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24/11/2016 | FRANCE | N°14/04303

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 24 novembre 2016, 14/04303


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



Code nac : 80A



11e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 24 NOVEMBRE 2016



R.G. N° 14/04303



EL/CA



AFFAIRE :



[O] [Z]





C/

SAS SEGULA MATRA TECHNOLOGIES venant aux droits de la Société Segula Technologies Automotive



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Septembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Versailles



N° RG : 12/0

0364





Copies exécutoires délivrées à :



Me Romain PIETRI

la SELARL DBC





Copies certifiées conformes délivrées à :



[O] [Z]



SAS SEGULA MATRA TECHNOLOGIES venant aux droits de la Société Segula Technologies Autom...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 24 NOVEMBRE 2016

R.G. N° 14/04303

EL/CA

AFFAIRE :

[O] [Z]

C/

SAS SEGULA MATRA TECHNOLOGIES venant aux droits de la Société Segula Technologies Automotive

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Septembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Versailles

N° RG : 12/00364

Copies exécutoires délivrées à :

Me Romain PIETRI

la SELARL DBC

Copies certifiées conformes délivrées à :

[O] [Z]

SAS SEGULA MATRA TECHNOLOGIES venant aux droits de la Société Segula Technologies Automotive

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire

entre :

Monsieur [O] [Z]

[Adresse 1]

[Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Romain PIETRI, avocat au barreau

de PARIS, vestiaire : L0237

APPELANT

****************

SAS SEGULA MATRA TECHNOLOGIES venant aux droits

de la Société Segula Technologies Automotive

[Adresse 3]

[Adresse 4]

représentée par Me Anne-christine PEREIRA de la SELARL DBC,

avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0180

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile,

l'affaire a été débattue le 26 Septembre 2016, en audience publique,

les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Eric LEGRIS,

Conseiller chargé(e) d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour,

composée de :

Madame Sylvie BOSI, Président,

Madame Marie-Christine PLANTIN, Conseiller,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Versailles rendu le 15 septembre 2014 qui a :

- dit le licenciement de Monsieur [Z] sans cause réelle et sérieuse,

- fixé son salaire moyen à la somme de 11.043 €,

- condamné la SAS SEGULA MATRA TECHNOLOGIES à verser à Monsieur [Z] les sommes suivantes :

75.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

33.129 € à titre d'indemnité de préavis,

16.564,50 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société SEGULA MATRA TECHNOLOGIES à rembourser aux ASSEDIC les indemnités de chômage versées à Monsieur [Z] dans la limite de 1 mois conformément à l'article L 1235-4 al2 du code du travail,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes fins et conclusions,

- condamné la SAS SEGULA MATRA TECHNOLOGIES aux éventuels dépens.

Vu la déclaration d'appel faite au nom de Monsieur [Z] du 6 octobre 2014 ;

Vu les conclusions écrites de Monsieur [Z], soutenues oralement à l'audience de la cour par son avocat, qui demande de :

- constater l'acquiescement de Monsieur [Z] quant à la condamnation de SEGULA à 33.129 € d'indemnité compensatrice de préavis,

- débouter SEGULA de ses demandes reconventionnelles,

- infirmer le jugement entrepris quand il a débouté Monsieur [Z],

- le réformer quand il a condamné SEGULA à lui verser des sommes dont le montant sera réévalué,

En conséquence,

- fixer le salaire mensuel moyen brut de Monsieur [Z] à 16.285,48 €,

- condamner SEGULA à verser à M. [Z] les sommes suivantes :

à titre de rémunération variable du premier semestre 2011, 5.090,67 € outre 509.07 € de congés payés afférents ;

à titre de rémunération variable du second semestre 2011,17.597,95 € outre 1.759,79 € de congés payés afférents ;

à titre de rappel de treizième mois pour l'année 2011 : 8.055 € ;

à titre de rappel pour heures supplémentaires pour l'année 2011, 48.319,03 €, outre 4.831,90 € de congés payés afférents ;

à titre de rappel pour heures supplémentaires pour l'année 2010, 36.957,25 €, outre 3.695,73 € de congés payés afférents ;

à titre de rappel pour heures supplémentaires pour l'année 2009, 39.871,87 €, outre 3.987,19 € de congés payés afférents ;

à titre de rappel pour heures supplémentaires pour l'année 2008, 35.646,76 €, outre 3.564,68 € de congés payés afférents ;

