COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 65B
3e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 26 JANVIER 2017
R.G. N° 15/05927
AFFAIRE :
SA ALLIANZ BANQUE
C/
[W] [K]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Décembre 2014 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
N° Chambre : 06
N° RG : 13/04793
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Valérie LEGAL
Me Philippe PECH DE LACLAUSE de la SELARL Pech de Laclause - Bathmanabane & Associés
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SIX JANVIER DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SA ALLIANZ BANQUE
N° SIRET : 572 199 461
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Valérie LEGAL, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 274 - N° du dossier 150078
Représentant : Me NIDERPRIM Plaidant, avocat au barreau de PARIS substituant Me Jean-marc PEREZ de la SELARL HP & Associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J109
APPELANTE
****************
1/ Monsieur [W] [K]
né le [Date naissance 1] 1931 à [Localité 1] (ALGERIE)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Philippe PECH DE LACLAUSE de la SELARL Pech de Laclause - Bathmanabane & Associés, Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J086 - N° du dossier 20130079
Représentant : Me BONAFOS de la SCP GOUIRY MARY CALVET BENET, Plaidant, avocat au barreau de NARBONNE
INTIME
2/ Monsieur [E] [A]
ci-devant
[Adresse 3]
[Adresse 3]
et actuellement sans domicile ni résidence ni lieu de travail connus
INTIME - Ordonnance de caducité partielle rendue le 8 janvier 2016
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 Décembre 2016 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique BOISSELET, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Véronique BOISSELET, Président,
Madame Françoise BAZET, Conseiller,
Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Maguelone PELLETERET
Par actes des 5 et 8 avril 2013, M. [K] a assigné devant le tribunal de grande instance de Nanterre la société AGF Banque et l'un de ses anciens salariés, M. [A], afin d'obtenir réparation du préjudice causé par le détournement de l'épargne qu'il avait souhaité investir, par l'intermédiaire de M. [A] ès qualité de salarié d'AGF, dans la souscription de parts d'OPCVM, et que M. [A] aurait détournée.
Par jugement du 12 décembre 2014, le tribunal de grande instance de Nanterre a :
- condamné la société Allianz Banque, venant aux droits d'AGF Banque à payer à M. [K] la somme de 15 244,99 euros à titre de dommages et intérêts,
- débouté M. [K] de sa demande pour résistance abusive, et Allianz de sa demande au titre d'une demande abusive,
- condamné Allianz à payer à M. [K] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Le tribunal a retenu pour l'essentiel que les circonstances de fait ayant entouré ce versement démontraient que M. [K] n'avait pu avoir conscience que M. [A] n'agissait pas dans le cadre de ses fonctions, et que rien ne démontrait que le lien de préposition entre AGF et M. [A] avait disparu à la date de souscription de l'investissement.
Allianz en a relevé appel le 3 août 2015, et prie la cour, par dernières écritures du 29 octobre 2015, de :
- débouter M. [K] de ses demandes,
- le condamner à lui payer les sommes de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, et 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières écritures du 17 décembre 2015, M. [K] demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner Allianz à lui payer les sommes de 5 000 euros pour résistance abusive et 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er décembre 2016.
SUR QUOI, LA COUR :
M. [K] a produit un bulletin de souscription à l'en-tête d'AGF Finance mentionnant un versement de 100 000 francs effectué sur son compte d'investissement AGF Finance et destiné à la souscription à un OPCVM dénommé AGF Invest daté du 16 janvier 2001. Il a effectué le versement correspondant, soit 15 244,99 euros, en un chèque établi à l'ordre de la Société Générale et daté du 16 janvier 2002. Seule cette dernière date peut être retenue, puisque le chèque ne porte trace d'aucune falsification, et que M. [K] a lui-même déclaré dans la constitution de partie civile qu'il a adressée le 10 mars 2003 au juge d'instruction chargé d'instruire du chef des agissements de M. [A] que le placement avait été effectué le 16 janvier 2002.
Le placement réglé n'a jamais été effectué.
Par jugement correctionnel du 25 février 2010, M. [A] a été déclaré coupable de faux et usage, escroquerie et abus de confiance, au préjudice notamment de M. [K], par lequel il s'est fait remettre la somme de 53 356 euros. Les demandes formées par les parties civiles, dont M. [K], ont été mises en délibéré au 27 mai 2010 et finalement tranchées par jugement sur intérêts civils du 24 août 2010. Ce jugement a fixé le préjudice de M. [K] à la somme de 15244,99 euros au titre d'un placement réalisé le 16 janvier 2001, et 38 112,25 euros le 5 juin 2002, soit la somme totale de 53 357,24 euros.
La cour ne peut que regretter, compte tenu de la motivation réduite du tribunal correctionnel, qu'aucune des parties, lesquelles étaient représentées à la procédure correctionnelle, n'ait estimé utile de produire l'ordonnance de renvoi ou le réquisitoire définitif. Elle ne peut dès lors qu'indiquer que le tribunal correctionnel, statuant sur intérêts civils le 24 août 2010, a rappelé que M. [A] démarchait ses clients en arguant d'une prétendue qualité de conseiller en patrimoine auprès d'Allianz vie ou d'Aviva Vie et se faisait remettre des sommes très importantes qui alimentaient un compte personnel en Suisse, avec lequel il boursicotait, et qu'il était acquis aux débats que, dans le cadre de ses méfaits, il était soit collaborateur salarié d'une compagnie d'assurance, soit agissait, dans ses relations avec les victimes, avec un mandat apparent de son employeur.
