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07/04/2016 | FRANCE | N°14/03462

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 07 avril 2016, 14/03462


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 61B



3e chambre



ARRET N°

REPUTE

CONTRADICTOIRE



DU 07 AVRIL 2016



R.G. N° 14/03462







AFFAIRE :



SA UCB PHARMA



C/



[E] [X]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Février 2014 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° chambre : 02

N° RG : 12/13054







Expéditions exÃ

©cutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Pierre GUTTIN

Me Stéphane CHOUTEAU de l'ASSOCIATION AVOCALYS





REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE SEPT AVRIL DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'aff...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 61B

3e chambre

ARRET N°

REPUTE

CONTRADICTOIRE

DU 07 AVRIL 2016

R.G. N° 14/03462

AFFAIRE :

SA UCB PHARMA

C/

[E] [X]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Février 2014 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° chambre : 02

N° RG : 12/13054

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Pierre GUTTIN

Me Stéphane CHOUTEAU de l'ASSOCIATION AVOCALYS

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE SEPT AVRIL DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SA UCB PHARMA

RCS NANTERRE N° 562 079 046

[Adresse 4]

et actuellement [Adresse 2]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - N° du dossier 14000153

Représentant : Me Carole SPORTES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

1/ Madame [E] [X]

née le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 3]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

2/ Madame [N], [V] [J] épouse [X]

née le [Date naissance 1] 1939 à [Localité 4]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

3/ Monsieur [M] [X]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentant : Me Stéphane CHOUTEAU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 - N° du dossier 001746

Représentant : Me Martine VERDIER, Plaidant, avocat au barreau d'ORLEANS

INTIMES

4/ CPAM DE BREST

[Adresse 1]

[Localité 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Février 2016, Madame Françoise BAZET, Conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Véronique BOISSELET, Président,

Madame Françoise BAZET, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier en pré-affectation, lors des débats : Madame Maguelone PELLETERET

----------

Mme [E] [X], née le [Date naissance 2] 1968, a été exposée au distilbène in utero. Atteinte d'infertilité, elle a, par acte des 10 et 11 juin 2009, assigné devant le tribunal de grande instance de Nanterre la société UCB Pharma et la CPAM de Brest en réparation du préjudice subi. Ses parents, M. [M] [X] et Mme [N] [J] épouse [X], sont intervenus volontairement à l'instance. [N] [X] est décédée depuis lors.

Par ordonnance du 20 octobre 2009, le juge de la mise en état a désigné un collège d'experts qui a déposé son rapport le 1er octobre 2010. Les demandes tendant à la nullité du rapport d'expertise et à un complément d'expertise ont été rejetées par ordonnance du juge de la mise en état du 5 avril 2011 confirmée par arrêt du 15 mars 2012.

Par jugement du 6 février 2014, le tribunal de grande instance de Nanterre a :

- déclaré la société UCB Pharma responsable des dommages résultant de l'exposition au DES de Mme [X],

- condamné UCB Pharma à payer les sommes de :

à Mme [E] [X], provisions à déduire107 950,00 euros

à Mme [N] [X]8 000,00 euros

à M. [X]3 000,00 euros

aux consorts [X] au titre de l'article 700 du code

de procédure civile8 000,00 euros

- ordonné l'exécution provisoire à hauteur de moitié des condamnations prononcées,

- déclaré le jugement commun à la CPAM de Brest.

UCB Pharma en a relevé appel le 6 mai 2014 et prie la cour, par dernières écritures du 26 janvier 2016, de :

- juger que sa responsabilité ne peut être retenue,

- débouter les consorts [X] de toutes leurs demandes et les condamner à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- subsidiairement, juger que le lien de causalité entre l'exposition au DES et la stérilité de Mme [E] [X] ne peut être que partiel, sans excéder 20 %, et évaluer le préjudice comme suit, après application de ce pourcentage :

frais divers5 492,00 euros

déficit fonctionnel temporairenéant

souffrances endurées2 000,00 euros

déficit fonctionnel permanent (25 %)10 000,00 euros

préjudice sexuelnéant

préjudice d'établissementnéant

préjudice d'anxiéténéant

- déclarer Mme [E] [X] irrecevable en sa demande ès qualités d'ayant-droit de sa mère, et en tout cas mal fondée,

- rejeter les demandes de M. [X],

- ramener l'indemnité de procédure à de plus justes proportions.

