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21/06/2016 | FRANCE | N°14/03226

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 21 juin 2016, 14/03226


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 83E



6e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 21 JUIN 2016



R.G. N° 14/03226



AFFAIRE :



[R] [T]



C/



SA SAP FRANCE, anciennement BUSINESS OBJECTS







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Juin 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Encadrement

N° RG : 09/04330





Copies exÃ

©cutoires délivrées à :



Me Sandrine BOURDAIS



AARPI VAUGHAN Avocats





Copies certifiées conformes délivrées à :



[R] [T]



SA SAP FRANCE, anciennement BUSINESS OBJECTS



le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VING...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 83E

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 21 JUIN 2016

R.G. N° 14/03226

AFFAIRE :

[R] [T]

C/

SA SAP FRANCE, anciennement BUSINESS OBJECTS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Juin 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Encadrement

N° RG : 09/04330

Copies exécutoires délivrées à :

Me Sandrine BOURDAIS

AARPI VAUGHAN Avocats

Copies certifiées conformes délivrées à :

[R] [T]

SA SAP FRANCE, anciennement BUSINESS OBJECTS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN JUIN DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [R] [T]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Comparant

Assisté de Me Sandrine BOURDAIS, avocat au barreau de PARIS

APPELANT

****************

SA SAP FRANCE, anciennement BUSINESS OBJECTS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Jean-Charles JOKIEL de l'AARPI VAUGHAN Avocats, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie BORREL-ABENSUR, conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine BÉZIO, président,

Madame Sylvie FÉTIZON, conseiller,

Madame Sylvie BORREL-ABENSUR, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE,

EXPOSE DU LITIGE

La société BUSINESS OBJECTS, créée en 1990, avec pour activité le développement l'édition et la commercialisation de progiciels de gestion d'entreprise, s'est développée pour devenir un groupe international, qui a été racheté en 2008 par le groupe concurrent SAP.

A compter du 1er janvier 2010 les salariés de société SAP FRANCE ont été transférés à la société BUSINESS OBJECTS, devenue filiale du groupe SAP.

La convention collective SYNTEC leur est applicable.

Selon un contrat à durée indéterminée, M. [T] a été engagé par la société BUSINESS OBJECTS, en qualité d'ingénieur support technique à compter du 21 juillet 1997, statut cadre, position 2.1 coefficient 110, moyennant un salaire de base de 170 000 francs.

Le 1er janvier 2000 il était promu « Quality Assurance Engineer » position 2.2 coefficient 130.

Le 1er janvier 2001 il était promu « ingénieur contrôle qualité » (software testing engineer) ou « Quality Specialist » position 2.3 coefficient 150, poste qui consiste à effectuer des tests sur des logiciels développés par la société.

Entre janvier 2001 et juillet 2005, sa rémunération était régulièrement augmentée pour atteindre au 1er juillet 2005 un salaire annuel brut de base de 46 748 €.

Le 12 avril 2006 il était désigné délégué syndical par le syndicat Force Ouvrière, et depuis lors il exerce, sans discontinuer les fonctions de délégué syndical, représentant du personnel ou/et de conseiller du salarié ; ayant changé de syndicat fin 2010, il est actuellement membre suppléant du comité d'entreprise pour le syndicat CGT, et conseiller du salarié dans les [Localité 1].

Estimant être victime de discrimination syndicale au niveau de l'évolution de son salaire et de sa carrière, il a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre le 14 décembre 2009, lequel, par jugement du 17 juin 2014, dont il a interjeté appel, l'a débouté de ses demandes.

Entre-temps M. [T] a été transféré dans la société SAP FRANCE.

A compter d'avril 2013 la société SAP FRANCE a divisé les classifications de la convention collective (T1 à T5) en sous-catégories (T1.1, T.2, T1.3 par exemple).

Par arrêt avant-dire droit du 3 novembre 2015, la cour de céans a sursis à statuer, ordonnant à la société SAP FRANCE de communiquer les pièces demandées par M. [T] par sommation du 7 septembre 2015, tout en renvoyant l'affaire à l'audience du 11 avril 2016.