à titre de rappel pour heures supplémentaires pour l'année 2007,19.202,04 €, outre 1.920,20 € de congés payés afférents ;

à titre de dommages et intérêts pour temps de déplacement professionnel dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail en 2011, 7.730,31€ ;

à titre de dommages et intérêts pour temps de déplacement professionnel dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail en 2010, 5.325,48 € ;

à titre de dommages et intérêts pour temps de déplacement professionnel dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail en 2009, 5.788,93 € ;

à titre de dommages et intérêts pour temps de déplacement professionnel dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail en 2008, 10.983,84 € ;

à titre de dommages et intérêts pour temps de déplacement professionnel dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail en 2007, 6.506,28 € ;

à titre de dommages et intérêts pour absence d'information sur les droits relatifs à la contrepartie obligatoire en repos, 5.000 € ;

à titre d'indemnisation pour absence de contrepartie obligatoire en repos due pour heures supplémentaires au-delà du contingent annuel de l'année 2011, 27.708,54 €, outre 2.770,85 € de congés payés afférents ;

à titre d'indemnisation pour absence de contrepartie obligatoire en repos due pour heures supplémentaires au-delà du contingent annuel de l'année 2010, 20.205,04 €, outre 2.020,50 € de congés payés afférents ;

à titre d'indemnisation pour absence de contrepartie obligatoire en repos due pour heures supplémentaires au-delà du contingent annuel de l'année 2009, 22.489,97 €, outre 2.249,00 € de congés payés afférents ;

à titre d'indemnisation pour absence de contrepartie obligatoire en repos due pour heures supplémentaires au-delà du contingent annuel de l'année 2008, 20.006,28 €, outre 2.000,63 € de congés payés afférents ;

à titre d'indemnisation pour absence de contrepartie obligatoire en repos due pour heures supplémentaires au-delà du contingent annuel de l'année 2007, 8.576,46 €, outre 857,65 € de congés payés afférents ;

à titre de dommages et intérêts pour non-respect des durées maximales de travail, 30.000 € ;

à titre de dommages et intérêts pour travail durant les congés payés, 5.000 € ;

à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'embauche : (1 mois de salaire) : 2.000 € ;

à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de l'attestation Pôle emploi (1 mois de salaire) : 5.000 € ;

à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, 97.712,88 € ;

à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse, 195.000 € ;

à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied du 21 novembre au 7 décembre 2011, 6.509,09 €, outre 650,90 € de congés payés afférents ;

à titre de congés payés sur indemnité compensatrice de préavis, 3.312,90 € ;

à titre de reliquat d'indemnité conventionnelle de licenciement, 920,75 € ;

à titre de préjudice moral, 90.000 € ;

à titre d'article 700 du cpc, 7.920 € ;

- condamner SEGULA à rectifier les documents de rupture,

- condamner SEGULA aux entiers dépens.

Vu les conclusions écrites de la société SEGULA MATRA AUTOMOTIVE, venant aux droits de la société SEGULA MATRA TECHNOLOGIES, soutenues oralement à l'audience de la cour par son avocat, qui demande de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a jugé le licenciement de Monsieur [Z] dénué de cause réelle et sérieuse et condamné la société SEGULA MATRA TECHNOLOGIES aux sommes suivantes :

75.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

33.129 € à titre d'indemnité de préavis,

16.564,50 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] de ses autres demandes,

Statuant à nouveau,

- débouter Monsieur [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre reconventionnel,

- condamner Monsieur [Z] au paiement d'une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux dépens,

A titre subsidiaire,

- fixer le salaire de référence de Monsieur [Z] à la somme de 11.043 €,

- limiter le montant de l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 33.129 € bruts, outre 3.312,90 € de congés payés afférents,

- limiter le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement à la somme de

16.564,50 €,

- limiter le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse aux 6 mois de salaire visés par l'article L 1235-3 du code du travail.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience.

