La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/03/2017 | FRANCE | N°16/02293

France | France, Cour d'appel de Versailles, 2ème chambre 1ère section, 09 mars 2017, 16/02293


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

2ème chambre 1ère section

ARRÊT No

CONTRADICTOIRE
Code nac : 20J

DU 09 MARS 2017

R. G. No 16/ 02293

AFFAIRE :

Jean-Marc X...
C/
Célia Y...épouse X...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Mars 2016 par le Juge aux affaires familiales de Versailles
No Chambre :
No Cabinet :
No RG : 11/ 05775

Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :

à :

- Me France VALAY-VAN LAMBAART,

- la SELARL RD ASSOCIES

‰PUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF MARS DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieu...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

2ème chambre 1ère section

ARRÊT No

CONTRADICTOIRE
Code nac : 20J

DU 09 MARS 2017

R. G. No 16/ 02293

AFFAIRE :

Jean-Marc X...
C/
Célia Y...épouse X...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Mars 2016 par le Juge aux affaires familiales de Versailles
No Chambre :
No Cabinet :
No RG : 11/ 05775

Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :

à :

- Me France VALAY-VAN LAMBAART,

- la SELARL RD ASSOCIES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF MARS DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur Jean-Marc X...
né le 01 Mai 1958 à MOSTAGANEM (ALGÉRIE)

...
...
59000 LILLE

représenté par Me France VALAY-VAN LAMBAART, avocat-barreau de VERSAILLES, vestiaire : C 199- No du dossier 009788

APPELANT

****************

Madame Célia Y...épouse X...
née le 04 Août 1961 à PARIS 9ème

...
27410 BEAUMESNIL

représentée par Me Nicolas RANDRIAMARO de la SELARL RD ASSOCIES, avocat postulant-barreau de VERSAILLES, vestiaire : 339- No du dossier VP13095
assistée de Me Florent LOYSEAU DE GRANDMAISON, avocat plaidant-barreau de PARIS, vestiaire : E2146

INTIMÉE
****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 31 Janvier 2017, en chambre du conseil, Monsieur Xavier RAGUIN, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Xavier RAGUIN, Président,
Madame Florence VIGIER, Conseiller,
Madame Christel LANGLOIS, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEILFAITS ET PROCÉDURE

Jean-Marc X...et Célia Y...se sont mariés le 21 octobre 1989 à PARIS (10ème) sans contrat préalable.

De cette union sont issus quatre enfants :

- Alexis, né le 11 février 1990, majeur à ce jour ;
- Loris, né le 7 août 1991, majeur à ce jour ;
- Elio, né le 31 août 1994, majeur à ce jour ;
- Maya, née le 27 août 1999, actuellement âgée de 17 ans.

Suite à la requête en divorce déposée le 30 juin 2011 par Célia Y..., par ordonnance de non-conciliation du 19 janvier 2012, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de VERSAILLES a, notamment :

- constaté la résidence séparée des époux ;

- attribué à l'épouse la jouissance du bien situé à BEAUMESNIL sous réserve des droits de chaque époux dans la liquidation du régime matrimonial ;

- fixé la pension alimentaire au profit de l'épouse, à la charge de Jean-Marc X...au titre du devoir de secours, à la somme mensuelle de 2. 000 euros, avec indexation ;

- fixé la résidence des enfants mineurs chez le père ;

- organisé un droit de visite et d'hébergement au profit de la mère ;

- dispensé Célia Y...de contribuer à l'entretien et l'éducation des enfants.

Par acte d'huissier du 18 juillet 2013, Jean-Marc X...a fait assigner son conjoint en divorce sur le fondement de l'article 237 du code civil alors que Célia Y...l'a assigné sur le fondement de l'article 242 par acte du 29 juillet 2013.

