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19/01/2017 | FRANCE | N°14/08649

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 19 janvier 2017, 14/08649


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 60C

3e chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 19 JANVIER 2017

R.G. No 14/08649

AFFAIRE :

SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE
...

C/

Alain, Henri X...
...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Novembre 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
No chambre : 04
No RG : 12/05427

Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Emmanuel MOREAU de la SCP MOREAU E. et ASSOCIES
Me Hubert GRISON
M

e Laure JOCHEM-KOLBREPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DIX NEUF JANVIER DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 60C

3e chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 19 JANVIER 2017

R.G. No 14/08649

AFFAIRE :

SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE
...

C/

Alain, Henri X...
...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Novembre 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
No chambre : 04
No RG : 12/05427

Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Emmanuel MOREAU de la SCP MOREAU E. et ASSOCIES
Me Hubert GRISON
Me Laure JOCHEM-KOLBREPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DIX NEUF JANVIER DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

1/ SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE
RCS de Paris no 399 227 354
4 rue Jules Lefebvre
75009 PARIS
agissant poursuites et diligences du président de son conseil d'admnistration domicilié en cette qualité audit siège

2/ SAS CLAIR GROUP, venant aux droits de la Société AIR ET COMPAGNIE GROUPE (nom commercial AIR et COMPAGNIE), suite à une opération de fusion absorption du 13 mars 2013
Aéroport de Toussus le Noble - Bâtiment 313
78117 CHATEAUFORT
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Emmanuel MOREAU de la SCP MOREAU E. et ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C 147 No du dossier 20137174
Représentant : Me Thierry MAZOYER de la SCP CHEVRIER ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1045

APPELANTES

****************

1/ Monsieur Alain, Henri X...
né le 29 Novembre 1947 à ROUGEMONT LE CHATEAU (90110)
de nationalité Française
...

Représentant : Me Hubert GRISON, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 139

INTIME

2/ GIE LA REUNION AERIENNE
No SIRET : 703 002 352
134 rue Danton
92300 LEVALLOIS PERRET
pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Laure JOCHEM-KOLB, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 385
Représentant : Me Maxime MALKA, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0930

INTIME

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 Novembre 2016, Madame Véronique BOISSELET, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Véronique BOISSELET, Président,
Madame Françoise BAZET, Conseiller,
Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Maguelone PELLETERET
____________
Le 8 septembre 2009, deux avions de tourisme sont entrés en collision au-dessus de la commune de Saint Martin Bréthencourt. Le premier avion, de type Commander et piloté par M. X..., a pu se poser en urgence, et seule sa passagère et compagne, Mme Y..., a été légèrement blessée. Le second avion, de type Cessna, affrété auprès de M. Z... par la société Air et Compagnie en qualité de locataire, aux droits de laquelle vient la société Clair Group, et assuré par Axa, s'est écrasé au sol et ses deux passagers, soit un élève en séance d'instruction et son instructeur, ont été tués.

A l'initiative de M. X..., une expertise a été effectuée, dont le rapport a été déposé le 12 octobre 2011.

Par actes des 4 et 19 juin 2012, M. X... a assigné devant le tribunal de grande instance de Versailles la société Clair Group et Axa afin d'obtenir réparation des préjudices subis. Axa et la société Air et Compagnie, aux droits de laquelle vient la société Clair Group, ont sollicité reconventionnellement la réparation des préjudices subis et assigné en intervention forcée le GIE la Réunion Aérienne le 14 janvier 2013.

Par jugement du 13 novembre 2014, le tribunal de grande instance de Versailles a :

- donné acte à la société Clair Group qu'elle vient aux droits de la société Air et Compagnie,

- condamné la société Clair Groupe à payer à M. X... les sommes de :

• préjudice matériel 88 000,00 euros
• préjudice de jouissance 2 000,00 euros
• indemnité de procédure 4 500,00 euros

- débouté M. X... de sa demande au titre des frais de gardiennage,

- débouté Axa et la société Clair Group de toutes leurs demandes,

- condamné Axa à garantir la société Clair Group,

- débouté la Réunion Aérienne de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné Axa et la société Clair Group aux dépens, en ce compris les frais d'expertise.

Axa et la société Clair Group en ont relevé appel le 3 décembre 2014.