CECI ETANT EXPOSE,

Considérant qu'il convient de rappeler que Monsieur [Z] a été embauché par la société GROUPE SEGULA TECHNOLOGIES par un contrat à durée indéterminée en date du 14 novembre 2005 en qualité de Directeur Technique ;

Que le salarié a été licencié le 21 décembre 2006 ;

Considérant que Monsieur [Z] a été embauché le 4 juin 2007 par une autre société du groupe, la société SEGULA TECHNOLOGIES AUTOMOTIVE en qualité de directeur projets - département automobile ;

Que la convention collective nationale applicable est celle des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils ; que la société compte plus de dix salariés ;

Considérant que par un avenant en date du 1er août 2007, Monsieur [Z] a pris les fonctions de Directeur Général Division Intégration et off-shore, moyennant une rémunération mensuelle brute et forfaitaire de 7.500 € ;

Considérant que Monsieur [Z] a été convoqué à un entretien préalable fixé le 29 novembre 2011 ;

Considérant que Monsieur [Z] a été licencié pour faute grave le 7 décembre 2011 ;

Que la lettre est ainsi motivée :

« (...) Depuis plusieurs mois, nous avons été amenés à vous alerter, à de multiples reprises, sur la nécessité impérieuse de mettre en oeuvre toutes les mesures et actions permettant d'éviter une quelconque dégradation des conditions de travail et de la santé de nos collaborateurs.

Bien que les faits qui nous avaient été remontés en 2010 sur le site de [Localité 1] ne semblent pas relever de tels agissements, nous vous avions toutefois expressément sensibilisé sur le fait que nous pourrions en aucun cas admettre que les méthodes de management employées par nos Cadres soient perçues par nos collaborateurs comme étant anormales, violentes ou déplacées.

Or, le mardi 15 novembre 2011, nous avons eu à déplorer un incident très grave concernant un ingénieur d'affaires rattaché au site de [Localité 2], placé sous votre responsabilité.

Selon les éléments qui nous ont été communiqués suite à cet incident particulièrement dramatique, ce salarié, pourtant reconnu pour son professionnalisme et son investissement dans son travail à expressément mis en cause votre comportement agressif à son égard et les pressions psychologiques qu 'il aurait subies.

Etant investi d'une obligation de prévention à l'égard de nos salariés de tous agissements ayant pour conséquence de porter atteinte à leurs droits et à leur dignité, ainsi qu 'à leur santé physique et mentale, nous ne pouvons tolérer, dans notre entreprise, que l'un de nos collaborateurs use de telles méthodes et nous nous devons de prendre, sans attendre, toutes les mesures nécessaires à la protection de notre personnel.

En tout état de cause, il est évident qu'un comportement, basé sur l'agressivité et une façon malsaine ou inadaptée d'imposer son autorité, démontre, en réalité, des difficultés managériales manifestes, ce que nous ne pouvons admettre de la part d'un Directeur de Pôle.

Votre attitude est d'autant plus blâmable que nous constatons que votre prétendue exigence vis-à-vis de vos subordonnés n'est pas le reflet de votre propre comportement vis-à-vis de votre hiérarchie.

Ainsi, à plusieurs reprises ces dernières semaines votre hiérarchie a eu à déplorer vos absences ou retards de diligences malgré ses demandes réitérées (à titre d'exemples non exhaustifs, concernant les entretiens individuels, les lettres de missions des collaborateurs au standard Segula, le SWOT et Stratégie, les études Make or Buy pour décider la politique d'investissement ou même votre absence injustifiée à la réunion « atterrissage ' Budget » que vous saviez pourtant impérative).

Plus encore, nous constatons une nouvelle fois que vous avez agi au mépris des instructions claires qui vous avaient été données par votre hiérarchie.

En témoigne notamment le dossier [I] pour lequel vous avez pris des engagements lourds au nom de l'entreprise, le 3 novembre dernier, sans prendre la peine de les valider avec votre direction en contradiction totale avec les procédures internes et malgré les divers rappels et recommandations que ce dernier avait émis sur votre qualité de travail.

Pour l'ensemble de ces motifs et compte tenu de la gravité des faits, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible. Le licenciement prend donc effet immédiatement et votre solde de tout compte sera arrêté à la date d'envoi de cette lettre, sans indemnité de préavis ni de licenciement étant précisé que la période non travaillée pour mise à pied à titre conservatoire ne sera pas rémunérée.

