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07/04/2016 | FRANCE | N°14/01342

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 07 avril 2016, 14/01342


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 60A



3e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 07 AVRIL 2016



R.G. N° 14/01342







AFFAIRE :





[B] [S]

...



C/



[H] [S]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Janvier 2014 par le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES

N° chambre : 01

N° RG : 12/02676







Expéditions

exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Isabelle PORTET

Me Philippe MERY de la SCP MERY - GENIQUE



REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE SEPT AVRIL DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 60A

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 AVRIL 2016

R.G. N° 14/01342

AFFAIRE :

[B] [S]

...

C/

[H] [S]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Janvier 2014 par le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES

N° chambre : 01

N° RG : 12/02676

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Isabelle PORTET

Me Philippe MERY de la SCP MERY - GENIQUE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE SEPT AVRIL DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

1/ Monsieur [B] [S]

[Adresse 5]

[Adresse 3]

2/ GROUPAMA CENTRE MANCHE

RCS 383 853 801

[Adresse 6]

[Adresse 1]

[Adresse 2]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Isabelle PORTET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 484

Représentant : Me Cathie FOND, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANTS

****************

Monsieur [H] [S]

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 2]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 3]

Représentant : Me Philippe MERY de la SCP MERY - GENIQUE, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000035 - N° du dossier 20031214

INTIME

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Février 2016, Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Véronique BOISSELET, Président,

Madame Françoise BAZET, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier en pré-affectation, lors des débats : Madame Maguelone PELLETERET

FAITS ET PROCÉDURE

Le 18 mars 1999, M. [H] [S], passager d'un ensemble agricole conduit par son père, M. [B] [S] a fait une chute qui lui a occasionné de graves blessures notamment à la jambe gauche.

Aux termes d'un protocole d'accord entre l'assureur et la victime en date du 5 janvier 2005, le docteur [G] a été mandaté pour définir et évaluer les conséquences corporelles de l'accident pour M. [H] [S].

Il a examiné la victime le 12 mars 2005 et a déposé un rapport le 24 mars 2005 qui a été complété, suite à un nouvel examen du 9 mai 2006, par un complément de rapport en date du 16 mai 2006.

Aucun accord amiable n'ayant pu intervenir sur l'évaluation du préjudice, M. [H] [S] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Chartres, M. [B] [S], Groupama Centre Manche, la Mutualité Sociale Agricole Beauce Coeur de Loire (MSA) et la Mutuelle AON aux fins d'indemnisation de son préjudice corporel

Par jugement du 8 janvier 2014 le tribunal de grande instance de Chartres a :

rejeté la fin de non-recevoir, tirée de la prescription de l'action, soulevée par Groupama Centre Manche,

déclaré M. [B] [S] et Groupama Centre Manche, tenus in solidum d'indemniser les préjudices subis par M. [H] [S] dans les suites de l'accident de la circulation du 18 mars 1999 par application des dispositions de la loi du 5 juillet 1985,

condamné in solidum M. [B] [S] et la société Groupama Centre Manche à verser à M. [H] [S] la somme de 681.685,44 euros, déduction non faite des provisions préalablement versées, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

condamné in solidum M. [B] [S] et Groupama Centre Manche à verser à la Mutualité Sociale Agricole Beauce Coeur de Loire (MSA) en remboursement de ses débours la somme de 7.022,73 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2013 et une indemnité forfaitaire de 1.015 euros,

alloué sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à M. [H] [S] la somme de 2.000 euros et à la Mutualité Sociale Agricole Beauce Coeur de Loire (MSA) celle de 800 euros,

ordonné l'exécution provisoire,

débouté les parties du surplus de leurs prétentions,

condamné in solidum M. [B] [S] et Groupama Centre Manche aux dépens.

