COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
17e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 08 MARS 2017
R.G. N° 13/03275
AFFAIRE :
[B] [Q]
C/
SA TRANSDEV ILE DE FRANCE venant aux droits de la société VEOLIA
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 30 mai 2013 par le conseil de prud'hommes - formation paritaire - de RAMBOUILLET
Section : Commerce
N° RG : 12/00071
Copies exécutoires délivrées à :
SELASU DADI AVOCATS
AARPI NMCG AARPI
Copies certifiées conformes délivrées à :
[B] [Q]
SA TRANSDEV ILE DE FRANCE venant aux droits de la société VEOLIA
POLE EMPLOI
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE HUIT MARS DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [B] [Q]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparante en personne, assistée de Me Ghislain DADI de la SELASU DADI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0257
APPELANTE
****************
SA TRANSDEV ILE DE FRANCE venant aux droits de la société VEOLIA
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Arnaud BLANC DE LA NAULTE de l'AARPI NMCG AARPI, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Noémie NAUDON, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : L0007
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue le 12 janvier 2017, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Clotilde MAUGENDRE, Président,
Madame Isabelle DE MERSSEMAN, Conseiller,
Madame Monique CHAULET, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Marine GANDREAU
Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Rambouillet (section commerce) du 30 mai 2013 qui a :
- déclaré que Mme [B] [Q] était recevable et bien fondée en ses demandes,
- dit et jugé que le licenciement de Mme [Q] était dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- ordonné l'annulation de la mise à pied du 26 octobre 2011,
- condamné la SA Veolia Transport à verser à Mme [Q] les sommes suivantes :
. 13 200 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 140,64 euros au titre du rappel de salaires lié à l'annulation de la mise à pied du 26 octobre 2011,
. 14,06 euros au titre du rappel de congés payés lié à l'annulation de la mise à pied du 26 octobre 2011,
. 884,90 euros au titre du préjudice pour formation non suivie,
. 843,84 euros au titre de rappel de congés payés,
. 1 000 euros au titre de l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile,
- débouté Mme [Q] du surplus de ses demandes,
- débouté la SA Veolia Transport de ses demandes reconventionnelles,
- condamné la SA Veolia Transport aux entiers dépens y compris les frais d'exécution éventuels,
Vu la déclaration d'appel adressée au greffe le10 juillet 2013 et les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, pour Mme [Q], qui demande à la cour de :
- réformer le jugement entrepris,
- fixer son salaire mensuel à la somme de 2 200,53 euros brut,
à titre principal,
- condamner la société à la réintégrer sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision de la cour,
- condamner la société à lui verser la somme de 87 140,98 euros brut correspondant aux 3 ans de salaire dus (février 2012 à février 2015) ainsi qu'aux congés payés afférents,
en tout état de cause,
- condamner la société à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi par Mme [Q] du fait de ce harcèlement,
à titre subsidiaire,
- dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- ordonner sa réintégration ou, à défaut, le versement par la société d'une indemnité de licenciement de 30 000 euros,
en tout état de cause,
- annuler la mise à pied prononcée le 29 novembre 2010 pour les faits du 26 octobre 2010 et condamner la SA Transdev Ile de France à lui verser la somme de 75,61 euros,
- annuler la mise à pied du 15 juin 2011 pour les faits du 23 mai 2011 et condamner la société à lui verser la somme de 77,35 euros,
- annuler la mise à pied du 26 octobre 2011 pour les faits du 27 septembre 2011 et condamner la société à lui verser la somme de 154,70 euros,
- annuler l'avertissement du 16 décembre 2011,
