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07/04/2016 | FRANCE | N°14/03611

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 07 avril 2016, 14/03611


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 50D



3e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 07 AVRIL 2016



R.G. N° 14/03611







AFFAIRE :





SAS CABINET VILLAIN



C/



[U], [E], [N] [H]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Mars 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° chambre : 3

N° RG : 11/10416







E

xpéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Nadine PLANTEC de la SCP BISDORFF & PLANTEC

Me Dominique LEBRUN

Me Frédérique FARGUES



REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE SEPT AVRIL DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 50D

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 AVRIL 2016

R.G. N° 14/03611

AFFAIRE :

SAS CABINET VILLAIN

C/

[U], [E], [N] [H]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Mars 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° chambre : 3

N° RG : 11/10416

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Nadine PLANTEC de la SCP BISDORFF & PLANTEC

Me Dominique LEBRUN

Me Frédérique FARGUES

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE SEPT AVRIL DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SAS CABINET VILLAIN

RCS 398 661 017

[Adresse 3]

[Localité 2]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Nadine PLANTEC de la SCP BISDORFF & PLANTEC, Postulant et Plaidant , avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 024

APPELANTE ET INTIMEE

****************

1/ Monsieur [U], [E], [N] [H]

né le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

2/ Madame [T], [I], [B], [C] [K] épouse [H]

née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 4]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentant : Me Dominique LEBRUN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 160

Représentant : Me Gérard FERREIRA de la SCP GINESTET SAINT ANDRIEU BELLIER FERREIRA LECAREUX, Plaidant, avocat au barreau de COMPIEGNE

INTIMES

3/ Monsieur [M], [D], [P] [J]

né le [Date naissance 4] 1969 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 1]

4/ Madame [Q] [X] épouse [J]

née le [Date naissance 3] 1963 à [Localité 3]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentant : Me Frédérique FARGUES, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 138

INTIMES ET APPELANTS

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Février 2016, Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Véronique BOISSELET, Président,

Madame Françoise BAZET, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier en pré-affectation, lors des débats : Madame Maguelone PELLETERET

-----------

FAITS ET PROCÉDURE

La société cabinet Villain a acquis en 2002 un terrain de 2.354 m² supportant une maison, terrain qu'elle a divisé en deux suivant document d'arpentage du 10 juin 2002.

Le 1er août 2003 , elle a vendu aux époux [J] un des lots issus de cette division, à savoir une maison, située [Adresse 1].

Le 29 juin 2004, elle a vendu aux époux [H] le second lot, soit un terrain à bâtir, implanté [Adresse 2].

Se plaignant de la présence de la fosse septique utilisée par les époux [J] sur leur terrain, les époux [H] les ont fait assigner, ainsi que leur vendeur, le 11 septembre 2009 en référé expertise.

L'expert a déposé son rapport le 28 octobre 2011.

Le 15 novembre 2011, les époux [H] ont fait assigner les époux [J] et le cabinet Villain devant le tribunal de grande instance de Versailles afin d'obtenir, notamment la suppression de la fosse septique et la réparation de leurs préjudices.

Par décision du 27 mars 2014, la juridiction a :

déclaré l'action en garantie des vices cachés de M. et Mme [H] recevable,

dit que le cabinet Villain devra prendre en charge le coût des travaux de suppression de la fosse septique ainsi que du regard de répartition et du pré-filtre implantés sur la propriété de M. et Mme [H] dans un délai de 6 mois à compter de la signification du jugement,

condamné le cabinet Villain à verser à M. et Mme [H] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts,

condamné le cabinet Villain à régler à M. et Mme [H] la somme de 224 euros au titre de la remise en état de leur pelouse,

ordonné à M. et Mme [J] de réaliser les opérations de suppression de la fosse septique, ainsi que du regard de répartition et du pré-filtre, éléments du système d'assainissement implantés sur le terrain de M. et Mme [H] dans un délai de six mois à compter de la signification du jugement,

condamné le cabinet Villain à verser à M. et Mme [J] la somme de 59.918 euros au titre du coût des travaux nécessaires à la suppression du système assainissement individuel situé sur le terrain des époux [H] et à son installation sur leur terrain,

rejeté les demandes plus amples et contraires,

condamné le cabinet Villain à verser à M. et Mme [H] la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné le cabinet Villain à verser à M. et Mme [J] la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

ordonné l'exécution provisoire,

condamné le cabinet Villain aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise et les frais de constat d'huissier du 28 juillet 2009.

