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12/10/2016 | FRANCE | N°15/00648

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 12 octobre 2016, 15/00648


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



19e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 12 OCTOBRE 2016



R.G. N° 15/00648



AFFAIRE :



[L] [Z]



C/



SARL ROVEOTEL 2 (HÔTEL LES BALLADINS)





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 décembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERSAILLES



N° RG : 13/00577





Copies exécutoir

es délivrées à :



Me Antoine FABRE



Me Patrick TABET





Copies certifiées conformes délivrées à :



[L] [Z]



SARL ROVEOTEL 2 (HOTEL LES BALLADINS)







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DOUZE OCTOBRE DEUX MILLE SEIZE,
...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 12 OCTOBRE 2016

R.G. N° 15/00648

AFFAIRE :

[L] [Z]

C/

SARL ROVEOTEL 2 (HÔTEL LES BALLADINS)

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 décembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERSAILLES

N° RG : 13/00577

Copies exécutoires délivrées à :

Me Antoine FABRE

Me Patrick TABET

Copies certifiées conformes délivrées à :

[L] [Z]

SARL ROVEOTEL 2 (HOTEL LES BALLADINS)

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DOUZE OCTOBRE DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [L] [Z]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Assistée de Me Antoine FABRE, avocat au barreau de VERSAILLES, (vestiaire : 02)

APPELANTE

****************

SARL ROVEOTEL 2 (HOTEL LES BALLADINS)

[Adresse 2]

[Adresse 1]

Représentée par Me Patrick TABET, avocat au barreau de PARIS, (vestiaire : D0681), substitué par Me PARANCE, avocat au barreau de PARIS, (vestiaire : D0681)

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 juin 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Christine HERVIER, conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Claire GIRARD, Président,

Madame Marie-Christine HERVIER, Conseiller,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Arnaud DERRIEN,

FAITS ET PROCÉDURE :

Par contrat à durée déterminée à effet au 1er avril 2008, Mme [L] [Z] a été engagée par la société Roveotel 2, exploitant un hôtel sous l'enseigne « les balladins » en qualité d'aide hôtelière jusqu'au 31 août 2008 pour une durée de travail mensuelle de 90 heures. Le contrat a été prolongé jusqu'au 31 mars 2009 pour une durée de travail mensuelle de 120 heures, puis jusqu'au 21 juillet 2009 pour une durée de travail mensuelle de 100 heures. A partir du 1er août 2009, la relation de travail s'est poursuivie par contrat à durée indéterminée sans régularisation d'un écrit.

Mme [Z] a présenté un arrêt de travail du 4 au 17 juin 2012 puis a bénéficié d'un congé maternité jusqu'au 7 octobre 2012 et pris un congé parental jusqu'au 8 avril 2013.

Par courrier recommandé du 26 décembre 2012, Mme [Z] a présenté une réclamation à l'employeur relative au non-paiement de plus de 800 heures supplémentaires depuis 2010.

Le 12 avril 2013, Mme [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Versailles afin d'obtenir la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et le paiement d'heures supplémentaires et complémentaires.

Par jugement du 18 décembre 2014, le conseil de prud'hommes de Versailles, section commerce, a :

- pris acte du versement par chèque de la SARL Roveotel 2 à Mme [Z] de la somme de 4 332 € en règlement des astreintes effectuées pour les années 2010 à 2012,

- débouté Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné Mme [Z] aux dépens.

Mme [Z] a régulièrement relevé appel du jugement le 2 février 2015.

Aux termes de ses conclusions transmises le 7 juin 2016, soutenues oralement à l'audience du 29 juin 2016, Mme [Z] demande à la cour d'infirmer le jugement et :

- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur,

- condamner la société Roveotel 2 à lui payer la somme de 18'187,05 € au titre du paiement des heures complémentaires non réglées outre 1 818,70 € au titre des congés payés y afférents,

- fixer le salaire de référence à la somme de 1 654,97 € bruts par mois,

- condamner la société Roveotel 2 à lui payer les sommes de :

* 1 985,96 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

* 16'549,70 € à titre d'indemnité en raison de la résiliation du contrat aux torts et griefs de l'employeur,

* 3 309,94 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 330,99 € au titre des congés payés y afférents,

* 280 € au titre des chèques cadeaux non perçus,

* 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Roveotel 2 aux dépens,

- dire que les intérêts au taux légal sont dus à compter de la saisine du conseil de prud'hommes le 5 avril 2013.

