LCOUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 58G
3e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 19 MAI 2016
R.G. N° 14/02963
AFFAIRE :
SA LEGAL & GENERAL
C/
[F], [C] [M]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Mars 2014 par le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES
N° Chambre : 01
N° RG : 12/00694
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES
Me Bruno GALY de l'AARPI BEZARD GALY COUZINET CONDON
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX NEUF MAI DEUX MILLE SEIZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SA LEGAL & GENERAL
RCS B 338 746 464
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Monsieur Olivier POTELLET, président directeur général, dûment habilité
Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625
Représentant : LA SELARL LABALTE AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
APPELANTE
****************
Monsieur [F], [C] [M]
né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 1] (75)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Bruno GALY de l'AARPI BEZARD GALY COUZINET CONDON, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000002
INTIME
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Mars 2016 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise BAZET, Conseiller et Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Véronique BOISSELET, Président,
Madame Françoise BAZET, Conseiller,
Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller
Greffier en pré-affectation, lors des débats : Madame Maguelone PELLETERET
FAITS ET PROCÉDURE
M. [M], en tant que salarié de la société HPC, est bénéficiaire d'un contrat d'assurance de groupe couvrant les garanties invalidité décès et prévoyance santé souscrit auprès de la société Legal & Général. Le 16 septembre 2009, il a été placé en arrêt de travail et a fait l'objet d'un licenciement pour inaptitude le 21 octobre 2011.
Le 9 décembre 2011 il a fait assigner la société Legal & Général devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Chartres, lequel a renvoyé l'examen de l'affaire devant le tribunal.
Par jugement du 5 mars 2014, la juridiction a :
débouté M. [M] de ses demandes au titre de la garantie incapacité,
condamné la société Legal & Général à payer à M. [M] au titre de la garantie invalidité, en deniers ou quittances, les sommes suivantes :
52.486,11 euros, 8.851,41 euros, 11.208,58 euros, 11.241,20 euros, 11.241,20 euros, 54.283,11 euros par trimestre à compter du 1er octobre 2012, dont seront à déduire les sommes payées par la CPAM d'[Localité 2] ainsi que la CSG et la CRDS et ce jusqu'à la date du jugement,
puis 54.283,11 euros par trimestre dans les mêmes conditions.
débouté M. [M] de sa demande de dommages-intérêts,
dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné la société Legal & Général aux dépens.
La société Legal & Général a interjeté appel de cette décision, et, aux termes de conclusions du 17 février 2016 demande à la cour de :
confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [M] de ses demandes au titre de la garantie incapacité,
réformer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné le calcul des garanties invalidité sur la base du salaire brut perçu et, statuant à nouveau :
juger que les règlements par elle effectués au titre de la garantie invalidité antérieurement au prononcé du jugement et couvrant la période comprise entre le 1er octobre 2012 et le 31 décembre 2013 (avis n° 70744, 75873, 81959, 84377 et 88770) sont conformes aux prescriptions contractuelles et ont donc rempli M. [M] de ses droits,
par conséquent, juger que les règlements complémentaires payés sur la base du salaire brut en application du jugement du tribunal de grande instance de Chartres au titre de l'exécution provisoire pour cette même période devront être remboursés par compensation avec les rentes restant à verser à M. [M], pour un montant à parfaire de 178.904,35 euros,
juger que les règlements des trimestrialités à venir de la rente invalidité devront être calculés sur la base du salaire net de M. [M] conformément aux dispositions contractuelles,
condamner M. [M] à rembourser en quittances ou deniers la somme de 52.486,11 euros à titre de remboursement de trop-perçu,
débouter M. [M] de ses demandes, fins et conclusions,
condamner M. [M] à verser la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens avec recouvrement direct.
Dans d'ultimes conclusions du 17 février 2016, M. [M] prie la cour, confirmant partiellement le jugement et statuant à nouveau, de :
condamner Légal & Général à lui payer les sommes suivantes :
Indemnités contractuelles garantie incapacité (deuxième quinzaine novembre 2010) : 10.631,71 euros et subsidiairement la moitié de cette somme,
Indemnités contractuelles garantie invalidité :
- Période 20 mai 2011-31 août 2011 : 52.486,11 euros, en deniers ou quittances,
- 4ème trimestre 2011 : 8.851,41 euros,
- 1er trimestre 2012 : 11.208,58 euros,
- 2ème trimestre 2012 : 11.241,20 euros,
- 3ème trimestre 2012 : 11.241,20 euros.
fixer à la somme de 54.283,11 euros le montant de l'indemnité trimestrielle due par la société Légal et Général à compter du 1er octobre 2012, dont à déduire les rentes payées par la CPAM depuis cette date par période trimestrielle, ainsi que la CSG et la CRDS au taux en vigueur à la date d'échéance, et la condamner à payer la différence entre cette somme et celle effectivement payée par elle sur la période en cause, jusqu'à la date du jugement,
condamner la société Légal & Général à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts, la somme de 7.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens avec recouvrement direct.