Le tribunal a jugé que l'action en garantie des vices cachés n'était pas prescrite, aucun élément ne permettant de considérer que les époux [H] aient eu connaissance de la présence de la fosse septique avant de procéder à l'aménagement de leur jardin courant 2008, en sorte que l'assignation en référé du 11 septembre 2009 est intervenue dans le délai requis.

Il a considéré que l'existence du vice caché résultait de la présence de la fosse septique sur leur terrain, situation non apparente, et différente de la servitude décrite dans l'acte de vente qui ne visait qu'un puisard et une zone d'épandage.

Il a écarté l'existence d'une servitude par destination du père de famille, car si les deux fonds proviennent bien de la division d'un fonds initial, cette servitude ne vaut que pour les servitudes continues et apparentes, or, la présence de la fosse septique n'était pas apparente.

Il a enfin constaté qu'il résultait de l'expertise que cette fosse était à l'origine de désordres pour les époux [H], justifiant sa suppression à la charge de leurs voisins, responsables d'un trouble anormal du voisinage et la condamnation de leur vendeur, professionnel, à supporter le coût de cette suppression (au titre du manquement à l'obligation de délivrance vis-à-vis des époux [J] qui ont acquis un bien équipé d'une fosse septique située sur le terrain voisin) et la réparation de leur préjudice de jouissance.

La société Cabinet Villain a interjeté appel de cette décision le 13 mai 2014 et, aux termes de conclusions du 12 janvier 2016, demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau, de :

déclarer les époux [H] mal fondés en toutes leurs demandes, les en débouter,

dire qu'elle n'a pas failli à ses obligations contractuelles,

déclarer mal fondés les époux [J] en leur appel en garantie à son encontre, les en débouter,

ordonner la mainlevée de la saisie-attribution diligentée par la Selarl [G] [W] [A], huissiers, le 2 juin 2014,

condamner solidairement les époux [H] et les époux [J] à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens avec recouvrement direct.

Elle rappelle les termes de l'acte de vente selon lesquels il était indiqué que le terrain vendu aux époux [H] était grevé d'une 'servitude zone d'épandage', et qu'ils avaient renoncé à tout recours contre le vendeur du fait des servitudes.

Elle soutient que la fosse septique désignée par les époux [H] comme constituant le vice caché ne fait pas partie de la vente consentie aux époux [H] 'puisque cette fosse septique est la propriété des époux [J]', et en déduit que l'action en vice caché est prescrite puisque cette fosse est matérialisée sur le plan de division qui a été porté à leur connaissance peu important qu'elle ait été désignée comme un 'puisard', les deux mots désignant la même chose.

Par conclusions du 21 août 2014, les époux [H] demandent à la cour de confirmer la décision entreprise et, y ajoutant, d'assortir la condamnation prononcée à l'encontre de la société Cabinet Villain et des époux [J] d'une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir. A titre subsidiaire, ils sollicitent la condamnation des époux [J] à réaliser l'ensemble des opérations de suppression des parties de leur système d'assainissement présentes sur leur terrain, hormis la zone d'épandage, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de trois mois à compter de la décision à intervenir, à leur payer la somme de 10.000 euros pour couvrir les préjudices subis et à leur rembourser la somme de 224 euros au titre du coût des travaux de remise en état de leur terrain à la suite des travaux de sondage effectués en cours d'expertise. En tout état de cause, ils demandent la condamnation du Cabinet Villain et/ou des époux [J] au paiement d'une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par conclusions du 20 octobre 2014, les époux [J] prient la cour :

à titre principal, d'infirmer le jugement entrepris, et statuant à nouveau, de dire les époux [H] aussi irrecevables que mal fondés dans l'ensemble de leurs fins et prétentions, qu'elles soient articulées à titre principal, ou à titre subsidiaire,

à titre reconventionnel, condamner les époux [H] à verser aux époux [J] la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance qu'ils ont subi,