- condamner la société à lui payer les sommes suivantes :
. 884,90 euros au titre de la formation non-suivie,
. 150 euros au titre du rappel de prime VAE,
. 108,25 euros au titre des chèques cadeaux,
. 843,84 euros au titre des rappels de congés payés caisse,
. 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, pour la SA Transdev Ile de France venant aux droits de la SA Veolia Transport, qui demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [Q] de sa demande au titre d'un prétendu harcèlement moral, d'annulation de mises à pied disciplinaire des 29 novembre 2010 et 15 juin 2011, de rappel de prime VAE et de rappel de paiement de chèques vacances,
- infirmer le jugement pour le surplus,
en conséquence,
- dire que Mme [Q] n'a pas fait l'objet d'un harcèlement moral,
- dire que les sanctions disciplinaires sont fondées,
- dire que le licenciement de Mme [Q] est fondé,
- débouter Mme [Q] de toutes ses demandes,
à titre reconventionnel,
- condamner Mme [Q] à lui payer la somme de 2 000 euros à titre d'indemnité pour procédure abusive,
- condamner Mme [Q] aux entiers dépens et à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
SUR CE LA COUR,
Considérant, sur la procédure , que la SA Transdev Ile de France demande que les pièces adverses n°51 à 59 communiquées la veille des débats soient écartées ; que dès lors qu'il ne résulte pas du dossier de 1ère instance qu'elles avaient déjà été communiquées, il convient afin d'assurer les conditions d'un débat loyal, de les écarter des débats ;
Considérant que Mme [B] [Q] a été engagée par la SA Veolia Transport, en qualité de conducteur receveur, par contrat de travail à durée indéterminée du 6 août 2007 ;
Qu'en dernier lieu, elle percevait une rémunération mensuelle de base brute de 1 828,40 euros ;
Qu'à partir du mois de mars 2010 plusieurs sanctions lui ont été notifiées ;
Que, convoquée par lettre recommandée avec avis de réception du 16 janvier 2012 à un entretien préalable fixé au 25 janvier 2012, Mme [Q] a été licenciée par lettre du 2 février 2012 ainsi libellée :
« (...) Par ailleurs, nous avons pris connaissance d'un mail envoyé par un parent d'élève le 9 décembre 2011 nous signalant que sur le tour 19 au cours de la matinée : « (sa) fille et d'autres camarades (se sont plaintes) que la conductrice condui(sait) très vite ». En outre ce parent d'élève nous a demandé d'intervenir rapidement pour régler ce problème. Or, après recherches, il est apparu que ces faits vous étaient une nouvelle fois imputable.
Le 29 décembre 2011, nous avons reçu un appel d'un client qui se plaignait qu'une course de la ligne 10 n'avait pas été effectuée le jour même à 10h12. Après recherches, il vous appartenait également de faire cette course.
Le 31 décembre 2011, vous ne vous êtes pas présentée à votre prise de service, et ce sans avoir prévenu l'exploitation et sans avoir produit de justificatif. Nous avons dû détacher un de vos collègues pour que vous puissiez procéder à une relève en ligne. Votre retard a donc considérablement désorganisé l'exploitation.
Le même jour non contente d'avoir un bus différent de celui du matin sur votre service de l'après-midi, vous avez manifesté votre mécontentement de façon colérique auprès de l'adjoint d'exploitation d'astreinte sous prétexte que vous aviez nettoyé le poste de conduite du véhicule affecté sur votre service du matin. Vous avez appelé l'exploitation à trois reprises sur ce sujet et ce alors que vous avez parfaitement connaissance que l'affectation des bus n'est pas nominative.
Lors de l'entretien du 25 janvier 2012, les explications que vous nous avez fournies ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits.
Tout d'abord, vous n'avez pas su apporter de réponse sur les raisons de votre conduite dangereuse le 09 décembre 2011.
En ce qui concerne votre absence de réalisation de la course sur la ligne 10 le 28 décembre 2011, vous vous êtes contentée de reconnaître les faits tout en précisant que vous pensiez avoir lu la feuille de service de la veille (feuille qui était restée dans votre car).