Par jugement en date du 4 mars 2016, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de VERSAILLES a notamment :

- prononcé aux torts exclusifs de Jean-Marc X...le divorce des époux ;

- débouté Célia Y...de sa demande relative à l'intégration des parts de société dans la communauté ;

- constaté l'accord des époux pour confier à Me Z..., notaire à VERSAILLES, la liquidation de leur régime matrimonial ;

- condamné Jean-Marc X...à verser à Célia Y...à titre de prestation compensatoire la somme en capital de 220. 000 euros ;

- rejeté la demande de dommages et intérêts de Célia Y...;

- constaté l'exercice conjoint de l'autorité parentale sur l'enfant mineure Maya ;

- fixé la résidence de l'enfant au domicile de Jean-Marc X...;

- dit que la mère bénéficiera d'un droit d'accueil pour l'enfant, à convenir librement avec elle ;

- débouté Jean-Marc X...de sa demande de contribution financière pour les enfants Elio et Maya ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 29 mars 2016, Jean-Marc X...a formé appel de portée générale contre cette décision.

Par ordonnance d'incident du 11 octobre 2016, le conseiller de la mise en état, saisi par Jean-Marc X...a débouté celui-ci de l'ensemble de ses demandes tendant à la modification des mesures financières existantes.

Sur le fond, aux termes de ses conclusions du 4 janvier 2017, Jean-Marc X...demande à la cour de :
- le déclarer recevable et bien fondé en son appel ;

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a prononcé le divorce à ses torts exclusifs ;

- et statuant de nouveau, constater que les époux vivaient séparément lors de leur comparution devant le juge conciliateur le 5 janvier 2012 ;

- prononcer le divorce des époux au visa des dispositions des articles 237 et 238 du code Civil, ;

- ordonner la mention du divorce en marge des actes d'Etat Civil ;

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de report des effets du divorce ;

- fixer la date des effets du divorce entre les époux, en ce qui concerne leurs biens, au 1er janvier 2010 et, subsidiairement, au 31 décembre 2010 ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la liquidation et le partage du régime matrimonial et constatant l'accord des parties désigné Maître Z..., notaire à Versailles, à cet effet ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a alloué une prestation compensatoire à Célia Y...et la débouter de toute demande à ce titre ;

- subsidiairement, faire application de l'article 275 du code civil et dire qu'il pourra s'acquitter du capital sur une période de huit années ;

- débouter Célia Y...de son appel incident et de toutes ses demandes formées devant la cour ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a fixé la résidence de Maya à son domicile et dit que la mère bénéficie d'un droit d'accueil pour Maya à convenir librement avec elle ;

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de contribution à l'entretien des enfants ;

- condamner Célia Y...à lui verser une somme mensuelle, avec indexation, de :

* 400 euros au titre de la contribution à l'entretien et à l'éducation de Maya,

* 200 euros au titre de la contribution à l'entretien et à l'éducation d'Elio,

- condamner Célia Y...à lui verser la somme de 5. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses conclusions du 4 janvier 2017, Célia Y...demande à la cour de :

- sur le prononcé du divorce : confirmer le jugement du 4 mars 2016 ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a fixé la date des effets du divorce entre les époux, en ce qui concerne leurs biens, au 19 janvier 2012 ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Jean-Marc X...à lui verser une prestation compensatoire sur le fondement de l'article 270 al. 2 du code civil ;

- infirmer le jugement quant au montant de la prestation compensatoire qu'il conviendra de fixer à la somme de 336. 000 euros ;

- ordonner l'intégration dans l'indivision post communautaire de la valeur patrimoniale des parts sociales de la SELARL « HP et Associés » détenues par Jean-Marc X...et financées par la communauté et le paiement à son profit de la soulte correspondante ;

- ordonner l'évaluation comptable de la SCM « A...et X...» ainsi que l'intégration dans l'indivision post communautaire de la valeur patrimoniale des parts sociales détenues par Jean-Marc X...et financées par la communauté et le paiement à son profit de la soulte correspondante ;

- sommer Jean-Marc X...de s'expliquer sur le sort de l'assurance vie de 100. 000 euros qu'il a souscrite sur les deniers de la communauté et ordonner le paiement à son profit de la soulte correspondante ;