à titre subsidiaire, en cas de condamnation à leur encontre à quelque titre que ce soit, confirmer le jugement entrepris, ce faisant, constater la responsabilité du cabinet Villain à leur égard s'agissant du non-respect de son obligation de délivrance conforme d'un assainissement individuel de type fosse septique, et de leur condamnation à prendre en charge le coût de la suppression du système d'assainissement situé sur le terrain des époux [H], en conséquence, condamner le cabinet Villain à leur verser la somme de 59.918 euros au titre du coût d'une part de la suppression du système d'assainissement situé sur le terrain des époux [H], et d'autre part de la mise en oeuvre d'un système d'assainissement individuel sur leur propre terrain et des frais annexes, dire que la suppression du système d'assainissement ne pourra concerner ni l'épandage, ni le regard de répartition situés sur le terrain appartenant aux époux [H],

condamner les époux [H], et subsidiairement in solidum le cabinet Villain à leur verser la somme de 4.000 euros du chef de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens avec recouvrement direct.

Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 janvier 2016.

SUR CE,

Il résulte clairement de l'expertise que les époux [H] ont subi des écoulements dans leur jardin, dont la cause était le déboîtement de la canalisation en sortie de la fosse septique desservant la maison de leurs voisins, les époux [J].

Il est donc établi que la présence de cette fosse septique a généré des désordres pour les époux [H].

Dans l'acte de vente du terrain à bâtir aux époux [H] figurait cette clause : 'l'immeuble présentement vendu n'est grevé d'aucune autre servitude que celles pouvant résulter ou résultant de la situation naturelle des lieux ou de la loi, et en outre, ce qui suit : servitude zone d'épandage d'après un plan d'architecte - ne pas construire sur cette zone'.

Le notaire chargé de la rédaction de cet acte de vente a indiqué dans une attestation que, pour expliciter cette servitude, seul était annexé à l'acte de vente un plan de division cadastrale. Ce dernier mettait en évidence non seulement la zone d'épandage, mais également le lieu d'implantation d'un puisard, d'ailleurs non expressément visé dans la description de la servitude.

On ne peut manquer de s'étonner que le notaire n'ait pas annexé à l'acte le plan d'architecte sur lequel figurait la fosse septique et la zone d'épandage, alors que, précisément, la servitude était définie par référence à ce plan.

Quoi qu'il en soit, les acquéreurs étaient ainsi informés, fût-ce sommairement, de la présence d'un puisard et d'une zone d'épandage sur leur terrain. Il s'agissait d'une servitude, donc d'une charge grevant leur terrain au profit d'un autre. Il peut à cet égard être rappelé que, selon la définition du dictionnaire [Z], un puisard est un égout vertical fermé destiné à absorber les eaux-vannes, et que les eaux-vannes sont quant à elles définies par ce même ouvrage comme les eaux en provenance des wc et sanitaires d'une habitation. Il est donc quelque peu insuffisant de prétendre qu'un puisard est 'nécessairement distinct' d'une fosse septique, comme le font les époux [H] et l'expert.

Quoi qu'il en soit, à supposer même que l'on considère que le titre de propriété des époux [H] ne les ait pas informés avec précision de la nature exacte de la servitude grevant leur fonds, à savoir une fosse septique, un pré-filtre puis un regard de répartition (comportant trois sorties d'épandage), les époux [J] invoquent l'existence d'une servitude 'par destination du père de famille'.

Aux termes de l'article 694 du même code, si le propriétaire de deux héritages entre lesquels il existe un signe apparent de servitude, dispose de l'un de ces héritages sans que le contrat contienne aucune convention relative à la servitude, elle continue d'exister activement ou passivement en faveur du fonds aliéné ou sur le fonds aliéné.

Ainsi, la destination du père de famille vaut titre à l'égard des servitudes discontinues s'il existe des signes apparents de servitude et que l'acte de division ne contient aucune stipulation contraire à son maintien.

Or, en l'espèce, il est constant que la propriété des époux [H] et celle des époux [J] sont issues de la division d'un bien unique, et que le lot acquis par les époux [J] comprenait une maison tandis que celui acquis par les époux [H] ne comportait aucune construction. Enfin, l'acte de division (qui est constitué d'un document d'arpentage annexé à l'acte de vente entre le Cabinet Villain et les époux [J]) ne contient aucune disposition contraire à l'existence de cette servitude.

