COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
11ème chambre
ARRET N°
contradictoire
DU 09 JUIN 2016
R.G. N° 14/02864
EL/CA
AFFAIRE :
[B] [T]
C/
SAS ORACLE FRANCE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Juin 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE
Section : Encadrement
N° RG : 11/02945
Copies exécutoires délivrées à :
la SCP SOCIÉTÉ JUREO
la SCP FLICHY GRANGÉ AVOCATS
Copies certifiées conformes délivrées à :
[B] [T]
SAS ORACLE FRANCE
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE NEUF JUIN DEUX MILLE SEIZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [B] [T]
[Adresse 2]
[Localité 1]
représenté par Me Bérengère LECAILLE de la SCP SOCIÉTÉ JUREO, avocat au barreau de LILLE
APPELANT
****************
SAS ORACLE FRANCE
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Charlotte MICHAUD de la SCP FLICHY GRANGÉ AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0461
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé de :
Madame Sylvie BOSI, Président,
Madame Marie-Christine PLANTIN, Conseiller,
Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Mohamed EL GOUZI,
Vu le Jugement du Conseil de Prud'hommes de Nanterre du 5 juin 2014 qui a :
- Débouté Monsieur [B] [T] de l'ensemble de ses demandes, en ce compris de sa demande d'indemnité de procédure sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Reçu la société ORACLE FRANCE dans sa demande d'indemnité reconventionnelle sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, mais l'en a déboutée ;
- Condamné Monsieur [T] aux dépens ;
Vu la déclaration d'appel de Monsieur [B] [T] en date du 16 juin 2014 ;
Vu les conclusions écrites déposées au greffe et soutenues oralement à l'audience du 11 avril 2016 par l'avocat de Monsieur [B] [T] qui demande à la Cour de :
Recevoir en son appel Monsieur [T] ;
Infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de NANTERRE en ce qu'il a débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes ;
Statuant à nouveau ;
Constater que la société ORACLE a décidé en que la cession des options HYPERION constitue un avantage en nature et salaire ;
Constater que la société ORACLE a déclaré que le salaire de Monsieur [T] au 31.12.2010 est d'un montant de 429 111.40 euros ;
Constater que la société ORACLE a calculé l'indemnité conventionnelle de licenciement sur la base d'un salaire annuel en 2010 de 429 111.40 euros ;
Constater que la société ORACLE s'est engagée unilatéralement le 20 décembre 2010 à proposer une indemnité dans un cadre transactionnel ;
Constater que la société ORACLE a refusé d'exécuter cette proposition selon les modalités qu'elle avait définies ;
Constater que devant la Cour, la société ORACLE refuse d'exécuter toute proposition ;
En conséquence, condamner la société ORACLE à s'exécuter, et ce faisant, Condamner la société ORACLE au paiement des sommes suivantes au profit de Monsieur [T]:
8 890, 17 euros au titre du reclassement ;
175 053, 31 euros au titre de l'indemnité spéciale de licenciement ;
8 890, 17 euros au titre des congés payés ;
321 833, 52 euros au titre de l'indemnité forfaitaire ;
276 595, 67 euros au titre de l'indemnité différentielle ;
25 000, 00 euros au titre du préjudice pour non-respect du coaching ;
Dire et juger que si la Cour devait appliquer le plafond au titre de l'indemnisation du départ volontaire, alors le montant de l'indemnité différentielle serait porté à 384 033.71 euros aux lieu et place de 276 595.67 euros ;