Plus précisément, le tribunal a fixé comme suit le préjudice de M. [H] [S] :

- DSA : débours de la MSA 7.022,73 euros

à charge de la victimenéant

- PGPAnéant

- pertes de gains professionnels futures 490.362,94 euros

- pertes de droits à la retraite109.210,42 euros

- incidence professionnelle débouté

- frais de transport6.622,08 euros

- déficit fonctionnel temporaire17.250,00 euros

- souffrances endurées avant consolidation 9.000,00 euros

- souffrances endurées après consolidationdébouté

- déficit fonctionnel permanent 1.880 euros du point x 23 % =43.240,00 euros

- préjudice d'agrémentdébouté

- préjudice esthétique permanent 6.000,00 euros

Le 19 février 2014, M. [B] [S] et la société Groupama Centre Manche ont interjeté appel de cette décision avec l'indication selon laquelle il s'agissait d'un recours partiel sur la perte de gains professionnels futurs et sur l'incidence professionnelle.

Aux termes de leurs dernières conclusions du 15 janvier 2016, M. [B] [S] et Groupama Centre Manche, demandent à la cour de :

constater que [H] [S] ne justifie pas de ses frais de transport, ne démontre pas qu'il aurait subi une perte de gains professionnels futurs et qu'il a bien subi une incidence professionnelle, en conséquence :

infirmer le jugement en ce qu'il les a condamnés à payer à [H] [S] les sommes de 6.622,08 euros au titre des frais de transport, de 599.573,36 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs et a rejeté la demande au titre de l'incidence professionnelle,

confirmer le jugement en ce qui concerne les DSA, la perte de gains professionnels actuels, le DFT, les souffrances endurées, le DFP, le préjudice d'agrément, le préjudice esthétique et le 'pretium doloris permanent',

statuant à nouveau, rejeter la demande d'indemnité de [H] [S] au titre des frais de transport, au titre de la perte de gains professionnels futurs et lui allouer la somme de 10.000 euros au titre de l'incidence professionnelle,

condamner [H] [S] à restituer à Groupama Centre Manche les sommes indûment payées au titre de l'exécution provisoire du jugement,

le condamner à leur payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel avec recouvrement direct.

Dans des conclusions du 17 décembre 2015, M. [H] [S], demande à la cour de :

déclarer Groupama Centre Manche irrecevable et en tous cas mal fondée en son appel,

confirmer le jugement entrepris, quant aux frais de transport, la PGPF et le DFT,

infirmer pour le surplus et condamner solidairement, en deniers ou quittances, Groupama d'Eure et Loir et M. [B] [S] à lui payer les sommes suivantes :

44 276,93 euros au titre des dépenses de santé futures (DSF),

30.000 euros au titre de l'incidence professionnelle,

30.000 euros au titre des souffrances endurées,

57.500 euros au titre du déficit fonctionnel permanent (2.500 euros x 23 %),

30.000 euros au titre du préjudice d'agrément,

30.000 euros au titre du préjudice esthétique permanent,

30.000 euros au titre des souffrances permanentes,

5.000 euros au titre des frais irrépétibles.

condamner solidairement, en deniers ou quittances, Groupama d'Eure et Loir et M. [B] [S] en tous les dépens avec recouvrement direct.

La Mutualité Sociale Agricole Beauce Coeur de Loire (MSA) a fait parvenir une correspondance en date du 26 janvier 2016 à la cour aux termes de laquelle elle précise qu'ayant été réglée des causes du jugement entrepris, elle ne se ferait pas représenter en cause d'appel.

Le 10 février 2016, M. [H] [S] a régularisé de nouvelles conclusions récapitulatives comportant une demande nouvelle au titre de la perte de gains actuels de 2.932,57 euros et portant la demande au titre de l'incidence professionnelle à la somme de 134.413,58 euros (au lieu de 30.000 euros).

L'ordonnance de clôture est intervenue le 11 février 2016.

Par conclusions du 12 février 2016 M. [B] [S] et Groupama Centre Manche ont demandé à la cour, à titre principal, de rejeter les conclusions du 10 février 2016 émanant de M. [H] [S], et, à titre subsidiaire, de révoquer l'ordonnance de clôture.

SUR CE,

- Sur la procédure

Aux termes de l'article 15 du code de procédure civile, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.

Alors que selon bulletin de procédure du 28 octobre 2014, la clôture était prévue le 17 décembre 2015, ce même jour, [H] [S] a communiqué de nouvelles conclusions, ce qui a entraîné la modification du calendrier de procédure.

