COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 20J
2e chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 26 MAI 2016
R.G. N° 14/08352
AFFAIRE :
[H] [U] [O] [L] épouse [T]
C/
[M] [T]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Juin 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
N° Chambre : JAF
N° Cabinet : 9
N° RG : 11/09771
Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :
Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA
Me Bertrand LISSARRAGUE
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT SIX MAI DEUX MILLE SEIZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [H] [U] [O] [L] épouse [T]
née le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 3]
78590 NOISY LE ROI
Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 - N° du dossier [T]
Représentant : Me Estelle FAGUERET-LABALLETTE de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 518
APPELANTE AU PRINCIPAL
INTIMEE INCIDEMMENT
****************
Monsieur [M], [Y] [T]
né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 3]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Adresse 2]
Représentant : Me Bertrand LISSARRAGUE de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1554152
Représentant : Me Barbara VRILLAC, Plaidant, avocat au barreau de SENLIS, vestiaire : PB 16
INTIME AU PRINCIPAL
APPELANT INCIDEMMENT
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Mars 2016 en chambre du conseil, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Agnès TAPIN, Conseiller chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Odile BOUVENOT-JACQUOT, Président,
Madame Agnès TAPIN, Conseiller,
Madame Florence CASSIGNARD, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Claudette DAULTIER,
Le délibéré prévu au 19 Mai 2016 a été prorogé au 26 Mai 2016.
FAITS ET PROCEDURE,
Monsieur [M] [T] et Madame [H] [L] se sont mariés le [Date mariage 1] 1993 à[Localité 1], sans contrat de mariage préalable.
De leur union sont nés trois enfants :
[V] le [Date naissance 4] 1986, actuellement âgé de 29 ans,
-[W] le [Date naissance 2] 1989, actuellement âgée de 26 ans,
[Q] le [Date naissance 3] 1995, actuellement âgée de 20 ans.
Suite à la requête en divorce de Monsieur [T] du 22 novembre 2011, une ordonnance de non-conciliation a été rendue le 29 mars 2012 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de VERSAILLES qui a notamment :
-donné l'autorisation d'introduire l'instance en divorce,
-constaté que les époux vivent séparément,
-attribué à Madame [L] la jouissance du domicile conjugal situé [Adresse 3],
-débouté Madame [L] de sa demande de pension alimentaire au titre du devoir de secours,
-constaté que les parents exercent en commun l'autorité parentale à l'égard de [Q],
-donné acte aux parents de leur accord sur la fixation de la résidence de [Q] au domicile de sa mère,
-fixé un droit de visite et d'hébergement usuel au profit du père,
-fixé la contribution mensuelle due par le père à l'entretien et l'éducation d'[W] à 1.000 € et de [Q] à 800 €, avec indexation.
Le 20 septembre 2012, Monsieur [T] a assigné Madame [L] en divorce sur le fondement de l'article 233 du code civil.
Par jugement du 6 juin 2014, le juge aux affaires familiales a :
-prononcé le divorce des époux pour altération définitive du lien conjugal,
-constaté que le divorce produira effet dans les rapports entre époux quant à leurs biens à la date du 29 mars 2012,
-constaté qu'en application de l'article 265 du code civil, le divorce emporte révocation de plein droit des avantages matrimoniaux qui ne prennent effet qu'à la dissolution du régime matrimonial ou au décès et des dispositions à cause de mort, accordé par un époux envers son conjoint par contrat de mariage ou pendant l'union,
-ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux,
-rejeté la demande de désignation d'un notaire,
-renvoyé les parties à procéder amiablement aux opérations de compte, liquidation et partage de leurs intérêts patrimoniaux et en cas de litige à assigner devant le juge de la liquidation,
-fixé la contribution de Monsieur [T] à l'entretien et à l'éducation des enfants majeures [W] et [Q] à la somme totale de 2.000 €, soit 1.000 € par enfant, et en tant que de besoin l'a condamné à payer cette contribution à Madame [L], avec indexation,
-condamné Monsieur [T] à verser à Madame [L] une prestation compensatoire sous forme d'un capital de 50.000 € nets de frais et de droits,
-constaté l'absence d'opposition de Monsieur [T] sur la jouissance à l'épouse de l'ancien domicile conjugal, bien commun de [Adresse 3] jusqu'à la vente,
-donné acte à Monsieur [T] de ce qu'il autorise son épouse à conserver l'usage de son nom durant un an après le prononcé du divorce,
-ordonné l'exécution provisoire du jugement en ce qui concerne les mesures relatives aux enfants,
-dit que chacune des parties conservera la charge des dépens par elle exposés.