D'autre part, nous vous informons que nous vous libérons de la clause de non concurrence contenue dans votre contrat de travail. (...) » ;

Considérant que Monsieur [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Versailles le 3 avril 2012 afin de présenter diverses demandes ;

Considérant que les parties n'étant pas parvenues à se concilier, le conseil de prud'hommes a rendu le jugement querellé ;

Sur le licenciement

Considérant, sur la cause du licenciement, qu'en application de l'article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ;

Considérant que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que la charge de la preuve incombe à l'employeur qui l'invoque ;

Considérant que si la société SEGULA TECHNOLOGIES AUTOMOTIVE se réfère à nouveau dans ses écritures aux motifs de licenciement notifié pour faute grave fin 2006, ledit licenciement constituait déjà une sanction, puis a fait l'objet d'une transaction ; qu'en tout état de cause ces faits, antérieurs à l'embauche au sein de la société SEGULA TECHNOLOGIES AUTOMOTIVE, concernaient un autre employeur et ne sont pas repris parmi les griefs énoncés dans la lettre de licenciement, laquelle fixe les limites du litige ;

Considérant que si la lettre de licenciement invoque ' les faits qui nous avaient été remontés en 2010 sur le site de [Localité 1]', elle ajoute aussitôt que les faits 'ne semblent pas relever [des] agissements' reprochés ; qu'en 2010 des allégations de harcèlement moral sur la personne de M. [M] impliquant le management de M. [Z] étaient apparues ; qu'il est avéré que le CHSCT avait conclu à l'absence de harcèlement moral et que M. [M] avait ensuite été débouté de sa demande de résiliation judiciaire ; que les méthodes de management inadaptées imputées à M. [Z] à cet égard sont insuffisamment démontrées ;

Considérant en outre que M. [Z], sans contester aucunement la détresse de M. [D], qui a tenté de mettre fin à ces jours le 15 novembre 2011, rappelle les éléments de contexte professionnel alors rencontrés ; qu'il relève que l'employeur utilise lui-même le conditionnel au sein de la lettre de licenciement au sujet des pressions psychologiques évoquées ; que si plusieurs attestations de M. [D] impliquent M. [Z], ce dernier rappelle l'absence de saisine du CHSCT par la société et produit plusieurs attestations d'anciens salariés en sa faveur ; qu'il n'est pas démontré que celles-ci aient été établies pour les besoins de la cause comme le prétend l'intimée, étant souligné que les témoignages de MM. [V] et [S] et de Mme [R] ont été formulés conformément aux dispositions des articles 202 et suivants du code de procédure civile ; que ce grief est également insuffisamment démontré ;

Considérant que le caractère délibéré des autres manquements ou carences reprochés à M. [Z] dans le cadre de son exercice professionnel n'est pas démontré ; qu'en particulier, s'agissant de l'absence à une réunion du 11 octobre 2011, outre qu'il est justifié de tenir compte du court délai et des efforts réalisés par M. [Z] pour transmettre ses éléments budgétaires, celui-ci justifie d'un déplacement planifié à Bucarest et, s'agissant du dossier [I], les échanges entre responsables ne caractérisent pas un refus d'appliquer les instructions de la hiérarchie ;

Considérant, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, que le licenciement pour faute grave n'est pas justifié ;

Qu'il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a dit le licenciement de Monsieur [Z] sans cause réelle et sérieuse ;

Qu'il y a lieu toutefois dans ces conditions de faire droit à la demande de M. [Z] de voir en outre condamner la société SEGULA à lui verser la somme de 6.509,09 euros à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied, outre 650 euros au titre des congés payés afférents ;

Sur les heures supplémentaires, contreparties en repos et durées maximales de travail

Considérant qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, mais qu'il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;

Considérant tout d'abord que la société SEGULA TECHNOLOGIES AUTOMOTIVE se réfère aux dispositions de la convention collective SYNTEC et de l'accord d'entreprise en date du 24 mars 2003 sur la réduction du temps de travail et soutient que M. [Z], était soumis, non pas à un forfait jours, mais aux 'modalités standart' de gestion des horaires ;

Considérant que l'article 4.1 de l'accord d'entreprise, prévoyant, au titre de ces modalités standard, la compensation des heures supplémentaires effectuées entre 35 et 36,60 heures par l'octroi de 10 jours de RTT sur l'année afin que l'horaire annuel ne puisse dépasser l'horaire annuel normal qui était de 1.600 heures, s'analyse, ainsi que fait valoir l'appelant, en un forfait en heures sur l'année ;

Qu'aux termes de l'article L. 3121-40 du code du travail, 'la conclusion d'une convention individuelle de forfait requiert l'accord du salarié. La convention est établie par écrit' ;