Par conclusions du 20 janvier 2016, les consorts [X] demandent à la cour de :

- fixer comme suit l'indemnisation de son préjudice :

frais divers28 905,24 euros

déficit fonctionnel temporaire18 333,00 euros

souffrances endurées15 000,00 euros

déficit fonctionnel permanent (25 %)67 500,00 euros

préjudice sexuel15 000,00 euros

préjudice d'établissement20 000,00 euros

préjudice d'anxiété8 000,00 euros

subsidiairement,

déficit fonctionnel incluant l'angoisse d'un cancer75 500,00 euros

- lui donner acte qu'elle reprend les demandes formulées par sa mère et condamner UCB Pharma à lui payer en réparation du préjudice de Mme [N] [X] la somme de 10 500,00 euros

- condamner UCB Pharma à payer à M. [X] la somme de 8 000,00 euros

- confirmer l'indemnité de procédure allouée au titre de la première instance,

- condamner UCB Pharma à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, la somme complémentaire de 6 000,00 euros

et aux dépens d'appel.

La CPAM de Brest, régulièrement assignée, ne s'est pas constituée.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 janvier 2016.

SUR QUOI, LA COUR

Le tribunal a retenu pour l'essentiel que l'exposition au DES in utero de Mme [E] [X] était établie, ainsi que la faute d'UCB Pharma, ayant consisté à maintenir sur le marché sans précaution ni mise en garde à l'époque de la prescription à [N] [X] un médicament faisant l'objet de doutes sur son efficacité et son innocuité, alors que la littérature médico-scientifique de l'époque avait déjà conduit à l'interdiction de la molécule aux Etats-Unis et qu'étaient connus ses effets tératogènes sur l'animal. Rappelant la multiplicité des effets néfastes de la molécule DES sur les femmes exposées, ainsi que l'interférence d'autres facteurs pouvant expliquer les pathologies présentées, le tribunal a rejeté la demande de Mme [E] [X], tendant à ce que soit reconnue une présomption de causalité entre l'exposition au DES et les troubles qu'elle a subis. En revanche, le tribunal a relevé que les experts avaient formellement retenu que les anomalies du col et de la cavité utérine observées chez Mme [X] étaient en relation directe et certaine avec l'exposition au DES in utero, le lien entre l'insuffisance ovarienne et cette exposition étant discuté, mais que les anomalies morphologiques du col et de l'utérus étaient impliquées dans la genèse plurifactorielle de la stérilité de Mme [X]. Il a donc déclaré UCB Pharma responsable des préjudices ainsi causés et les a fixés comme suit :

- frais divers (dépassement d'honoraire, frais de traduction et d'adoption)22 450,00 euros

- déficit fonctionnel temporairerejet

- souffrances endurées12 000,00 euros

- déficit fonctionnel permanent67 500,00 euros

-rejet

UCB Pharma expose qu'à l'époque de la prescription aucun risque de malformation génitale n'avait été identifié, et que sa faute n'est pas démontrée. Le seul fait de l'exposition ne démontre par ailleurs pas le lien de causalité entre cette dernière et les préjudices invoqués en l'absence de présomption applicable. Or dans le cas de Mme [X], l'insuffisance ovarienne constitue une cause autonome d'infertilité dont l'imputabilité au DES n'est pas démontrée, et les anomalies morphologiques du col et de l'utérus ne peuvent à elles seules l'expliquer. UCB Pharma conteste donc le lien de causalité entre l'exposition au DES et les pathologies observées chez Mme [X].

- Sur la responsabilité d'UCB Pharma :

L'exposition au DES de Mme [X] n'est pas contestée.

- Sur la faute de la société UCB Pharma :

La faute du laboratoire, au sens de l'article 1382 du code civil, seul fondement possible de la demande, et sans qu'il soit utile de recourir au principe de précaution instauré par la convention européenne des Droits de l'Homme, doit être établie à la période d'exposition au DES de Mme [X].

