ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles et doit supporter les dépens.

PAR CES MOTIFS LA COUR

Statuant publiquement par décision contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Déclare régulière la saisie-attribution réalisée le 13 mai 2014 auprès de la SA BNP Paribas sur le compte bancaire de la SA Total Outre-Mer pour un montant de 755.499,22 euros en exécution de la sentence arbitrale rendue le 12 mars 2009 et revêtue de l'exéquatur le 2 avril 2009,

Déboute en conséquence la SA Total Outre-Mer de ses demandes tendant à l'annulation et à la mainlevée de la saisie-attribution ainsi pratiquée le 13 mai 2014 et du surplus de ses prétentions en ce comprise celle tendant à la condamnation de M. [G] pour saisie abusive et celle fondée, en première instance, sur l'article 700 du code de procédure civile.

Y ajoutant,

Déboute M. [Z] [G] de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Condamne la SA Total Outre-Mer à payer à M. [Z] [G] la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette la demande présentée par la SA Total Outre-Mer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SA Total Outre-Mer aux entiers dépens de première instance et d'appel.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Odette-Luce BOUVIER, Président et par Madame RUIZ DE CONEJO, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 16e chambre
Numéro d'arrêt : 15/01186
Date de la décision : 23/03/2017

Références :

Cour d'appel de Versailles 16, arrêt n°15/01186 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-03-23;15.01186 ?
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