- ordonner l'intégration dans l'indivision post communautaire de la somme de 544 euros objet d'un virement à Mademoiselle B..., prélevé sur les deniers de la communauté et ordonner le paiement à son profit de la soulte correspondante ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la liquidation et le partage du régime matrimonial et constaté l'accord des parties concernant la désignation de Maître Z...à cet effet ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a constaté que les parents exercent en commun l'autorité parentale sur l'enfant mineure Maya, née le 27 août 1999 ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a fixé la résidence de Maya au domicile de son père et dit que sa mère bénéficie d'un droit d'accueil à convenir librement avec elle ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Jean-Marc X...de sa demande de sa contribution à l'entretien et l'éducation des enfants Elio et Maya ;

- condamner Jean-Marc X...au paiement de la somme de 30. 000 euros à titre de dommages et intérêts, conformément aux dispositions de l'article 266 du code civil ;

- condamner Jean-Marc X...au paiement de la somme de 10. 000 euros conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens en ce compris les frais résultant du partage ;

- condamner aux entiers dépens ;

- débouter Jean-Marc X...de ses plus amples demandes ;

- si l exécution forcée devait intervenir par le ministère d un huissier, en application de l'article 1248 du code civil, le montant des sommes retenues par celui-ci en application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret 96/ 1080 du 2 décembre 1996 devra être supporté par Jean-Marc X...en sus des frais irrépétibles.

La clôture de la procédure a été prononcée le 5 janvier 2017.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu'aux écritures déposées et développées à l'audience.

SUR CE, LA COUR

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Considérant que selon les dispositions de l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile, les prétentions des parties sont récapitulées sous forme de dispositif ; que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ;

Sur le divorce

Considérant selon les articles 212 et 215 du code civil que les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours et assistance ; qu'ils s'obligent mutuellement à une communauté de vie ;

Considérant selon l'article 242 du code civil que le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ;
Considérant que pour prononcer le divorce aux torts exclusifs de Jean-Marc X..., le premier juge a retenu qu'il avait mis, par son comportement, la famille dans une situation délicate, de façon répétée et qu'il avait manqué à son obligation de fidélité ; qu'il n'a pas été admis que la problématique d'alcoolisation de l'épouse pouvait constituer une circonstance dépouillant le comportement de Jean-Marc X...de son caractère fautif ;

Considérant qu'il doit être rappelé que Jean-Marc X...exerce la profession d'avocat et que la situation financière du couple s'est dégradée au cours des années 2000 puisque Jean-Marc X...indique lui-même que son endettement s'élevait à plus de 600. 000 euros en 2006 au titre d'un crédit immobilier, d'arriérés de loyers, d'arriérés d'impôts, de cotisations Urssaf, de la TVA, de cotisations maladie et retraite ;

Que cette situation a entraîné d'une part une séparation géographique de la famille afin de réduire les frais de logement, Célia Y...s'installant à Beaumesnil dans la résidence secondaire du couple avec Maya alors que Jean-Marc X...demeurait à Alfortville puis à Paris avec deux garçons, d'autre part des actions judiciaires des créanciers notamment pour la dette de loyers et le non reversement de la TVA pour lequel une saisie immobilière a été engagée de la part du Trésor public pour recouvrer un montant omis de 355. 883 euros ;

Qu'il doit être observé que l'endettement du couple résulte principalement de dettes professionnelles de Jean-Marc X...qui devant les difficultés qu'il rencontrait du fait de la disparition de clients institutionnels n'a pas trouvé d'autres solutions que d'utiliser comme trésorerie les sommes dues à l'Etat dont il était seulement le collecteur ;

Qu'il apparaît également que Jean-Marc X...s'est désintéressé du règlement de ces problèmes en laissant son épouse comparaître seule devant la cour d'appel de Rouen sur le recours formé contre la décision du juge de l'exécution concernant la saisie immobilière ;

Considérant qu'en avril 2011, selon ses propres dires, Jean-Marc X...a rencontré Mme B... avec laquelle il a noué une relation intime et qui est devenue sa compagne ;

Considérant que pour ôter à son comportement tout caractère fautif, Jean-Marc X...fait valoir que face aux difficultés financières du couple, Célia Y...ne lui a apporté aucun soutien en s'opposant à la vente de la résidence secondaire de Beaumesnil, en refusant de reprendre un travail et en s'adonnant aux loisirs et à la boisson ;