Dans des conclusions d'incident du 17 février 2016 adressées au conseiller de la mise en état, M. [M] demande à la cour de rejeter les conclusions adverses n° 4 (soit, celles du 17 février 2016) et la pièce 26 signifiées le 17 février 2016.
Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 18 février 2016.
SUR CE,
- Sur la procédure
Par message RPVA du 15 mars 2016, le conseil de M. [M] a indiqué qu'il abandonnait sa demande tendant à voir déclarer irrecevables les dernières conclusions de l'appelant. A l'audience, il a confirmé cet abandon.
- Sur la garantie incapacité
S'agissant de la période du 13 au 30 novembre 2010, le tribunal a dit que l'assureur devait la moitié du salaire puisque M. [M] avait repris son activité à temps partiel. Constatant qu'après lui avoir opposé un refus, l'assureur lui avait réglé la somme de 4.058,12 euros au titre de cette période, le tribunal a rejeté la demande de M. [M] de ce chef.
L'appelante indique que M. [M] n'a jamais repris son activité du 13 au 30 novembre 2010 même s'il était apte à le faire à temps partiel et qu'en conséquence elle ne lui doit rien, elle sollicite donc, mais pour cet autre motif, la confirmation de la décision entreprise.
M. [M] prétend quant à lui qu'il était bien en arrêt de travail durant cette période, qu'une reprise de 15 jours entre deux périodes d'ITT n'a aucun sens, et, subsidiairement, qu'il est en droit d'obtenir la moitié de la somme due par l'assureur sur le fondement de l'article B.
L'expert qui l'a examiné contradictoirement le 18 mai 2011 a indiqué qu'il devait être considéré comme consolidé au terme de son arrêt de travail, soit au 13 novembre 2010 et qu'à cette date, son état était compatible avec une reprise de travail à temps partiel, dans son poste antérieur ou dans un autre poste.
Il est donc tout à fait inexact de prétendre que l'expert a fait une erreur en omettant cette période de 15 jours dans les périodes d'ITT, alors qu'il résulte de l'expertise que M. [M] a lui-même expliqué qu'il avait rechuté en décembre 2010 suite à une interruption de son traitement. L'expert a d'ailleurs à nouveau examiné M. [M] et a établi un second rapport le 18 mai 2011 dans lequel il maintient ses conclusions sur les périodes d'ITT, rappelant même qu'il y a eu une rechute de la symptomatologie anxio-dépressive le 1er décembre 2010.
Il est donc acquis que du 13 au 30 novembre 2010, M. [M] ne se trouvait pas en état d'incapacité temporaire totale de travail, et qu'en application de l'article C1 (page 7 du contrat), il ne relevait pas de la prise en charge par l'assureur. N'ayant pas repris son activité à temps partiel, il ne peut prétendre à aucune indemnisation, l'article B, 'reprise d'activité' (page 7 du contrat) n'ayant pas vocation à s'appliquer.
Pour ce motif substitué, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [M] de sa demande de ce chef.
- Sur la garantie invalidité
La discussion qui oppose les parties porte sur la base de calcul de l'indemnité versée à compter du licenciement de M. [M], alors classé invalide à hauteur de 70 % : 95 % du salaire brut, comme le soutient M. [M] et l'a retenu le tribunal ou bien du salaire net, comme le demande l'appelante.
Celle-ci soutient notamment qu'il résulte de l'intitulé de l'article 4 des conditions générales du contrat que l'arrêt de travail est une notion générique qui vise tant les situations d'invalidité que les situations d'incapacité de travail, que prendre comme base de calcul le salaire brut aboutirait à un enrichissement sans cause de l'assuré, qu'en effet, lorsque le contrat de travail est rompu, les prestations versées par l'assureur ne transitent plus par l'employeur mais sont versées directement au bénéficiaire et ne sont plus assimilées à un salaire, que la pension n'est pas soumise à charges sociales et que les prestations versées, que ce soit par la CPAM ou par l'assureur sont donc nécessairement nettes de charges sociales, à la seule exception des contributions CSG et CRDS.