Le 20 novembre 2014, Madame [L] a interjeté un appel général du jugement.
Dans ses dernières conclusions du 7 mars 2016, Madame [L] demande de :
-réformer partiellement le jugement entrepris, et statuant à nouveau,
-fixer la contribution de Monsieur [T] à l'entretien et à l'éducation de [Q] à la somme mensuelle de 1.820 € avec indexation,
-dire que cette somme sera due jusqu'à ce que [Q] ait terminé ses études et exerce une activité professionnelle rémunérée non occasionnelle lui permettant de subvenir à ses besoins,
-condamner Monsieur [T] à verser à Madame [L] une prestation compensatoire sous forme d'un capital de 220.000 €,
-dire que Madame [L] conservera l'usage du nom marital,
En tout état de cause,
-confirmer le jugement entrepris pour le surplus,
-débouter Monsieur [T] de l'ensemble de ses demandes,
-condamner Monsieur [T] au paiement de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamner Monsieur [T] aux dépens.
Dans ses dernières conclusions du 29 février 2016, Monsieur [T] demande de :
-réformer partiellement le jugement entrepris,
-constater qu'un accord est intervenu entre Monsieur [T] et sa fille [W] sur l'arrêt du versement de la pension alimentaire à compter du 1 février 2016,
-confirmer le jugement pour le surplus,
En tout état de cause,
-débouter Madame [L] de toutes ses demandes,
-condamner Madame [L] aux dépens.
Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie à leurs écritures conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 3 mars 2016.
La cour a demandé à l'audience à Monsieur [T] de produire sous huitaine son avis d'impôt 2015 sur ses revenus 2014, ainsi qu'à la partie adverse.
Il ne l'a pas fait.
MOTIFS
Sur le nom d'usage
Madame [L] soutient qu'elle a toujours été connue de l'ensemble de ses collègues sous le nom de [T] depuis son mariage, que depuis le jugement, elle a changé de poste au sein de la CAF 92 puisque le sien a été supprimé, et qu'elle a nécessairement besoin de l'appui de son réseau de contacts actuels qui la connaissent sous le nom de [T]. Elle ajoute avoir développé une activité annexe de « coaching personnel » dont le développement passe notamment par l'activation d'un réseau par internet qui pour elle a été enregistré sous le nom de [T], et qu'elle perdrait l'ensemble des bénéfices de ce référencement si elle perdait l'usage du nom marital.
Monsieur [T] réplique que Madame [L] ne justifie pas de son référencement sur internet sous le nom de [T].
Selon l'article 264 du code civil, à la suite du divorce, chacun des époux perd l'usage du nom de son conjoint. L'un des époux peut néanmoins conserver l'usage du nom de l'autre, soit avec l'accord de celui-ci, soit avec l'autorisation du juge, s'il justifie d'un intérêt particulier pour lui ou pour les enfants.
Madame [L] qui travaille depuis le mariage à la CAF 92 sous le nom de [T], et a créé une activité de « coaching » en qualité d'auto-entrepreneur en 2009 également sous ce nom (cf les déclarations de chiffre d'affaires), justifie d'un intérêt particulier pour elle de conserver l'usage du nom de son époux, sans limitation de durée.
Le jugement est donc infirmé de ce chef.
Sur la prestation compensatoire
Madame [L] fait valoir que la rupture du mariage va créer incontestablement une disparité dans les conditions de vie des époux, que l'accident dont a été victime Monsieur [T] est intervenu en 1973 alors que les époux ne se connaissaient pas, que les séquelles de cet accident n'ont pas empêché Monsieur [T] de développer une vie personnelle, en ayant trois enfants, et professionnelle épanouie, qu'il a en effet mené une brillante carrière, son handicap ne l'ayant pas empêché de gravir les échelons au sein de son entreprise, ni mis un frein à sa carrière, comme sa surdité totale d'une oreille et celle partielle de l'autre oreille. Madame [L] explique que Monsieur [T] a toujours travaillé sans interruption, mené une carrière brillante avec une rémunération toujours croissante, qu'elle-même est suivie médicalement pour un risque génétique de cancer du sein qui nécessite une surveillance annuelle, et qu'elle a été diagnostiquée récemment comme souffrant d'arthrose du poignet droit nécessitant le port d'une orthèse nocturne, qui s'est révélée suite à la suite d'un accident du travail.
