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01/09/2016 | FRANCE | N°15/04011

France | France, Cour d'appel de Versailles, 5e chambre, 01 septembre 2016, 15/04011


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 88B



5e Chambre







EW



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 01 SEPTEMBRE 2016



R.G. N° 15/04011



AFFAIRE :



SA SOCIETE PARISIENNE D'ETUDES D'INFORMATIQUE ET DE GESTION

C/

UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Juillet 2015 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale

de VERSAILLES

N° RG : 13-00322





Copies exécutoires délivrées à :



SCP PEROL RAYMOND KHANNA ET ASSOCIES



UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES



Copies...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 88B

5e Chambre

EW

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 01 SEPTEMBRE 2016

R.G. N° 15/04011

AFFAIRE :

SA SOCIETE PARISIENNE D'ETUDES D'INFORMATIQUE ET DE GESTION

C/

UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Juillet 2015 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VERSAILLES

N° RG : 13-00322

Copies exécutoires délivrées à :

SCP PEROL RAYMOND KHANNA ET ASSOCIES

UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES

Copies certifiées conformes délivrées à :

SA SOCIETE PARISIENNE D'ETUDES D'INFORMATIQUE ET DE GESTION

le :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE PREMIER SEPTEMBRE DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SA SOCIETE PARISIENNE D'ETUDES D'INFORMATIQUE ET DE GESTION

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Marie-Christine PEROL de la SCP PEROL RAYMOND KHANNA ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0312

APPELANTE

****************

UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par M. [R] [N] (Inspecteur du contentieux) en vertu d'un pouvoir général

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Juin 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Elisabeth WATRELOT, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Olivier FOURMY, Président,

Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller,

Madame Elisabeth WATRELOT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Jérémy GRAVIER,

FAITS ET PROCEDURE

L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (l'URSSAF) a effectué un contrôle au sein de la Société Parisienne d'Etudes d'informatique et de gestion (ci-après la société SPEIG), sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011.

Le 19 octobre 2012, les inspecteurs de l'URSSAF [Localité 3] adressaient à la société SPEIG, une lettre d'observations constatant des anomalies concernant six chefs de redressement qui se résument de la façon suivante :

. chef n°1 : Plafond temps partiel : abattement d'assiette plafonnée, montant réclamé :11.785 € ;

. chef n° 2 : Avantage en nature véhicule : principe et évaluation, montant réclamé : 38.940 € ;

. chef n° 3 : Prestations servies par l'entreprise en présence d'un comité d'entreprise, montant réclamé : 2.077 € ;

. chef n °4 : Frais professionnels non justifiés, montant réclamé : 2.571 € ;

. chef n° 5 : CSG/CRDS ' Rupture contrat de travail : limites d'exonération des indemnités de licenciement et assimilées, montant réclamé : 1.420 € ;

. chef n° 6 : Frais professionnels non justifiés ' restauration hors des locaux de l'entreprise : pas de redressement, observation pour l'avenir.

Au terme de cette lettre d'observations, un redressement était envisagé à hauteur de la somme de 56.793 euros. La société a répondu par lettre du 20 novembre 2012, acceptant de régler, sans discuter, la totalité des sommes réclamées au titre des chefs de redressement n° 1, 3, 4 et 5, mais contestant le bien fondé du redressement n° 2.

Le 27 novembre 2012, l'URSSAF maintenait l'ensemble des redressements et observations, prenant acte de l'accord de la société SPEIG SAS sur quatre chefs de redressements.

Le 12 décembre 2012, la société procédait au règlement de la somme de 17 853 euros, au titre des quatre chefs de redressement non critiqués.

Le 20 décembre 2012, l'URSSAF adressait à la société une mise en demeure d'avoir à payer la somme de 63 479 euros incluant les majorations de retard, puis une contrainte, datée du 6 février 2013, à hauteur de la somme totale de 45 626 euros, soit la somme de 56 793 euros au titre des cotisations, 6 686 euros au titre majorations, et déduction faite de la somme de 17 853 euros au titre du versement effectué le 12 décembre 2012.

