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17/03/2016 | FRANCE | N°15/02921

France | France, Cour d'appel de Versailles, 2ème chambre 1ère section, 17 mars 2016, 15/02921


2ème chambre 1ère section

ARRÊT No

CONTRADICTOIRE Code nac : 20J

DU 17 MARS 2016

R. G. No 15/ 02921

AFFAIRE : Corine, Marie-Léone X... épouse Y... C/ Jean-Robert, Michel Y...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Mars 2015 par le Juge aux affaires familiales de VERSAILLES No Chambre : 05 No Cabinet : No RG : 13/ 01186

Expéditions exécutoires Expéditions délivrées le :

à :

- Me Aurélie MONTEL,
- l'ASSOCIATION AVOCALYS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX

SEPT MARS DEUX MILLE SEIZE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame Corine, Marie-Léone X.....

2ème chambre 1ère section

ARRÊT No

CONTRADICTOIRE Code nac : 20J

DU 17 MARS 2016

R. G. No 15/ 02921

AFFAIRE : Corine, Marie-Léone X... épouse Y... C/ Jean-Robert, Michel Y...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Mars 2015 par le Juge aux affaires familiales de VERSAILLES No Chambre : 05 No Cabinet : No RG : 13/ 01186

Expéditions exécutoires Expéditions délivrées le :

à :

- Me Aurélie MONTEL,
- l'ASSOCIATION AVOCALYS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX SEPT MARS DEUX MILLE SEIZE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame Corine, Marie-Léone X... épouse Y... née le 29 Novembre 1973 à PARIS 14èME

..., ...78600 MAISONS LAFFITTE

représentée par Me Aurélie MONTEL, avocat postulant-barreau de VERSAILLES, vestiaire : 188 assistée de Me Véronique MARRE de la SELARL MARRE et GUILLARD, avocat plaidant-barreau de PARIS, vestiaire : E1253

APPELANTE ****************

Monsieur Jean-Robert, Michel Y... né le 21 Août 1958 à PARIS 6èME

...75015 PARIS

représenté par Me Stéphane CHOUTEAU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, avocat postulant-barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620- No du dossier 002292 assisté de Me Dominique DENOBILI BARLIER, avocat plaidant-barreau de PARIS, vestiaire : D0395

INTIMÉ ****************

Composition de la cour :
L'affaire a été débattue le 09 Février 2016, en chambre du conseil, Monsieur Xavier RAGUIN, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Xavier RAGUIN, Président, Mme Florence LAGEMI, Conseiller, Mme Florence VIGIER, Conseiller,

qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEILFAITS ET PROCÉDURE

Corine X... et Jean-Robert Y... se sont mariés le 25 juillet 1998 par devant l'officier d'Etat civil de la mairie de SARTROUVILLE (78). Les époux ont fait précéder leur union d'un contrat de séparation de biens, en l'Etude de Maître Z..., Notaire à PARIS, le 11 juin 1998.

Un enfant est né de cette union :
- Pierre-Louis, né le 4 novembre 1998, actuellement âgé de 17 ans.
Corine X... a déposé le 8 février 2013, une requête en divorce.
Par ordonnance de non-conciliation du 8 juillet 2013, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Versailles a, notamment :
- donné l'autorisation aux époux d'introduire l'instance en divorce,
- constaté que les époux résident séparément,
- attribué à la femme la jouissance du domicile conjugal à MAISONS-LAFFITTE, domicile qui est un bien propre de l'épouse,
- débouté le mari de sa demande de pension alimentaire,
- constaté que les deux parents exercent en commun l'autorité parentale à l'égard de Pierre-Louis, enfant mineur, et leur a donné acte de leur accord sur la fixation de la résidence chez la mère,
- fixé la résidence de l'enfant chez la mère, assortie d'un simple droit de visite du père jusqu'au 30 novembre 2013, et d'un droit de visite et d'hébergement usuel à compter du 1er décembre 2013,
- fixé la contribution due par le père à l'entretien et l'éducation de l'enfant à la somme de 300 euros par mois.
Par exploit d'huissier du 15 novembre 2013, Corine X... a assigné son époux en divorce sur le fondement des articles 242 et suivants du Code civil.
Par jugement rendu le 5 mars 2015, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de VERSAILLES, a, notamment :
- prononcé le divorce aux torts exclusifs de l'époux,
- ordonné, en tant que de besoin, la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux,
- autorisé l'épouse à conserver l'usage du nom marital postérieurement au prononcé du divorce ;
- condamné Jean-Robert Y... à verser à son épouse la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil ;
- débouté Corine X... de sa demande au fondement de l'article 266 du Code Civil ;
- condamné Corine X... à verser à son époux la somme de 60. 000 euros à titre de prestation compensatoire ;
- constaté que l'autorité parentale à l'égard de l'enfant Pierre-Louis est exercée conjointement par les parents ;
- fixé la résidence de l'enfant chez la mère ;
- accordé au père un droit de visite et d'hébergement ;
- fixé la pension due par le père au titre de sa contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant à la somme de 340 euros par mois ;
- condamné Jean-Robert Y... aux dépens de l'instance ;
- débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par déclaration du 17 avril 2015, Corine X... a formé un appel de portée générale contre cette décision, aux termes de ses conclusions du 8 janvier 2016, elle demande à la cour de :