Madame [L] indique que les choix opérés par le couple afin qu'elle puisse rester au domicile pour s'occuper des enfants, ont permis à Monsieur [T] d'accéder à un poste à très haute responsabilité au sein de son entreprise, qu'il a retrouvé très rapidement du travail après son licenciement économique en 2002 qui n'a pas affecté son évolution de carrière, que Monsieur [T] ne communique toujours aucun document sur sa demande officielle de retraite, ni ses droits à retraite, qu'elle estime à 6.957 € par mois, que contrairement à ce que soutient Monsieur [T], elle n'est pas fonctionnaire, qu'elle ne dispose pas des diplômes nécessaires pour être cadre supérieur, et que son activité de « coaching » qu'elle a démarré en 2009 ne lui a rien rapporté en 2014.
Sur le patrimoine des époux, elle déclare ne pas disposer de toutes les informations sur les valeurs mobilières dès lors que la plupart des comptes communs ont été ouverts au nom de Monsieur [T] et n'était pas destinataire des relevés bancaires, que les sommes réparties entre les parties après vente de tout leur patrimoine immobilier, ne seront pas égales puisque Monsieur [T] fait état d'une reconnaissance de dette signée par elle au moment de l'achat du domicile conjugal à NOISY LE ROI, et que la partie du prix de vente du bien immobilier commun situé sur l'ile d'OLERON qui lui est revenu, a été entièrement investi par elle dans l'entretien et le paiement des charges du domicile conjugal du NOISY LE ROI, dont elle a bénéficié de la jouissance à titre gratuit, et de sa participation aux frais de scolarité de [Q].
Monsieur [T] répond que l'exposé des situations respectives des parties suffit à démontrer le caractère exorbitant de la somme réclamée, et que Madame [L] ne saurait ignorer la réalité de son état de santé qui est particulièrement préoccupant.
Il ajoute que son épouse est responsable du pôle des consultations sociales et familiales de l'agence des allocations familiales de [Localité 4] qui est une des plus grosses agences des HAUTS de SEINE, qu'elle a bénéficié de promotions dans sa carrière, et a plus de 10 ans devant elle pour bénéficier d'opportunité de progression à un poste de direction, qu'elle a encore la possibilité de parfaire ses droits à la retraite, et que dès que lui même fera valoir ses droits à retraite, il « sera dans une situation à minima d'égalité vis à vis de Madame [L] ».
Monsieur [T] explique qu'il a gravi un à un les échelons au sein d'[Établissement 2] mais qu'il ne pourra plus progresser, que son avenir professionnel est bien moins stable que celui de son épouse, que compte-tenu de la crise économique, ses revenus provenant de sa part variable ne sont nullement garantis, et qu'il entend faire valoir ses droits à retraite dès que possible en qualité d'assuré handicapé, bénéficiant d'ailleurs d'un droit à retraite à taux plein depuis le 1er juillet 2012.
Il déclare que les époux n'ont fait aucun choix professionnel pour favoriser l'éducation des enfants, que Madame [L] a toujours travaillé comme lui, qu'elle a certes bénéficié de congés parentaux mais a toujours travaillé à temps plein après le mariage, et qu'il bénéficie d'une reconnaissance de dette de Madame [L] régularisée devant notaire, les sommes prétées provenant de l'indemnisation de son handicap.
Suivant l'article 270 du code civil, l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans leurs conditions de vie respectives, en fonction de la situation au moment du prononcé du divorce et de l'évolution dans un avenir prévisible.
Il y a lieu de tenir compte, notamment, de la durée du mariage, de l'âge et de l'état de santé des époux, de la qualification et de la situation professionnelles des époux, des conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, du patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, de leurs droits existants et prévisibles, et leur situation respective en matière de pension de retraite.