Saisie le 18 janvier 2013 par la société SPEIG SAS d'une contestation du contrôle, de la mise en demeure et des chefs de redressement, la commission de recours amiable de l'URSSAF a rejeté le recours de la société SPEIG SAS, le 22 avril 2013.

Le 4 juillet 2013, la société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines qui, par jugement du 9 juillet 2015, a annulé la contrainte du 6 février 2013, signifiée par l'URSSAF, le 13 février 2013, déclaré régulière la procédure de contrôle opérée par les inspecteurs de l'URSSAF, a reçu l'URSSAF en sa demande reconventionnelle et a condamné la société SPEIG SAS à lui payer la somme de 38 381,56 euros, au titre de cotisations et 6 686 euros, au titre des majorations de retard, soit la somme totale de 45 067,56 euros.

La société a relevé appel de cette décision et les parties ont été convoquées à l'audience du 13 juin 2016.

Par conclusions déposées et soutenues à l'audience, la société SPEIG SAS demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a annulé la contrainte datée du 6 février 2013 ;

- infirmer le jugement sur le surplus ;

- la déclarer recevable et bien fondée en toutes ses demandes fins et conclusions ;

et statuant à nouveau :

- annuler le contrôle dont elle a fait l'objet et portant sur la période 2010-2011, la mise en demeure datée du 20 décembre 2012, ainsi que la contrainte du 6 février 2013, d'un montant total de 45 949,31€ .

- et condamner l'URSSAF Ile de France à lui rembourser la somme de 17 853 € augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date du versement partiel ainsi que de la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil .

- annuler la mise en demeure du 20 décembre 2012, pour non-respect du contradictoire et des droits de la défense, et des articles L.244-2 et suivants du Code de la Sécurité Sociale, et la contrainte du 6 février 2013 ;

- et condamner l'URSSAF Ile de France à lui rembourser la somme 17 853 € augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de ce versement partiel ainsi que de la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil ;

au fond,

- annuler tous les chefs de redressement ;

- et condamner l'URSSAF Ile de France à lui rembourser en deniers ou quittance la somme 17 853 € augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de ce versement partiel ainsi que de la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil ;

plus subsidiairement,

- réduire le chef de redressement n°2 concernant les avantages en nature véhicule à un total de 30 232 € ;

- réduire le chef de redressement n°4 relatif aux frais professionnels non justifiés à un total de 1 995 € ;

En tout état de cause,

- dire et juger que tant la contrainte que sa signification et la mise en demeure du 20 décembre 2012 sont irrégulières et les annuler ;

- débouter l'URSSAF Ile de France de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions ;

- et la condamner à lui rembourser la somme 17 853€, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de ce versement partiel ainsi que de la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil ;

- si la mise en demeure n'était pas annulée, déduire de son montant la somme versée de 17 853 €.

L'URSSAF Ile de France, venant aux droits de l'URSSAF [Localité 3], demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de débouter la société SPEIG SAS du surplus de ses demandes, fins et conclusions.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions et aux pièces déposées et soutenues oralement.

MOTIFS DE LA DÉCISION,

Sur l'irrégularité du contrôle et le non respect de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale

Sur la validité de l'avis de contrôle

La société SPEIG SAS fait valoir que l'avis de contrôle ne mentionne pas qu'il s'agissait en fait d'un contrôle concerté dans le cadre d'un plan d'action national de contrôle (PANC) qui a concerné la SPEIG mais aussi de nombreuses autres sociétés appartenant, comme elle, au groupe Colas, alors que ce contrôle est intervenu selon les dispositions classiques, si bien qu'il est irrégulier, fallacieux et trompeur et qu'il traduit un comportement déloyal puisqu'il ne respecte pas l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale et ne lui a pas permis de se faire conseiller utilement. La société demande donc l'annulation de ce contrôle ainsi que de la mise en demeure et de la contrainte qui en ont résulté.

