COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
5e Chambre
Renvoi après cassation
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 01 SEPTEMBRE 2016
R.G. N° 15/02736
AFFAIRE :
[F] [Y]
C/
SA AXA FRANCE VIE
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Octobre 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE
N° Section : E
N° RG : F 09/01072
Copies exécutoires délivrées à :
SELARL RACINE
SELARL CAPSTAN LMS
Copies certifiées conformes délivrées à :
[F] [Y]
SA AXA FRANCE VIE,
SA AXA FRANCE IARD,
GIE AXA FRANCE
le :
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE PREMIER SEPTEMBRE DEUX MILLE SEIZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
DEMANDERESSE ayant saisi la cour d'appel de Versailles par déclaration enregistrée au greffe social le 22 juin 2015 en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation du 20 mai 2015 cassant et annulant l'arrêt rendu le 15 janvier 2013 par la cour d'appel de VERSAILLES
Madame [F] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Alain MENARD de la SELARL RACINE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0301 - N° du dossier 10802762
****************
DEFENDERESSES DEVANT LA COUR DE RENVOI
SA AXA FRANCE VIE
N° SIRET : 310 499 959
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentée par Me Antoine SAPPIN de la SELARL CAPSTAN LMS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0020, Me Audrey BELMONT de la SCP CAPSTAN LMS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K020
SA AXA FRANCE IARD
N° SIRET : 722 057 460
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentée par Me Antoine SAPPIN de la SELARL CAPSTAN LMS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0020, Me Audrey BELMONT de la SCP CAPSTAN LMS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K020
GIE AXA FRANCE
N° SIRET : 310 499 959
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentée par Me Antoine SAPPIN de la SELARL CAPSTAN LMS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0020, Me Audrey BELMONT de la SCP CAPSTAN LMS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K020
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 09 Juin 2016, devant la cour composée de :
Monsieur Olivier FOURMY, Président,
Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller,
Madame Elisabeth WATRELOT, Conseiller,
et que ces mêmes magistrats en ont délibéré conformément à la loi, dans l'affaire,
Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT
FAITS ET PROCÉDURE
Le 13 février 1992, Mme [Y] a été engagée par la société UNI EUROPE en contrat à durée indéterminée, à effet du 17 février suivant, sur le poste de support technique central à la direction informatique. A la suite d'une fusion absorption, le contrat de Mme [Y] sera transféré au sein de la société Axa Courtage.
Il convient de préciser d'emblée que 'Axa', l'employeur de Mme [Y], comprend trois entités distinctes : le groupement d'intérêt économique Axa France (GIE) ; la société Axa France Iard SA ; la société Axa France Vie SA.
Le 1er septembre 2001, le contrat de Mme [Y] évolue en temps partiel à 80%.
Le 03 juin 2003, Mme [Y] est mutée au poste d'acheteur au département achats, administration et support du GIE, poste évalué en classe 6 et assorti d'une période d'adaptation de 12 mois.
Le 1er décembre 2007, Mme [Y] se voit confier la mission de responsable de la sous-direction de l'entité achat informatique. Ce poste, alors en classe 6, est placé sous l'autorité directe de M. [B].
Ce poste évoluera de la classe 6 à la classe 7 lors d'une réunion de direction en avril 2008.
Le 3 juillet 2008, l'employeur propose à Mme [Y] une période d'adaptation de six mois en tant que manager de classe 7.
Au terme de cette période d'adaptation, le 16 décembre 2008, Mme [Y] n'est pas confirmée sur ce poste par son employeur. Ce dernier propose à Mme [Y] une nouvelle période d'adaptation de 6 mois, qu'elle refuse, et deux postes, tous deux de classe 6, qu'elle refuse également.
Le 23 février 2009, Mme [Y] prend acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur.
Le 30 mars 2009, Mme [Y] saisit le conseil des prud'hommes de Nanterre (CPH) afin de faire reconnaître que la prise d'acte de rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur était bien fondée, que son employeur a violé le principe 'à travail égal, salaire égal'et de faire condamner solidairement les sociétés Axa France, Axa France IARD et le GIE Axa France à lui payer des indemnités de rupture, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que des dommages-intérêts au titre de la discrimination salariale.