Par dernières écritures du 5 juin 2015, elles demandent à la cour de :

- juger M. X... seul responsable des conséquences de la collision,

- condamner M. X... et son assureur, la Réunion Aérienne, à payer

- à Axa :

• indemnité d'assurance versée à M. Z..., propriétaire de l'avion, au titre de la garantie "corps" (valeur de l'aéronef) 48 000,00 euros

• capital décès (garantie individuelle à la place- Pilote) 16 000,00 euros

- à la société Clair Group :

• franchise contractuelle 1 500,00 euros
• préjudice d'exploitation 32 571,30 euros

- confirmer le cas échéant les dispositions du jugement ayant fixé le préjudice matériel de M. X... à la somme de 88.000 euros, ayant débouté ce dernier de sa demande au titre des frais de gardiennage, limité le préjudice de jouissance à 2 000 euros,

- subsidiairement, limiter le préjudice de jouissance complémentaire de M. X... à la somme de 4 600 euros,

- condamner M. X... et la Réunion Aérienne à leur payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par dernières écritures du 10 avril 2015, M. X... demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf celle concernant les frais de gardiennage,

- condamner la société Clair Group à lui payer la somme de 17 747,44 euros au titre des frais de gardiennage, et celle de 6 600 euros au titre du préjudice de jouissance,

- condamner les appelantes à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile , ainsi qu'aux entiers dépens.

Par dernières écritures du 10 avril 2015, la Réunion Aérienne demande à la cour de confirmer le jugement, et subsidiairement, minorer sensiblement les préjudices allégués, celle formulée au titre du capital décès étant déclarée irrecevable.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 novembre 2016.

SUR QUOI, LA COUR :

Sur les responsabilités :

Le tribunal, après avoir rappelé la règle posée par l'article L.6131 du code des transports, selon laquelle en cas de dommage causé par un aéronef en évolution à un autre aéronef en évolution, la responsabilité du pilote et de l'exploitant de l'appareil est régie par les dispositions du code civil, a retenu que le pilote du Cessna avait commis une faute en ne cédant pas le passage au Commander qui venait de sa droite.

Axa et la société Clair Group objectent que les constatations de l'expert établissent que le pilote du Cessna n'a pas vu l'arrivant, les ailes hautes du Cessna occultant la vision compte tenu de l'altitude légèrement inférieure du Cessna par rapport au Commander, en sorte qu'aucune faute du pilote du Cessna n'est établie. Au contraire, le pilote du Commander avait le temps de faire une manoeuvre d'évitement, mais, distrait par d'autres tâches et gêné par le soleil, puisque ne portant pas de lunettes de soleil, ainsi que déclaré lors de l'enquête, il n'avait, lui non plus, pas vu le Cessna, mais à la suite d'un défaut de vigilance de sa part. Les appelantes ajoutent qu'en outre M. X... s'était affranchi de l'obligation d'utiliser son transpondeur en mode C, alors pourtant qu'il savait que la zone était dangereuse en raison de sa forte fréquentation, en sorte que le service de contrôle des vols Paris info n'a pu alerter le pilote du Cessna sur la présence du Commander dans la zone.

A supposer même qu'il soit jugé qu'aucune faute n'est établie, le pilote du Commander, qui avait le pouvoir de direction et de contrôle du Commander, doit réparer le dommage causé à l'exploitant et l'assureur du Cessna sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1 du code civil.

M. X... fait valoir que la manoeuvre d'évitement de dernière seconde tentée par le Cessna n'était pas adaptée, dans la mesure où il est préconisé de "plonger" et non de monter en pareille occurrence, que les évolutions choisies et leur zone d'exécution étaient imprudentes, et que l'équipage du Cessna pouvait également se voir reprocher d'avoir été dépourvu de tout contact radio. Sur le terrain de l'article 1384 du code civil, il expose que c'est bien le Cessna qui est venu heurter son appareil et non l'inverse.

***

Selon les éléments concordants figurant dans le procès-verbal de la gendarmerie des transports aériens, et le rapport d'expertise, les données de fait sont les suivantes :

La collision a eu lieu dans un espace aérien de classe G. Les classes d'espace aérien sont une normalisation des services rendus dans les espaces aériens par les stations de contrôle. Chaque classe d'espace se voit attribuer une lettre, la classe A étant la plus restrictive mais aussi la plus sécurisée, et la classe G la plus libre (les espaces non contrôlés sont de classe F et G). La seule règle qui y prévaut est celle de "voir et éviter" avec priorité à droite. Le code de l'aviation civile met néanmoins à la charge de chaque pilote l'obligation de faire toute manoeuvre propre à éviter un abordage.