L'URSSAF, s'appuyant sur des arrêts de la Cour de cassation, réplique qu'elle se devait d'adresser l'avis de contrôle sans autre mention particulière que celles prévues par les textes, que l'absence de tout renvoi au contrôle national concerté du groupe Colas n'est pas de nature à vicier la procédure et n'a pas empêché la société SPEIG SAS de faire valoir ses droits et d'exercer utilement sa défense.

L'article R.243-59, alinéas 1 et 2, du code de la sécurité sociale alinéa 1er, dans sa rédaction applicable à la présente espèce, est rédigé comme suit :

Tout contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 est précédé de l'envoi par l'organisme chargé du recouvrement des cotisations d'un avis adressé à l'employeur ou au travailleur indépendant par lettre recommandée avec accusé de réception, sauf dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 324-9 du code du travail. Cet avis mentionne qu'un document présentant au cotisant la procédure de contrôle et les droits dont il dispose pendant son déroulement et à son issue, tels qu'ils sont définis par le présent code, lui sera remis dès le début du contrôle et précise l'adresse électronique où ce document est consultable. Lorsque l'avis concerne un contrôle mentionné à l'article R. 243-59-3, il précise l'adresse électronique où ce document est consultable et indique qu'il est adressé au cotisant sur sa demande, le modèle de ce document, intitulé "Charte du cotisant contrôlé", est fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.

L'employeur ou le travailleur indépendant a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix. Il est fait mention de ce droit dans l'avis prévu à l'alinéa précédent.

Ce texte n'exige pas que l'avis de contrôle mentionne le cadre du contrôle envisagé et notamment le fait qu'il s'agit d'un contrôle concerté, comme l'appelante le soutient.

L'avis de contrôle adressé, le 27 avril 2012, à la société SPEIG SAS, en son établissement de [Localité 4], comporte toutes les mentions exigées par le code de la sécurité sociale et notamment la possibilité qu'a la société contrôlée de se faire assister au cours du contrôle par le conseil de son choix. L'appelante ne peut donc arguer d'un quelconque empêchement à se faire conseiller utilement. L'avis de contrôle est par conséquent régulier. La cour rejettera la demande formée à ce titre.

Sur la régularité de la lettre d'observations et de la réponse des contrôleurs

La société SPEIG SAS fait valoir que la lettre d'observations ne satisfait pas aux exigences de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale et de la jurisprudence constante qui en a découlé, qu'ainsi, elle ne comporte pas tous les textes sur lesquels se fondent tous les chefs de redressements, notamment pour les chefs n° 2 et 4, elle ne mentionne pas le mode de calcul des redressements envisagés, elle n'indique pas, pour chaque redressement, le nombre de salariés, le montant des rémunérations réintégrées et le taux de cotisations appliqué et elle montre un recours irrégulier à l'évaluation forfaitaire assimilable ici à une taxation forfaitaire, contraire à l'article R.242-5 du code de la sécurité sociale qui ne l'autorise qu'en cas d'absence ou insuffisance de comptabilité, ce qui n'était pas le cas. Enfin elle estime que la lettre établie par les inspecteurs le 27 novembre 2012 ne constitue pas une véritable réponse à ses propres observations dès lors qu'elle n'est qu'un résumé de la lettre d'observations.

L'URSSAF qui estime que la lettre d'observations comporte les mentions exigées par l'article R.243-59 à peine de nullité, répond, en outre, que la lettre d'observations doit indiquer l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée, la date de fin des opérations, les observations faites au cours du contrôle, la nature, le mode de calcul et le montant des redressements envisagés, rien n'obligeant les inspecteurs à donner des indications détaillées sur chacun des chefs de redressement, sur le mode de calcul appliqué pour les évaluer et sur le montant des redressements pour chaque salarié. Elle ajoute que la réponse des inspecteurs a été particulièrement motivée et qu'en conséquence, les règles relatives aux principe du contradictoire de la procédure et aux droits de la défense ont été respectées.

