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12/10/2016 | FRANCE | N°14/03904

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 12 octobre 2016, 14/03904


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



19e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 12 OCTOBRE 2016



R.G. N° 14/03904



AFFAIRE :



Société BELEM TAXIS, ayant pour gérant M. [A] [K]



C/



[Z] [R]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 juillet 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE



N° RG : 10/03889





Copies

exécutoires délivrées à :



Me Christian CHARRIERE



Me Belaid MAZNI





Copies certifiées conformes délivrées à :



Société BELEM TAXIS, ayant pour gérant M. [A] [K]



[Z] [R]







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





LE DOUZ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 12 OCTOBRE 2016

R.G. N° 14/03904

AFFAIRE :

Société BELEM TAXIS, ayant pour gérant M. [A] [K]

C/

[Z] [R]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 juillet 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° RG : 10/03889

Copies exécutoires délivrées à :

Me Christian CHARRIERE

Me Belaid MAZNI

Copies certifiées conformes délivrées à :

Société BELEM TAXIS, ayant pour gérant M. [A] [K]

[Z] [R]

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DOUZE OCTOBRE DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Société BELEM TAXIS, ayant pour gérant M. [A] [K]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Christian CHARRIERE, avocat au barreau de VAL D'OISE, (vestiaire : 189)

APPELANTE

****************

Monsieur [Z] [R]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Assisté de Me Belaid MAZNI, avocat au barreau de PARIS, (vestiaire : D1654)

INTIMÉ

****************

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 juin 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Christine HERVIER, conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Claire GIRARD, Président,

Madame Marie-Christine HERVIER, Conseiller,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Arnaud DERRIEN,

FAITS ET PROCÉDURE :

Par contrat à durée indéterminée à effet du 16 août 1993, M. [Z] [R] a été engagé par la société Belem taxis en qualité de chauffeur moyennant une rémunération mensuelle brute dont la moyenne s'évalue de l'accord des parties à la somme de 925 €.

La convention collective applicable à la relation de travail est celle des taxis parisiens salariés.

Les parties indiquent que M. [R] est en arrêt de travail depuis le mois de janvier 2006 pour une maladie dont l'origine n'est pas professionnelle.

Le 3 novembre 2008, M. [R] a été déclaré inapte à la conduite d'un taxi par décision de la commission interdépartementale d'appel de Paris.

Un certificat médical du docteur [N], psychiatre, établi le 20 juillet 2009, mentionne que l'état de santé de son patient est incompatible avec la reprise de son activité de chauffeur de taxi.

Expliquant avoir été ni reclassé ni licencié malgré son inaptitude, M. [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre le 26 novembre 2010 afin d'obtenir la condamnation de l'employeur à lui verser des rappels de salaire et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par lettre recommandée du 25 mars 2011, la société Belem taxis a notifié à M. [R] qu'elle était dans l'impossibilité d'assurer son reclassement.

Par lettre recommandée datée du 3 mai 2011, M [R] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 11 mai 2011.

Par lettre recommandée du 18 mai 2011, M. [R] s'est vu notifier son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Au moment du licenciement la société employait au moins 11 salariés.

Par jugement rendu le 11 juillet 2014, le conseil de prud'hommes de Nanterre, section commerce, a :

- fixé le salaire de M. [R] à la somme mensuelle de 925 €,

- dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Belem taxis à payer à M. [R] les sommes de :

- 28'212,50 € à titre de rappel de salaire pour la période du 3 novembre 2008 au 18 mai 2011 outre 2 821,25 € au titre des congés payés y afférents,

- 5 550 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du jugement pour les dommages- intérêts et à compter du 25 mai 2011 pour les salaires,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la société Belem taxis aux dépens.

La société Belem taxis a régulièrement relevé appel du jugement le 7 août 2014 et l'affaire est venue pour plaider à l'audience du 6 janvier 2016.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives déposées à l'audience du 17 juin 2015, soutenues oralement à l'audience du 6 janvier 2016, la société Belem taxis priait la cour d'infirmer le jugement dans toutes ses dispositions, débouter M. [R] de l'ensemble de ses demandes et le condamner à lui payer la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions transmises le 21 mai 2015, soutenues oralement à l'audience du 6 janvier 2016, M. [R] demandait à la cour de :

- confirmer le jugement du chef des condamnations pour rappels de salaire et les congés payés y afférents et sur la requalification du licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- le réformer pour le surplus et condamner la société Belem taxis à lui verser avec intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la demande, les sommes de :

- 925 € pour inobservation de la procédure de licenciement,

- 18'500 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner l'employeur à lui verser la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 17 mars 2016, la cour constatant que le licenciement de M. [R] prononcé pour inaptitude alors que le médecin du travail ne s'est pas prononcé sur celle-ci et intervenant en cours de suspension du contrat de travail pour un motif autre que la faute grave ou l'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à l'accident ou la maladie en violation des dispositions de l'article L.1226-9 du code du travail, a soulevé d'office l'éventuelle nullité du licenciement et a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 29 juin 2016 pour recueillir les observations des parties.

La société Belem taxis n'a pas déposé de nouvelles conclusions.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 29 juin 2016, M. [R] demande à la cour de prononcer la nullité du licenciement et condamner la société à lui payer les sommes de :

- 925 € à titre d'indemnité pour inobservation de la procédure,

- 2 148 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 214 € au titre des congés payés y afférents,

- 28'212,50 € à titre de rappel de salaire sur la période courant du 3 novembre 2008 au 18 mai 2011,

- 2 821,25 € au titre des congés payés y afférents,

- 18'500 € à titre d'indemnité pour nullité du licenciement,

Il sollicite en outre que ces condamnations soient assorties des intérêts au taux légal depuis l'introduction de la demande, que la société Belem taxis soit condamnée à lui verser la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et qu'elle soit condamnée aux dépens.