Aux termes de ses conclusions transmises le 28 avril 2016 et soutenues oralement à l'audience du 29 juin 2016, la société Roveotel 2 prie la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, débouter Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes et la condamner aux dépens.

SUR CE :

Sur les heures supplémentaires et complémentaires :

Mme [Z] dont la durée hebdomadaire de travail était de 23 heures, soutient qu'elle a effectué des heures complémentaires et supplémentaires qui ne lui ont pas été payées, notamment les heures « d'astreinte » qu'elle effectuait à raison de 37 heures tous les quinze jours les samedis et dimanches durant le jour et/ou la nuit et qui lui ont été finalement rémunérées par l'employeur lors de l'audience devant le conseil de prud'hommes comme de simples astreintes alors qu'il s'agit d'heures de travail effectif.

L'employeur s'oppose à la demande en soutenant que les heures d'astreinte de jour et de nuit ont été réglées à la salariée lors de l'audience, leur paiement tardif étant consécutif à une erreur et qu'elles étaient comprises dans les 100 heures de travail mensuelles accomplies par la salariée.

Au vu des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

A l'appui de sa demande, Mme [Z] présente dans ses écritures un décompte des heures qu'elle prétend avoir effectuées et communique des copies de ses feuilles de planning récapitulant ses horaires jour par jour dont elle soutient qu'il a été établi par l'employeur lui-même ainsi qu'un extrait de son agenda pour la période du 27 septembre 2010 au 1er janvier 2011, ce qui suffit à l'étayer et il appartient donc à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

La société Roveotel 2 conteste tout d'abord que les feuilles de planning soient le reflet de la réalité des horaires de Mme [Z] mais ne verse aucune pièce de nature à établir quels seraient les horaires exacts de la salariée. Par ailleurs, les annotations manuscrites figurant sur ces feuilles de planning établissent qu'elles émanent bien de l'employeur et celui-ci ne produit d'ailleurs aucun document pour les contredire ou les compléter. Enfin, l'employeur ne saurait valablement reprocher à la salariée l'imprécision de ses agendas par rapport aux plannings qu'il a lui-même établis.

S'agissant des astreintes, Mme [Z] soutient que celles-ci constituaient du temps de travail effectif dès lors qu'elle devait les accomplir sur son lieu de travail. L'employeur de son côté conteste la demande en indiquant que Mme [Z] n'effectuait pas 37 heures mais 36 lors de ses astreintes et était rémunérée dans le cadre de la durée contractuelle de travail.

Aux termes de l'article L. 3121-5 du code du travail, une période d'astreinte s'entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de son employeur a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'accomplir un travail au service de l'entreprise.

Comme le soutient justement Mme [Z], ses périodes de permanence s'effectuant sur le lieu de travail ne constituent pas des astreintes au sens de l'article précité mais du temps de travail effectif qui doit donc être rémunéré comme tel.

L'employeur qui ne présente aucun élément pour répondre à la demande étayée de la salariée en paiement de ses heures complémentaires et ne justifie en rien des horaires réellement effectués par celle-ci lorsqu'il conteste les jours revendiqués par Mme [Z] comme des jours de permanence, devra donc lui payer ses heures complémentaires sur les bases suivantes :

Pour l'année 2010 : 65 heures complémentaires ouvrant droit à majoration de 10% et 768 ouvrant droit à majoration de 25%, calculées sur la base d'un taux horaire de 9,68 € soit un total de 9 984,40 € bruts.