Groupama Centre Manche et [B] [S] ont conclu en réponse le 15 janvier 2016.

Cependant [H] [S] a de nouveau conclu le 10 février 2016 à 19h10, veille de la clôture, en formant de nouvelles prétentions.

Il est manifeste dans ces conditions, que ses dernières conclusions signifiées moins de 24 h avant la date de la clôture doivent être déclarées irrecevables comme tardives, les appelants ne disposant à l'évidence pas d'un délai suffisant pour leur permettre d'y répondre utilement avant la clôture.

Les conclusions tardives de M. [H] [S] étant écartées, aucune cause grave ne justifie la révocation de l'ordonnance de clôture, la cour statuant sur les dernières conclusions de celui-ci signifiées le 17 décembre 2015.

- Sur les limites de l'appel

Les dispositions du jugement ne font l'objet d'aucune critique des parties constituées s'agissant de ses dispositions relatives à l'entier droit à indemnisation de M. [H] [S] à la suite de l'accident 18 mars 1999, à l'évaluation du DFT et à l'allocation de diverses sommes à la Mutualité Sociale Agricole Beauce Coeur de Loire (DSA, indemnité forfaitaire et frais irrépétibles), qui sont donc définitives.

Dans leur acte d'appel , M. [B] [S] et Groupama Centre Manche ont précisé qu'il s'agissait d'un appel partiel sur la perte de gains professionnels futurs et sur l'incidence professionnelle.

En l'absence d'appel incident de la victime sur l'évaluation des frais de transports et au vu des limitations de l'appel principal figurant sur l'acte d'appel, M. [B] [S] et Groupama Centre Manche ne sont donc pas recevables à critiquer la décision en ce qui concerne ce poste de préjudice évalué à la somme de 6.622,08 euros.

- Sur la fixation du préjudice de M. [H] [S]

Les conclusions du docteur [G] sont les suivantes :

- pas d'état antérieur. Blessures, traitement et séquelles totalement imputables à l'accident du 18 mars 1999,

- ITT du 18 mars 1999 au 16 avril 2001,

- consolidation le 18 septembre 2001,

- DFP 23 %,

- pretium doloris 4/7,

- préjudice esthétique 3/7,

- séquelles stables. Réserves à l'avenir sur une aggravation au niveau du genou gauche ou des articulations sus et sous-jacentes,

- M. [H] [S] est apte à exercer une profession d'ingénieur sans station debout prolongée ni déplacement important,

- préjudice d'agrément définitif pour les sports effectués avant l'accident,

- suite à son accident du 18 mars 1999, M. [H] [S] est inapte à son poste d'ingénieur adaptation marché chez Novartis. Par contre, M. [H] [S] à l'avenir, s'il le trouve, peut occuper un poste d'ingénieur dans un bureau avec de courts déplacements.

M. [H] [S] a présenté à la suite de l'accident du 18 mars 1999 une fracture déplacée de deux os de la jambe gauche avec un important hématome de la loge postérieure, une plaie par herse au niveau de la face interne de la cuisse gauche, des dégâts musculaires très importants siégeant essentiellement au niveau des abducteurs et vaste interne, une brûlure au niveau de la face interne du poignet droit avec important oedème et une contusion lombaire droite avec de nombreuses égratignures.

Lors de son hospitalisation à l'hôpital de [Localité 1], il a subi le jour même de l'accident une opération consistant en un enclouage centro-médullaire du tibia gauche pour la fracture tibia-péroné du membre inférieur gauche et en une exploration de la plaie de la face interne de la cuisse gauche montrant un gros délabrement musculaire avec suture des différents éléments.

En raison d'importantes douleurs du membre inférieur gauche, une scintigraphie osseuse a été effectuée le 28 mai 1999 qui a révélé une algodystrophie.

M. [H] [S] a séjourné ensuite pendant un mois au centre de réadaptation de Beaurouvre puis est retourné à son domicile où il a suivi des séances de rééducation pendant deux années.