L'article R. 243-59, alinéas 5, 6 et 7, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la présente espèce, est rédigé comme suit :

A l'issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements envisagés. Le cas échéant, il mentionne les motifs qui conduisent à ne pas retenir la bonne foi de l'employeur ou du travailleur indépendant. Ce constat d'absence de bonne foi est contresigné par le directeur de l'organisme chargé du recouvrement. Il indique également au cotisant qu'il dispose d'un délai de trente jours pour répondre par lettre recommandée avec accusé de réception, à ces observations et qu'il a, pour ce faire, la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix.

En l'absence de réponse de l'employeur ou du travailleur indépendant dans le délai de trente jours, l'organisme de recouvrement peut engager la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement.

Lorsque l'employeur ou le travailleur indépendant a répondu aux observations avant la fin du délai imparti, la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement ne peut intervenir avant l'expiration de ce délai et avant qu'il ait été répondu par l'inspecteur du recouvrement aux observations de l'employeur ou du travailleur indépendant [...].

La cour constate que dans leur lettre d'observations du 19 octobre 2012, les inspecteurs du recouvrement ont pris le soin de préciser, chef de redressement par chef de redressement, les textes applicables, la nature du redressement envisagé, les assiettes et le montant du redressement par année et le cas échéant, les taux de cotisation appliqués. Les noms des salariés concernés par le chef de redressement n° 1 sont également indiqués. Par ailleurs, est joint, en annexe n°1, un tableau récapitulant, au titre du chef de redressement n°2, chaque véhicule, son immatriculation et son conducteur.

Enfin, la cour observe que les modes de calcul de chaque chef de redressement sont suffisamment précis et détaillés pour être connus et vérifiés par la société SPEIG SAS. En effet, pour les chefs de redressement n°1, le mode de calcul du salaire à temps plein et du plafond réduit est expliqué, et les bases figurent dans deux tableaux récapitulatifs reprenant le montant dû pour chaque salarié concerné suivi d'un tableau mentionnant les cotisations et contributions recouvrées. De même, au titre du chef de redressement n°2, le mode de calcul de l'avantage en nature est développé, le taux retenu est précisé ainsi que les bases de calcul qui sont en outre détaillées dans l'annexe n°1 qui y est jointe. Par ailleurs, plusieurs tableaux récapitulent les calculs des cotisations réclamées et sont insérés dans la lettre d'observation (chefs de redressement n° 3, 4 et 5). Pour ce qui concerne le chef de redressement n°6, aucun calcul n'a été fait s'agissant seulement d'une invitation de l'employeur à se mettre en conformité.

Quant à la réponse des inspecteurs de l'URSSAF en date du 27 novembre 2012, la cour estime qu'elle est motivée et argumentée et qu'elle répond avec précision à bon nombre des observations formulées par la société SPEIG SAS.

Dans ces conditions, le contrôle et la lettre d'observations apparaissent réguliers en la forme.

Sur la nullité de forme de la mise en demeure

La société SPEIG SAS soutient à cet égard que la mise en demeure du 17 décembre 2012 est inexistante, ce qui a fait renoncer l'URSSAF au bénéfice de la contrainte, et que celle du 20 décembre 2012 est nulle et de nul effet, étant insuffisamment motivée. Elle ne précise pas la date jusqu'à laquelle les versements effectués ont été pris en compte et son montant est erroné. Elle ne mentionne pas le nombre de salariés concernés. Elle se fonde sur des observations insuffisantes, comme expliqué ci-dessus et ainsi, elle ne respecte pas l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, ni l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale ni les lois des 11 juillet 1979 et du 12 avril 2000.

L'URSSAF précise qu'elle n'a pas relevé appel de la décision qui a annulé la contrainte du 6 février 2013. Elle fait valoir que la mise en demeure du 20 décembre 2012 a permis à la société SPEIG SAS d'avoir parfaitement connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de ses obligations par les indications combinées de la mise en demeure et de la lettre d'observations à laquelle elle se référait et qui lui avait été également notifiées.