Les deux appareils étaient en vol VFR, sous transpondeur.

Un vol VFR (visuel flight rules) est un vol au cours duquel le pilote utilise la vue de son cockpit comme source d'information principale (par opposition aux vols avec instruments de navigation).

Le transpondeur (équipement embarqué qui permet aux radars secondaires des stations de contrôle du trafic aérien au sol de déterminer la position de l'avion dans la zone surveillée) n'est pas obligatoire en France sur les avions volant en VFR dans les zones de classe G. Les deux avions étaient cependant sous code transpondeur. Même si le mode C de celui du Commander ne fonctionnait pas, l'avion était encore sous code correspondant à un suivi par la station de contrôle Paris info. Le Cessna n'était pas en liaison avec Paris info, mais cette station de contrôle pouvait le voir sur ses écrans.

Le Commander effectuait un vol de croisière en ligne droite. Le Cessna a évolué dans une zone restreinte dans les 5 mn avant la collision, selon un programme d'évolution conforme à une 2ème leçon de pilotage (étude de l'assiette, et de l'inclinaison, révision des 3 axes, lacet inverse).

Selon étude du tracé radar, la trajectoire du Commander était rectiligne et a croisé une première fois celle du Cessna. Vu la distance lors de ce premier croisement, soit plus de 3 km, il était difficile aux pilotes de se voir à ce moment. Le Cessna s'est retrouvé 30 secondes avant la collision, soit à 1 km du Commander, sur une ligne droite à 90o à la gauche du Commander. Il était donc débiteur de la priorité à droite.

L'étude des traces de choc sur le Commander a démontré que l'aile droite du Cessna, sur son bord de fuite, a heurté l'aile gauche du Commander, sur son bord d'attaque. Le Cessna était donc à très forte inclinaison, soit plus de 60 o puisque les fuselages ne se sont pas touchés. Le Cessna était en virage à gauche avec une très forte inclinaison lors de la collision, et le Commander toujours en ligne droite à l'horizontale.

Aucune manoeuvre d'évitement n'a été faite à temps, ce qui montre que les pilotes ne se sont pas vus. Le brusque virage à gauche du Cessna dans les dernières secondes peut correspondre à une tentative d'évitement. Le virage à gauche des dernières secondes du Cessna a inversé la priorité, le Commander devenant rattrapant. L'abordage résulte d'un défaut de surveillance de chacun des pilotes, dans les 30 dernières secondes, le Commander était prioritaire.

M. X... a indiqué aux enquêteurs qu'il avait sorti son train d'atterrissage, afin d'en contrôler les voyants avant l'impact, qu'il cherchait avec insistance l'autoroute de Chartres, et que, lorsque son regard est revenu à l'intérieur du cockpit pour identifier cette autoroute avec certitude sur la carte, il a alors entendu un choc important, et a constaté que le bord d'attaque de son aile gauche avait disparu.

***

Ne peuvent être retenus, contre l'équipage du Cessna, ni la présence de leur avion, pour un vol d'instruction, à cet endroit, ce qui n'est évoqué ni par les enquêteurs, ni par l'expert, étant rappelé que la zone était classée en G, donc sans réglementation particulière, ni le fait qu'ils n'avaient pas de moyen de communication, puisque l'avion était sous transpondeur, ni l'inadaptation des évolutions de l'avion à une 2ème leçon, ce qui n'est pas retenu par l'expert et ne résulte d'aucune pièce.

De même, il ne peut être reproché à M. X... d'avoir volé alors que le mode C de son transpondeur était hors service, puisque le mode C sert uniquement à renseigner la station de contrôle sur l'altitude de l'avion, et n'était pas obligatoire, non plus qu'à cet endroit, l'usage d'un transpondeur. Il ne peut davantage lui être fait grief de ne pas avoir mis de lunettes de soleil, puisque, compte tenu de l'heure de l'accident et de la saison, le soleil n'était pas gênant, étant en outre rappelé qu'il était légèrement voilé ce jour là.