Que si l'article 45 de la loi 2012-387 du 22 mars 2012 a inséré dans le code du travail l'article L.3122-6 (repris à l'article L. 3121-43 actuel) selon lequel la mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail, ce texte n'a pas d'effet rétroactif et n'est applicable qu'aux décisions de mise en oeuvre effective de la modulation du temps de travail prises après publication de ladite loi ;

Qu'en l'espèce, il est constant que M. [Z] n'a jamais signé de convention individuelle de forfait ; que son accord demeurait nécessaire dès lors que l'accord d'entreprise invoqué était antérieur à la loi du 22 mars 2012 ;

Considérant toutefois que les décomptes, tels que produits par M. [Z] en cause d'appel au soutien de sa demande de rappel d'heures supplémentaires, ne font pas état expressément des jours de RTT pris et sont notamment basés sur des postulats contestés - y compris au regard des horaires de fermeture des sites de travail - d'horaires moyens quotidiens (fonction d'heures d'arrivée, de pause déjeuner, et de départ habituels) plutôt que d'éléments permettant de révéler sa présence effective et d'informations directes relatives à son temps de travail précis au jour le jour ;

Que s'agissant de l'envoi de courriels tôt le matin ou tard le soir tard, les pièces produites consistent essentiellement en des captures d'écran d'historiques de courriels ; qu'au surplus, cette circonstance n'est pas déterminante dans la mesure où M. [Z] disposait, compte tenu des fonctions qu'il exerçait (directeur projets département automobile puis directeur général division intégration et off-shore), d'une importante liberté dans la gestion de son temps de travail, en ce compris lorsqu'il effectuait des déplacements à l'étranger;

Que l'employeur, qui conteste principalement la réalisation des heures supplémentaires compte tenu notamment des éléments susvisés et en tout état de cause leur connaissance, souligne que les horaires allégués n'avaient donné lieu à aucune réclamation antérieure, sont en contradiction avec les horaires en vigueur au sein de l'entreprise et qu'existait au sein du groupe une procédure spécifique pour la réalisation d'heures supplémentaires qui n'a pas été utilisée ;

Considérant, au vu des éléments fournis par les deux parties, que l'accomplissement des heures supplémentaires n'est pas avéré ; que le jugement entrepris ayant rejeté la demande formée de ce chef sera donc confirmé ;

Que par suite de ces motifs et des éléments présentés par les parties, les demandes de dommages et intérêts formées au titre de la contrepartie obligatoire en repos pour heures supplémentaires au-delà du contingent annuel, absence d'information à ce titre et pour non-respect des durées maximales de travail et travail durant les congés payés seront également rejetées ;

Sur le travail dissimulé

Considérant, sur les dommages et intérêts pour travail dissimulé, que la dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L.8221-5 du code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que la matérialité de cette dissimulation ainsi au surplus qu'une telle intention ne sont pas avérés en l'espèce, ce qui justifie le rejet de la demande formée à ce titre ;

Sur le temps de déplacement professionnel

Considérant que M. [Z] sollicite l'indemnisation du temps de déplacement professionnel dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail ;

Qu'en application de l'article L. 2121-4 du code du travail, le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif ; toutefois, le temps de déplacement professionnel dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail doit faire l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière ;

Que les temps de trajet quotidiens du salarié pour se rendre de son domicile à son lieu habituel de travail à [Localité 3] et [Localité 4] ne sont pas assimilés à du temps de travail effectif ;

Que s'agissant du temps de déplacement entre le domicile et le lieu d'exécution du travail autre que le lieu habituel, M. [Z] justifie pour partie seulement des déplacements qu'il allègue au titre des temps de trajet dépassant le temps normal de trajet à cet égard ;

Qu'il sera par suite fait droit à sa demande de dommages et intérêts pour temps de déplacement professionnel dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, mais seulement à hauteur de la somme de 5.000 euros ;

Sur la rémunération variable

Considérant qu'au regard des éléments d'appréciation soumis à la cour par les parties, pris dans leur ensemble, il apparaît justifié que le périmètre de référence ait inclus, pour le calcul de la rémunération variable au cours de l'année 2011, le périmètre INTEGRATION et le périmètre 'INDUSTRY NORD', ayant conduit l'employeur à verser à M. [Z] la somme de 8.659euros bruts pour les deux semestres de cette année ;

Que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de rappel de salaire formée à ce titre ;