Au cours d'une hospitalisation du 29 juin au 4 juillet 2000 est intervenue l'ablation du clou d'ostéosynthèse tibial gauche.

Lui ont été prescrits comme soins des antalgiques, un suivi par son médecin traitant et la pratique de la natation.

L'expert retient comme séquelles de l'accident une raideur légère de la hanche et de la cheville gauche, une raideur importante en flexion du genou gauche, une hypotrophie du membre inférieur gauche et un raccourcissement de 2 cm du membre inférieur gauche.

Le quantum doloris a été quantifié à 4/7 en raison des lésions initiales, des interventions pratiquées, de la durée et de la nature des hospitalisations et des immobilisations, de la longue rééducation, de l'algodystrophie, des douleurs avant consolidation, des soins prodigués.

Le préjudice esthétique a été quantifié à 3/7 du fait de la persistance de cicatrices nombreuses et importantes, du raccourcissement du membre inférieur gauche à l'origine d'une boiterie nette, d'une hypotrophie du membre inférieur gauche visible.

Du point de vue professionnel, le docteur [G] précise que les séquelles permettent à M. [H] [S] d'exercer une profession d'ingénieur dans son domaine, à la condition qu'il n'y ait pas de station debout prolongée ni de déplacement important.

Il retient un préjudice d'agrément définitif pour les sports effectués avant l'accident.

Aucun élément produit ne permettant de remettre en cause le travail minutieux, précis et documenté du docteur [G], son rapport servira de base à l'évaluation du préjudice de M. [H] [S].

* Dépenses de santé futures (DSF)

Cette réclamation relative au coût du Versatis 5 % n'avait pas été présentée en première instance et ne pouvait l'être puisque le refus de prise en charge par le tiers payeur date du 22 juillet 2015, comme la correspondance de cet organisme produite aux débats le justifie.

Il résulte du rapport de l'expert que les séquelles dont reste atteinte la victime engendrent d'importantes douleurs nécessitant non seulement la prise d'antidépresseurs, d'antalgiques, d'anti inflammatoire mais également une prise en charge dans un centre anti-douleurs.

Aux termes de la notice concernant la compresse adhésive Versatis 5 %, il est mentionné au paragraphe 'indication' : 'Traitement des douleurs neuropathiques post-zostériennes (PHN) en cas d'échec, de contre-indication ou d'intolérance à un traitement par antidépresseur et anti-épileptique ou lorsque ces traitements ne sont pas recommandés'.

Il apparaît que ce médicament déjà prescrit depuis 2012 par le docteur [R] du groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière est adapté à la pathologie de M. [H] [S] et ce dernier ne saurait s'en voir privé sous prétexte de modifications de prises en charge par les tiers payeurs.

En conséquence, il est bien fondé à solliciter la prise en charge à titre viager de cette prescription dont le coût mensuel justifié est de 173,26 euros.

Il convient de faire droit pour la capitalisation viagère à l'application de l'euro de rente de la table publiée à la gazette du palais en novembre 2011 soit 20,469, la victime née le [Date naissance 1] 1963 étant âgée de 52 ans et non de 50 ans (comme figurant dans le calcul proposé), ce qui représente une somme de 173,26 euros x 12 x 20,469 = 42.557,51 euros.

* Pertes de gains professionnels futurs

Les différents éléments versés aux débats et notamment l'arrêt du 12 septembre 2006 rendu par la chambre sociale de la cour d'appel de Versailles ordonnant la réintégration de M. [H] [S] dans son entreprise établissent que ce dernier n'a pas subi de pertes de gains professionnels jusqu'à son licenciement intervenu le 10 mai 2007 au motif que l'employeur ne disposait pas de poste adapté pour lui.

Il y a lieu de constater au vu des pièces produites :

- que les recherches de travail effectuées par la victime sont toutes antérieures à sa réintégration et à son dernier licenciement puisqu'elles s'étalent de 2002 à 2005,

- que postérieurement au 10 mai 2007, M. [H] [S] a effectué un seul stage d'informatique du 8 novembre au 6 décembre 2007 dont la nature était également adaptée à l'exploitation agricole,

- que le salaire de la victime était certes de 2.407,89 euros mais brut, les revenus nets imposables étant en 1998 de 24.168,20 euros soit une moyenne mensuelle nette de 2.014,02 euros,

- les revenus fiscaux de référence soulignés par M. [B] [S] et Groupama Centre Manche comportent non seulement les revenus salariés et agricoles mais également des revenus soumis aux prélèvements libératoires variant de 15.000 à 36.000 euros et qui ne peuvent donc pas, comme ces derniers le font, être pris en compte pour le calcul des PGPF proprement dites et de l'incidence professionnelle.

Le docteur [G] dans son complément d'expertise du 16 mai 2006 précise : 'suite à son accident du 18 mars 1999, M. [H] [S] était inapte à son poste d'ingénieur adaptation marché chez Novartis. Par contre, M. [H] [S], à l'avenir peut occuper un poste d'ingénieur dans un bureau avec de courts déplacements'.

Or, force est de constater qu'après son licenciement de mai 2007, M. [H] [S] ne rapporte pas la preuve d'avoir cherché effectivement à continuer son métier d'ingénieur, son choix se portant sur l'exploitation agricole familiale qui lui a procuré des revenus hors quotient nets pour la plupart en croissance permettant de passer ainsi de 13.239 euros en 2011 à 22.065 euros en 2012.

Bien que l'instance ait duré près de deux ans en appel, M. [H] [S] s'est abstenu de produire ses déclarations de revenus ou avis d'imposition des années 2013, 2014 voire un aperçu comptable de 2015.

Cette carence se retrouve également dans l'absence de communication du moindre document établissant le salaire auquel il aurait pu prétendre dans l'activité d'ingénieur qu'il lui était possible d'exercer afin de déterminer l'existence ou non d'une perte de gains.

En effet, eu égard aux conclusions du docteur [G] M. [H] [S], ne peut, comme il le fait, prétendre à une indemnisation de PGPF sur une perte totale de salaire (brut et non net au surplus) et ce, jusqu'à l'âge de la retraite ni à une perte de droits à la retraite calculée sur les mêmes bases, alors qu'il développe désormais depuis son dernier licenciement son activité agricole en ayant adapté le matériel à ses capacités physiques comme le démontrent les factures de matériels produites aux débats.

Ainsi M. [H] [S] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe des pertes de gains professionnels futurs et de droits à la retraite qu'il allègue, en sorte que le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

* Incidence professionnelle

Les séquelles résultant de l'accident du 18 mars 1999 ont entraîné incontestablement pour M. [H] [S] :

- la nécessité de modifier pour partie les conditions d'exercice du métier d'ingénieur adaptation marché mais nullement son abandon et également de celles d'exploitant agricole exercée effectivement,

- une pénibilité tant pour l'exercice de son métier d'ingénieur mais également pour celui d'exploitant agricole déjà exercé avant l'accident et qu'il semble désormais avoir choisi,

- une dévalorisation sur le marché du travail.

Dés lors, la demande formulée à hauteur de 30.000 euros doit être accueillie, et le jugement infirmé sur ce point.

* Souffrances endurées

En page 38 du rapport [E], les souffrances endurées sont ainsi définies : 'il s'agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que les troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est à dire du jour de l'accident à celui de sa consolidation. En effet, à compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre'.

Dés lors peuvent être indemnisées au titre des souffrances endurées sous ce titre celles antérieures à la consolidation, celles postérieures à la consolidation étant indemnisées dans le cadre du DFP.

Au vu des éléments contenus dans le rapport d'expertise et de ceux produits par les parties, l'évaluation retenue en première instance doit être confirmée soit 9.000 euros.

* Préjudice esthétique de 3/7

L'évaluation retenue en première instance, parfaitement adaptée, doit être retenue soit 6.000 euros.

* DFP

Compte tenu de l'importance et de la nature des séquelles incluant notamment les douleurs après consolidation, de l'âge de la victime née le [Date naissance 1] 1963 lors de la consolidation du 18 septembre 2001soit 38 ans, le DFP doit être fixé sur une base du point de 2.400 euros, soit 2.400 euros x 23 % = 55.200 euros.

* Préjudice d'agrément

Manifestement M.[H] [S] n'a pas tenu compte des observations précises et pertinentes du premier juge qui a :

- rappelé que les activités sportives, ludiques ou culturelles précédemment pratiquées par la victime devaient être prouvées,

- déploré qu'il ne verse aux débats aucune pièce (licence sportive, attestation...) susceptible d'établir la pratique, antérieure à son accident, d'une telle activité.

Seule figure au dossier une attestation de l'UPCA du 14 janvier 1990 pur un séjour de ski alpin passion pour une huitaine de jours, sans autres précisions.

Ainsi manifestement M. [H] [S] n'a pas su profiter du délai généré par l'appel des parties adverses pour étayer son dossier notamment par la production d'attestations de personnes pratiquant avec lui avant l'accident les activités alléguées.

Il n'en demeure pas moins que lors de l'accident à l'âge de 35 ans M. [H] [S] s'est vu limiter considérablement le choix de ses activités de loisir eu égard aux séquelles en découlant.

Dés lors ce préjudice sera indemnisé par la somme d'un montant de 5.000 euros.

Il revient donc à M. [H] [S] en réparation du préjudice subi à la suite de l'accident du 18 mars 1999 après imputation de la créance de la Mutualité Sociale Agricole Beauce Coeur de Loire (MSA), poste par poste conformément à la loi du 21 décembre 2006, mais provisions non déduites les sommes suivantes :

- DSF42.557,51 euros

- pertes de gains professionnels futurs et de droits à retraitenéant

- incidence professionnelle 30.000,00 euros

- frais de transport6.622,08 euros

- déficit fonctionnel temporaire17.250,00 euros

- souffrances endurées avant consolidation 9.000,00 euros

- souffrances endurées après consolidationnéant

- déficit fonctionnel permanent 23 % 55.200,00 euros

- préjudice d'agrément 5.000,00 euros

- préjudice esthétique permanent 6.000,00 euros

- Sur la demande de restitution de trop perçu par Groupama Centre Manche

Il y a lieu de rappeler qu'un arrêt infirmatif constitue le titre ouvrant droit à la restitution de trop perçu éventuel à la suite des sommes versées en exécution du jugement entrepris et que les sommes devant être restituées ne peuvent porter intérêts au taux légal qu'à compter de la notification, valant mise en demeure de la décision ouvrant droit à restitution.

- Sur les dépens

Compte tenu du sens de la présente décision, chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens d'appel.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile

Les dispositions du jugement seront confirmées et, compte tenu du sens de la présente décision, il n'y a pas lieu d'allouer à l'une ou l'autre des parties une indemnisation au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Déclare irrecevables les conclusions de M. [H] [S] signifiées le 10 février 2016,

Dit n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture,

Déclare irrecevable l'appel incident relatif aux frais de transports émanant de M. [B] [S] et de Groupama Centre Manche,

Statuant dans les limites de l'appel, confirme le jugement entrepris en ses dispositions relatives à l'évaluation des souffrances endurées avant consolidation, du préjudice esthétique, aux frais irrépétibles de première instance, aux dépens et au rejet de la demande au titre des souffrances endurées après consolidation,

Infirme le jugement entrepris pour le surplus (PGPF, perte de droits à la retraite, incidence professionnelle, DFP, préjudice d'agrément), statuant à nouveau et y ajoutant :

Déboute M. [H] [S] de ses demandes relatives aux pertes de gains professionnels futurs et de droits à la retraite,

Condamne in solidum M. [B] [S] et la société Groupama Centre Manche au paiement en deniers ou quittances à M. [H] [S] des sommes suivantes, provisions non déduites :

42.557,51 euros au titre des dépenses de santé futures,

30.000 euros au titre de l'incidence professionnelle,

55.200 euros au titre du DFP,

5.000 euros au titre du préjudice d'agrément.

Déclare sans objet la demande de restitution formulée par Groupama Centre Manche,

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens,

Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 14/01342
Date de la décision : 07/04/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 03, arrêt n°14/01342 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-04-07;14.01342 ?
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