Par écriture soutenues oralement par les parties à l'audience du 11 avril 2016, auxquelles la cour se réfère, en application de l'article 455 du code de procédure civile, les parties ont conclu ainsi qu'il suit :

M. [T] conclut à l'infirmation du jugement, sollicitant que la cour, tout en constant l'existence d'une discrimination syndicale ayant affecté son salaire et son évolution de carrière :

- revalorise sa fonction et son coefficient au niveau « Senior Quality Spécialist » grade T 3.3 à compter du 1er avril 2013,

- fixe sa rémunération brute annuelle à objectifs atteints à la somme de 82 100 € à titre principal, et à celle de 72 073,80 € à titre subsidiaire, soit 6157,50 €/mois à titre principal, ou 5405,54 € à titre subsidiaire, à compter du 1er avril 2016, demandant la condamnation de la société SAP FRANCE à lui payer à titre de rappel de salaire fixe à compter du 1er avril 2016 la somme de 1704,41 €/mois à titre principal, ou 952,45 € à titre subsidiaire, jusqu'à la date de l'arrêt,

- condamne la société SAP FRANCE à lui payer les sommes suivantes :

* 171 185,54 € à titre principal ou 106 105,24 € à titre subsidiaire, nette de CSG-CRDS, au titre de son préjudice économique,

* 20 000 €, nette de CSG-CRDS, à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

- outre la somme de 8000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société SAP FRANCE conclut à la confirmation du jugement, vu l'absence de discrimination ou d'inégalité de traitement.

A titre subsidiaire, elle demande d'écarter l'évaluation erronée du préjudice, de réduire le quantum des condamnations tant au titre du préjudice économique, que de la fixation du salaire en fonction de la classification interne retenue par la cour, et de dire que la condamnation se fera en deniers ou quittances.

Elle conclut aussi au débouté de la demande au titre du préjudice moral, et la condamnation de M. [T] à lui payer la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la discrimination syndicale

L'article L. 2141-5 du code du travail interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance syndicale ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux.

Aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son patronyme ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

L'article L. 1134-1 du même code dispose qu'en cas de litige relatif à l'application du texte précédent, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte et il incombe à la partie défenderesse, au vu des ces éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, le juge formant sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

M.[T] soutient que depuis le 12 avril 2006, date à laquelle il a été désigné délégué syndical par le syndicat Force Ouvrière, il a constaté un arrêt brutal de toute évolution de carrière et la cessation d'augmentation de salaire jusqu'à la saisine du conseil de prud'hommes en décembre 2009, se basant notamment sur un panel de 36 salariés (pièce 90).

Ses multiples réclamations depuis 2007 concernant la revalorisation de sa position et de son salaire n'ont pas été entendues par la direction.

Il fait valoir que des salariés ayant une ancienneté moindre à la sienne ont été promus Senior Quality Spécialist (T3), sans aucune justification objective, et ce malgré ses bonnes évaluations et une tendance à la « seniorisation » des Quality Spécialist (T2) comme lui.

Il précise que les salariés ayant le statut de T3 faisaient le même travail que lui depuis 2006, et font en 2015 un travail quasiment identique.

Quant au refus de certaines formations, il explique qu'il ne sert à rien de suivre des formations si par la suite on ne peut utiliser ses nouvelles connaissances, vite obsolètes vu l'évolution de l'informatique, dans le cadre d'une promotion.

Il souligne enfin que la société reconnaît l'existence d'inégalités salariales, ce point ayant été débattu en 2010 dans le cadre de la négociation annuelle des salaires, ce que la société indique elle-même dans ses conclusions.

La société SAP FRANCE, sur la base du panel de 27 salariés (pièce 5 bis) et non de 36, comme utilisé par M. [T], estime qu'il est normal que le salaire de ce dernier soit légèrement inférieur à la moyenne de ces 28 salariés puisque le graphique inclut des salariés ayant évolué de la classification T2 à T5, alors que M. [T] n'a pas montré suffisamment de compétences et de mérite pour accéder à la classification T3 qu'il revendique depuis 2007, comme cela lui a été énoncé dans le cadre de ses évaluations (2008, 2014 et 2015).

Elle précise qu'il a bénéficié d'augmentations de salaire, en 2008 sur la part variable, et en 2009/2010/2013/2014 sur le salaire de base, en fonction de ses bonnes performances mais aussi de la décision de la société, à compter du 1er avril 2010, d'effectuer un rattrapage des inégalités salariales notamment à l'égard des représentants du personnel.

Elle fait aussi valoir, au vu du graphique en pièce 5 ter, que le salaire de M. [T] a été, entre 2006 et 2009, au dessus du salaire médian des salariés au même niveau de classification T 2 que lui, et qu'à partir de 2010 son salaire a été légèrement inférieur à ce salaire médian (entre 96 et 98 % du salaire médian).

Enfin, elle fait observer que M. [T] a refusé des formations en 2008 et 2013, alors que ces formations auraient pu l'aider à évoluer.

En l'espèce, il convient de vérifier si M. [T], qui a été embauché en 1997, à niveau d'ancienneté, de poste et de qualification professionnelle comparables avec ses collègues embauchés à la même époque au même niveau de classification (position 2.1 coefficient 110), a subi une différence de traitement tant au niveau de sa rémunération que de son évolution de carrière entre 2006 et 2016, et si l'évolution de ses compétences et l'appréciation de sa hiérarchie sur son travail peuvent expliquer une différence de carrière et de salaire.