La cour constate que l'intimée ne remet pas en cause les dispositions du jugement entrepris en ce que les premiers juges ont annulé la contrainte du 6 février 2013. En revanche, l'URSSAF ayant formé une demande reconventionnelle en paiement de la somme redressée sur la base de la mise en demeure du 20 décembre 2012, la validité de celle-ci doit être examinée.

Il résulte des dispositions de l'article R. 244-1 du code de la sécurité sociale que la mise en demeure envoyée par l'organisme de recouvrement, et prévue par l'article L. 244-2 du même code, doit préciser la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.

La mise en demeure datée du 20 décembre 2012, qui fait expressément référence à la lettre d'observations dont la régularité vient d'être reconnue, répond aux exigences du code de la sécurité sociale en ce qu'elle précise suffisamment la cause, la nature, le montant des sommes réclamées et les périodes concernées. Comme le tribunal l'a relevé exactement, ces mentions et la référence à la lettre d'observation permettent à la société d'avoir connaissance de l'étendue de ses obligations, de sorte qu'elles respectent le droit à un procès équitable dont le principe a été posé par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.

Cette mise en demeure et la procédure de contrôle qui l'a précédée sont ainsi régulières en la forme. Le jugement entrepris sera confirmé à cet égard.

Sur le fond

En premier lieu, la société SPEIG SAS critique le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable sa contestation des chefs de redressement n°1, 3, 4 et 5, faute d'en avoir saisi préalablement la commission de recours amiable, alors qu'elle précise avoir clairement contesté devant la commission de recours amiable tous les chefs de redressement et en avoir demandé l'annulation.

L'URSSAF soulève, comme en première instance, l'irrecevabilité de la contestation de la société SPEIG SAS concernant les chefs de redressement n° 1, 3, 4 et 5, faute d'avoir été soumis à la commission de recours amiable. Elle rappelle que la société SPEIG SAS a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de deux recours : le premier concernant la contestation de la décision de la commission de recours amiable et le second, une opposition à contrainte. Elle relève que la commission n'a été saisie que de la contestation au fond du chef de redressement relatif à l'avantage en nature véhicule et la contrainte a été établie pour les seules sommes contestées non réglées, à savoir les sommes correspondant à ce même chef de redressement.

Le 18 janvier 2013, la société SPEIG SAS a saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF [Localité 3] d'une contestation portant sur l'intégralité du redressement et sur la mise en demeure avec la précision ' que sa validité est contestée de même que tous les chefs de redressement '. Il est vrai que par les développements qui suivent, la société ne discute que le chef de redressement n°2. Cependant, même en l'absence de motivation des autres chefs de redressement, la commission de recours amiable se trouvait saisie de l'ensemble de la contestation. La contestation de tous les chefs de redressement portée ensuite devant le tribunal des affaires de sécurité sociale était donc recevable.

Cependant, devant la cour, la société SPEIG SAS adopte la même défense que devant la commission de recours amiable puis devant le tribunal des affaires de sécurité sociale : elle ne soutient aucun argument à l'appui de sa contestation des chefs de redressement n° 1, 3, 4 et 5, se limitant à en demander l'annulation, au motif qu'ils ne seraient pas fondés sur de véritables constatations et sont injustifiés au regard des textes applicables, sans articuler le moindre moyen de droit à l'appui de sa constestation ni viser aucune des 26 pièces produites par elle.

Au terme de sa lettre d'observations qui a précisé, pour chaque chef de redressement, les textes visés, les documents consultés qui lui ont permis de relever les anomalies constatées, ainsi que l'exposé des faits de façon circonstanciée et l'analyse de chaque situation, l'URSSAF a justifié du bien fondé de chacun des redressements opérés. Par conséquent, la cour rejettera la demande d'annulation formée par la société SPEIG SAS au titre de ces quatre redressements.

Reste le redressement n°2 relatif à l'avantage en nature véhicule retenu par L'URSSAF.