Selon l'article 274 du code civil, le juge décide des modalités selon lesquelles s'exécutera la prestation compensatoire en capital. Celles-ci sont limitativement prévues par la loi.
Les ressources, les charges, les parcours professionnels et familiaux, les droits à retraite et les patrimoines commun et propres des parties sont les suivants au vu de l'ensemble des pièces produites.
Madame [L], âgée actuellement de 54 ans, s'est mariée avec Monsieur [T], âgé de 59 ans, le 10 juillet 1993, soit depuis pratiquement 21 ans au moment du jugement de divorce, et 19 ans et demi jusqu'à l'ordonnance de non conciliation.
La surveillance médicale annuelle de Madame [L] n'est pas établie par des documents. Il ressort en revanche d'un certificat du 26 mai 2015 qu'elle présente des « problèmes intéressants l'appareil locomoteur et qui à terme peuvent retentir sur sa capacité de travail » sans plus de précision. Elle justifie également avoir été « consolidée dans ses lésions » le 20 août 2015, sans indication complémentaire.
Monsieur [T] a été gravement accidenté de la route le 6 décembre 1973 dont il est résulté une gangrène et de nombreuses fractures des membres inférieurs qui ont demandé plusieurs années d'opérations et de soins intensifs avant consolidation. Après cette consolidation, la COTOREP a reconnu le handicap de Monsieur [T] aux taux de 80 % le 25 mai 1981.
Depuis son accident, Monsieur [T] est sujet, selon son dossier médical de décembre 2011, à de graves épisodes d'érésypèle récidivant pouvant entrainer gangrène et embolie, et d'eczémas suitants pourvant entrainer une amputation de sa jambe droite dans les prochaines années. Les risques d'aggravation de son état de santé sont importants, avec des répercussions sur sa vie quotidienne pouvant aller jusqu'à un aménagement de son lieu de vie.
Enfin, depuis son adolescence, Monsieur [T] est sourd à 100 % de son oreille gauche, non appareillable ni opérable, et une perte d'audition à l'oreille droite de 70 %, appareillée, mais non opérable. Le médecin indique en novembre 2011 que l'évolution spontanée de ce handicap est défavorable.
Les revenus actuels de Madame [L] sont constitués principalement par ses salaires qu'elle perçoit en qualité de « Manager de service niveau 1 » au statut cadre, au sein de la CAF 92 des HAUTS de SEINE, et d'auto-entrepreneur d'une activité de « coaching » qu'elle exerce depuis novembre 2009. Selon ses avis d'impôt et bulletins de paie, elle a perçu :
-en 2010, des salaires de 35.210 € nets imposables,
-en 2011, des salaires de 36.809 €,
-en 2012, des salaires de 37.202 €, des BNC professionnels de 1.935 €, des revenus de capitaux mobiliers de 1.583 € et des revenus nets fonciers de ' 1350 €, qui représentent en moyenne
3.393 € par mois,
-en 2013, des salaires de 37.746 €, des BNC professionnels de 480 €, des revenus de capitaux mobiliers de 185 €, et des revenus nets fonciers de ' 2043 €, qui représentent en moyenne
3.201 € par mois,
-en 2014, des salaires de 37.836 € et des revenus nets fonciers de ' 1.093 €, qui représentent en moyenne 3.153 € par mois,
-en 2015, des salaires de 38.236 € et un chiffre d'affaires brut de 500 € qui représentent en moyenne environ 3.228 € par mois.
Il est incontestable que les revenus de Madame [L] diminuent depuis 2012.
Son relevé de carrière et des attestations émanant de la DRH de la CAF 92 établissent que Madame [L] travaille pour la CAF depuis le 11 octobre 1982, qu'elle a pris un congé parental du 22 juin 1996 au 7 août 1998 pour s'occuper des trois enfants d'âges rapprochés, puis un congé sans solde du 10 août au 9 septembre 1998, étant justifié qu'entre janvier 1997 et mars 1998 Monsieur [T] a préparé un MBA (finances, marketing, stratégie et ventes ...) à l'université [Établissement 4] à mi-temps, qu'elle a travaillé à temps partiel du
3 septembre 1990 jusqu'au 31 août 1995, puis du 10 septembre 1998 jusqu'au 30 novembre 2003, et qu'elle est devenue cadre en 2004.