Considérant que ces allégations ne reposent sur aucun élément probatoire sérieux ;

Qu'ainsi, aucun élément ne justifie d'un refus de Célia Y...avant l'engagement de la procédure de divorce de procéder à la vente du bien de Beaumesnil qui était d'ailleurs apparu comme un moyen de pallier les problèmes financiers du couple liés aux frais de logement ; qu'il ne peut être reproché à Célia Y...de ne pas avoir recherché du travail alors que le couple avait quatre enfants dont l'éducation et l'entretien nécessitaient, jusqu'à la séparation géographique de la famille en 2010, un investissement quotidien ;

Que, concernant l'addiction de Célia Y...à l'alcool dont la preuve résulte de l'expertise réalisée par le docteur Bensussan selon Jean-Marc X...qui fait grief au premier juge de l'avoir ignoré, il doit être rappelé qu'un rapport d'expertise médico-psychologique ne peut être utilisé dans le débat sur la cause du divorce ;

Que les seules attestations des parents de Jean-Marc X...sur ce phénomène d'addiction comme le délit de conduite en état d'ivresse commis par Célia Y...le 23 août 2012 sont insuffisants pour établir un comportement permanent et habituel ayant contribué à dégrader l'atmosphère familiale pendant le cours de la vie commune dans des proportions telles qu'elles légitimeraient l'adultère de l'époux ;

Considérant qu'en définitive qu'il apparaît que l'époux à titre principal, a placé sa famille dans une situation financière ayant entraîné son éclatement, qu'il s'est désintéressé des procédures judiciaires engagées et a abandonné moralement son épouse dans ces épreuves puis a commis un adultère ; qu'il apparaît fautif au sens de l'article 242 ;

Que le jugement qui a prononcé le divorce à ses torts doit être approuvé ;

Sur la date d'effet du divorce entre les époux quant à leurs biens

Considérant que selon l'article 262-1 du code civil, le jugement de divorce prend effet dans les rapports entre les époux, en ce qui concerne leurs biens lorsqu'il est prononcé pour acceptation du principe de la rupture du mariage, pour altération définitive du lien conjugal ou pour faute, à la date de l'ordonnance de non-conciliation ;

Qu'à la demande de l'un des époux, le juge peut fixer les effets du jugement à la date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer ;

Considérant que Jean-Marc X...critique le jugement qui a fixé la date d'effet du divorce à celle de l'ordonnance de non conciliation alors que, selon lui, toute cohabitation et collaboration a cessé entre les époux à compter du 1er janvier 2010 et au plus tard au 31 décembre 2010 ;

Considérant qu'il est constant que la cohabitation entre les époux a cessé matériellement en 2010 ; que cependant, comme l'a relevé le premier juge, il résulte d'un mail envoyé par Jean-Marc X...à son épouse le 28 novembre 2011 que cette séparation était causée par les soucis financiers de la famille et avait pour finalité la réduction des frais de logement et n'était pas animée par l'intention de rompre toute vie commune entre les époux alors même que fin 2010, Jean-Marc X...cherchait toujours une solution pour trouver un appartement permettant le regroupement de toute la famille ;

Qu'ainsi, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la prétention de Jean-Marc X...de voir fixer la date d'effet du divorce entre les époux antérieurement à l'ordonnance de non conciliation ;

Sur les demandes relatives à l'indivision post communautaire

Considérant que Célia Y...formule des demandes s'inscrivant dans le processus de liquidation des intérêts patrimoniaux des époux, soit :

- ordonner l'intégration dans l'indivision post communautaire de la valeur patrimoniale des parts sociales de la SELARL « HP et Associés » détenues par Jean-Marc X...et financées par la communauté et le paiement à son profit de la soulte correspondante ;

- ordonner l'évaluation comptable de la SCM « A...et X...» ainsi que l'intégration dans l'indivision post communautaire de la valeur patrimoniale des parts sociales détenues par Jean-Marc X...et financées par la communauté et le paiement à son profit de la soulte correspondante ;