Par jugement rendu le 11 octobre 2011, le conseil des prud'hommes de Nanterre a débouté Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes et a qualifié de démission la prise d'acte de rupture du contrat de travail.
Par arrêt en date du 15 janvier 2013, la cour d'appel de Versailles autrement composée, a confirmé le jugement de première instance en ce qui concerne la qualification de la prise d'acte de rupture du contrat de travail en démission. La cour a condamné solidairement les sociétés Axa France VIE et Axa France IARD à verser à Mme [Y] la somme de 12.574,04 euros brut de rappel de salaires, pour la période du 1er décembre 2007 au 24 février 2009, au titre de la discrimination salariale et débouté Mme [Y] du surplus de ses demandes.
Mme [Y] a formé un pourvoi et, par arrêt du 20 mai 2015, la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu par la cour d'appel de Versailles et renvoyé les parties devant la cour de céans autrement composée, dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt.
Mme [Y], par ses conclusions écrites et soutenues oralement, demande ainsi à la cour d'infirmer le jugement du 11 octobre 2011 du CPH ; de dire et juger que sa prise d'acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur est bien fondée et doit avoir les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; de dire et juger qu'elle a été victime d'une inégalité de traitement.
Mme [Y] sollicite la Cour de condamner les sociétés intimées à payer les sommes suivantes :
- 14.220 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et celle de 1.422 euros bruts au titre des congés payés afférents ;
- 49.809,87 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
- 140.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- un rappel de salaire à hauteur de 98.449,20 euros ;
- une somme de 7.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [Y] demande en outre à la cour de condamner les sociétés intimées, sous astreintes de 100 euros par jour de retard, à lui remettre des bulletins de salaire et l'attestation destinée au Pôle Emploi, conformes à la décision à intervenir.
Axa France (les sociétés Axa France IARD SA et Axa France Vie SA), par conclusions écrites et soutenues oralement, demande à la cour :
- à titre liminaire de déclarer irrecevables les demandes de Mme [Y] à l'égard du GIE Axa France ;
- à titre principal de confirmer le jugement du CPH en tout point et par conséquent de débouter Mme [Y] de l'intégralité de ses demandes et de la condamner aux dépens ainsi qu'à verser à Axa France la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 ;
- à titre subsidiaire, d'apprécier le préjudice allégué par Mme [Y] au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse dans de bien plus justes proportions et de limiter le rappel de salaires éventuellement dû à Mme [Y] sur la période du 1er décembre 2007 au 24 février 2009.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions et aux pièces déposées ou soutenues à l'audience.
MOTIFS
Sur la mise hors de cause du GIE
La cour ne peut que constater que la situation juridique des entités du groupe Axa ne peut qu'apparaître complexe car, outre que nombre des entités sont domiciliés à la même adresse (la '[Adresse 3]'), les documents qui ont pu être adressés à Mme [Y], les intitulés de ses fonctions et les différentes expressions utilisées dans les correspondances versées au dossier utilisent des termes différents pour qualifier l'employeur ou les interlocuteurs de Mme [Y].
Ainsi, l'employeur de Mme [Y] tel qu'il apparaît dans l'avenant au contrat de travail du 10 septembre 2001 est « AXA FRANCE ASSURANCE », dans la lettre d'affectation au poste d'acheteur, « AXA France » et l'employeur sur les bulletins de salaires est « AXA France IARD / VIE ».
Les conclusions d'Axa, aux termes desquelles la « société AXA France IARD/VIE » n'existe pas apparaissent ainsi quelque peu inutilement péremptoires.
Cette situation est éminemment regrettable pour les salariés, qui éprouvent des difficultés à identifier l'entité juridique qui est leur employeur.
Cette situation résulte de ce que, comme l'explique le conseil d'Axa, les sociétés Axa France IARD SA et Axa France Vie SA constituent une entité économique et sociale et « ont la qualité de coemployeur à l'égard du personnel, dont Mme [Y] ».