La dalle recouvrant la fosse septique était apparente et les époux [H] ne sauraient utilement prétendre qu'elle était invisible au regard de l'importance de la végétation qui avait poussé sur le terrain, alors qu'ils étaient informés de la présence et de l'emplacement d'un puisard par le plan annexé à leur acte de vente, et que celui-ci était bien matérialisé par une plaque ronde en ciment, plaque qu'il suffisait de soulever pour constater la nature des eaux concernées par cette installation.

Ainsi, il apparaît que la servitude de traitement et d'écoulement des eaux usées en provenance de la maison des époux [J] était apparente.

Les époux [H] soutiennent que le vice est constitué par la présence d'une fosse septique plutôt que d'une simple zone d'épandage, voire d'un puisard.

Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la présence du dispositif d'assainissement de la propriété voisine constitue une servitude apparente de sorte que la garantie des vices cachée n'a pas vocation à être mise en oeuvre. Il faut en outre rappeler que certaines installations d'assainissement très anciennes se réduisent à un puisard, tandis que la fosse septique est une création plus récente et donc améliorée, et qu'en conséquence, on voit mal quelle aggravation résulterait de la présence d'une fosse septique plutôt que d'un puisard.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a retenu à l'encontre du vendeur l'existence d'un tel vice. Les demandes des époux [H] à l'encontre du Cabinet Villain seront donc rejetées.

De manière surabondante, il sera rappelé qu'aux termes de l'article 1638 du code civil, si l'héritage vendu se trouve grevé, sans qu'il en ait été fait de déclaration, de servitudes non apparentes, et qu'elles soient de telle importance qu'il y ait lieu de présumer que l'acquéreur n'aurait pas acheté s'il en avait été instruit, il peut demander la résiliation du contrat, si mieux il n'aime se contenter d'une indemnité.

Ce texte a seul vocation à être mis en oeuvre, à l'exclusion de toute action fondée sur la garantie des vices cachés, dans l'hypothèse où les acquéreurs se plaindraient à raison d'une servitude non apparente qui ne leur a pas été signalée.

Telle est d'ailleurs la thèse soutenue par les époux [H] de sorte que si la cour avait retenu l'existence dune servitude non apparente grevant leur fonds, et non mentionnée dans leur titre de propriété, leurs demandes auraient été rejetées en tant que fondées sur la garantie des vices cachés, non applicable au cas d'espèce.

S'agissant du dysfonctionnement présenté par cette fosse septique, ainsi que le soulignent à raison les époux [J], il n'est pas du tout établi par les époux [H] qu'il soit apparu en juin 2008, sachant que si leur avocat a effectivement écrit au Cabinet Villain et aux époux [J] le 31 juillet 2008, pour les mettre en demeure de retirer l'installation, leurs récriminations portaient alors sur la seule présence de cette fosse et sur les odeurs s'en dégageant, aucun phénomène de débordement n'étant évoqué. Ce courrier faisait suite à une opération de curage de ladite fosse à l'initiative des époux [J] en juin 2008, au cours de laquelle aucune anomalie n'avait été constatée.

Ce n'est d'ailleurs que le 28 juillet 2009, soit un an plus tard, que les époux [H] solliciteront un huissier pour faire constater ces débordements.

Ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, la cause de ces désordres est le déboîtement de la canalisation en sortie de la fosse septique.

Il est de principe que nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage. Il s'agit d'une responsabilité objective qui ne nécessite pas la preuve d'une faute, son unique fondement est le dommage et la réparation sa seule fonction.

Pour pouvoir mettre en cause la responsabilité de leurs voisins sur ce fondement, encore faut-il que les époux [H] démontrent que les désordres proviennent exclusivement de l'installation d'assainissement de leurs voisins, sans qu'ils aient joué le moindre rôle dans le dysfonctionnement constaté.

Il faut en effet rappeler qu'aux termes de l'article 701 du code civil, le propriétaire du fonds débiteur de la servitude ne peut rien faire qui tende à en diminuer l'usage ou à le rendre plus incommode.