Ces sommes devront être majorées des intérêts légaux à compter du 19 septembre 2011 ou de la citation soit le 31 octobre 2011 ;
15.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
15.000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens conformément à l'article 699 du Code de Procédure Civile ;
En tout état de cause et à titre subsidiaire, donner acte à Monsieur [T] de ce que la société ORACLE a reconnu être débitrice d'une somme de 204 000.00 euros en principal ;
Lui ordonner de verser ce montant et y ajoutant fixant le montant total réel des créances de Monsieur [T] à son encontre ;
Dire et juger que les intérêts produiront eux-mêmes intérêts à compter de la première échéance annuelle et ce à chaque date anniversaire jusqu'à complet paiement ;
Condamner la société ORACLE au paiement des entiers frais et dépens conformément à l'article 699 du Code de Procédure Civile ;
Vu les conclusions écrites déposées au greffe et soutenues oralement à l'audience du 11 avril 2016 par l'avocat de la SAS ORACLE FRANCE qui demande à la Cour de :
Débouter Monsieur [T] de l'ensemble de ses demandes ;
Condamner Monsieur [T] à verser à la SAS ORACLE FRANCE la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens;
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience ;
LA COUR,
Considérant qu'il convient de rappeler que Monsieur [B] [T] a été embauché par la Société HYPERION SOLUTIONS aux droits de laquelle vient la Société ORACLE selon contrat de travail à durée indéterminée en date du 27 septembre 2002 ; que Monsieur [T] occupait les fonctions de directeur des opérations EMEA ; que Monsieur [T] a intégré le plan de sauvegarde de l'emploi en date du 17 décembre 2010 ; que sa candidature au départ volontaire a été acceptée par la Société ORACLE FRANCE le 22 décembre 2010; que les parties ont signé la Convention de départ volontaire pour motif économique le 11 février 2011 ; que Monsieur [T] a contesté les conditions générales de son départ et a saisi le Conseil de Prud'hommes de Nanterre de demandes en paiement de différentes sommes ;
Sur les droits issus du plan de sauvegarde de l'emploi
Considérant que Monsieur [T] s'est porté candidat à un départ volontaire par un courrier daté du 17 décembre 2010, après avoir pris connaissance des modalités du plan de sauvegarde de l'emploi présenté en CE en 2010, qu'il a bénéficié d'un temps de réflexion et d'une communication du Plan, lequel faisait suite à un accord de méthode du 7 octobre 2010, et signé une convention de départ volontaire pour motif économique le 11 février 2011 ;
Que s'il avait auparavant, par courrier du 2 septembre 2010, dénoncé auprès de son employeur des difficultés d'exécution de son contrat de travail, il ne fait pas la démonstration de ce que la signature de ladite convention de départ volontaire ait été contrainte ou consécutive à un vice du consentement ;
Considérant qu'aux termes de l'article II.6.4 du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) 'le salarié volontaire au départ percevra des indemnités de rupture sur les bases suivantes.
Toutes les indemnités de rupture pour motif économique qui sont présentées, exceptée l'indemnité conventionnelle de licenciement qui est calculée sur le Salaire de Référence défini au point II.5.7 ci-dessus, sont calculées sur la base du montant brut le plus favorable pour le salarié, entre :
- le Salaire de Référence,
ou
- le salaire OTE annuel (à objectif atteint), exprimé sur une base brute (...)'