M. [M] revendique le bénéfice de l'article 9 de la notice d'information qui prévoit que la base des prestations est le salaire brut, et, à tout le moins, que les dispositions de l'article 4.5 ne concernent que le cas où l'assuré est en ITT et non en invalidité, qu'à tout le moins il existe une ambiguïté entre les deux clauses qui doit donner lieu à l'interprétation qui lui est la plus favorable. Il soutient que la perception d'une pension calculée sur le salaire brut ne constitue nullement un enrichissement sans cause puisqu'il doit désormais cotiser lui-même pour sa retraite et sa complémentaire santé.
***
Il n'est pas discuté que M. [M] a été classé en invalidité (70 %) à compter du 20 mai 2011, et qu'il a été licencié postérieurement, le 21 octobre 2011.
L'article 5.5 des conditions particulières du contrat en cause (qui figurent également dans l'article 4.5 des conditions générales de la police) prévoit, sous le titre 'licenciement d'un assuré en arrêt de travail' : les prestations sont calculées, selon les mêmes modalités, mais sur la base des prestations indiquées aux Conditions Particulières correspondant au salaire net (souligné par la cour).
Contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le fait que ce texte vise le licenciement du salarié 'en arrêt de travail' ne suffit pas à en restreindre l'application aux cas d'incapacité de travail à l'exclusion des invalidités, la notion d'arrêt de travail intégrant tout à la fois les cas d'ITT et ceux d'invalidité, l'information essentielle donnée par ce texte portant sur l'impact du licenciement d'un salarié, non présent dans l'entreprise pour une raison de santé, cet article 5.5 s'inscrivant dans un chapitre 5 intitulé 'exonération du paiement des cotisations - maintien des garanties aux adhérents dont l'état d'incapacité de travail ou d'invalidité survient pendant la durée du contrat'.
Le terme d'arrêt de travail utilisé dans cet article couvre donc les deux situations visées dans le chapitre, celle d'une ITT et celle d'une invalidité.
Ainsi que l'observe l'appelante, aucun autre texte de la notice d'information n'évoque le sort des garanties et de la cotisation lorsque le salarié a arrêté de travailler puis a été licencié.
De surcroît cette interprétation apparaît parfaitement cohérente puisque l'indemnisation en cas d'invalidité et de licenciement constitue un revenu de remplacement directement versé au salarié licencié et non plus à l'entreprise et qui, de fait, n'est plus soumis à un certains nombres de charges, à l'exception de la CSG et de la CRDS (d'ailleurs collectées par l'assureur).
C'est enfin par erreur que le tribunal a observé que la société Legal & Général avait elle-même accordé à M. [M] des indemnités calculées sur son salaire brut après son licenciement, les sommes visées dans les avis de paiement cités par le tribunal concernant précisément la période antérieure à son licenciement.
Le fait que soit visé le salaire brut dans l'article 9 des conditions générales, qui porte sur la base des prestations n'est absolument pas en contradiction avec les dispositions de l'article 4.5 précitées, qui fait clairement état en cas de licenciement d'un mode de calcul basé sur le salaire net, sans qu'il en résulte la moindre ambiguïté et donc sans qu'il soit nécessaire d'interpréter les clauses du contrat comme le demande M. [M].
Le jugement sera donc infirmé sur ce point, M. [M] sera débouté de ses demandes en paiement d'indemnités calculés sur la base de son salaire brut et il sera jugé que les règlements des indemnités trimestrielles dues à M. [M] en application de la garantie invalidité postérieurement à son licenciement devront être calculés sur la base de son salaire net.
S'agissant de la restitution des sommes versées en exécution du jugement entrepris, le présent arrêt, en ce qu'il infirme la décision de première instance, constitue un titre suffisant pour obtenir le remboursement des sommes indûment perçues par M. [M].
Les demandes de restitution de la société Legal & Général sont donc sans objet.
Enfin, c'est aux termes de justes motifs que la cour adopte que le tribunal a débouté M. [M] de sa demande de dommages-intérêts.
M. [M] qui succombe supportera les dépens de première instance et d'appel.
Il versera à la société Legal & Général une indemnisation de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Constate que M. [M] s'est désisté de l'incident formé le 17 février 2016 devant la conseiller de la mise en état tendant à voir rejeter des débats les dernières conclusions de la société Legal & Général du 17 février 2016 ainsi que sa pièce n° 26,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [M] de sa demande au titre de la garantie incapacité, de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
Déboute M. [M] de ses demandes en paiement d'indemnités calculés sur la base de son salaire brut,
Dit que les règlements des indemnités trimestrielles dues à M. [M] en application de la garantie invalidité postérieurement à son licenciement doivent être calculés sur la base de son salaire net,
Condamne M. [M] aux dépens de première instance et d'appel lesquels pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,
Condamne M. [M] à payer à la société Legal et Général la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier,Le Président,