Il est justement rappelé par Mme [X] qui cite à ce propos de nombreux éléments de jurisprudence pertinents, que la molécule DES a été fabriquée en vue du traitement des femmes qui avaient des difficultés pour mener à terme une grossesse, à partir de 1946, et considérée comme bénéfique jusqu'à une étude dite 'Diekman' de 1953 qui a mis en doute son efficacité en vue de la prévention des fausses couches du premier trimestre. La littérature médicale montre que des études antérieures sur des animaux en 1938, 1939 et 1941 ont mis en évidence des effets indésirables tels que des cancers ou des anomalies morphologiques. Sur l'être humain, le lien a été fait avec la survenue de certains cancers du col de l'utérus ou du vagin chez des jeunes femmes exposées in utero (étude dite 'Herbst' de 1971) puis avec des anomalies utérines (1977). Il a cessé d'être prescrit en 1977.

S'il est exact que, comme le soutient UCB Pharma, les effets néfastes sur l'être humain du DES n'ont été démontrés qu'en 1977, il demeure que, depuis les années 1960, se trouvait posée la question de l'efficacité de la molécule DES et d'effets tératogènes constatés chez les animaux, et que son efficacité était mise en cause depuis 1953. Or le laboratoire ne démontre pas avoir, à la période à laquelle Mme [X] a été exposée, c'est-à-dire en 1968, tiré les conséquences de ces interrogations en avisant les prescripteurs des inconvénients constatés et des réserves que devait susciter la prescription de ce produit.

Le tribunal a dès lors justement retenu contre la société UCB Pharma une imprudence par défaut de vigilance, pour avoir maintenu, sans précaution ni mise en garde un produit dont la réelle efficacité et l'innocuité se trouvaient bien antérieurement mises en doute.

- Sur le lien de causalité entre l'exposition au DES et les pathologies présentées par Mme [X] :

Mme [X] a fait une fausse couche à l'âge de 20 ans. Le dossier stérilité qu'elle produit mentionne un désir d'enfant depuis 2002. Dans le cadre de l'exploration de son infertilité à l'âge de 37 ans, elle a subi une hystéroplastie en janvier 2006 destinée à agrandir la cavité utérine, qui n'a cependant pas permis de grossesse.

Les experts exposent que Mme [X] a présenté une infertilité secondaire qui a été explorée alors qu'elle avait 37 ans. Le bilan de cette infertilité a mis en évidence plusieurs facteurs qui peuvent être mis en cause,

1) une anomalie morphologique du col qui est 'punctiforme',

2) une anomalie de la cavité utérine avec un rétrécissement sévère médiocavitaire mis en évidence par l'hystéroscopie,

3) une insuffisance ovarienne décelée par les dosages hormonaux.

Les experts, après avoir rappelé les données chronologiques relatives au DES, relèvent qu'il est discuté que l'exposition au DES puisse être à l'origine d'une insuffisance ovarienne. Ils rappellent à ce propos les études [D] et [F], la seconde en faveur d'un tel lien, et l'étude [W] qui l'exclut. Dans le cas de Mme [X], ils écrivent que, s'il est difficile d'affirmer la relation de causalité directe et certaine entre l'exposition au DES et la stérilité de Mme [X], les anomalies constatées ne permettant pas à elles seules d'expliquer la stérilité, il est certain que ces anomalies ont une implication dans la genèse plurifactorielle de l'infertilité de Mme [X]. Il y a un rapport de causalité entre l'exposition in utero au DES et la stérilité de Mme [X], la causalité selon l'échelle imposée par l'AFSSAPS est certaine. Elle n'est cependant pas exclusive.

UCB Pharma expose que les anomalies morphologiques du col et de l'utérus ne peuvent avoir aucun rôle causal dans la stérilité si cette dernière est imputable à une insuffisance ovarienne, elle-même sans lien avec l'exposition au DES. En effet, l'insuffisance ovarienne, peut expliquer, à elle seule, l'absence de démarrage de toute grossesse, les anomalies morphologiques liées au DES ne pouvant jouer que dans un second temps.

Le laboratoire cite les trois études existantes sur l'imputabilité au DES d'une insuffisance ovarienne.

La publication [D] conclut d'une étude menée entre 1989 et 1996 sur 56 femmes exposées au DES et 45 femmes atteintes d'une pathologie des trompes n'a pas mis en évidence de différences significatives dans le statut de maturation des ovocytes, les taux de fécondation, la qualité et le développement des embryons entre les sujets exposés et les sujets témoins.