L'expert judiciaire a indiqué qu'il ne pouvait se prononcer ni sur la date à laquelle la liaison entre la fosse et le pré-filtre avait été endommagée, ni sur les circonstances de cette dégradation.

Cependant :

l'écoulement en cause n'avait pas été constaté en juillet 2008,

il résulte des constatations de l'expert que les époux [H] ont édifié un muret devant la fosse septique, au mépris de l'interdiction qu'ils connaissaient de construire au-dessus de la zone d'épandage,

entre mai et juillet 2009, ainsi que le révèlent les photographies produites par les époux [J], ils ont retourné la terre de leur terrain, jusqu'à une zone comprenant la fosse et le système d'épandage, d'ailleurs un morceau de regard 'décapité' a été retrouvé lors des travaux de réparation de la fosse (cf. attestation de M. [F] qui a réparé la fosse et photographie jointe, pièce n° 13 des époux [J]),

enfin, questionné par dire sur les constatations faites par M. [F], l'expert a admis qu'il était 'possible' en effet que les travaux de terrassement entrepris par les époux [H] aient endommagé le regard et provoqué le déboîtement de la canalisation au niveau de la fosse.

En conséquence, au regard de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que ce sont les époux [H] qui sont à l'origine des dysfonctionnements de la fosse septique.

Ils seront donc déboutés de toutes leurs demandes à l'encontre des époux [J] et le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions.

Compte tenu du sens de la présente décision, la main-levée de la saisie attribution effectuée le 2 juin 2014 par la Selarl [G] [W] [A] entre les mains du Crédit du Nord à l'initiative des époux [J] sera ordonnée.

- Sur les demandes des époux [J]

Les époux [J] font valoir qu'ils ont subi, du fait de l'obstruction opposée par les époux [H] à la réalisation des travaux de réparation, un préjudice lié à la dégradation de leur système d'assainissement d'une part et à l'impossibilité d'utiliser celui-ci normalement d'autre part ; en effet, pendant 15 mois, ils ont été contraints de réduire l'usage de leur système d'assainissement, en limitant les bains de leurs deux enfants, ainsi que les lessives et l'usage de leurs sanitaires, pour éviter de faire fonctionner l'installation alors dégradée.

L'expert a indiqué dans son rapport (page 24), que lors de la deuxième réunion (soit le 15 mars 2010) il avait demandé la réalisation de mesures conservatoires pour faire cesser les désordres, mais que les époux [H] se sont opposés aux travaux au motif qu'ils outrepassaient les mesures conservatoires demandées. L'expert a précisé que les travaux que voulaient entreprendre les époux [J] permettaient en une seule intervention de remettre le système en bon fonctionnement, il a autorisé la destruction du muret édifié par les époux [H], nécessaire à la réalisation des travaux de reprise (page 35). Les époux [J] ont fait établir un devis de réparation dès le 30 avril 2010, mais l'intervention n'a eu lieu que les 10, 11 et 12 mai 2011 compte tenu de l'opposition des époux [H]. Ces travaux ont mis un terme aux désordres.

Cette attitude des époux [H] a contribué à laisser perdurer les désordres pendant de nombreux mois, et les époux [J] en ont supporté les conséquences en se contraignant à un usage plus restreint de leur réseau d'assainissement, ce qui constitue un préjudice de jouissance qui sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 1.500 euros.

Succombant en appel, les époux [H] seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise judiciaire et verseront aux époux [J] une somme de 4.000 euros et au Cabinet Villain une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Statuant à nouveau :

Déboute M. et Mme [H] de toutes leurs demandes,

Ordonne la main levée de la saisie attribution effectuée le 2 juin 2014 par la Selarl [G] [W] [A] entre les mains du Crédit du Nord à l'initiative de M. et Mme [J],

Condamne M. et Mme [H] à payer à M. et Mme [J] la somme de 1.500 euros à titre de dommages-intérêts,

Condamne M. et Mme [H] aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise, lesquels pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne M. et Mme [H] à payer à M. et Mme [J] la somme de 4.000 euros et au Cabinet Villain la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 14/03611
Date de la décision : 07/04/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 03, arrêt n°14/03611 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-04-07;14.03611 ?
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