Que l'article II.5.7 définit le Salaire de Référence comme la rémunération mensuelle brute moyenne soumise aux contributions d'assurance chômage au titre des 12 derniers mois précédant la signature de la convention de départ volontaire ; à titre d'information, le salaire de référence comprend la rémunération fixe et variable ainsi que celle versée sous forme d'avantage en nature; en revanche, elle ne comprend pas les avantages liés aux stock-options ;
Que, par ailleurs, le PSE prévoyait un plafond, fixé à 400.000 euros, du montant brut cumulé des sommes versées au titre du préavis, de l'indemnité de licenciement, de l'indemnité complémentaire et du congé de reclassement ;
Qu'il résulte de ces stipulations que si les indemnités de rupture autres que l'indemnité conventionnelle de licenciement sont évaluées selon la base de calcul la plus favorable entre le salaire de référence et le salaire OTE, le salaire de référence, pour le calcul de l'indemnité conventionnelle de licenciement comme des autres indemnités de rupture (le cas échéant), exclut les avantages liés aux stock-options ;
Qu'au surplus cette interprétation est confortée par l'article 4.3 du Titre II de l'accord de méthode et d'anticipation du PSE qui faisait référence au 'Salaire de Référence au sens de l'article 1.5.1", lequel article comportait la même définition, et donc la même exclusion, que celle figurant à l'article II.5.7 du PSE ;
Qu'en outre, les plus-values réalisées en janvier 2010 puis septembre 2010, relatives aux options HYPERION, même ayant été dites 'non-qualifiantes' par la société ORACLE et ayant par suite été soumises en particulier à charges sociales, ne s'analysent pas, ainsi que l'intimée apparaît fondée à le soutenir dans le cadre de la présente instance, en une rémunération allouée en contrepartie du travail au regard du calcul de l'indemnité complémentaire de départ mais correspondent à des 'avantages liés aux stock-options', non à des 'avantages en nature', au sens du PSE ;
Qu'il s'ensuit que le salaire de référence de Monsieur [T] s'élevait à la somme de 15.062,03 euros bruts ;
Que le montant de 100.877,10 euros versé au titre de licenciement ne pouvait être créateur de droits pour modifier le calcul de l'indemnité complémentaire de départ ;
Considérant par ailleurs qu'au regard des dispositions du PSE, de la reprise d'un nouvel emploi à compter du 1er septembre 2011, du salaire de référence et des bulletins de paie produits, Monsieur [T] a été rempli de ses droits au titre de la rémunération pendant le congé de reclassement ;
Considérant qu'il est de même au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés versée pour un montant de 32.167,39 euros, calculée en divisant le salaire mensuel de référence par 21,67 jours ouvrés par mois incluant notamment les congés payés, jours de repos et jours fériés, en mutipliant le résultat obtenu par autant de jours ouvrés de congés payés restant dûs ;
Considérant, en conséquence, que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [T] de ses demandes formées au titre du congé de reclassement et des compensations financières issus du plan de sauvegarde de l'emploi ;
Sur la proposition transactionnelle
Considérant que Monsieur [T] se prévaut d'un engagement unilatéral de la société ORACLE FRANCE de lui payer trois types de créances supplémentaires, qualifiées d'indemnité transactionnelle ou forfaitaire, d'indemnité différentielle et se rapportant enfin au bénéfice d'un coaching ;
Que la société ORACLE FRANCE rappelle que le salarié s'était prévalu initialement de difficultés d'exécution de son contrat de travail et indique que les échanges se sont engagés entre les parties dans ce contexte ;
Qu'aux termes d'un courrier du 20 décembre 2010, la société ORACLE FRANCE ' s'engage [ait], dans le cas où vous déposeriez un dossier de candidature au départ volontaire et où celui-ci serait accepté, à vous proposer une indemnité dans un cadre transactionnel, c'est à dire subordonné à votre renonciation à toute instance et action portant sur l'exécution et la cessation de votre contrat de travail ; le montant brut de cette indemnité transactionnelle comprendrait (1) une indemnité d'un montant brut de neuf mois de salaire à laquelle viendrait s'ajouter (2) une indemnité d'un montant brut qui serait égal à la différence entre les indemnités versées au titre de votre départ volontaire et celles qui vous auraient été dues en cas de départ contraint aux conditions prévues par l'actuel plan de sauvegarde de l'emploi.