Elle a été nommée à compter du 1er septembre 2005 « responsable d'agence action sociale à [Localité 4] »
L'adjointe de la DRH de la CAF 92 atteste le 15 juin 2015 que Madame [L] n'a pas accès aux postes d'agents de direction parce qu'elle n'est pas titulaire du diplôme nécessaire, et que l'agence de [Localité 4] fermant ses portes fin 2015, elle sera reclassée en interne sur un poste de même niveau.
Les revenus actuels de Monsieur [T] sont constitués d'un salaire fixe et d'une partie variable, se situant entre 1 à deux fois le montant du salaire fixe au vu des quelques bulletins de paie produits entre 2010 et 2015. Il travaille depuis le 20 janvier 2003, actuellement en qualité de « Director Sales Management » au sein de la société [Établissement 2], dite [Établissement 2]. Suivant ses avis d'impôt, sauf celui 2015 de ses revenus 2014 absent du dossier de Monsieur [T], il a perçu :
-en 2010, des salaires de 140.424 € nets imposables, et des revenus nets fonciers de ' 3.457 €,
-en 2011, des salaires de 146.958 € et des revenus nets fonciers de ' 2713 €,
-en 2012, des salaires de 156.531 €, des revenus de capitaux mobiliers de 1.320 € et des revenus nets fonciers de ' 2472 €, qui représentent en moyenne 13.154 € par mois,
-en 2013, des salaires de 158.141 €, des revenus de capitaux mobiliers de 4.603 € et des revenus nets fonciers de -1635 €, qui représentent en moyenne 13.562 € par mois,
-en 2014, des salaires de 143.321 € en l'absence de production de l'avis d'impôt 2015 sur les revenus 2014, aucune information n'étant communiquée sur les revenus fonciers nets, ni les revenus de capitaux mobiliers,
-en 2015, des salaires de 179.630 €, aucune information n'étant communiquée sur les revenus fonciers nets, ni les revenus de capitaux mobiliers. Cela représente environ 14.969 € par mois.
[Établissement 2] indique le 7 décembre 2015 que Monsieur [T] a perçu en avril 2015 un revenu exceptionnel de 24.770 € bruts correspondant à 32,5 jours de compte épargne temps, pour les années 2014 et 2015, et qu'il n'est ni démissionnaire, ni en période d'essai, ni en période de préavis.
Il a été reconnu travailleur handicapé en 2001.
Comme Monsieur [T] n'a produit aucun relevé de carrière émanant notamment de la CNAV, ni d'avis d'impôt antérieur à 2011, aucune comparaison ne peut être faite des salaires perçus par chaque époux depuis le mariage.
Monsieur [T] qui déclare dans son CV produit par Madame [L], avoir une expérience de 20 ans dans l'étude, le développement et la commercialisation d'équipements et services de télécommunications, travaille sans discontinuer depuis 1979 après avoir obtenu en 1979 une licence EEA, puis en 1987 un diplôme de technologies et de marketing industriel à l'[Établissement 1] et l'université [Établissement 3].
Il a travaillé successivement pendant le mariage pour les sociétés CS TELECOM, GTS OMINCOM, GTS EBONE GLOBAL SYSTEM, IBbus, puis à compter de janvier 2003 pour la société AT&T EMEA.
Il déclare avoir été licencié en 2002, mais avoir retrouvé rapidement du travail.
Les droits à retraite de Madame [L] sont, suivant l'évaluation de la CNAV du 27 avril 2015, de 1.344,31 € bruts par mois au 1er décembre 2023 versés pour le régime général.
L'évaluation n'est pas communiquée pour l'ARRCO et l'AGIRC. Elle dispose au 4 janvier 2015 de 4.154 points pour l'ARRCO et de 2.735 points pour L'AGIRC.
A cette évaluation et ces points s'ajoute la rente PREFON qu'elle percevra. En effet, Madame [L] justifie y avoir cotisé depuis 2004. Au 31 décembre 2011, son épargne s'élevait à
19.903 € et elle pouvait bénéficier d'une rente annuelle de :
*1930 € si elle cotisait jusqu'en octobre 2016,
*2980 € si elle cotisait jusqu'en octobre 2021,
*4420 € si elle cotisait jusqu'en octobre 2026.