En revanche, les conclusions convergentes tant de l'expert, que des gendarmes de l'Air, que personne ne discute, selon lesquelles les deux pilotes ne se sont pas vus, et n'ont donc ni l'un ni l'autre entrepris de manoeuvre d'évitement en temps utile, caractérisent, chez tous deux, un manque de vigilance compte tenu de la règle "voir et être vu" constituant la prescription essentielle applicable dans la zone dans laquelle ils se trouvaient et au mode de vol utilisé (VFR), ainsi que le relève justement l'expert.

Ne peuvent être retenues à la décharge de chacun des pilotes, les contraintes de visibilité propre à chaque avion (vision réduite en hauteur pour le Cessna, qui a des ailes "hautes" et vision réduite sur les côtés et vers le bas pour le Commander qui a des ailes plus basses) puisque, selon les estimations proposées par l'expert et non discutées, les avions se sont retrouvés, 30 secondes avant l'accident et 1 km avant le point de choc sur des trajectoires perpendiculaires, qui, malgré ces contraintes et en raison de la distance, auraient dû leur permettre de se voir.

Il demeure que le Cessna était débiteur de la priorité à droite, sans que son dernier virage doive être considéré comme ayant inversé la priorité, puisque son extrême tardiveté privait l'autre avion de toute possibilité de modifier sa route, et que le pilote du Cessna devait donc être particulièrement vigilant en ce qui concerne cette direction. Celui du Commander pouvait en revanche légitimement relâcher son attention de ce côté là, ce qui ne l'autorisait cependant pas, alors surtout qu'il connaissait les dangers de la zone à raison de l'importance du trafic aérien, à cesser tout examen de son environnement aérien pour s'intéresser exclusivement aux points de repères offerts par le sol ou sa carte aéronautique.

La cour retiendra en conséquence que Axa et la société Clair Group seront tenues de supporter 60 % du sinistre subi par M. X..., et que ce dernier et la Réunion Aérienne seront tenus de réparer 40 % du sinistre subi par Axa et la société Clair Group.

Les créances réciproques de dommages et intérêts se compenseront par l'effet de la loi.

Sur les préjudices :

Sur le préjudice de M. X... :

La valeur d'épave du Commander n'est pas contestée, et sera donc retenue pour 88 000 euros.

En ce qui concerne le préjudice de jouissance, il a été justement indemnisé, par le jugement, au titre de la période courant du 8 septembre 2009 au 8 septembre 2011. Cette évaluation sera confirmée.

M. X... est parfaitement recevable à solliciter devant la cour la réparation du préjudice subi pour la période suivante, soit entre le 9 septembre 2011 et le 4 mars 2015, soit sur une période de 3 ans et 6 mois. La somme de 100 euros par mois n'étant pas contestée, ce préjudice complémentaire sera fixé à la somme de 4 200 euros.

En ce qui concerne les frais de gardiennage, le tribunal a justement observé que M. X... pouvait récupérer son avion dès la levée des scellés, et sa demande en paiement de frais de gardiennage sera jugée mal fondée. Il n'est d'ailleurs pas justifié du paiement effectif de la somme réclamée.

Compte tenu du partage de responsabilité retenu, la société Clair Group sera condamnée à payer à M. X... les sommes de :

88 000 euros x 60 % = 52 800,00 euros
6 200 euros x 60 % = 3 720,00 euros

Sur le préjudice de la société Clair Group et d'Axa :

L'indemnisation de la perte du Cessna n'est pas discutée, à hauteur de 48 500 euros pour Axa et 1 500 euros pour la société Clair Group au titre de la franchise.

En ce qui concerne le versement de la somme de 16 000 euros à la fille mineure d'Auguste A..., il résulte du protocole de règlement définitif et du contrat d'assurance que cette somme est versée au titre du contrat "Individuelle à la place-pilote" et a été forfaitairement déterminée par le contrat. Dès lors le capital versé a un caractère forfaitaire, excluant la subrogation de l'assureur à l'égard du tiers responsable en application de l'article L.131-2 du code des assurances, ainsi que justement relevé par la Réunion Aérienne, et Axa doit être déboutée de cette demande.