- sommer Jean-Marc X...de s'expliquer sur le sort de l'assurance vie de 100. 000 euros qu'il a souscrite sur les deniers de la communauté et ordonner le paiement à son profit de la soulte correspondante ;

- ordonner l'intégration dans l'indivision post communautaire de la somme de 544 euros objet d'un virement à Mademoiselle B..., prélevé sur les deniers de la communauté et ordonner le paiement à son profit de la soulte correspondante ;

Considérant que ces demandes, qui relèvent de la procédure de liquidation partage, ne peuvent être présentées devant le juge du divorce ;

Sur la prestation compensatoire

Considérant selon les dispositions de l'article 270 du code civil que le divorce met fin au devoir de secours ; que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ; cette prestation a un caractère forfaitaire, elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge ;

Que l'article 271 du même code dispose notamment que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; qu'à cet effet, le juge prend en considération notamment : la durée du mariage, l'âge et l'état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles, les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, leurs droits existants et prévisibles, leur situation respective en matière de pension de retraite ;
Considérant que la durée du mariage est de 27 ans au jour du prononcé du divorce par la cour, la durée de la vie commune durant le mariage jusqu'à l'ordonnance de non conciliation de 22 ans ;

Que la situation des époux, mariés sous le régime de la communauté légale, est la suivante :

- Célia Y...est âgée de 55 ans et connaît d'importants problèmes de santé liés à des interventions sur une hernie discale, la cheville et au genou ; elle est reconnue travailleur handicapée avec un taux d'IPP de 16 % ;

Elle a exercé la profession de traductrice et a cessé son activité après la naissance du quatrième enfant ; son état de santé réduit sérieusement ses possibilités de travailler compte tenu des difficultés qu'elle rencontre pour se déplacer ;

Célia Y...a pour seuls revenus une pension d'invalidité de 622 euros par trimestre qu'elle ne mentionnait pas dans sa déclaration sur l'honneur du 11 juillet 2013 qui est la seule déclaration conforme à l'article 272 du code civil ; qu'elle n'a pas actualisé cette déclaration qui ne faisait état d'aucun patrimoine propre alors que ses deux parents sont décédés, son père, Francisco Y..., artiste peintre et sculpteur le 10 mai 2014 et sa mère le 11 février 2016 ;

Célia Y...s'est abstenu de révéler au premier juge qui a clôturé sa procédure le 07 décembre 2015 qu'une déclaration de succession avait été déposée suite au décès de son père le 1er décembre 2014 puis une déclaration rectificative le 06 août 2015 dont il résulte que ses droits s'élèvent à 1. 274. 747 euros dont 166. 408 euros de droits à payer venant en déduction, l'actif successoral portant notamment en France sur des sommes liquides à concurrence de 57. 343 euros, un bien immobilier évalué 450. 000 euros et en Espagne sur des sommes liquides de 113. 197 euros, trois biens immobiliers évalués au total 360. 000 euros, le surplus de la succession en France comme en Espagne se composant notamment d'oeuvres d'art dont la destination, vente ou conservation, est incertaine selon Célia Y...puisque par testament, Francisco Y...a légué à la ville de Guadalajara des oeuvres en vue de la création d'un musée, projet sur la réalisation concrète duquel aucun élément n'est apporté ;

Cependant, dès le 31 juillet 2014, les trois enfants de Francisco Y...dont l'intimée, ont créé une société par actions simplifiée Atelier Y...dont l'existence n'a pas été révélée au premier juge et qui, selon l'extrait K Bis produit, a pour activité principale la vente au détail d'objets d'art ; le dépôt des comptes de cette société est couvert par une clause de confidentialité ; leur production par Célia Y...permet de constater d'une part que l'indivision est créancière de 118. 000 euros sur la société ce qui implique que Célia Y...a pu mobiliser un capital, d'autre part que des produits sont constatés d'avance à hauteur de 140. 000 euros ce qui répond bien à l'activité de vente d'objet d'art qui est la finalité première de la société ;