Ces chiffres qui peuvent encore évolués jusqu'à la retraite de Madame [L], révèlent cependant que le fait qu'elle n'ait pas cotisé à taux plein pendant 20 ans, a diminué ses droits, contrairement à Monsieur [T] qui a toujours travaillé à temps plein et n'a pas pris de congé parental, et ne s'est jamais mis en disponibilité.
En effet, même si celui-ci ne produit aucun élément sur ses droits à retraite, il ressort des documents produits par Madame [L] et des avis d'impôt que :
-en décembre 2008, Monsieur [T] disposait de 55.492 points AGIRC dans la tranche B, et de 12.168 poins dans la tranche C ;
-en décembre 2008, Monsieur [T] disposait de 903 points ARRCO ;
-au 31 décembre 2009, il disposait d'une « épargne supplémentaire » de 39.694 € provenant d'un « contrat de retraite supplémentaire souscrit pour lui par son employeur [Établissement 2] auprès d'AXA » et qui « sera converti en rente au moment de son départ à la retraite. » S'il part à la retraite à
65 ans, il pourra percevoir :
*dans le cas d'une épargne de 39.694 €, une rente annuelle de 2.489 €,
*dans le cas d'une épargne progressant normalement, une rente annuelle de 6.415 € ;
-en 2012 et en 2013, suivant ses deux avis d'impôt, il a versé 25.000 € et ensuite 23.291 € sur « une épargne retraite ».
Enfin, certes Monsieur [T] justifie avoir répondu à un questionnaire de la CNAV sur un départ anticipé à la retraite le 1er février 2012, mais il n'est nullement justifié qu'il la prenne dans les mois à venir. La DRH de [Établissement 2] a d'ailleurs indiqué le 7 décembre 2015 que « Monsieur [T] n'est ni démissionnaire, ni en période d'essai, ni en période de préavis. »
Le patrimoine commun des époux est constitué de :
1 ' le domicile conjugal constitué d'une maison d'habitation de sept pièces principales avec
750 m² de terrain, situé à NOISY LE ROI, et vendu le 18 août 2015 au prix net vendeur de 665.000 € sequestré chez le notaire.
2 ' une maison d'habitation de trois pièces principales avec la jouissance d'un jardin et deux parkings extérieurs, située à SAINT LOUIS sur l'ile de la [Localité 6], achetée le 12 décembre 2006 au prix de 264.472 €. Cette maison qui était louée 575 € nets par mois en janvier 2013 (après déduction de l'assurance loyers et des frais de gestion), a fait l'objet d'une promesse de vente courant 2016, signée par les parties, au prix de 86.000 €. Monsieur [T] rembourse le prêt de la totalité du prix d'achat, contracté auprès de la Société Générale, à raison d'échéances mensuelles de 1.604,39 € chacune, après renégocation du taux d'intérêt en octobre 2014, jusqu'au mois de mars 2027.
La vente de l'immeuble se fera à perte.
2 ' des valeurs mobilières de 293.422 € selon la déclaration de Madame [L] au jour de l'ordonnance de non-conciliation. La cour relève qu'aucun relevé de compte n'est produit, Madame [L] déclarant que ces valeurs mobilières proviennent de comptes ouverts au CREDIT AGRICOLE, la BNP, de comptes épargne retraite, de six contrats d'assurance vie, et d'épargne salariale.
Les parties étaient également propriétaires en commun d'une maison située sur l'ile d'OLERON qui a été vendue le 27 juillet 2012 au prix net vendeur de 155.752 € après paiement des diverses taxes et honoraires et de l'organisme prêteur. Chaque partie a donc perçu 77.876 €.
Madame [L] déclare avoir dépensé cette somme pour faire face aux charges élevées du domicile conjugal qu'elle n'a quitté que fin 2014 et au coût des études de [Q].
Madame [L] reconnaît avoir signé une reconnaissance de dette au profit de Monsieur [T] qui consiste, selon le mail d'un notaire, en ce qu'elle « lui doit 15 % du prix de vente des lots 198 et 201 et des actions donnant la jouissance, puis à l'attribution du lot n°521 dépendant d'un ensemble immobilier situé à la [Localité 2], acquis le 19 août 1987, vendus en 1997. » Madame [L] est redevable, toujours d'après ce mail, au 10 juin 2015 d'une somme de 27.327 € « plus les intérêts légaux depuis 1997 prévus dans la reconnaissance de dette ».