Pour apprécier dans un premier temps l'existence de cette différence de traitement, il convient de déterminer, entre les panels proposés par les parties, lequel correspond à des salariés qui se trouvent dans une situation comparable à celle de M. [T].

Sur l'évolution de carrière et de position

Le panel de comparaison le plus adapté proposé par M. [T] est celui des 28 salariés (M. [T] inclus) parmi les 36 listés embauchés (entre 1996 et 1999), en ne prenant que les salariés embauchés à la même position SYNTEC que lui (2.1), et en comparant leur évolution de position entre leur embauche et 2014, ce qui est retracé dans la pièce 88 de M. [T], qui se résume ainsi :

- 2 salariés, dont un délégué syndical M. [F], ont peu progressé, de 2.1 à 2.2,

- 9 salariés*, outre M. [T], ont progressé de 2.1 à 2.3,

- 16 salariés ont bien progressé, de 2.1 à 3.1 ou 3.2.

En effectuant une comparaison sur la base de la classification interne de la société, qui diffère de celle de la convention collective SYNTEC, l'on constate aussi une différence plus marquée encore, car parmi les 9 salariés* qui ont la même progression de position SYNTEC que M. [T], tous ont plus progressé que lui dans la classification interne de la société : 3 à 3.1, 4 à 3.2, 1 à 3.3 et 1 à 4.1, alors que M. [T] est resté à 2.3, comme dans sa classification SYNTEC.

Cette différence d'évolution de classification (tant SYNTEC qu'interne à la société) en défaveur de M. [T] a pour corollaire un salaire plus bas que la moyenne des salaires de ces 28 salariés du panel, entre 2006 et 2015, comme l'illustre le graphique produit par la société en pièce 5 bis.

Toutefois, la société justifie cette différence de traitement par le manque de compétences, d'investissement, et de capacité d'encadrement de M. [T], les augmentations de salaire et la progression des salariés d'une position à l'autre dépendant de leurs mérites propres, pondérés par le salaire médian.

Le profil des postes T2 (pièce 18 de la société) correspond à un salarié qui exécute son travail selon une stratégie qui lui est donnée, qui possède des connaissances de base du domaine du produit et des langages de programmation.

Selon le profil des postes T3 (pièce 19 de la société), le salarié qui peut accéder à ce niveau doit savoir définir les stratégies qualité et test pour les produits, être un expert pour les équipes, proposer des améliorations de processus ou d'outils, posséder des connaissances approfondies du domaine du produit et des langages de programmation.

En 2007 M. [T] a souhaité évoluer en position T3, mais il lui a été indiqué qu'il ne possédait pas les compétences requises par les standards internes exposés plus haut.

En pièce 10, son supérieur hiérarchique indique en mars 2016 que M. [T], malgré ses progrès, n'est toujours pas en capacité d'obtenir cette promotion, car il a une compréhension de base du domaine de sa compétence, mais a besoin d'orientations et de consignes pour mettre en oeuvre ses compétences ou connaissances, qu'il est débutant dans la programmation, et après plusieurs années dans l'équipe automation il n'est pas en mesure d'être autonome, ce qui démontre qu'il a pas les compétences requises pour accéder à la position T3, par manque d'autonomie et de connaissances approfondies, et ce même indépendamment de sa capacité à encadrer une équipe (pour répondre à l'argument de M. [T] selon lequel des salariés T3 n'ont pas de responsabilité d'encadrement).

Par ailleurs, il apparaît, au vu de son entretien d'évaluation en avril/mai 2008, que M. [T] a refusé des formations en 2007, ce qu'il ne conteste pas, et ce qui aurait pu lui permettre de plus évoluer dans ses compétences.

En conséquence, ces éléments n'établissent pas une différence de traitement injustifiée quant à l'évolution de carrière de M. [T], lequel sera donc débouté de ses demandes de nouveau positionnement en T3, avec rappels de salaire afférents.

Sur les évolutions salariales

Les évaluations de M. [T], qui est en position T2, font état d'augmentations de salaire mais seulement certaines années après la saisine du conseil en décembre 2009 :

- En effet, pour la période d'avril 2006 à mars 2007, M. [T] n'a pas rempli ses objectifs (« needs improvements », ce qui signifie qu'il a besoin de s'améliorer), étant peu impliqué, ce qui justifie son absence d'augmentation ; cette évaluation n'est pas contredite par M. [T].