Enfin, en ce qui concerne les faits survenus le 31 décembre 2011, vous avez tenté d'expliquer votre retard une fois encore par une mauvaise lecture de votre feuille de service qui vous aurait amené à confondre votre heure de prise de service avec l'heure de votre départ en gare pour votre 1er tour.
Par ailleurs, vous nous avez expliqué que si vous aviez été agressive sur le changement de car c'est parce que vous estimiez avoir été victime d'une injustice au motif que, selon vos dires, ce changement d'affectation n'aurait concerné que votre service, ce que nous réfutons totalement puisque plusieurs de vos collègues ont été amenés ce jour-là à changer de véhicule. Contrairement à vos dires, il n'y a donc aucune injustice envers votre personne.
Tout ceci n'est pas acceptable. (...) » ;
Considérant sur le harcèlement moral, qu'aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. » ;
Qu'en application de l'article L. 1154-1, dans sa version applicable à l'espèce, interprété à la lumière de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, lorsque survient un litige relatif à l'application de ce texte, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Que Mme [Q] soutient qu'à partir du mois de mars 2010, période à laquelle est intervenu le changement de direction du dépôt de [Localité 1], elle est devenue le souffre-douleur de ses supérieurs hiérarchiques directs ; qu'elle affirme qu'elle a subi des reproches injustifiés et a été poussée à bout en étant sanctionnée et convoquée à de nombreux entretiens préalables laissés sans suite ;
Qu'elle établit :
- avoir été convoquée le 28 octobre 2010 à un entretien préalable fixé au 8 novembre 2010, puis avoir été sanctionnée d'une mise à pied d'une journée, le 14 décembre 2010, notifiée le 29 novembre 2010 pour être rentrée le mardi 26 octobre 2010 vers 16h30 dans le dépôt avec sa voiture à une allure excessive et avoir manqué de respect à l'encontre de l'assureur présent sous prétexte que son bus avait été affecté à un autre collègue,
- avoir été convoquée par courrier du 10 février 2011 remis en main propre le 11 février à un entretien préalable fixé au 22 février 2011, entretien resté sans suite,
- avoir été convoquée par courrier du 24 mai et entretien préalable fixé au 1er juin et sanctionnée d'une mise à pied pour avoir transporté, le 23 mai 2011, son chien de type berger malinois dans son bus,
- avoir été convoquée par lettre recommandée avec avis de réception du 7 juin 2011 à un entretien préalable fixé au 15 juin 2011 auquel aucune suite n'a été donnée,
- avoir été convoquée le 3 octobre 2011à un entretien préalable fixé au 11 octobre 2011 et sanctionnée d'une mise à pied de deux jours, les 8 et 9 novembre, notifiée le 26 octobre 2011 pour avoir eu un comportement dangereux au volant le 27 septembre,
- avoir été convoquée par courrier du 10 novembre 2011 à un entretien préalable fixé au 17 novembre 2011 et sanctionnée d'un avertissement notifié le 16 décembre 2011 pour conduite brusque et non respect d'un feu rouge le 4 octobre 2011 ;
Que M. [Y], ancien salarié de la SA Transdev Ile de France qui a occupé les fonctions de responsable formation, recrutement et assurance d'août 2007 à novembre 2011 au sein du dépôt de [Localité 1], dans une déclaration sur l'honneur, qui n'est pas dépourvue de valeur probante au seul motif qu'elle ne respecte pas les conditions de forme de l'article 202 du code de procédure civile, témoigne de ce qu'il a pu constater des attitudes machistes à l'égard de Mme [Q], des paroles déplacées, une attitude anormalement agressive, le fait que les assureurs mettaient un temps inhabituellement long à lui donner les papiers du car à sa prise de service, occasionnant des départs de service en retard, situation génératrice de stress ; qu'il ajoute qu'il lui était reproché de passer trop de temps dans les bureaux alors que certains chauffeurs y discutaient parfois une heure le matin ;