SUR CE :

Sur la nullité du licenciement :

La lettre de licenciement fixant les limites du litige est rédigée dans les termes suivants :

« Monsieur,

Faisant suite à la convocation à un entretien préliminaire fixé au 10 mai 2011, nous vous confirmons votre licenciement compte tenu de votre inaptitude à la conduite d'un taxi et en raison de l'impossibilité de reclassement qui vous a été notifié par lettre du 22 mars 2011.

Le licenciement prend effet à la date de notification du présent licenciement.

Conformément à la loi vous percevrez une indemnité compensatrice d'un montant à celui de l'indemnité légale de préavis (code du travail Art L. 1266-14).

De même vous percevrez l'indemnité spéciale de licenciement égale au double de l'indemnité légale de licenciement (code du travail Art L. 1327-4)

Seront tenus à votre disposition au siège social votre certificat de travail, votre solde de tout compte, votre attestation ASSEDIC POLE EMPLOI.

Nous vous prions d'agréer, l'expression de nos salutations distinguées. »

Le licenciement intervient pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

La cour relève qu'aucune visite médicale de reprise n'étant intervenue, il n'a pas été mis fin à la suspension du contrat de travail découlant de la maladie du salarié. En effet ni l'avis de la commission interdépartementale d'appel déclarant l'intéressé inapte à la conduite d'un taxi ni le certificat médical du psychiatre suivant l'intéressé en date du 20 juillet 2009 ne constituent la visite de reprise que doit effectuer le médecin du travail en application de l'article L. 1226-2 du code du travail qui seule met fin à la suspension du contrat de travail.

Il ressort des dispositions combinées des articles L.1132-1, L.1132-4 et L.1226-2 du code du

travail qu'aucun salarié ne peut être licencié en raison de son état de santé sauf inaptitude constatée par le médecin du travail, toute disposition ou tout acte contraire étant nul de plein droit.

L'inaptitude de M [R] n'ayant pas été constatée par un médecin du travail, son licenciement est nul et la cour fera par conséquent droit à sa demande, le jugement étant infirmé sur ce point.

Sur les conséquences de la nullité du licenciement :

M. [R] ne sollicitant pas sa réintégration, il peut prétendre aux indemnités de rupture et à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement cette dernière étant au moins égale à celle prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail.

Compte tenu de l'ancienneté de M. [R] (plus de 17 ans), du montant de sa rémunération des six derniers mois (accord des parties sur une moyenne de 925 €), des circonstances de son licenciement, de ce qu'il justifie de sa situation actuelle, son préjudice sera intégralement réparé par l'allocation d'une somme de 12 000 €.

Les demandes relatives à l'indemnité compensatrice de préavis seront rejetées puisque l'employeur justifie en produisant le bulletin de salaire de M. [R] du mois de mai 2011 du versement de cette indemnité à hauteur de la somme de 2 148,92 €.

S'agissant de l'indemnité spéciale de licenciement, la demande sera également rejetée, l'employeur justifiant du versement de cette indemnité à hauteur de la somme de 7 879,30 €.

Sur les demandes de dommages-intérêts pour non paiement des salaires, M. [R] a précisé à l'audience que ses demandes en paiement de la somme de 28'212,50 € et des congés payés y afférents ne s'analysaient pas comme des demandes de rappels de salaire mais comme une demande de dommages-intérêts.

Le préjudice de M. [R] qui n'a plus perçu de salaires depuis plusieurs années mais ne justifie pas de ses revenus pour la période antérieure à 2014 sera suffisamment réparé par l'allocation d'une somme de 20 000 € à titre de dommages-intérêts.

S'agissant de l'irrégularité de la procédure, l'article L.1232-2 du code du travail dispose que l'employeur convoque le salarié à un entretien préalable à un licenciement qui ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre de convocation. En l'espèce, la lettre datée du 3 mai 2011 a été réceptionnée par le salarié le 10 mai 2011 mais présentée à une date qui ne figure pas sur la copie de l'accusé de réception communiqué aux débats. Le salarié ne rapportant pas la preuve de l'irrégularité de la procédure invoquée alors que la charge de la preuve de l'irrégularité alléguée pèse sur lui, sera débouté de sa demande, le jugement étant confirmé sur ce point.

Les intérêts au taux légal seront dus s'agissant de condamnations de nature indemnitaire à compter du prononcé de la décision.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

La décision entreprise sera confirmée sur ces points et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel seront mis à la charge de la société Belem taxis qui devra en outre indemniser M. [R] des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens à hauteur de la somme de 1 000 €.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe et par arrêt contradictoire,

Vu l'arrêt du 17 mars 2016,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté M. [R] de sa demande d'indemnité pour procédure irrégulière et condamné la société Belem taxis à payer à M. [R] la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

Prononce la nullité du licenciement,

Condamne la société Belem taxis à payer à M. [R] la somme de :

- 12'000 € à titre d'indemnité pour licenciement nul,

- 20'000 € à titre de dommages-intérêts pour non-paiement des salaires,

Rappelle que les condamnations de nature indemnitaire produisent intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Déboute M. [R] du surplus de ses demandes,

Condamne la société Belem taxis à payer à M. [R] la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Belem taxis aux dépens.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Claire GIRARD, président et par Mademoiselle Gaëlle POIRIER, greffier en pré affectation, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 14/03904
Date de la décision : 12/10/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 19, arrêt n°14/03904 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-10-12;14.03904 ?
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