- Pour la période d'avril 2007 à mars 2008, son évaluation était bonne (« generally achieves », ce qui signifie que ses objectifs sont atteints), mais il n'a pas bénéficié d'augmentation car son salaire était, selon la société, déjà positionné haut dans la matrice salariale, ce qui est contredit par la société en 2009, puisqu'elle va reconnaître l'existence d'inégalités salariales à l'égard des représentants du personnel.

- Pour la période d'avril à décembre 2008, il a aussi atteint ses objectifs, mais cette année-là, en raison des difficultés économiques, l'ensemble de la masse salariale n'a pas augmenté ; il n'a donc pas reçu d'augmentation de son salaire de base, mais a bénéficié d'une augmentation de la part variable de son salaire.

Dans cette évaluation, la société fait mention de son mandat syndical, mais c'est pour indiquer que malgré ce mandat, qui engendre un planning chargé et difficile, M. [T] est très impliqué dans l'équipe et a atteint ses objectifs de performance, tout en s'autoformant, car le budget ne lui a pas permis d'effectuer des formations; cette mention sur le mandat syndical n'est donc pas négative, ni stigmatisante, tout au contraire.

- En 2010, il a bénéficié d'une augmentation de son salaire brut de 3,41 %, vu sa performance de 2009 et des mesures unilatérales destinées à réduire les inégalités salariales, notamment à l'égard des représentants du personnel (selon les propres termes de la société dans ses conclusions).

- En 2011, il en a été de même, avec une augmentation de son salaire brut de 8,09 %, ainsi qu'en 2013 et 2014 avec une augmentation de 3,06 % chacun de ces deux années.

Il résulte de ces éléments qu'en 2008 et 2009 M. [T] n'a pas bénéficié d'augmentation de son salaire de base, malgré de bonnes évaluations, puis qu'à partir de 2010, il a bénéficié d'augmentations régulières de salaire, tant en raison d'une meilleure atteinte de ses objectifs que de la volonté de la société d'effectuer un rattrapage de salaire pour réduire les inégalités salariales, notamment à l'égard des représentants du personnel, ce qui établit par là même la preuve de la conscience par la société de l'existence de cette inégalité, qu'elle s'est efforcée toutefois de réduire entre 2010 et 2014, sans que le rattrapage prenne complètement en compte l'absence d'augmentation de 2008/2009.

M. [T] a donc été victime de discrimination salariale, entre 2008 et 2014 en raison de son engagement syndical au sein de la société.

Faute d'éléments chiffrés permettant d'évaluer le préjudice économique de M. [T] lié à cette évolution salariale discriminatoire, la cour invite les parties à chiffrer ce rattrapage salarial, afin de rétablir le salaire que M. [T] aurait dû percevoir, s'il avait bénéficié d'augmentations salariales en 2008 et 2009, et ce sur la base de la moyenne des augmentations des salariés du panel restreint des 9 salariés* (cf plus haut), qui à l'instar de M. [T], ont progressé de coefficient SYNTEC 2.1 à 2.3.

Ces 9 salariés sont : M. ou Mme [M], [Z], [U], [K], [X], [J], [P], [A] et [O].

Le préjudice moral, d'ores et déjà établi, puisqu'il est lié à une absence d'augmentation de son salaire de base pendant 2 ans (2008/2009), avec une répercussion sur les salaires des années suivantes et en lien avec une discrimination syndicale, que la cour fixera à la somme de 5 000 € nette de CSG-CRDS à titre de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires

La somme de 5000 € sera allouée à M. [T] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens de première instance et d'appel seront mis à la charge de la société.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

STATUANT contradictoirement, en dernier ressort et par arrêt mis à la disposition des parties au greffe,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre en date du 17 juin 2014, en ce que le conseil a rejeté la demande de nouveau positionnement de M. [T] en T 3, mais L'INFIRME pour le surplus, et statuant à nouveau ;

INVITE les parties à chiffrer le rattrapage salarial, au titre des années 2008 et 2009, et ce sur la base de la moyenne des augmentations des salariés du panel des 9 salariés susvisés dans les motifs du présent arrêt ;

DIT que, sur ces bases, la société SAP FRANCE devra indemniser M. [T], et que les parties, en cas de difficulté, pourront saisir la cour sur simple requête ;

CONDAMNE la société SAP FRANCE à payer à M. [T] la somme de 5 000 € nette de CSG-CRDS, à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral lié à une discrimination syndicale, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, outre celle de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNE la société SAP FRANCE aux dépens de première instance et d'appel.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Catherine BÉZIO, président, et par Sabine MARÉVILLE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 14/03226
Date de la décision : 21/06/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 06, arrêt n°14/03226 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-21;14.03226 ?
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