Qu'il déclare que la situation de Mme [Q] s'est encore dégradée avec l'arrivée de M. [M], directeur de centre, et de M. [O], responsable d'exploitation, ceux-ci l'affublant de surnoms dégradants, M. [M] la qualifiant de « chialeuse » car lors de différents entretiens il lui arrivait de fondre en larmes et M. [O] l'appelant « Barbie » ;
Qu'il précise qu'un jour à l'occasion d'un entretien avec M. [O], qui se plaignait de la conduite trop rapide de Mme [Q], il lui avait proposé d'inscrire Mme [Q] à une formation, et celui-ci lui avait répondu que c'était inutile et que de toute façon il voulait la « sacquer » ;
Qu'il résulte des feuilles de route produites que la salariée a fini son service à 22h42 le 24 décembre 2010, à 22h12 le 31 décembre 2010 et à 21h22 le 31 décembre 2011 ;
Que des demandes de réparation produites, il résulte que la salariée a demandé la réparation de la porte avant pour la première fois le 18 novembre 2011, puis le 25 décembre 2011, le 16 janvier 2012, en insistant sur le danger, et le 24 janvier 2012 ;
Que le docteur [S], psychiatrique, atteste dans un certificat médical du 15 octobre 2012 avoir régulièrement reçu Mme [Q] de février à avril 2012 pour soins d'un état dépressif ;
Que la multiplicité des procédures disciplinaires engagées contre Mme [Q], les faits précis décrits par M. [Y], la circonstance qu'elle a fini son service tardivement les deux soirs de réveillon 2010 et les difficultés rencontrées pour obtenir la réparation du car qu'elle conduisait, pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Que M. [M], dans son attestation, se borne à affirmer qu'il a toujours agi de manière impartiale à l'égard de Mme [Q] et qu'il conteste formellement ses accusations ;
Que M. [O] conteste également tout comportement répréhensible et affirme n'avoir jamais appelé Mme [Q] « Barbie » ; qu'il précise avoir su, lorsqu'il travaillait à l'entrepôt d'[Localité 2], qu'une collègue de [Localité 1] Mme [Q], qu'il ne connaissait alors pas, était surnommée ainsi notamment par M. [Y] dont il remet en cause le témoignage en soutenant que lorsqu'il a pris sa suite à [Localité 1] il lui avait laissé une liste du personnel avec des commentaire du style « malade chronique » ou « qualité de service moyenne voir moins », annotation figurant à côté du nom de Mme [Q] ;
Que ces témoignages sont trop peu circonstanciés pour démentir celui de M. [Y] ;
Que la SA Transdev Ile de France ne discute pas que les deux convocations à entretien préalable des 10 et 7 juin 2011 sont restées sans suite ; que si l'employeur a le droit de renoncer à la procédure disciplinaire qu'il a engagée, la bonne gestion des relations sociales exige qu'il en informe le salarié ce qui n'a pas été le cas en l'espèce ;
Que la réparation de la porte sollicitée la première fois le 18 novembre 2011 a fait l'objet d'une intervention le 30 novembre, insatisfaisante puisque Mme [Q] a dû la renouveler et qu'une autre a été faite le 19 décembre, à nouveau, insatisfaisante ; que la SA Transdev Ile de France ne démontre pas que ce problème de sécurité a été traité avec le soin nécessaire ;
Que, s'agissant de la mise à pied notifiée le 29 novembre 2010 pour les faits du 26 octobre 2010, Mme [Q] conteste être entrée à grande vitesse dans l'entrepôt et avoir eu une attitude agressive à l'égard de M. [E] ;
Que M. [E] dans un courrier du 27 octobre 2010 adressé au directeur a indiqué avoir vu entrer à vive à l'allure dans l'enceinte du dépôt un véhicule Peugeot conduit par Mme [Q] laquelle était descendue du véhicule en lui demandant sur un ton désagréable « pourquoi c'est Belkefoul qui à mon car ' » ; qu'il lui avait demandé de se calmer, qu'elle était très contrariée et l'avait traité d'incapable ; que M. [G] avait essayé de la raisonner en lui tenant les mains pour qu'elle ne dépasse pas les limites « de l'agression sur sa personne »; que, cependant , M. [G] dans une attestation du 20 novembre 2012 soutient que ce témoignage est faux et qu'il n'a pas eu à intervenir pour porter secours à M. [E] qui était séparé de Mme [Q] par une cloison surmontée de carreaux coulissants ; que M. [F] atteste que Mme [Q] est entrée dans la « bulle » et a agressé verbalement M. [E] en le traitant d'incapable ;