Le conseil d'Axa avait pris, en 2010, des conclusions d'irrecevabilité afin que Mme [Y] régularise la procédure à l'encontre des sociétés Axa France IARD SA et AXA France Vie SA.
La cour mettra le GIE Axa France est hors de la cause.
Sur le fond
Il convient tout d'abord de rappeler que, le 28 juin 1999, un accord collectif a été signé au sein d'Axa, sur la mise en 'uvre et le suivi des classifications, dont l'article 6-2 prévoit que la mesure individuelle associée à un changement de classe et de fonction ne peut intervenir qu'au terme d'une période d'adaptation permettant à l'entreprise et au salarié d'avoir le recul suffisant ; que le litige entre les parties trouve son origine dans la double circonstance que Mme [Y] a été nommée par Axa sur un poste de classe 6 en décembre 2007, qu'en avril 2008 le comité d'évaluation a décidé de placer ce poste en classe 7 et que le 3 juillet 2008, soit huit mois après la prise de poste par Mme [Y], Axa a décidé que celle-ci devrait connaître une période d'adaptation aux fonctions de manager de classe 7 ; qu'à l'issue de cette première période, Axa a considéré que Mme [Y] devait être soumise à une seconde période d'adaptation, ce qu'elle a refusé, qu'il lui a alors été proposé deux postes de classe 6, qu'elle a également refusés.
La Cour de cassation a statué dans les termes suivants :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 6-2 de l'accord collectif de groupe Axa en date du 28 juin 1999 sur la mise en 'uvre et le suivi des classifications ;
Attendu, selon ce texte, que la mesure individuelle associée à un changement de classe et de fonction ne peut intervenir qu'au terme d'une période d'adaptation permettant à l'entreprise et au salarié d'avoir le recul suffisant ; qu'il sera pris en compte l'adaptation à la nouvelle fonction et la performance individuelle atteinte ;
Attendu que pour dire que la prise d'acte de la rupture produisait les effets d'une démission et rejeter la demande de la salariée tendant à voir condamner solidairement les sociétés Axa France vie et la société Axa France IARD à lui payer des sommes à titre d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient qu'un accord collectif de groupe a été conclu le 28 juin 1999 portant sur la mise en 'uvre et le suivi des classifications ; que la salariée ne discute pas véritablement l'application de cet accord collectif qui a eu vocation à être mis en 'uvre en l'espèce dès lors que le poste qu'elle occupait a été réévalué de classe 6 en classe 7, comme le prévoit l'article 6.2 cité ci-dessus ; que dès lors la salariée ne peut pas utilement soutenir qu'elle occupait déjà ce poste précédemment puisque la décision de changement de classe prise par le comité d'évaluation est intervenue au mois d'avril 2008, plusieurs mois après qu'elle avait commencé à occuper ce poste ; qu'en outre cet article 6.2 énonce que cette période d'adaptation y compris dans le cas de réévaluation de classe est impérative et s'impose tant à l'employeur qu'au salarié, seule sa durée est réduite de douze à six mois ; qu'il n'est donc pas démontré que la période d'adaptation a été imposée unilatéralement par l'employeur ; qu'en raison de dispositions conventionnelles impératives qui s'imposaient à toutes les parties au contrat de travail, la salariée échoue également à démontrer que cette période probatoire était illégale ; que l'employeur en lui adressant la lettre du 3 juillet 2008 l'informant qu'elle serait confirmée dans sa nouvelle fonction d'expert manager à l'issue de cette période probatoire suite à l'évaluation de son poste en classe 7, s'est donc conformé à l'accord collectif précité ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la mesure individuelle visée par l'article 6-2 de l'accord collectif du 28 juin 1999 suppose l'existence d'un changement à la fois de poste et de classe, la cour d'appel, qui a constaté que la notification par l'employeur à la salariée d'une période probatoire était intervenue le 3 juillet 2008, soit à une époque nettement postérieure à l'occupation du nouveau poste depuis le 1er décembre 2007 suivie d'un changement de classe survenu en avril 2008, a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen :
Vu le principe d'égalité de traitement ;
Attendu que pour limiter à une certaine somme le rappel de salaire dû au titre de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement pour la période du 1er décembre 2007 au 24 février 2009, l'arrêt retient que si l'employeur peut justifier la différence de rémunération par le niveau des performances atteint, il lui appartient de justifier des augmentations intervenues dont il fait état y compris au titre de la rémunération de base, que c'est le cas pour Mme [S], les sociétés prouvant qu'une augmentation de 7 747 euros était intervenue sur la rémunération annuelle de façon rétroactive à partir du 1er janvier 2008 ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans préciser quels éléments objectifs et pertinents permettaient de justifier la différence de traitement dont elle constatait l'existence, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 janvier 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée (')
Sur la prise d'acte
Axa fait notamment valoir que c'est le départ, le 1er décembre 2007, de M. [T], responsable de la direction 'Achats-Frais généraux', supérieur de Mme [Y], directeur 'Achats informatiques' qui a entraîné le rattachement direct de Mme [Y] à M. [B], directeur des achats et sous-entend par-là que le poste de Mme [Y] n'aurait pas été, de ce seul fait, modifié.