Pour l'année 2011 : 67,8 heures complémentaires ouvrant droit à majoration de 10% et 703 ouvrant droit à majoration de 25%, sur la base d'un taux horaire de 9,86 € bruts soit un total de 9 354,07 € bruts.

Pour l'année 2012, 25 heures complémentaires ouvrant droit à majoration de 10% et 258 ouvrant droit à majoration de 25% sur la base d'un taux horaire de 9,09 € bruts soit un total de  3 180,58 € bruts.

L'employeur qui a déjà versé une somme de 4 332 € au titre des astreintes sera par conséquent condamné à payer à Mme [Z] une somme de 18 187,05 € au titre du solde restant dû pour les heures complémentaires non payées outre 1 818,70 € au titre des congés payés y afférents.

Les intérêts au taux légal seront dus à compter du 22 avril 2014, date de la réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation.

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail :

Tout salarié peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail en cas de manquement de l'employeur à ses obligations mais les manquements allégués doivent être suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

La charge de la preuve pèse sur le salarié qui sollicite la résiliation judiciaire du contrat.

En l'espèce, Mme [Z] invoque à l'encontre de son employeur le non-paiement de ses heures d'astreinte depuis plusieurs années. La cour a retenu le manquement que l'employeur a d'ailleurs partiellement reconnu puisqu'il a versé à la salariée une somme de 4 332 € lors de l'audience devant le conseil de prud'hommes.

Ces manquements, qui, aux termes de trois années ont engendré pour la salariée une très importante perte de rémunération que l'employeur ne s'est pas soucié de combler malgré la réclamation présentée en 2012, sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail. Il sera par conséquent fait droit à la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, laquelle produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Le salaire de référence sera fixé à la somme de 1 654,97 € bruts, prenant en compte les heures complémentaires qui auraient dû être payées comme le revendique la salariée, la demande de celle-ci ayant été accueillie dans son intégralité.

L'ancienneté revendiquée par la salariée est de 6 ans.

L'indemnité légale de licenciement sera fixée à la somme de 1 985,96 € en application de l'article L.1234-9 du code du travail.

Mme [Z], employée depuis plus de deux ans dans une entreprise comprenant au moins onze salariés, doit être indemnisée du préjudice qu'elle a subi en raison du licenciement sans cause réelle et sérieuse lequel ne peut être évalué à une somme inférieure aux salaires des six derniers mois en application de l'article L.1235-3 du code du travail. Compte tenu de son ancienneté, de son âge au moment du licenciement (née en 1984), de ce qu'elle ne justifie en rien de sa situation actuelle, son préjudice sera intégralement réparé par l'allocation d'une somme de 11 000 €.

Sur la demande de paiement des chèques cadeaux :

Mme [Z] sera déboutée de cette demande qui n'est justifiée par aucun élément de nature à prouver l'existence de l'usage allégué.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

La décision entreprise sera infirmée en ce qu'elle a condamné Mme [Z] aux dépens. La société devra supporter les dépens de première instance et d'appel et indemniser Mme [Z] des frais exposés par elle en cause d'appel et non compris dans les dépens à hauteur de la somme de 2 500 €.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe et par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et dit qu'elle produit

les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse au jour de la présente décision,

Condamne la société Roveotel 2 à payer à Mme [Z] la somme de 18 187,05 € au titre du solde des heures complémentaires pour les années 2010 à 2012, outre la somme de 1 818,70 € au titre des congés payés y afférents,

Condamne la société Roveotel 2 à payer à Mme [Z] les sommes de :

* 1 985,96 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

* 11 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Déboute Mme [Z] du surplus de ses demandes,

Condamne la société Roveotel 2 à payer à Mme [Z] la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ,

Condamne la société Roveotel 2 aux dépens de première instance et d'appel.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Claire GIRARD, président et Mademoiselle Gaëlle POIRIER, greffier en pré affectation, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 15/00648
Date de la décision : 12/10/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 19, arrêt n°15/00648 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-10-12;15.00648 ?
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