Que ces témoignages sont trop contradictoires pour considérer que les faits reprochés sont établis ;
Que cette mise à pied est donc injustifiée ;
Que, s'agissant de la mise à pied notifiée le 15 juin 2011 pour avoir le 23 mai 2011 transporté son chien, un berger malinois, dans le bus, Mme [Q] admet l'avoir transporté alors que le bus était vide entre le dépôt et son lieu de départ pour le donner à la garde de sa mère ; qu'il est établi que ne sont admis dans les bus de la SA Transdev Ile de France que les chiens de non voyants et les animaux de petite taille transportés dans des paniers ou des sacs et que les gros chiens et chiens de taille moyenne (
Qu'en revanche, dès lors qu'il n'y avait pas de voyageur dans le bus et que le trajet était limité, la mise à pied constituait une sanction disproportionnée ;
Que, s'agissant de la mise à pied notifiée le 26 octobre 2011 pour les faits du 22 septembre 2011, Mme [Q] conteste la conduite dangereuse sanctionnée ; que le 22 septembre 2011 Mme [I] a adressé au directeur un courrier dans lequel elle expliquait avoir reçu ce jour un SMS de sa fille qui lui disait « [Y] je suis dans le bus. La dame conduit beaucoup trop vite et j'ai peur », qu'elle était allée à l'arrivée du bus de la ligne [Localité 1] saint Léger, trop tard pour voir la conductrice, mais qu'elle avait interrogé les enfants qui descendaient du bus et qui avaient été unanimes pour dire que la conductrice allait très vite, qu'ils avaient eu peur et en avaient déjà parlé à leurs parents, un des enfants avait basculé dans un virage et sa tête avait heurté un accoudoir ;
Que force est de constater que ce courrier reste vague sur la vitesse qualifiée d'excessive ; qu'au surplus, M. [G], représentant du personnel qui a assisté la salariée, dans un courrier du 30 mars 2012 adressé à l'avocat de Mme [Q], a indiqué avoir demandé à l'employeur de procéder à une vérification sur les disques, demande que l'employeur a rejetée en disant que « cela ne prouverait rien » ; qu'en outre, Mme [Q] produit plusieurs courriers de passagers habituels de son bus qui déclarent apprécier sa conduite et son dévouement au service public et aussi celui de Mme [N], accompagnatrice scolaire de 2007 à 2010 qui déclare que Madame [Q] avait toujours une conduite irréprochable et que son comportement était adapté à la clientèle d'enfant de 3 à 11 ans ;
Que l'unique courrier de Mme [I] est insuffisant à établir la réalité des faits reprochés ; que cette sanction n'était donc pas justifiée ;
Que, s'agissant de l'avertissement notifié le 16 décembre 2011 reprochant à Mme [Q] une conduite brusque et le non respect d'un feu rouge , la SA Transdev Ile de France produit une fiche de « remontée client » concernant un incident survenu le 28 septembre 2011 à 8h émanant de Mme [B] qui rapportait les remarques de sa fille et de deux de ses amies sur le trajet [Établissement 1]-collège [Établissement 2] la « conductrice, plutôt jeune, cheveux blonds jusqu'aux épaules, conduisant brusquement, passant au feu rouge et pillant en voyant trop tardivement un bouchon » ;
Que Mme [Q] soutient qu'elle ne conduisait pas le bus le 28 septembre 2011 ; que la SA Transdev Ile de France l'admet et fait valoir que Mme [B] a identifié Mme [Q] le 4 octobre 2011 et s'était trompée de date dans sa plainte initiale ;
Que la fiche « remontée client » est trop imprécise pour établir la réalité des faits reprochés ;
