COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
6e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 06 SEPTEMBRE 2016
R.G. N° 15/03722
AFFAIRE :
SNC ROUTIERE DE L'EST PARISIEN (REP)
C/
[M] [H]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Juillet 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY
Section : Commerce
N° RG : F 13/00302
Copies exécutoires délivrées à :
SCP PECHENARD & Associés
SELARL ALPHA LEGIS
Copies certifiées conformes délivrées à :
SNC ROUTIERE DE L'EST PARISIEN (REP)
[M] [H]
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SIX SEPTEMBRE DEUX MILLE SEIZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SNC ROUTIERE DE L'EST PARISIEN (REP)
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Annie ETIENNE de la SCP PECHENARD & Associés, avocat au barreau de PARIS
APPELANTE
****************
Monsieur [M] [H]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Comparant
Assisté de Me Michelle PIERRARD-SIMON de la SELARL ALPHA LEGIS, avocat au barreau de SAINT-MALO
INTIME
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue le 24 Mai 2016, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Catherine BÉZIO, président,
Madame Sylvie FÉTIZON, conseiller,
Madame Sylvie BORREL-ABENSUR, conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE
FAITS ET PROCÉDURE
La société ROUTIERE DE L'EST PARISIEN a été créée en 1961 par M. [Q] [U]. En 2009, le groupe VEOLIA a pris le contrôle de cette entreprise, exploitée sous le nom de SNC REP.
M. [M] [H] a travaillé de 1974 au 31 mars 2012 au sein de cette entreprise, date à laquelle il a fait valoir ses droits à la retraite. En dernier lieu, il exerçait le métier de conducteur de travaux routier niveau G2, catégorie ETAM.
Estimant que son employeur ne l'avait pas entièrement payé de son dû, lors de la réception du solde de tout compte, M. [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Montmorency lequel a rendu un jugement le 20 juillet 2015 qui a notamment condamné la société REP à lui verser les sommes de 28 956 euros au titre de la prime de départ 30 ans sur le fondement de l'indemnité [Q] [U] et 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, retenant comme dernier salaire , la somme de 5557 euros bruts.
La société REP a interjeté appel de cette décision devant la cour d'appel de Paris puis s'est désisté de son appel le 4 décembre 2015 pour porter ses demandes devant la cour d'appel de Versailles saisie à la même date que la cour d'appel de Paris le 18 août 2015.
Elle demande :
- que son appel soit déclaré recevable
- que la décision attaquée soit infirmée en ce qu'elle a considéré que la prime «' [Q] [U]'» avait valeur d'usage et l'avait ainsi condamné à verser un rappel de prime
- que la décision soit confirmée en ce qu'elle a débouté M. [H] de sa demande de complément d'indemnité de départ à la retraite
- que M. [H] soit condamné à lui restituer la somme de 1055,32 euros au titre du trop perçu d'indemnité de départ à la retraite
- que ce dernier soit condamné aussi à lui verser la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur [H] conclut à :
- l'irrecevabilité de l'appel interjeté par la société REP
- la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société SNC REP à lui verser la somme au titre de la prime de fidélité ou prime «' [Q] [U]'»
- la condamnation de la société appelante à lui verser la somme de 2721,05 euros à titre de solde d'indemnité conventionnelle de départ à la retraite à titre principal outre la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- à titre subsidiaire, ordonner la production des documents suivants (livre d'entrée et de sortie du personnel, dernière fiche de paie de M. [K] [E] portant paiement des indemnités de départ à la retraite réglées et la dernière fiche de paie portant règlement de ces mêmes indemnités, de chaque ETAM parti en retraite sur les années 2004 à 2008 inclus), ordonner la comparution personnelle de M. [P], ancien directeur des Ressources Humaines de la société REP.
Vu les conclusions régulièrement signifiées,
Vu l'audience du 24 mai 2016,
Vu l'article 455 du code de procédure civile,
SUR CE
Sur la recevabilité de l'appel interjeté
M. [H] soutient que l'appel interjeté par la société SNC ROUTIERE DE L'EST PARISIEN est irrecevable en ce que elle a déclaré se désister de son appel et que, par application de l'article 403 du code de procédure civile, le désistement emporte acquiescement du jugement. En outre, selon, l'article R 1452-6 du code du travail, le conseiller de la mise en état a constaté à la fois le désistement d'instance mais aussi le désistement d'action de l'appelante.
La société REP rétorque que, par erreur, appel a été interjeté à la fois devant la cour d'appel de Paris et devant la cour d'appel de Versailles le même jour et que, si le désistement d'appel vaut acquiescement au jugement attaqué, c'est à la condition qu'aucune réserve relative au second appel déjà formé devant une autre cour, s'agissant d'une erreur sur la compétence territoriale de la juridiction d'appel.
Il est constant que la société REP a interjeté appel le même jour soit le 18 août 2015 du jugement attaqué devant deux cours d'appels différentes (PARIS et VERSAILLES) et qu'elle s'est désistée de son appel interjeté auprès de la cour d'appel de Paris le 4 décembre 2015.
Il ressort de l'ordonnance du conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Paris que ce dernier a indiqué que la société REP s'était ainsi désistée de son instance et de son action.
L'article 403 du code de procédure civile prévoit que 'le désistement de l'appel emporte acquiescement au jugement. Il est non avenu si postérieurement, une autre partie interjette elle même régulièrement appel'.