Ainsi au vu de tous ces éléments, la totalité de l'actif de la communauté s'élève à environ
960.000 € dont Monsieur [T] devrait recevoir environ 510.000 € en raison de la reconnaissance de dette précitée et Madame [L] environ 450.000 €, sauf à parfaire.
Aucune information n'est communiquée sur le patrimoine propre de Monsieur [T]. Aucun document n'est communiqué par lui sur ses divers comptes bancaires, contrats d'assurance vie etc '
Madame [L] ne produit pas de relevé de ses comptes épargne, ni de ses contrats d'assurance vie. Elle déclare sur l'honneur le 20 février 2016 détenir :
*2.234 € sur un CODEVI,
*801,81 € sur un livret A,
*52,41 € sur un contrat d'assurance vie BNP.
Les charges fixes justifiées de Madame [L] comprennent outre les charges habituelles d'électricité, de téléphone mobile, d'assurances automobile, habitation, de salaires d'un employé de maison dépendant d'une association et payé en CESU, ainsi que ses dépenses courantes d'entretien, de nourriture et d'habillement :
-le loyer de 20 € par mois d'un parking,
-l'impôt 2015 sur les revenus 2014 de 1.639 €,
-le loyer de 970,25 € TCC d'un appartement de deux pièces principales qu'elle a loué à NOISY LE ROI en janvier 2015, selon la quittance de février 2016,
-la taxe d'habitation et la contribution à l'audio visuel public 2015 du domicile conjugal qu'elle habitait de 2.558 €,
-le remboursement d'un prêt « pour la caution et l'installation » consenti par le CE de la CAF 92 de 4.000 € par échéances mensuelles de 80 € chacune jusqu'en septembre 2019,
-le remboursement d'un prêt « équipement » consenti par le CE de la CAF 92 de 598 € par échéances mensuelles de 54 € chacune jusqu'en septembre 2016.
Les charges fixes justifiées de Monsieur [T] comprennent outre les charges habituelles d'électricité, d'assurance habitation de sa location, de propriétaire de la maison à la [Localité 6], de téléphone mobile, ainsi que les dépenses courantes d'entretien, de nourriture et d'habillement:
-l'impôt 2015 sur les revenus 2014, seule la première page de l'avis d'impôt étant produit, de 27.670 €,
-le loyer d'un appartement situé à [Adresse 4], loué le 7 octobre 2011, de 2.252 € TCC en février 2012,
-les taxes foncières de la maison de la [Localité 6] 2011 de 1.478 €.
Il s'ensuit que les choix professionnels effectués par Monsieur [T] pour poursuivre sa carrière professionnelle à un poste de responsabilités élevées au sein des entreprises pour lesquelles il a travaillé et travaille encore, et pour entreprendre pendant une année des études aux ETATS UNIS, a conduit Madame [L], en accord avec Monsieur [T], à ne pas travailler pendant pratiquement trois années pour s'occuper de leurs trois enfants d'âges rapprochés, puis à temps partiel jusqu'en 2003.
Eu égard à la durée du mariage des époux, de leurs âges, des conséquences des choix professionnels faits par Madame [L] pendant la vie commune pour l'éducation des trois enfants et en accord entre les époux, du patrimoine prévisible de ceux-ci en capital après la liquidation du régime matrimonial et de leurs droits prévisibles et de leur situation respective en matière de pension de retraite qui sont nettement en défaveur de Madame [L], qui a peu travaillé à temps complet, ou pour des rémunérations nettement inférieures à celles de son époux, est établie la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux, disparité qui s'effectue au détriment de Madame [L].
Le paiement d'une prestation compensatoire en capital à son bénéfice lui permettra de compenser sa situation financière avec celle de Monsieur [T]. Il convient dans ces conditions de la fixer à 200.000 €, en infirmant le jugement de ce chef.
Monsieur [T] est condamné à la payer à Madame [L].
Sur la contribution à l'entretien et l'éducation des deux filles
Madame [L] accepte dans ses dernières écritures la demande de Monsieur [T] de supprimer à compter du 1er février 2016 le paiement d'une contribution à [W] qui travaille en qualité de psychologue.