Qu'au surplus, M. [G] dans un courrier du 10 juillet 2012 adressé à l'avocat de Mme [Q] a relaté avoir un jour suivi un car de l'entreprise sur une route en travaux et avoir constaté qu'alors que le feu de chantier était passé au rouge plusieurs voitures et le car avaient franchi le feu rouge ; qu'il a ajouté qu'en arrivant au dépôt il avait fait remarquer au responsable qui accompagnait le chauffeur en reconnaissance de ligne que le feu avait été grillé « un peu abusivement » et que celui-ci lui avait été répondu que le conducteur s'était un peu emmêlé dans les vitesses ; qu'il a conclu que la réponse était pour le moins surprenante quand on sait ce qui peut être reproché à Mme [Q] sur un simple courrier sans la moindre preuve ;
Que cette sanction était donc également injustifiée ;
Qu'il résulte de ces éléments que la SA Transdev Ile de France ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que les multiples sanctions injustifiées et le comportement anormal de la direction ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement que le harcèlement moral est donc établi ;
Que le préjudice subi par Mme [Q] soumise à un stress quotidien sera réparé par l'allocation d'une somme de 4 000 euros ;
Considérant, sur l'annulation des sanctions, que sous le bénéfice des motivations précédentes, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a annulé la mise à pied conservatoire notifiée le 26 octobre 2011 et alloué à Mme [Q] la somme de 140,64 euros à titre de rappel de salaire et 14,06 euros à titre de congés payés afférents ;
Qu'au surplus, infirmant le jugement, il convient d'annuler l'avertissement notifié le 16 décembre 2011 et les mises à pied conservatoires notifiées le 29 novembre 2010 et le 15 juin 2011 et d'allouer à Mme [Q] le salaire correspondant ;
Considérant, sur le licenciement, que, s'agissant des faits du 9 décembre 2011, Mme [Q] soutient que le 9 décembre 2011 elle n'était pas de service sur le tour 19 ; que le mail de Mme [V] du vendredi 9 décembre indique que le ramassage du mercredi matin, donc du mercredi 7 décembre, passe toujours avant 1 heure et que sa fille et d'autres camarades se plaignent de ce que la conductrice va trop vite ; que ce mail est trop imprécis pour établir la réalité des faits d'autant que la SA Transdev Ile de France dispose des moyens techniques de vérifier la vitesse et les horaires du bus ; que ce grief n'est pas établi ;
Que Mme [Q] admet ne pas avoir effectué une course le 28 décembre 2011 et explique qu'elle ne s'était pas rendue compte que sa feuille de service avait été modifiée ;
Qu'elle reconnaît être arrivée en retard le 31 décembre car elle avait confondu l'horaire de départ du bus et l'heure à laquelle elle devait le prendre au dépôt ;
Que ces deux derniers griefs sont donc établis ;
Que dès lors que les sanctions précédentes ont été annulées, ces griefs n'étaient pas de nature à justifier la mesure extrême que constitue un licenciement ;
Que cependant, dès lors qu'il n'est pas établi que ces deux griefs étaient la conséquence du harcèlement moral subi, il n'y a pas lieu de dire le licenciement nul ;
Considérant, sur la réintégration et l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'en application de l'article L. 1235-3 « si le licenciement survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise avec maintien des avantages acquis. » ; que si l'une ou l'autre partie refuse le juge octroie au salarié une indemnité, à la charge de l'employeur, qui, Mme [Q] à la date du licenciement, comptant au moins deux ans d'ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés a droit, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, ne saurait être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement ;
Que dès lors que la SA Transdev Ile de France s'oppose à sa réintégration, au regard de son âge au moment du licenciement, 34 ans, de son ancienneté d'environ 4,5 ans dans l'entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, de son aptitude à retrouver un emploi eu égard à son expérience professionnelle et de ce qu'elle ne communique aucun élément sur sa situation professionnelle et soutient ne pas avoir retrouvé d'emploi, il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral subi, la somme de 15 000 euros ;