Or, il ressort des pièces du dossier que la société REP a entendu limiter son désistement à l'instance initiale, seule, en raison d'une erreur sur la compétence territoriale de la juridiction d'appel, entendant soumettre son appel à la juridiction d'appel compétente. Ainsi, le désistement de la société REP devant la cour d'appel de Paris ne portait que sur l'instance engagée devant cette cour et n'emportait pas désistement d'action. Le principe de l'unicité de l'instance n'est pas opérant alors que la cour d'appel de Paris ne s'est pas prononcée sur le fond de l'affaire.
Au vu des ces éléments, l'appel interjeté devant la cour d'appel de Versailles est bien recevable.
Sur la prime de fidélité appelée prime [Q] [U]
M. [H] soutient qu'il devait bénéficier de cette prime s'élevant à 762 euros par année d'ancienneté, - la prime [Q] [U], du nom de son fondateur, constituant un usage au sein de l'entreprise jamais dénoncé et qui n'est pas tombé en désuétude.
La société REP s'oppose à ce versement de prime, faisant valoir que le salarié ne rapporte pas la preuve de cet usage c'est à dire que cette prime ait eu un caractère général, fixe et constant.
Il est constant que la prime dite [Q] [U], mise en place par ce dernier alors fondateur de la société ROUTIERE DE L'EST PARISIEN prévoit le versement de la somme de 762 euros par année d'ancienneté au départ du salarié, lorsque celui ci justifie d'une ancienneté d'au moins 15 ans.
La société REP reconnaît l'existence de cette prime d'après elle «' tombée en désuétude'»'ainsi qu'elle l'écrit le 29 févier 2012 à M. [H].
Cependant, l'ancien directeur des ressources humaines, M. [S], parti à la retraite en 2011 atteste dans des termes clairs et précis de l'existence de cette prime dans les conditions de versement ci dessus exposées, prime prévue par le fondateur de l'entreprise et qui n'est visée par aucun texte.
Pour justifier de l'existence d'un usage auprès d'autres salariés comme lui partis à la retraite, le salarié ne pouvait concrètement, disposer des noms de ses collègues déjà partis après 15 ans d'ancienneté au sein de l'entreprise rapportant ainsi la preuve du caractère général, fixe et constant du versement de cette prime. Au vu de l'attestation circonstanciée de l'ancien DRH de la société et du bulletin de paie de avril 2014 mentionnant une «' prime de fidélité'» de 23000 euros outre les écritures mêmes de la société appelante laquelle note l'existence d'une pratique régalienne [Q] [U] tombée en désuétude, il apparaît que cette prime créée par le fondateur de la société, aujourd'hui décédé, avait bien le caractère d'usage par sa constance, sa généralité et sa fixité sans que la société TEP se retranche derrière l'inexistence d'archives à ce sujet.
Par ailleurs, cette pratique n'a pas été dénoncée par la société qui a repris la société ROUTIERE DE L'EST PARISIEN. Enfin, la société appelante n'a pas donné suite au courrier officiel du conseil du salarié lequel a réclamé le 22 avril 2016 le livre d'entrée et de sortie du personnel afin de déterminer les salariés catégorie ETAM partis à la retraite qui ont bénéficié de cette prime outre la dernière feuille de paie d'un autre salarié de l'entreprise, M. [E], parti lui aussi à la retraite en 2004, privant ainsi M. [H], sans motif, de la possibilité d'obtenir d'autres éléments de preuve établissant la réalité de l'usage invoqué.
Au vu de ces éléments, la décision attaquée est confirmée et cette prime allouée dans son principe et son montant.
Sur le solde d'indemnité conventionnelle de départ à la retraite
M. [H] sollicite la somme à titre principal de 2721,05 euros au titre du solde de la prime conventionnelle de départ à la retraite.
La société REP s'oppose à cette demande, soulignant que M. [H] a bien été rempli de ses droits, le salarié ayant perçu la somme de 24437,72 euros bruts à ce titre.
Il ressort de la convention collective applicable ETAM que le salarié qui prend sa retraite à plus de 60 ans perçoit une indemnité de départ qui est calculée selon l'ancienneté du salarié en mois de rémunération selon un barème précis soit une prime de départ qui ne pouvait être supérieure à 5 mois de salaire.
Il ressort des éléments du dossier que le salarié a bien été rempli de ses droits concernant cette indemnité conventionnelle de départ puisqu'il a perçu plus de 5 mois de salaire soit le somme de 27 438,32 euros bruts et non la somme de 24 437,72 euros comme l'indique le salarié. Il est exact que la société REP a pris en compte, comme l'indiquent les premiers juges, dans le calcul du salaire moyen , la totalité des primes ayant un caractère annuel ou exceptionnel conformément aux dispositions de l'article R 1234-4 du code du travail. Ainsi, M. [H] est redevable du trop perçu à ce titre soit la somme de 1055,32 euros due à son ex employeur.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
Il est équitable de mettre à la charge de la société appelante le versement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur les dépens
La partie qui succombe doit supporter les entiers dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition et en dernier ressort,
Recoit l'appel formé par la société SNC REP ;
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
Ordonne la restitution par le salarié de la somme de 1055,32 euros au titre du trop perçu d'indemnité de départ à la société SNC REP ;
Condamne la société appelante à verser à M. [H] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Laisse les éventuels dépens à la charge de la société SNC REP.
- arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Sylvie BORREL-ABENSUR, conseiller en raison de l'empêchement de Catherine BÉZIO, président, et par madame Mélissa FABRE, greffier en pré-affectation, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER,P/Le PRESIDENT,