Par ailleurs, bien que la mère de Célia Y...soit décédée le 11 février 2016, celle-ci ne produit pas la déclaration de succession qui a dû être déposée dans le délai légal de 6 mois après le décès ce qui soustrait à la connaissance de la cour le patrimoine qui la compose, Célia Y...étant cependant contrainte de reconnaître qu'elle comprend notamment un appartement rue Charlot dans le 3ème arrondissement de Paris qui a fait l'objet d'un acte de partage publié le 02 décembre 2016, le fait que cet appartement soit laissé à la disposition de la soeur de Célia Y...comme celle-ci l'allègue ayant nécessairement une compensation pour les deux autres co-indivisaires ; Célia Y...fait état également d'une assurance vie pour expliquer l'existence d'un virement de 18. 000 euros sur son compte en juin 2016 ;

Célia Y...déclare supporter des charges mensuelles fixes de 940 euros qui apparaissent en cohérence avec les pièces justificatives versées aux débats, la cour observant cependant des frais de pension pour un chien de 240 euros qui interrogent sur les choix qu'elle opère ;

Ses droits en matière de retraite seront minimes ;

- Jean-Marc X...est âgé de 58 ans et ne fait pas état de soucis de santé ; il est avocat d'exercice libéral au sein d'une société HP et associés ; il a déclaré un revenu mensuel de 17. 910 euros en 2015 selon son avis d'imposition ;

Selon sa déclaration sur l'honneur du 27 mai 2016, Jean-Marc X...n'a aucun bien propre ; il déclare supporter des charges mensuelles fixes de 13. 676 dont il ne justifie que partiellement et qui incluent notamment la pension alimentaire de 2. 070 euros due au titre du devoir de secours dont le paiement va cesser dès que le divorce aura acquis force de chose jugée, le remboursement de la TVA qui se rapporte à son exercice professionnel ; il indique s'acquitter seul du passif commun évalué à 516. 866 au 1er janvier 2010 dont l'essentiel est composé de dettes professionnelles (CNBF 20. 000 euros/ Urssaf 74. 185 euros/ TVA 361. 681 euros) ; il partage ses charges avec sa compagne, elle-même salariée, étant observé que Jean-Marc X...a la charge quotidienne de trois des quatre enfants, Loris, Elio et Maya et qu'il indique, sans toutefois en justifier, que les deux filles de sa compagne, étudiantes, vivent à leur domicile ;

Jean-Marc X...n'a pas renseigné ses droits en matière de retraite ;

- les deux époux ont en commun le bien immobilier de Beaumesnil, évalué 240. 000 euros par Jean-Marc X...et des parts de sociétés qu'il évalue 255. 181 euros sans autre précision sur la nature de ces parts et l'origine de cette évaluation, étant précisé que Jean-Marc X...est titulaire de parts dans la société d'exercice libéral HP et associés mais également dans la société civile de moyens A...et X...;

Considérant qu'il incombe à chaque partie de rapporter la preuve des faits nécessaires au succès de ses prétentions ; qu'il appartient au créancier d'une prestation compensatoire d'exposer de façon complète et loyale ses conditions de vie et son patrimoine ;

Qu'en l'espèce, force est de constater que dès la première instance et ensuite devant la cour, Célia Y...a manqué à son obligation de loyauté en dissimulant la succession de son père puis la succession de sa mère et les droits qui en découlent pour elle ; qu'elle soutient vainement que ses droits ne sont pas prévisibles et ne peuvent être pris en considération pour apprécier son droit à prestation compensatoire puisque les deux successions sont en cours de règlement, ne sont pas clôturées et n'ont donné lieu à aucun versement à son profit selon attestation du notaire en date du 30 novembre 2016 ; qu'en effet, il convient d'observer qu'il n'est justifié d'aucun obstacle s'opposant au règlement même partiel des successions des deux parents de l'intimée alors que leur consistance le permet (comptes bancaires du père/ assurance vie de la mère/ biens immobiliers) ; que la consistance des patrimoines successoraux est connue et déterminée ; que les droits de Célia Y...dans la succession de ses deux parents sont certains en l'absence de renonciation de celle-ci ; que le seul délai nécessaire à leur réalisation ne leur confère pas un caractère imprévisible, d'autant que son écoulement dépend de l'action de son titulaire ;