(...) Oracle France s'engage également, dans le cas où vous déposeriez un dossier de candidature au départ volontaire et où celui-ci serait accepté, à vous proposer le bénéfice d'un service de coaching à déterminer en accord avec Oracle. (...)' ;
Qu'un écrit du 11 mars 2011 reprenait ces éléments, en ce compris son caractère subordonné à la renonciation du salarié à toute instance et action, en précisant au titre de l'accompagnement/coaching : 'Enfin (...) Nous pourrions convenir d'un accompagnement/coaching par le cabinet BPI encore davantage personnalisé. (...)' ;
Que Monsieur [T] ne peut, eu égard au contenu de cette proposition, valablement soutenir que l'engagement de son employeur n'était soumis qu'à une unique condition d'application tenant au dépôt et à l'acceptation de son dossier de candidature au départ, pour occulter la concession attendue du salarié de renoncer corrélativement à toute instance et action ;
Que la société ORACLE FRANCE justifie avoir transmis le 23 mars 2011 un protocole transactionnel, lequel après avoir rappelé que le salarié s'était prévalu de difficultés d'exécution de son contrat de travail et mentionné que ce dernier avait envisagé une suite contentieuse, prévoyait expressément que le salarié renonçait à toute instance et action, tandis que la société Oracle France lui versait une indemnité transactionnelle d'un montant de 204.000 euros ;
Qu'elle détaillait le 11 avril 2011 ce chiffrage, correspondant aux sommes de 135.558 euros au titre des neuf mois de salaire, soit à un salaire de référence de 15.062 euros ainsi qu'à une indemnité différentielle de 67.724 euros, également calculée par application des règles contenues dans le PSE ;
Que ce faisant elle justifie avoir respecté ses engagements, alors qu'il n'est pas avéré que les parties se soient entendues pour retenir une base de calcul de l'indemnité forfaitaire incluant les stock-options, laquelle, ainsi qu'il a déjà été retenu, n'était pas celle prévue par le PSE, ni imposée par une disposition légale ; qu'il n'est pas non plus avéré, s'agissant de l'indemnité différentielle, que les parties se soient entendues pour inclure encore les stock-options, ou pour exclure le plafonnement de 400.000 euros (au titre du montant brut cumulé des sommes versées au titre du préavis, de l'indemnité de licenciement, de l'indemnité complémentaire et du congé de reclassement) pourtant prévu par le même PSE, pour les candidats au départ volontaire comme d'ailleurs pour les salariés contraints au départ, dans la suite de l'accord de méthode signé le 7 octobre 2010 ;
Que force est de constater que Monsieur [T] a cependant, à la fois, continué de réclamer une indemnisation supérieure reposant sur sa propre interprétation de l'engagement initial de la société, et refusé de renoncer à toute instance et action portant sur l'exécution et la cessation de son contrat de travail ;
Qu'enfin, s'agissant d'un accompagnement ou service de coaching/outplacement, l'engagement de la société ORACLE FRANCE prévoyait de déterminer d'un commun accord le cabinet prestataire ; qu'il ressort de l'écrit précité du 11 mars 2011 que l'employeur a proposé un 'accompagnement/coaching par le cabinet BPI encore davantage personnalisé' ; que Monsieur [T] ne démontre pas suffisamment, par les pièces qu'il produit, d'accord de la société ORACLE FRANCE pour recourir à la société RIGHT MANAGEMENT ;
Que dans ces conditions et compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il convient, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, de débouter Monsieur [T] de ses demandes formées au titre de l'indemnité transactionnelle et de l'indemnité différentielle, outre du coaching ;
Que dans la mesure où la proposition indemnitaire de l'employeur ayant toujours été subordonnée à la signature d'un protocole transactionnel, la société ORACLE FRANCE ne peut être condamnée au versement de la somme de 204 000.00 euros en principal ;
Sur les autres demandes
Considérant, par suite des motifs susvisés, que le rejet de la demande de dommages et intérêts formée au titre d'une résistance abusive de l'employeur sera encore confirmé ;
Considérant que Monsieur [T], qui succombe dans la présente instance, doit supporter les dépens ;
Qu'il y a lieu de le débouter de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Considérant qu'au regard de la situation respective des parties, il apparaît équitable de laisser à la charge de la société les frais irrépétibles par elle exposés ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris,
Déboute la société ORACLE FRANCE et Monsieur [T] de leurs demandes formées par application de l'article 700 du Code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,
Condamne Monsieur [T] aux dépens.
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2 ème alinéa de l'art 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Sylvie BOSI, Président, et par Madame Claudine AUBERT, Greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT