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12/10/2016 | FRANCE | N°14/04422

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 12 octobre 2016, 14/04422


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES







Code nac : 80A



17e chambre





ARRET N°





contradictoire



DU 12 OCTOBRE 2016



R.G. N° 14/04422



AFFAIRE :



[S] [O]



C/



SAS REGIE LINGE FINANCES









Décision déférée à la cour : jugement rendu le 24 Mai 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire - de BOULOGNE BILLANCOURT



N° RG : 10/00955





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Copies exécutoires délivrées à :



SELARL SCAVELLO WAYMEL



SELARL HOCHE SOCIETE D AVOCATS





Copies certifiées conformes délivrées à :



[S] [O]



SAS REGIE LINGE FINANCES







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







LE DOUZE OCTOBRE DEUX ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 12 OCTOBRE 2016

R.G. N° 14/04422

AFFAIRE :

[S] [O]

C/

SAS REGIE LINGE FINANCES

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 24 Mai 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire - de BOULOGNE BILLANCOURT

N° RG : 10/00955

Copies exécutoires délivrées à :

SELARL SCAVELLO WAYMEL

SELARL HOCHE SOCIETE D AVOCATS

Copies certifiées conformes délivrées à :

[S] [O]

SAS REGIE LINGE FINANCES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DOUZE OCTOBRE DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [S] [O]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par Me Joachim SCAVELLO de la SELARL SCAVELLO WAYMEL, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, substitué par Me Dyhia CHEGRA, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 281

APPELANT

****************

SAS REGIE LINGE FINANCES

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Nicolas MANCRET de la SELARL HOCHE SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Sandra ABOUKRAT de la SELARL VICTOR, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : K061

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Septembre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Isabelle DE MERSSEMAN, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Président,

Madame Isabelle DE MERSSEMAN, Conseiller,

Madame Monique CHAULET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Brigitte BEUREL,

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt du 24 mai 2012 qui a :

- requalifié la prise d'acte de la rupture du contrat de travail du 18 novembre 2009 en une démission du salarié,

- rejeté la demande de condamnation de la société Régie Linge Finances pour licenciement abusif,

- condamné M. [S] [O] à payer à la société Régie Linge Finances une indemnité compensatrice de préavis de 8 460 euros et une indemnité de procédure de 300 euros sur le fondement de l=article 700 du code de procédure civile.

Vu la déclaration d'appel de M. [S] [O] adressée au greffe le 26 juin 2012.

Vu la décision de radiation pour défaut de diligence de l'appelant du 11 décembre 2013.

Vu les conclusions de l'appelant déposées le 10 octobre 2014 comportant une demande de rétablissement de l'affaire au rôle de la cour.

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil pour M. [S] [O] qui demande à la cour de :

- infirmer le jugement du 24 mai 2012,

- dire que la prise d'acte s'analyse en un licenciement abusif imputable à l'employeur,

- le condamner à payer les sommes suivantes :

' 33 840 euros correspondant à 12 mois de salaire à titre d'indemnité pour licenciement abusif,

' 101 520 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement d'un salarié protégé,

' 8 460 euros à titre d=indemnité de préavis (3 mois de salaire),

' 846 euros à titre de congés payés sur préavis,

' 564 euros à titre d=indemnité de licenciement (1/5ème ),

' 7 781,17 euros à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires effectuées en 2008 et 2009,

' 778 euros au titre des congés payés sur les heures supplémentaires,

- dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal du jour de la saisine pour les créances à caractère salarial et du jour de la décision pour celles ayant un caractère indemnitaire,

- condamner la société Régie Linge Finances au paiement de 2 000 euros sur le fondement de l=article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil pour la société Régie Linge Finances qui demande à la cour de :

- dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. [O] s'analyse en une démission et en conséquence confirmer le jugement du 24 mai 2012,

- condamner M. [S] [O] au paiement de :

' 8 460 euros au titre de l=indemnité de préavis non effectué,

' 2 000 euros sur le fondement de l=article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [S] [O] aux dépens.

SUR CE LA COUR :

Considérant que M. [O] a été engagé par la société Régie Linge Finances en qualité de gestionnaire de paie par contrat à durée indéterminée du 18 février 2008 à effet au 1er février 2008 ; qu'il a obtenu le statut de cadre à compter du 1er avril 2008 conformément à son contrat de travail ; qu'il a été nommé administrateur du système d'information et de gestion des ressources humaines (SIRH) à compter du 1er janvier 2009, sans avenant au contrat de travail ;

Considérant que M. [O] a été nommé conseiller des salariés par décision du 9 septembre 2009, prenant rétroactivement effet au 1er septembre 2009 ;

Considérant que le 8 octobre 2009, M. [O] a reçu une convocation, en vue d'une sanction pouvant aller jusqu'à un éventuel licenciement, à un entretien préalable fixé au 19 octobre à 17 heures, avec mise à pied conservatoire ; que le 15 octobre 2009, l'employeur a adressé à M. [O] un nouveau courrier lui indiquant avoir appris par un délégué syndical central l'existence de son mandat de conseiller du salarié, lui demandant de confirmer ce statut et d'en justifier par un document officiel ;

Considérant qu'à la suite de l'entretien du 19 octobre 2009 et d'un entretien informel du 26 octobre, la société Régie Linge Finances a renoncé au licenciement mais lui a délivré un avertissement remis en mains propres à l'issue d'un entretien le 30 octobre 2009 motivé par une attitude négative vis à vis de l'entreprise, du manager et de l'équipe du CSP et un faible sens du travail en équipe, assorti d'une mesure de mise à pied qui s'est déroulée du 12 au 29 octobre 2009, période durant laquelle le salaire a été maintenu ;

Considérant que M. [O] a adressé le 16 novembre 2009 à la société Régie Linge Finances un courrier indiquant prendre acte de la rupture du contrat de travail, décision qu'il sollicite de voir requalifier en un licenciement abusif affirmant que son employeur a modifié ses fonctions et lui a supprimé l'accès au logiciel de paie après avoir appris sa fonction de conseiller du salarié ;

Sur la prise d'acte de la rupture :

Considérant, que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués étaient d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; que la charge de la preuve des faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur à l'appui de sa prise d'acte pèse sur le salarié ;

Considérant que M. [O] produit un courrier de la direction départementale du travail de l'emploi et de la formation professionnelle de la Seine Saint-Denis en date du 9 septembre 2009 le nommant pour trois ans conseiller du salarié à compter du 1er septembre 2009, qu'il ne justifie pas avoir informé son employeur de cette nomination ; que le seul document établissant que l'employeur a été informé de ce statut est un mail d'un délégué syndical du 13 octobre 2009 envoyé à 21h51 ;

Qu'en conséquence, l'employeur n'était pas encore informé du statut protégé du salarié lors de l'envoi du courrier du 8 octobre 2009 le convoquant à un entretien préalable en vue d'une sanction pouvant aller jusqu'à un éventuel licenciement, fixé au 19 octobre à 17 heures, avec mise à pied conservatoire ;

Considérant que M. [O] a reçu un avertissement le 30 octobre 2009 en raison d'une attitude négative vis à vis de l'entreprise, de son manager et de l'équipe caractérisés par une mauvaise volonté à prendre en charge des tâches faisant partie de ses fonctions ou nécessaires au service, une négligence à traiter certaines tâches et une difficulté à prendre en compte des remarques relatives à son travail et une propension à reporter la responsabilité sur les autres ;

Considérant que le contrat de travail de M. [O] prévoyait qu'il était employé en qualité de gestionnaire de paie, qu'il était placé sous l'autorité et dans le cadre des instruction du responsable paie ou du responsable du SIRH ou de toute autre personne qui pourrait leur être substituée ; qu'à compter du 1er janvier 2009, il exerçait les fonctions d'administrateur du système d'information et de gestion des ressources humaines (SIRH), fonction qui figure sur ses bulletins de salaire ; qu'à compter de son retour dans l'entreprise après sa mise à pied, de nouvelles missions lui ont été attribuées consistant principalement en la réalisation de notes sur la législation en matière de durée du travail et la réalisation des cahiers des charges pour la modification du système de paie, qui ne rendaient plus nécessaire un accès au réseau SIRH ; qu'un nouveau bureau lui a été attribué au 7ème étage alors qu'il était précédemment situé au 5ème étage et qu'il n'avait plus accès au SIRH ;

Considérant que M. [O] ne démontre pas que ce changement de bureau constitue une dégradation de ses conditions matérielles de travail ; qu'il ne fournit aucune précision sur sa précédente installation ; que les photographies présentées au dossier montrent un bureau collectif dont tous les bureaux sont face au mur, que devant le bureau de M. [O] se trouve un fauteuil sur roulette pivotant identique aux fauteuils de ses collègues ;

Considérant que les nouvelles attributions de M. [O] sont compatibles avec la description de sa mission fixée par le contrat de travail, qu'il n'établit pas avoir refusé cette évolution de son profil de poste ; que son salaire a été maintenu ; que lui-même n'a pas considéré cette évolution comme une rétrogradation ; qu'il a certes adressé un message le 29 octobre 2009 à un représentant syndical l'informant d'un changement de bureau, d'une installation sur 'une chaise style chaise de cuisine' mais en lui recommandant de 'ne rien faire pour le moment sur cet état de fait' (en gras dans le texte), sollicitant le passage d'un inspecteur du travail et sa désignation en qualité de délégué syndical CFDT du département des Hauts de Seine, mais il n'a adressé aucun courrier à son employeur avant la lettre de prise d'acte ;