Le 8 novembre 2004 une transaction a été conclue entre Aviva Vie et M. [K] par laquelle Aviva Vie versait pour solde de tout compte une somme de 38 112,25 euros. Il était précisé dans cette convention que : 'Monsieur [W] [K] déclare être intégralement rempli de ses droits et n'avoir plus aucune revendication ni demande à formuler vis-à-vis de la SA Aviva Vie du fait des agissements de son préposé Monsieur [E] [A], étant précisé que M. [K] donne acte du fait que Aviva Vie ne peut être concernée par la remise à M. [A] de la somme de 15 244,99 euros, celle-ci ayant été opérée avant que Monsieur [A] ne devienne salarié d'Aviva Vie et, semble-t-il, versée sur un support dont Aviva Vie n'assure pas la gestion.'.
Allianz fait valoir que sa responsabilité en qualité de commettant de M. [A] ne saurait être retenue puisqu'elle produit en cause d'appel la lettre de démission de ce dernier, et établit ainsi que le lien de préposition a pris fin le 10 décembre 2001. Ce n'est donc pas en sa qualité de préposé d'Allianz qu'il a agi, et ce d'autant plus que M. [K] produit des documents à en tête de CGU Abeille Vie. Le préjudice n'est en outre pas établi faute de preuve que le chèque ait bien été encaissé par M. [A], étant rappelé que l'appréciation d'un préjudice par la juridiction pénale ne lie pas le juge civil, et qu'aucune explication n'est fournie sur le mandat de 4 500 euros reçu par M. [K] de M. [A], en sorte que cette somme devrait en tout état de cause être déduite.
Subsidiairement, elle expose que les conditions dans lesquelles M. [K] a procédé à ce versement excluent qu'il ait réellement pu croire avoir affaire à un préposé agissant dans l'exercice de ses fonctions.
M. [K] rappelle que sa demande est fondée sur l'article 1998 du code civil, et que l'existence d'un mandat apparent est parfaitement établie. Il précise que l'ordre figurant sur le chèque qu'il a remis a été rédigé par M. [A], et que les éléments matériels dont il se prévaut sont précisément ceux qui ont été sanctionnés par la juridiction pénale. Il conteste toute faute.
***
Les observations d'Allianz sur le fondement de l'article 1384 al 5 ancien du code civil n'ont pas de pertinence, puisque la demande est désormais exclusivement fondée sur l'article 1998 du code civil et l'existence d'un mandat apparent.
La cour fait siens les motifs qui ont conduit le tribunal à considérer que M. [K] avait été abusé par l'usage par M. [A] d'un bulletin de souscription d'AGF Finances, et qu'il n'était pas établi que l'ordre du chèque de versement avait été rédigé par M. [K]. Elle ajoutera que, s'il est exact que l'appréciation d'un préjudice par une juridiction pénale statuant sur intérêts civils n'a pas l'autorité à l'égard de tous attachée aux décisions pénales, M. [K] observe à juste titre que sa réclamation est fondée, non pas sur l'appréciation de son préjudice par le tribunal correctionnel, mais sur les éléments constitutifs du délit d'escroquerie dont M. [A] a été déclaré coupable. En effet, M. [A] a été déclaré coupable du délit d'escroquerie, en ce qui concerne, notamment, la somme objet de la présente instance, pour avoir, en abusant de sa qualité vraie de conseiller en patrimoine et en usant de manoeuvres frauduleuses, en l'espèce en établissant des contrats fictifs destinés à faire croire à l'existence de placements de fonds à forte rentabilité, déterminé M. [K] à lui remettre les fonds. Le fait que ce soient les manoeuvres frauduleuses de M. [A], ou l'abus de sa qualité passée de mandataire d'AGF Finance, qui aient déterminé M. [K] à remettre les fonds est un élément essentiel du délit d'escroquerie fondant la condamnation prononcée et s'impose à tous à ce titre. La qualité de mandataire apparent d'AGF Finance, aux droits de laquelle vient Allianz, de M. [A] est ainsi ipso facto établie.
Le jugement sera donc confirmé sur le bien fondé de la demande de M. [K] en son principe.
Néanmoins, sur son montant, il est justement observé par Allianz que M. [K] a toujours déclaré avoir perçu un remboursement de 4 500 euros, lequel n'est pas rattachable au prétendu placement auprès d'Aviva Vie, qui n'aurait pas manqué de le déduire de la somme allouée au titre de la transaction ci-dessus rappelée. C'est donc une somme de 10 744,99 euros qui reviendra à M. [K].
Aucune des parties n'établit contre l'autre d'abus dans la défense de ses droits et leurs demandes respectives de dommages et intérêts ont été justement rejetées.
Allianz, qui succombe sur le principe de son recours, en supportera les dépens, et contribuera, en équité, aux frais de procédure exposés devant la cour par M. [K] à hauteur de 2 500 euros, les dispositions du jugement relatives aux dépens et application de l'article 700 du code de procédure civile étant par ailleurs confirmées.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Infirmant le jugement entrepris sur le montant de la somme allouée à M. [K] et statuant à nouveau de ce chef,
Condamne la société Allianz Banque à payer à M. [W] [K] la somme de 10 744,99 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 12 décembre 2014,
Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la société Allianz Banque à payer à M. [W] [K] la somme complémentaire de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
La condamne également aux dépens d'appel, avec recouvrement direct.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier,Le Président,