En ce qui concerne la perte d'exploitation, les chiffres bruts retenus par l'expert concernant les heures de vol, le carburant non consommé et la location coque nue ne sont pas contestés et seront donc retenus. Néanmoins la réclamation de Clair Group ne pourra être entièrement satisfaite, au regard de l'insuffisance de ses explications sur l'impossibilité de report partiel de l'activité du Cessna détruit sur l'autre appareil de même type dont elle dispose, justement évalué par l'expert à 30 %. Par ailleurs, en l'absence de démonstration que la prime d'assurance du Cessna détruit a continué à être réglée, la déduction de la somme de 1 500 euros au titre de la prime d'assurance évitée opérée par l'expert sera admise.

L'évaluation de la perte d'exploitation proposée par l'expert sera donc retenue pour la somme de 20 206, 20 euros.

Compte tenu du partage de responsabilité, les sommes suivantes reviendront :

- à Axa :

• perte du Cessna : 48 500 euros x 40 % = 19 400,00 euros

- à la société Clair Group :

• franchise sur perte de l'appareil : 1 500 x 40 % 600,00 euros
• perte d'exploitation : 20 206,20 euros x 40 % 8 082,48 euros

Sur les autres demandes :

Chacune des parties ayant engagé sa responsabilité, et succombant partiellement, conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel, les frais d'expertise étant partagés par moitié.

Aucune considération d'équité ne justifie l'application de l'article 700 du code de procédure civile en la cause.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a été donné acte à la société Clair Group qu'elle vient aux droits de la société Air et Compagnie Groupe, et en ce que la Réunion Aérienne a été déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

Déclare la société Clair Group, garantie par la société Axa Corporate Solutions Assurance, responsable à hauteur de 60 % du dommage causé à M. X... par l'accident du 8 septembre 2009,

Déclare M. X..., garanti par le GIE la Réunion Aérienne, responsable à hauteur de 40 % du dommage causé à la société Clair Group et à Axa Corporate Solutions Assurance par l'accident du 8 septembre 2009,

Condamne la société Clair Group garantie par Axa Corporate Solutions Assurance à payer à M. Alain X... les sommes de :

valeur d'épave de l'avion Commander 52 800,00 euros
préjudice de jouissance 3 720,00 euros

Condamne in solidum M. Alain X... et le GIE la Réunion Aérienne, cette dernière dans les limites de son contrat, à payer :

à la société Axa Corporate Solutions Assurance :

perte de l'avion Cessna 19 400,00 euros

à la société Clair Group :

franchise sur perte de l'appareil 600,00 euros
perte d'exploitation 8 082,48 euros

Dit que ces créances réciproques se compenseront par l'effet de la loi,

Rejette le surplus des demandes,

Rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel, à l'exception des frais d'expertise judiciaire, qui seront partagés par moitié entre d'une première part, M. Alain X... et le GIE la Réunion Aérienne, et, d'une seconde part, Axa Axa Corporate Solutions Assurance et la société Clair Group,

Dit que les dépens pourront faire l'objet de recouvrement direct.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 14/08649
Date de la décision : 19/01/2017
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Analyses

Sommaire Arrêt rendu le 19 janvier 2017 par la 3ème chambre de la cour d’appel de Versailles RG 14/08649 Responsabilité civile, navigation aérienne, accident d'aéronefs, collision en vol, règlement de la circulation aérienne, dommages matériels, partage de responsabilité – réparation. Deux avions de tourisme sont entrés en collision dans l’espace aérien de classe G, le premier de type Commandeur ayant pu se poser d’urgence, le second, de type Cessna, s’étant écrasé au sol, ses deux passagers ayant été tués. La cour, pour infirmer le jugement entrepris et opérer un partage de responsabilité, retient que les conclusions convergentes tant de l’expert, que des gendarmes de l’Air, selon lesquelles les deux pilotes ne se sont pas vus, et n’ont donc ni l’un ni l’autre entrepris de manœuvre d’évitement en temps utile, caractérisent, chez tous deux, un manque de vigilance compte tenu de la règle “voir et être vu” constituant la prescription essentielle applicable dans la zone dans laquelle ils se trouvaient et au mode de vol VFR (visuel flight rules), vol au cours duquel le pilote utilise la vue de son cockpit comme source d’information principale. Et pour fixer à 60 % la part de responsabilité du pilote du Cessna, la cour considère que son pilote était débiteur de la priorité à droite et qu’il a donc commis une faute en en cédant pas le passage au Commandeur.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2017-01-19;14.08649 ?
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