Une communication [F] relatant une étude plus récente de la réserve ovarienne de femmes exposées de moins de 38 ans fait état d'un taux de 26,4 % de perturbation de leur bilan hormonal, avec réponse insuffisante à la stimulation ovarienne. Néanmoins, le même auteur a relevé qu'au terme d'une étude rétrospective de cas témoins les conclusions ne démontrent aucune différence en termes d'insuffisance ovarienne entre les populations DES et témoin sur les critères déterminés (réponse aux protocoles de stimulation ovarienne, ovocytes et embryons).

Une étude dite [W] de 2001 conclut que l'exposition au DES n'a pas été associée à une progression du risque d'infertilité primaire due à des facteurs ovulatoires ou hormonaux, en revanche cette étude souligne que le risque d'infertilité est multiplié par 7,7 pour les femmes exposées au DES et présentant une anomalie de l'utérus.

Il est également fait état de l'opinion d'un autre expert, le docteur [U], selon laquelle l'insuffisance ovarienne prématurée (ménopause précoce) n'est pas en rapport direct est certain avec l'exposition au DES.

Dans le cas de Mme [X], il doit être relevé en premier lieu que l'anomalie de l'utérus était, avant opération, particulièrement sévère, et que l'insuffisance ovarienne relevée par les experts à la suite du docteur [G] en 2005 n'a pas été constante puisqu'une fausse couche est survenue, et qu'un nouveau dosage hormonal en 2009 s'est révélé normal. Il n'est par ailleurs pas fait état d'une ménopause précoce.

S'il paraît en effet logique, même sans connaissances médicales particulières, de considérer qu'une insuffisance ovarienne avérée et dont l'étiologie serait connue constituerait une cause de stérilité excluant le rôle causal des anomalies de l'utérus et de son col, force est de constater d'une part qu'il n'est pas scientifiquement démontré que l'exposition au DES n'a pas d'incidence sur le fonctionnement ovarien, et d'autre part que l'insuffisance ovarienne retrouvée chez Mme [X] n'a été ni constante ni expliquée, alors que son âge au moment de ses premières interrogations sur sa fertilité n'était que de 34 ans, et qu'il n'est pas allégué qu'elle ait présenté une ménopause précoce, hypothèse dans laquelle se situait l'expertise [U] précitée.

Il est ainsi suffisamment démontré que l'infertilité dont souffre Mme [X] n'a aucune cause étrangère à son exposition au DES. C'est dès lors à juste titre que, compte tenu des présomptions graves précises et concordantes tirées de l'existence et de la nature des anomalies morphologiques gynécologiques liées à l'exposition in utero au DES, le tribunal a considéré que cette exposition était directement en lien avec son infertilité et que UCB Pharma devait être déclarée seule responsable de ses conséquences dommageables.

- Sur les préjudices subis :

Les experts ont :

- relevé un préjudice moral important avec suivi par un psychiatre à compter de mars 2007 pendant 18 mois,

- fixé la date de consolidation au 28 novembre 2005,

- estimé qu'il n'y avait ni préjudice sexuel ni DFT,

- évalué le DFP, caractérisé par l'impossibilité de procréer à 25 %,

- évalué les souffrances physiques à 3/7 et les souffrances psychiques à 4/7.

Frais divers :

Il est justifié des frais médicaux restés à charge après prise en charge par la CPAM et la mutuelle MACSF prévoyance pour la somme de 629,28 euros

En ce qui concerne les frais d'adoption, il doit être rappelé que cette démarche relève du choix personnel de Mme [X] et ne peut être considérée seulement comme une conséquence de l'impossibilité d'une procréation. Ainsi que justement rappelé par le tribunal, UCB Pharma ne peut ainsi être tenue d'en assumer intégralement les conséquences financières, en sorte que sera seulement mise à sa charge la somme de 10 000,00 euros

Les frais de déplacement allégués ne sont pas suffisamment établis.

Les honoraires du docteur [R], afférents à la rédaction d'une note critique du rapport d'expertise, ne constituaient pas une dépense indispensable dans le cadre de la présente procédure, et la demande y afférente sera rejetée.

Le poste frais divers sera donc fixé à la somme de 10 629,28 euros

Déficit fonctionnel temporaire :

L'intervention d'hystéroplastie du 19 janvier 2006, laquelle a conduit à un DFT d'un mois ayant pour objet de traiter l'anomalie de l'utérus constitue une conséquence directe de l'exposition au DES, en sorte que la consolidation doit, ainsi que demandé par Mme [X], être fixée au 17 février 2007, et le DFT lié à cette intervention réparé par la somme de 700,00 euros

étant relevé que la demande maintenue dans le dispositif des conclusions d'appel à hauteur de 18 333 euros n'est pas argumentée.