Considérant qu'en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur, à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de 6 mois d'indemnités ;
Considérant, sur le droit à formation, que le licenciement de Mme [Q] l'a privée des jours de formation FCOS destinée au maintien de son autorisation de conduite qui était programmée du 27 février au 2 mars 2012 ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué à Mme [Q] la somme de 884,90 euros de ce chef ;
Considérant, sur la prime Validation des Acquis de l'Expérience, que Mme [Q] établit avoir obtenu le 2 avril 2012 le certificat d'aptitude professionnelle d'agent d'accueil et de conduite routière transport de voyageurs ; qu'elle avait donc droit au montant de la prime de 150 euros ; que le jugement sera infirmé de ce chef ;
Considérant, sur les chèques cadeaux, que dès lors que Mme [Q] n'était plus dans les effectifs au mois de juin 2012 la SA Transdev Ile de France ne lui devait pas de chèques cadeaux pour l'année 2012 ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef ;
Considérant, sur les congés payés, que dès lors que la caisse de congés payés avait payé à Mme [Q] ses congés payés comme si elle était présente dans l'entreprise au mois de juin 2012, la SA Transdev Ile de France était fondée à lui retenir au mois d'avril 2012 un trop-perçu de 834,84 euros ; que le jugement sera infirmé en ce qu'il avait fait droit à la demande de Mme [Q] de ce chef ;
Considérant, sur les dommages et intérêts pour résistance abusive, que dès lors que les demandes de Mme [Q] prospèrent en cause d'appel, la SA Transdev Ile de France sera déboutée de sa demande de ce chef ;
Considérant que Mme [Q] qui succombe, doit supporter la charge des dépens et ne saurait bénéficier de l'article 700 du code de procédure civile ; que toutefois, pour des raisons d'équité, il n'y a pas lieu de faire application à son encontre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Considérant qu'il est inéquitable de laisser à la charge de les frais par lui exposés non compris dans les dépens à hauteur de ;
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement et contradictoirement,
Ecarte des débats les pièces n°51 à 59 communiquées par Mme [Q] ;
Infirme partiellement le jugement,
Statuant à nouveau,
Dit le harcèlement moral établi,
Annule les mises à pied notifiées les 29 novembre 2010 et 15 juin 2011,
Annule l'avertissement notifié le 16 décembre 2011,
Condamne la SA Transdev Ile de France à payer à Mme [B] [Q] les sommes suivantes :
. 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
. 15 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 150 euros à titre de prime VAE,
. 75,61 euros à titre de salaire de la mise à pied conservatoire notifiée le 29 novembre 2010,
. 77,35 euros à titre de salaire pour la mise à pied conservatoire notifiée le 15 juin 2011,
Déboute Mme [Q] de sa demande de rappels de congés payés caisse,
Ordonne d'office le remboursement par l'employeur, à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de 6 mois d'indemnités,
Déboute la SA Transdev Ile de France de sa demande pour procédure abusive,
Confirme pour le surplus le jugement,
Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
Condamne la SA Transdev Ile de France à payer à Mme [Q] la somme complémentaire de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,
Déboute la SA Transdev Ile de France de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SA Transdev Ile de France aux dépens.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Clotilde Maugendre, président et Madame Marine Gandreau, greffier en pré-affectation.
Le greffier,Le président,