La société SPEIG SAS explique que l'Association des Utilisateurs de Véhicules (l'AUV ci-après) a été créée par des salariés de la société COLAS SA dont elle est une filiale, afin d'optimiser leur utilisation d'un véhicule qu'elle met à leur disposition à des fins personnelles et professionnelles, ces derniers versant, en contrepartie, une cotisation annuelle dont le montant est fonction de la puissance fiscale dudit véhicule. Les ressources de l'association sont constituées des remboursements par les entreprises employeurs des frais d'utilisation professionnelle des véhicules, selon le kilométrage déclaré mensuellement par les adhérents et facturé à la société SPEIG SAS selon les barêmes publiés par l'administration fiscale. La carte de carburant évoquée par l'URSSAF est fournie par l'AUV et non par la société qui ne règle donc pas les factures de carburant. Elle indique que l'association loue ou achète les véhicules à des organismes tiers, ceux-ci n'appartenant donc ni aux adhérents ni à elle-même et que rien n'interdit que l'association accueille des adhérents issus d'autres horizons, dès lors qu'ils règlent leur cotisation.

L'URSSAF rappelle que les cadres qui utilisent un véhicule mis à leur disposition par l'AUV pour leurs déplacements professionnels, peuvent en disposer à titre permanent, à des fins personnelles aussi, et sans limitation, de sorte que l'économie réalisée par ces salariés constitue incontestablement un avantage en nature opéré en considération de l'appartenance du salarié à l'entreprise et qui aurait dû être intégré par l'employeur dans l'assiette des cotisations sociales. Elle note que la société SPEIG SAS effectue auprès de l'administration fiscale une déclaration TVTS pour le paiement de la taxe sur les véhicules de tourisme, se considérant ainsi comme principale utilisatrice des véhicules appartenant à l'AUV et mis à la disposition de ses salariés. L'éventuelle participation des salariés aux frais de voiture ne pourrait que minorer à due concurrence la valeur de l'avantage en nature. Elle estime que les salariés n'engagent aucun frais supplémentaire pour l'utilisation professionnelle de leur véhicule, qu'ils bénéficient d'une carte essence et ne font aucune avance de frais si bien que les sommes versées par la société SPEIG SAS sont improprement qualifiées par elle de 'remboursement de frais' alors qu'elles correspondent uniquement à l'allocation d'un budget de fonctionnement à l'AUV, sans lequel l'association n'aurait pu perdurer dans le temps. Elle conteste enfin le fait que les utilisateurs des véhicules mis à disposition n'appartiennent pas nécessairement aux sociétés du groupe COLAS.

Sur le principe, il convient de rappeler qu'un avantage en nature doit être pris en compte au titre de la rémunération, au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, quand bien même il aurait été versé ou fourni par un tiers, dès lors que cet octroi est fourni en considération de l'appartenance du salarié à l'entreprise concernée.

La cour observe que les statuts de l'AUV indiquent qu'elle a pour objet « dans un but de solidarité, de défendre les intérêts de ses adhérents dans les rapports qu'ils entretiennent avec leurs employeurs ou avec quelconque tiers et concernant l'utilisation professionnelle des véhicules qu'ils possèdent ou dont ils se sont assurés la disposition ».

L'article 5 des statuts précise que « des cotisations pourront être versées par les membres à première demande des administrateurs. En outre, les ressources de l'Association seront constituées par l'ensemble des remboursements de frais, qui seront versés par les entreprises ou sociétés qui emploient des utilisateurs de véhicules, chaque fois que ces véhicules seront utilisés pour les besoins de leur travail. A l'aide de ces ressources, l'Association fera son affaire, pour le compte de ses adhérents, des règlements de factures de location et des différents factures d'entretien et de réparation concernant les véhicules de ses membres ».

La seule lecture de ces articles tend à indiquer que les salariés membres de l'AUV peuvent bénéficier, dans des conditions extrêmement privilégiées, grâce à leurs employeurs, de véhicules qu'ils peuvent utiliser à des fins autres que professionnelles et par conséquent pour leurs déplacements personnels, sans aucune limitation. Il est soutenu que les cotisations sont fixées selon la puissance fiscale du véhicule, cependant aucun document ne permet à la cour de le vérifier. Seule est fournie, à cet égard, la liste des salariés de la société SPEIG SAS sociétaires de l'AUV en 2010 dont il résulte que le montant des cotisations annuelles dues était alors compris entre 485 euros et 1656 euros, ce qui est bien loin du coût d'une location longue durée, ou du remboursement d'un prêt, pour l'achat d'un véhicule de la catégorie correspondante.