Souffrances endurées :

Ce poste a pour objet de réparer les souffrances physiques et morales causées avant consolidation par le dommage, étant rappelé que les souffrances postérieures sont réparées au titre du DFP. Il a justement été fixé par le tribunal à la somme de 12 000,00 euros

Déficit fonctionnel permanent:

Le pourcentage d'AIPP de 25 % proposé par les experts est adapté et a été justement retenu.

Au regard de l'âge de la victime, soit 38 ans lors de la consolidation, ce poste sera réparé par la somme de 64 000,00 euros

Préjudice sexuel et préjudice d'établissement :

Ainsi qu'observé par UCB Pharma, l'impossibilité de procréer a été réparée dans le cadre du déficit fonctionnel permanent, et le préjudice d'établissement ne concerne pas le cas de Mme [X], ce poste de préjudice réparant, selon la nomenclature Dintilhac, la perte de la faculté de réaliser un projet de vie familiale en raison de la gravité d'un handicap.

Le jugement sera donc infirmé en ce que ces demandes ont été accueillies.

Préjudice spécifique d'anxiété :

La réparation de ce préjudice ne peut être justifiée par la seule affirmation de principe d'une angoisse liée à la crainte de la survenance d'un cancer du sein ou des organes génitaux qu'aucun élément ne vient objectiver. En l'espèce Mme [X] ne fait état d'aucune surveillance particulière, étant observé que des frottis réguliers font partie du suivi gynécologique normal de toute femme soucieuse de sa santé, ce qu'est sans aucun doute Mme [X], qui est infirmière.

En outre, la nécessité de se soumettre à des examens plus fréquents à raison des risques majorés de cancer constitue en elle-même une séquelle de l'exposition au DES et est réparée au titre du DFP.

Le tribunal a donc justement rejeté cette demande.

- Sur les préjudices par ricochet :

Mme [X] ne produit aucune pièce établissant sa qualité de seule héritière de sa mère décédée. Sa demande au titre du préjudice moral allégué de feue [N] [X] doit donc être déclarée irrecevable.

Il en est de même pour le préjudice moral allégué par M. [M] [X], la simple vue de la souffrance de sa fille à raison de sa stérilité ne pouvant suffire à caractériser un préjudice moral.

- Sur les autres demandes :

Les dispositions du jugement relatives aux dépens de première instance, y inclus les frais d'expertise, ainsi que celles relatives à l'indemnité de procédure seront confirmées, sauf à préciser que cette indemnité sera jugée suffisante pour couvrir également les frais d'appel.

Le jugement sera déclaré commun à la CPAM de Brest.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,

Confirme le jugement déféré en ce que :

la société UCB Pharma a été déclarée responsable du préjudice causé à Mme [E] [X] par son exposition in utero au DES,

la demande au titre du préjudice d'anxiété a été rejetée,

les souffrances endurées ont été réparées par la somme de 12 000 euros,

la société UCB Pharma a été condamnée aux dépens de première instance, en ce compris les frais d'expertise, et à payer une indemnité de procédure de 8 000 euros à Mme [E] [X],

L'infirmant sur le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant,

déboute Mme [E] [X] de ses demandes au titre des préjudices sexuel et d'établissement,

déboute M. [M] [X] de sa demande au titre de son préjudice moral,

déclare Mme [E] [X] irrecevable en sa demande ès qualités d'ayant droit de sa mère décédée,

fixe ainsi les postes de préjudice de Mme [E] [X], provisions non déduites :

frais divers10 629,28 euros

déficit fonctionnel temporaire700,00 euros

souffrances endurées12 000,00 euros

déficit fonctionnel permanent (25 %)64 000,00 euros

préjudice sexuelrejet

préjudice d'établissementrejet

préjudice d'anxiétérejet

Condamne en conséquence la société UCB Pharma à payer lesdites sommes à Mme [E] [X] en deniers ou quittances,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Déclare l'arrêt commun à la CPAM de Brest,

Condamne la société UCB Pharma aux dépens d'appel, avec recouvrement direct.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 14/03462
Date de la décision : 07/04/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 03, arrêt n°14/03462 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-04-07;14.03462 ?
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