Sur le rappel de 13ème mois

Considérant que le contrat de travail en date du 4 juin 2007 prévoyait expressément, en son article premier, le versement d'un treizième mois 'aux salariés effectivement présents au 31 décembre de chaque année', 10 % de cette prime étant néanmoins versés en tout état de cause en même temps que le salaire de septembre ;

Que faute de présence effective de M. [Z] dans l'entreprise à compter du 7 décembre 2011, le rejet de sa demande de rappel de 13ème mois, au-delà des 10 % versés, sera confirmé ;

Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et le préjudice moral

Considérant que M.[Z] avait une ancienneté de 4 ans et 6 mois au sein de la société SEGULA TECHNOLOGIES AUTOMOTIVE qui employait de façon habituelle plus de 11 salariés ;

Considérant qu'en application de l'article L1235-3 du code du travail, il peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure au montant brut des salaires qu'il a perçus pendant les six derniers mois précédant son licenciement ;

Que son salaire moyen s'élevait à la somme de 11.043 € ;

Considérant qu'à la suite de son licenciement M. [Z] a exercé une activité de consultant mais a connu une baisse de revenus liés à son activité professionnelle ; qu'il a été réembauché en avril 2016 ;

Considérant qu'au vu des éléments d'appréciation dont dispose la cour, il sera fait droit à la demande du salarié tendant à obtenir la condamnation de la société SEGULA TECHNOLOGIES AUTOMOTIVE à lui payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse mais seulement dans la limite de 75.000 euros ; que le jugement ayant statué en ce sens sera confirmé ;

Considérant que la demande de dommages et intérêts formée au titre d'un préjudice moral sera également rejetée en l'absence de démonstration suffisante du comportement fautif - au regard d'un non-respect de la liberté d'expression, d'un changement de bureau, d'une humiliation, ou de faits brutaux ou vexatoires - allégué à l'encontre de l'employeur et d'un préjudice distinct de celui résultant du licenciement ;

Sur les autres demandes

Considérant qu'au vu des éléments d'appréciation dont dispose la cour, le conseil de prud'hommes a bien apprécié l'indemnité conventionnelle de licenciement (16.564,50 €) et l'indemnité de préavis (33.129 €) qui seront confirmées ;

Qu'il y a lieu toutefois, ainsi que le réclame l'appelant, de condamner la société SEGULA au paiement des congés payés afférents à l'indemnité de préavis, soit à la somme de 3.312 euros ;

Considérant, s'agissant des demandes de dommages et intérêts formées au titre de l'absence de visite médicale ainsi que d'une remise tardive d'attestation Pôle Emploi, que M. [Z] n'apporte pas d'éléments pour justifier du préjudice qu'il allègue de ces chefs ; que leur rejet sera par suite confirmé ;

Considérant qu'en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour de la décision dans la limite de 1 mois d'indemnités ;

Considérant que l'équité commande de faire droit à l'indemnité pour frais irrépétibles de procédure présentée par M.[Z] dans la limite de 1.500 euros en sus de la somme allouée en première instance ;

Considérant que la société SEGULA qui succombe pour l'essentiel à l'action sera déboutée en sa demande d'indemnité pour frais irrépétibles de procédure et condamnée aux entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ses dispositions relatives aux congés payés afférents à l'indemnité de préavis et au rappel de salaire pendant la mise à pied,

Statuant de nouveau de ces chefs, condamne la société SEGULA MATRA AUTOMOTIVE, venant aux droits de la société SEGULA MATRA TECHNOLOGIES SEGULA, à payer à Monsieur [Z] les sommes de :

- 3.312 euros au titre des congés payés afférents à l'indemnité de préavis,

- 6.509,09 euros à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied, outre 650 euros au titre des congés payés afférents,

Y ajoutant,

Condamne la société SEGULA MATRA AUTOMOTIVE, venant aux droits de la société SEGULA MATRA TECHNOLOGIES SEGULA, à payer à Monsieur [Z] les sommes de:

- 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour temps de déplacement professionnel dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail,

- 1.500 euros à titre d'indemnité complémentaire pour frais irrépétibles de procédure,

Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société SEGULA aux dépens.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2 ème alinéa de l'art 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Sylvie BOSI, Président, et par Madame Claudine AUBERT, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11e chambre
Numéro d'arrêt : 14/04303
Date de la décision : 24/11/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 11, arrêt n°14/04303 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-11-24;14.04303 ?
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