Considérant qu'il n'est pas discuté que M. [O] avait annoncé son intention de quitter l'entreprise le 20 novembre, ayant trouvé un nouvel emploi équivalent ; que le changement de bureau et la modification de sa mission n'ont duré que 20 jours ; que la circonstance qu'il n'ait pas protesté auprès de son employeur de l'évolution de sa mission, jointe à la circonstance de son prochain départ de l'entreprise pour un nouvel emploi évoqué lors d'un entretien avec la directrice des ressources humaines conduisent à considérer qu'il ne peut valablement affirmer que la poursuite de son contrat de travail a été rendue impossible du fait de l'employeur ;

Qu'il convient donc de confirmer la décision de première instance en ce qu'elle a requalifié la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en une démission du salarié et en ce qu'elle a condamné M. [O] à verser à la société Régie Linge Finances une indemnité compensatrice de préavis de 8 460 euros ;

Sur les heures supplémentaires :

Considérant que l'article L3121-10 du code du travail fixe la durée légale du travail effectif des salariés à 35 heures par semaine ;

Considérant que la qualité de cadre ne suffit pas à exclure le droit au paiement des heures supplémentaires sauf à constater l'existence d'un salaire forfaitaire compensant les dépassements d'horaires résultant de la fonction assurée ; qu'en l'espèce, l'article 4 du contrat de travail de M. [O] prévoyait que 'la durée du travail du salarié compte tenu de la nature et des responsabilités confiées ne saurait être prédéterminée'; qu'en l'absence de convention de forfait, le contrat ne dérogeait pas à la durée légale de travail hebdomadaire de 35 heures ;

Considérant qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, mais qu'il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;

Considérant que M. [O] réclame le versement de 7 781,17 euros à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires effectuées en 2008 et 2009 sur la base d'un tableau récapitulatif qu'il a lui-même réalisé ;

Que ce tableau récapitulatif fait apparaître le nombre d'heures supplémentaires effectuées pour les nécessités du services entre février 2008, date de l'embauche, et novembre 2009 qui indique précisément les horaires journaliers effectués et les absences pour congés payés ou pour RTT ; que ce tableau est suffisamment précis pour permettre à l'employeur de fournir ses propres éléments ; qu'il se contente de se prévaloir de ce que le salarié a bénéficié de RTT et n'apporte aucun élément pour contredire les éléments fournis ;

Que du tableau non utilement critiqué il résulte que le salarié a effectué au cours de l'année 2008, 212,75 heures supplémentaires et au cours de l'année 2009, 119,25 heures supplémentaires, soit au total 332 heures supplémentaires ;

Considérant que les heures supplémentaires peuvent faire l'objet de compensations sous forme de journées prises au titre de la réduction du temps de travail (RTT) ; que le tableau fait apparaître qu'en 2008, M. [O] a bénéficié de 13 jours de RTT soit une récupération de 104 heures et, en 2009, de 6 jours de RTT soit une récupération de 48 heures, si bien qu'il convient de déduire 152 heures des 332 heures supplémentaires ;

Qu'il convient donc, au vu des éléments produits aux débats, de condamner la société Régie Linge Finances à verser à M. [O] la somme de 4 183,20 euros au titre des heures supplémentaires et 418,32 euros de congés payés afférents ;

Sur les dépens et l'indemnité de procédure:

Considérant que la société régie Linges Finances a été condamnée à payer des heures supplémentaires qu'elle aurait dû payer ; qu'il convient de mettre à sa charge les dépens d'appel et de la condamner à verser à M. [O] une indemnité de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en compensation des frais de représentation exposés en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Infirme partiellement le jugement du le jugement du Conseil de Prud'hommes de Boulogne-Billancourt en date du 24 mai et statuant à nouveau,

Condamne la société Régie Linge Finances à verser à M. [S] [O] les sommes suivantes :

' 4 183,20 euros au titre des heures supplémentaires,

' 418,32 euros de congés payés afférents ;

Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal du jour de la saisine pour les créances à caractère salarial,

Confirme pour le surplus les dispositions non contraires du jugement entrepris,

Déboute les parties de toutes leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

Condamne la société Régie Linge Finances à verser à M. [O] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Régie Linge Finances à supporter les dépens de la procédure  d'appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Clotilde MAUGENDRE , président et Madame Marine GANDREAU , greffier en préaffectation.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 14/04422
Date de la décision : 12/10/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 17, arrêt n°14/04422 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-10-12;14.04422 ?
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