Mais la cour ne peut que constater que les organigrammes fournis par Axa elle-même font apparaître que, jusqu' au départ de M. [T], M. [B] était le N+2 de Mme [Y] tandis qu'à compter du 1er décembre 2007, il en devient le N+1.
En tout état de cause, aux termes de l'article 6 de l'accord sur la mise en 'uvre et le suivi des qualifications du 28 juin 1999 (applicable à compter du 1er juin 1999) :
Souhaitant reconnaître individuellement les évolutions professionnelles, les parties signataires conviennent d'associer une mesure individuelle à un changement de fonction entraînant un changement de classe dans les conditions définies aux alinéas suivants :
6.1.- NOTIFICATION ECRITE DE CHANGEMENT DE CLASSE ET DE FONCTION
Les changements de classe et de fonction donneront nécessairement lieu à un écrit précisant notamment l'intitulé du poste, la fonction de rattachement, la classe correspondante et la prise d'effet.
6.2.- PERIODE D'ADAPTATION
La mesure individuelle associée à un changement de classe et de fonction ne peut intervenir qu'au terme d'une période d'adaptation permettant à l'entreprise et au salarié d'avoir le recul suffisant. Il sera pris en compte l'adaptation à la nouvelle fonction et la performance individuelle atteinte.
Lorsque l'évolution professionnelle se situe dans la continuité de la fonction antérieure ou dans la même nature de métier, et/ou dans la même famille professionnelle, la période d'adaptation sera de 6 mois pour les cadres et de 3 mois pour les autres collaborateurs.
Dans les cas contraires, la période d'adaptation sera respectivement portée à 12 mois et 6 mois.
Lorsqu'exceptionnellement la progression professionnelle dépassera une classe, la période d'adaptation pourra être portée à 18 mois maximum.
(') (souligné par la cour)
Il est constant que Mme [Y] a occupé le poste de responsable de l'entité achats informatiques le 1er décembre 2007, alors qu'il était en classe 6 ; que le comité d'évaluation a décidé de positionner ce poste en classe 7 lors d'une réunion au mois d'avril 2008 et que ce n'est que le 3 juillet 2008 que la direction d'Axa a demandé à Mme [Y] de suivre une période d'adaptation.
L'article 6-2 de l'accord collectif, précité, prévoit certes que la période d'adaptation est impérative, étant seulement limitée à six mois (au lieu de douze) en cas de « continuité dans la fonction antérieure ».
Il demeure que Mme [Y] occupait ce poste depuis sept mois au moment où Axa a voulu lui imposer cette période d'adaptation, qu'Axa a attendu plus de deux mois pour ce faire et que, au demeurant, Axa ne démontre en aucune manière que Mme [Y] n'aurait pas, dans la période du 1er décembre 2007 au 03 juillet 2008, accompli de manière satisfaisante les tâches qui lui incombaient sur ce poste.