La cour constate également que la société SPEIG SAS ne peut fournir aucun exemple de membre d'AUV qui ne serait pas salarié du Groupe Colas ni ne peut contester que l'AUV, pour pouvoir survivre, devait recevoir de la société Colas ou de la société SPEIG SAS, sous une forme ou sous une autre, des subventions, le cumul de la contribution du salarié et des indemnités kilométriques, au sens strict, versées par la société, ne pouvant suffire à couvrir les charges de l'association.

D'ailleurs la société effectue une déclaration relative à la taxe sur les véhicules de tourisme (TVTS) et paie cette taxe à hauteur de 50% du parc automobile considéré.

Le règlement intérieur produit par la société SPEIG SAS fait ressortir, en outre, que le salarié dispose d'une carte de carburant, fournie par l'AUV, mais il n'est précisé ni justifié par qui sont réglés les frais de carburant y afférents.

Surtout, si la société SPEIG SAS fournit le détail des kilomètres déclarés par ses salariés pour l'année 2011 ainsi que les diverses factures acquittées qui lui ont été adressées par l'AUV, sur la base des kilomètres déclarés, et qu'elle justifie du paiement effectif des cotisations par les adhérents, force est de constater qu'aucun document ne permet de vérifier le paiement effectif à l'AUV par les salariés concernés du carburant consommé dans le cadre de l'utilisation personnelle du véhicule mis à leur disposition ni des frais engendrés par cet usage en dehors du cadre professionnel et que rien n'est prévu à cet effet ni dans les statuts ni dans le règlement intérieur de l'association.

Ainsi, la cour en déduit que les cadres adhérents à l'association bénéficient de l'avantage résultant de la prise en charge par la société du véhicule qu'ils utilisent de façon permanente et illimitée.

Dès lors qu'il n'est pas contesté que l'URSSAF déduit de cet avantage le montant de la contribution de chaque salarié, le redressement opéré est fondé dans son principe.

La société SPEIG SAS demande à titre subsidiaire de réduire les sommes réclamées au titre du chef de redressement n°2 à la somme de 30 232 euros, au titre du chef de redressement n° 4 à la somme de 1 995 euros et d'annuler purement et simplement le chef de redressement n°3, aucun texte n'étant visé au titre des cotisations et contributions réclamées.

La société ne justifiant par aucun élément les nouveaux calculs qu'elle propose, rien ne permet qu'il soit fait droit à sa demande de modification des sommes réclamées au titre des redressements n° 2 et 4. Pour ce qui concerne le chef de redressement n°3, l'URSSAF vise l'instruction ministérielle du 17 avril 1985 qui est relative à la définition des prestations servies par les comités d'entreprise et susceptibles d'être comprises dans l'assiette des cotisations sociales et l'article R.432-2 du code de la sécurité sociale. Il n'y a donc pas lieu de l'annuler.

Au total, la cour estime que le contrôle opéré par l'URSSAF et la mise en demeure du 20 décembre 2012 sont réguliers en la forme et bien fondés et confirmera donc le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, par décision contradictoire,

Infirme le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de la société SPEIG au titre des chefs de redressement n° 1, 3, 4 et 5 ;

Et statuant à nouveau à cet égard,

Déclare la société SPEIG SAS recevable en sa contestation des chefs de redressement n° 1, 3, 4 et 5, mais l'en dit mal fondée ;

Confirme le jugement entrepris pour le surplus ;

Rappelle que la présente procédure est exempte de dépens.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Madame Hélène Avon, adjointe faisant fonction de greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 15/04011
Date de la décision : 01/09/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 05, arrêt n°15/04011 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-09-01;15.04011 ?
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