Il convient d'infirmer le jugement de ce chef dans ces conditions.
Il ne reste à statuer que sur le montant de la contribution pour [Q], âgée de 20 ans.
Suivant l'article 371-2 du code civil, chacun des parents doit contribuer à l'entretien et l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent et des besoins de l'enfant. Cette obligation ne cesse pas de plein droit à la majorité des enfants et elle ne disparaît que lorsque les enfants ont achevé leurs études et ont en outre acquis une autonomie financière les mettant hors état de besoin.
Il convient de se reporter aux développements précédents sur les ressources et les charges des parties.
Les besoins de [Q] qui suit des études aux ETATS UNIS depuis l'année scolaire 2014/2015, sont ceux d'une jeune fille de son âge vivant à l'étranger.
Madame [L] justifie par de nombreuses pièces (dont les relevés des comptes bancaires de [Q] à la BNP et la Société Générale depuis août 2014) que l'ensemble des dépenses de la jeune fille s'élève à environ 2.251 € par mois, y compris le coût des transports entre [Établissement 5], où elle étudie à la [Établissement 6] pour obtenir un Bachelor de communication.
Elle justifie de ce que notamment les frais suivants s'élèvent à :
*8.500 € pour une année universitaire,
*1.462 € pour un aller retour entre SALT LAKE CITY et PARIS,
*144 € tous les trois mois pour l'affiliation à la sécurité sociale pour les étrangers.
A ces coûts s'ajoutent les frais de logement, d'entretien, de nourriture et d'habillement, annexes de scolarité, de loisirs, et le virement permanent que Madame [L] lui adresse chaque mois de 250 €.
Ainsi, au vu des ressources des parties, importantes pour Monsieur [T] comparativement à celles de Madame [L], des charges des parties qui ont vendu tous leurs biens immobiliers communs, ainsi que des besoins importants de [Q] en raison de son éloignement pour suivre un enseignement aux ETATS UNIS dont elle a de très bons résultats, il convient de fixer à
1.600 € la contribution mensuelle de Monsieur [T] à l'entretien et l'éducation de [Q] à compter du présent arrêt, avec l'indexation prévue au présent dispositif.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de Madame [L] les frais irrépétibles au cours de cette procédure. Elle est donc déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
En revanche Monsieur [T] qui succombe à titre principal, dans sa défense et ses demandes, est condamné aux dépens de cette instance.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort, après débats en chambre du conseil,
INFIRMANT partiellement le jugement du 6 juin 2014,
ET STATUANT à nouveau ;
DIT que Madame [H] [L], à la suite du divorce, conserve l'usage du nom de Monsieur [M] [T]
FIXE à la somme de 200.000 € la prestation compensatoire en capital due par Monsieur [M] [T] à Madame [H] [L], nets de frais et de droits, et au besoin l'y condamne,
DIT que le paiement de toute contribution par Monsieur [M] [T] pour sa fille [W] est supprimée à compter du 1er février 2016,
FIXE à 1.600 € la contribution mensuelle à l'entretien et l'éducation de [Q] due par Monsieur [M] [T] à Madame [H] [L], à compter du présent arrêt, et au besoin l'y condamne,
DIT que cette contribution sera réévaluée le 1er juin de chaque année par le débiteur et pour la première fois le 1er juin 2017 en fonction de la variation de l'indice mensuel des prix à la consommation des ménages urbains (hors tabac) dont le chef est ouvrier ou employé publié par l'INSEE (tel.01.41.17.50.50 ou 66.11, minitel 3615 code INSEE, internet : www.insee.fr ), l'indice de base étant le dernier publié à la date de la présente décision,
DIT que cette contribution sera due au-delà de la majorité ou jusqu'à la fin des études poursuivies par l'enfant dont il devra être justifié chaque année ou jusqu'à ce que l'enfant exerce une activité rémunérée non occasionnelle au moins égale au S.M.I.C. lui permettant de subvenir lui-même à ses besoins,
CONFIRME le jugement en en toutes ses dispositions non contraires au présent arrêt,
DEBOUTE les parties de leurs autres demandes,
CONDAMNE Monsieur [M] [T] aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Odile BOUVENOT-JACQUOT, Présidente et par Madame Claudette DAULTIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER,Le PRESIDENT,