Il est particulièrement révélateur, à cet égard, que le 'Bilan d'Adaptation' (pièce 44 d'Axa), qui aurait été établi par M. [V] (nouveau N+1 de Mme [Y]) et dresse une liste des 'Compétences à développer' pour conclure « Je ne confirme pas [F] dans son poste de manager niveau 7 », n'est pas signé par M. [V] et n'est pas davantage signé par Mme [Y].
Dans ces conditions, le refus de confirmer Mme [Y] dans ses fonctions, quand bien même des propositions de prolongation de la période d'adaptation ou d'autres postes de classe 6 lui auraient été faites, justifie la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par cette salariée, aux torts de son employeur.
La cour dira que cette prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur le principe « à travail égal salaire égal »
Mme [Y] soutient que l'égalité de traitement n'a pas été respectée avec ses homologues occupant les mêmes fonctions qu'elle, Mme [S] et Mme [G] et qu'elle a perçu une « rémunération ramenée sur un temps plein, inférieure de près de 20% à celle de ses collègues ».
Mme [Y] produit un tableau comparatif comprenant trois rubriques : salaire de base en 2008 ; rémunération moyenne en 2008 ; et rémunération moyenne en 2008 hors variable.
Elle ajoute qu'il n'a pas été tenu compte, dans la réalisation de ses objectifs, de ce qu'elle travaillait à temps partiel, ni de ce qu'elle devait gérer un périmètre plus large que celui des deux salariées auxquelles elle se compare : « le département Achats Informatiques (') était celui pour lequel les sommes à gérer étaient les plus importantes et elle disposait d'ailleurs d'une procuration pour signer des contrats d'un montant plus important que ses collègues ».
Enfin, Mme [Y] procède au calcul du rappel de salaire en prenant comme base la période de janvier 2008 à mars 2009 par rapport à Mme [S], soit la somme de 26 903,70 euros, et celle de mars 2004 à décembre 2007 par rapport à Mme [G], soit la somme de 71 545,50 euros.
Mme [Y] sollicite ainsi un rappel de salaire d'un montant total de 98 449,20 euros, lequel doit servir de base pour calculer les indemnités et dommages intérêts qui lui sont dus au titre du licenciement.
Axa souligne, pour sa part, que la situation de Mme [Y] et celle de Mmes [S] et [G] ne sont « identiques qu'à compter du 1er décembre 20007 », date à laquelle la première est devenue responsable des achats informatiques quand la deuxième est devenue responsable des achats services généraux et la troisième, responsable des achats de services professionnels.
S'agissant de Mme [S], l'employeur précise que cette derrière avait bénéficié de nombreux bonus et gratifications au sein du GIE Axa et qu'il y a donc eu un ajustement lors de son transfert chez Axa France IARD Vie « de nature à lui permettre de conserver son montant de rémunération » ; qu'en outre, elle fait l'objet de « commentaires excessivement élogieux ». S'agissant de Mme [G], Axa soutient que cette dernière, recrutée en 1990, a eu un « parcours nettement plus performant que celui » de Mme [Y] et a par conséquent bénéficié d'augmentations plus importantes.
La cour rappelle que le principe 'à travail égal, salaire égal' signifie que deux salariés ayant le même travail, la même ancienneté, la même formation, la même qualification, que rien ne permet de distinguer objectivement, doivent percevoir la même rémunération, laquelle englobe le salaire, les gratifications, les primes exceptionnelles et autres avantages.
C'est au salarié qui l'invoque d'apporter des éléments susceptibles de caractériser une inégalité.
Dans le cas présent, la seule lecture du tableau dressé par Mme [Y], dont il convient de rappeler qu'il a été établi sur la base d'une rémunération de celle-ci rapportée à un temps plein (puisqu'elle travaillait à temps partiel), montre des différences sensibles de rémunération.
La cour doit cependant constater que Mme [Y] ne justifie en rien des raisons pour lesquelles elle a choisi les périodes de temps auxquelles elle se réfère ni que ces périodes soient différentes de l'une de ses collègues à l'autre.
De plus, s'agissant de Mme [G], celle-ci avait une ancienneté de deux ans supérieure à celle de Mme [Y] et se trouvait donc, de ce seul fait, dans une situation distincte.
Mme [Y] ne conteste pas, en outre, que les performances de Mme [G] ont été légèrement supérieures aux siennes (moyenne de 97% pour la première, de 95% pour la seconde) mais invoque les sommes beaucoup plus importantes qu'elle avait à gérer.
Ce faisant, Mme [Y] ne se réfère à aucune pièce précise qu'elle produirait.
Les performances globales de Mme [S] ont, elles, été évaluées à 100%. Il est souligné dans l'évaluation dont elle a fait l'objet que Mme [S] a dû reprendre des dossiers importants sur lesquels les 'Achats' étaient « marginalisés ».
Il existait donc des raisons objectives de faire bénéficier Mme [S] ou Mme [G] d'une rémunération supérieure à celle de Mme [Y].
Mme [Y] sera donc déboutée de sa demande relative à la différence de traitement alléguée.
Sur les sommes à allouer à Mme [Y]
Il résulte de ce qui précède que le salaire et la rémunération à prendre en considération dans le calcul des sommes à allouer à Mme [Y] sont celles résultant de ses bulletins de salaire.
Au vu du bulletin de salaire établi le 31 décembre 2008, la rémunération moyenne de Mme [Y] s'établit à la somme de 3 383,07 euros.
Mme [Y] a droit à percevoir l'indemnité conventionnelle de licenciement. Il n'est pas contesté que cette indemnité se calcule sur la base de l'ancienneté, au taux de 4,5%, outre qu'il faille tenir compte du passage au temps partiel à compter de septembre 2001 (soit 7,5 années à temps partiel).
La somme due à Mme [Y] est ainsi de [(4,5% x 40596,84x7,5) + (4,5%x40596,84x100/80x9,5] = (13 701,43 euros + 21 693,93) = 35 395,36 euros.
Mme [Y] a également droit à une indemnité compensatrice de préavis, soit la somme de 10 149,21 euros, en outre les congés payés y afférents, soit la somme de 1014,92 euros.
Mme [Y] avait une ancienneté de 17 ans au moment du licenciement. Elle souligne que, du fait des circonstances de la rupture du contrat de travail, elle n'a pas pu bénéficier de l'assurance chômage. Elle a mal supporté les conditions de cette rupture et un état anxio-dépressif lui a été diagnostiqué. Mme [Y] sollicite en conséquence l'allocation d'une somme de 140 000 euros.
La cour note que si Mme [Y] a consulté un médecin le 5 janvier 2009 et que ce dernier a noté un état anxio-dépressif avec troubles du sommeil réactionnels à un stress professionnel, il résulte du certificat de travail délivré le 06 avril 2011 que l'arrêt de travail a été du 05 au 13 janvier 2009.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il est juste d'allouer une somme de 47 000 euros.
Sur la délivrance de documents de fin de travail conformes
La cour dira que la société Axa devra délivrer des bulletins de salaire conformes et l'y condamnera en tant que de besoin.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Axa succombe pour l'essentiel et sera condamnée aux dépens.
Il est juste de condamner Axa à payer à Mme [Y] une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 500 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, par décision contradictoire,
Met hors de cause le Groupement d'intérêt économique Axa France ;
Confirme le jugement entrepris en en ce qu'il a débouté Mme [F] [Y] de ses demandes relatives à une inégalité de traitement salarial ;
Infirme le jugement entrepris pour le surplus ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit le licenciement de Mme [Y] sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne solidairement les sociétés Axa France IARD SA et Axa France Vie SA à payer à Mme [F] [Y] les sommes de :
. 10 149,21 euros à titre d'indemnité de préavis, en outre celle de 1014,92 euros au titre des congés payés y afférents ;
. 35 395,36 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
. 47 000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne les sociétés Axa France IARD SA et Axa France Vie SA, unies d'intérêt, à payer à Mme [Y] une indemnité d'un montant de 3 000 euros, en cause d'appel, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les sociétés Axa France IARD SA et Axa France Vie SA de leur demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de toute autre demande plus ample ou contraire ;
Condamne Axa aux entiers dépens.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Madame Hélène Avon, adjointe faisant fonction de greffier, à laquelle le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,