Considérant que si Célia Y...a des revenus insignifiants, elle possède un patrimoine propre important qu'elle a délibérément occulté et qu'elle n'a révélé que sous la contrainte des productions de pièces de son adversaire en limitant au maximum sa transparence notamment en ce qui concerne la succession de sa mère ; qu'en outre, elle a des droits issus de la liquidation, par principe égalitaire, du régime matrimonial à venir ;

Qu'ainsi, Célia Y...ne démontre pas que la dissolution du mariage entraîne à son détriment une disparité dans les conditions de vie des époux de telle sorte que le jugement qui lui a accordé une prestation compensatoire doit être réformé de ce chef ;

Sur les dommages-intérêts

Considérant que des dommages et intérêts peuvent être alloués à un époux sur le fondement de l'article 266 du code civil lorsque la dissolution du mariage entraîne des conséquences d'une particulière gravité, soit lorsqu'il était défendeur à un divorce prononcé pour altération définitive du lien conjugal et qu'il n'avait lui-même formé aucune demande en divorce, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de son conjoint ;

Considérant que Célia Y...ne rapporte pas la preuve de la particulière gravité qu'elle invoque de telle sorte que le jugement qui a rejeté sa demande doit être confirmé ;

Sur la contribution à l'entretien et l'éducation des enfants

Considérant que, conformément aux dispositions de l'article 371-2 du code civil, chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant ; que cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur ;

Considérant que la situation des deux parents a été examinée ; que les besoins d'Elio et Maya sont conformes à leur âge ;

Qu'il convient de fixer à 100 euros par mois et par enfant la part contributive de Célia Y...;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Considérant que chaque partie succombant partiellement dans ses prétentions, chacune conservera la charge de ses propres dépens ;

Considérant que l'équité ne commande pas de faire application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en raison de la nature familiale du litige ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE, en dernier ressort et après débats en chambre du conseil ;

CONFIRME le jugement sauf en ce qu'il a alloué à Célia Y...une prestation compensatoire et rejeté la demande de contribution à l'entretien et l'éducation des enfants formée par Jean-Marc X...,

STATUANT à nouveau,

REJETTE la demande de prestation compensatoire de Célia Y...,

FIXE à 100 euros le montant de la contribution mensuelle de la mère à l'entretien et l'éducation de chaque enfant Elio et Maya et CONDAMNE Célia Y...en tant que de besoin à payer cette somme, soit 200 euros (100 x 2) à Jean-Marc X...à compter du présent arrêt,

DIT que cette pension sera réévaluée le 1er mars de chaque année par le débiteur et pour la première fois le 1er mars 2018 en fonction de la variation de l'indice mensuel des prix à la consommation des ménages urbains (hors tabac) dont le chef est ouvrier ou employé publié par l'INSEE, l'indice de base étant le dernier publié lors de la réévaluation ;

DIT que cette contribution sera due au-delà de la majorité ou jusqu'à la fin des études poursuivies par chaque enfant dont il devra être justifié chaque année ou jusqu'à ce que l'enfant exerce une activité rémunérée non occasionnelle lui permettant de subvenir lui-même à ses besoins ;

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d'appel,

REJETTE toute autre demande des parties,

arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Xavier RAGUIN, président, et par Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute,

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 16/02293
Date de la décision : 09/03/2017
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Analyses

Arrêt rendu le 09 mars 2017 par la 2ème chambre 1ère section de la cour d’appel de Versailles RG 16 /02293 Divorce-prestation compensatoire-droits prévisibles En l’état de successions ouvertes du fait du décès des parents, il ne peut être soutenu que les droits successoraux ne sont pas prévisibles au motif que les successions sont en cours de règlement, ne sont pas clôturées et n’ont donné lieu à aucun versement au profit des héritiers alors que la consistance des patrimoines successoraux est connue et déterminée et que les droits de l’appelante dans la succession de ses deux parents sont certains en l’absence de renonciation de celle-ci ; que le seul délai nécessaire à leur réalisation ne leur confère pas un caractère imprévisible, d’autant que son écoulement dépend de l’action de son titulaire .


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2017-03-09;16.02293 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award