- à titre liminaire, vu l'article 961 du Code de procédure civile, dire et juger irrecevables les conclusions d'appel régularisées par Jean-Robert Y... le 11 août 2015 et les éventuelles écritures suivantes sur lesquelles figurerait toujours le même domicile erroné,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
* prononcé le divorce aux torts exclusifs de Jean-Robert Y...,
* lui a accordé l'usage du nom de famille Y...,
* ordonné le maintien de l'exercice conjoint de l'autorité parentale de l'enfant mineur Pierre-Louis et de sa résidence à titre principal chez sa mère,
* condamné Jean-Robert Y... aux dépens de 1ère instance,
- infirmer le jugement sur le reste et statuant à nouveau :
* dire et juger que l'exercice du droit de visite et d'hébergement de Jean-Robert Y... sera libre, mais en accord avec Pierre-Louis,
* dire et juger que la contribution à l'entretien et l'éducation due à la mère par Jean-Robert Y... sera fixée à la somme de 500 euros par mois, et sera indexée,
* dire et juger qu'il n'y a pas lieu à liquidation du régime matrimonial des époux,
* condamner Jean-Robert Y... à lui verser des dommages et intérêts d'un montant de 20. 000 euros sur le fondement de l'article 1382 du Code civil,
* dans l'hypothèse où elle serait condamnée à verser une prestation compensatoire à son mari, condamner Jean-Robert Y... à lui verser des dommages et intérêts d'un montant de 20. 000 euros sur le fondement de l'article 266 du Code civil,
* à titre principal, débouter Jean-Robert Y... de sa demande de prestation compensatoire sur le fondement de l'article 270 alinéa 3 du Code civil,
* à titre infiniment subsidiaire, constater que le divorce ne créera pas de disparité dans les conditions de vie respectives des époux et débouter Jean-Robert Y... de sa demande de prestation compensatoire sur le fondement de l'article 271 du Code civil,
- en tout état de cause, débouter Jean-Robert Y... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- le condamner à lui verser la somme de 5. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.

Aux termes de ses conclusions du 8 janvier 2016, Jean-Robert Y... demande à la cour de :

- déclarer Corine X... mal fondée tant en son appel qu'en toutes ses demandes, fins et conclusions et l'en débouter,
- le déclarer recevable et bien fondé en son appel incident ainsi qu'en toutes ses demandes, fins et conclusions,
- confirmer le jugement du 5 mars 2015 en toutes ses dispositions, à l'exception du prononcé du divorce qu'il demande de prononcer pour altération du lien marital et de la prestation compensatoire qu'il sollicite de voir fixer à la somme de 150 000 euros,
- et ce faisant, prononcer le divorce d'entre les époux pour altération du lien conjugal,
- ordonner la liquidation du régime matrimonial ayant existé entre les époux,
- dire et juger que Corine X... cessera d'user du patronyme de Y..., en application de l'article 264 alinéa 2 du Code civil,
- débouter expressément Corine X... de ses demandes de dommages-intérêts,
- dire et juger qu'il sera fait application de l'article 265 du Code civil concernant la révocation de plein droit des avantages matrimoniaux prenant effet à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l'un des époux et des dispositions à cause de mort que les époux auraient pu s'accorder,
- condamner Corine X... à lui payer un capital de 150. 000 euros, net de tous droits, à titre de prestation compensatoire,
- dire et juger que lui et Corine X... continueront à exercer en commun l'autorité parentale sur leur fils Pierre-Louis, né le 4 novembre 1998,
- fixer la résidence habituelle de l'enfant au domicile de la mère,
- dire et juger que le droit de visite et d'hébergement du père s'exercera, sous réserve d'un meilleur accord, de la façon suivante :
* durant l'année scolaire : les fins de semaines paires de chaque mois, du samedi matin 10h au dimanche soir 19h,
* durant les vacances scolaires : la première moitié des petites vacances scolaires les années paires, la seconde moitié des vacances les années impaires, ainsi que les premières quinzaines de juillet et août les années paires et les deuxièmes quinzaines de juillet et août les années impaires.
- fixer sa contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant à la somme de 340 euros par mois ;
- condamner Corine X... à lui payer la somme de 2. 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

La clôture de la procédure a été prononcée le 14 janvier 2016.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu'aux écritures déposées et développées à l'audience.

Sur ce, la cour :

Sur la recevabilité des conclusions de Jean-Robert Y...
Considérant que les conclusions déposées par Jean-Robert Y... font mention d'un domicile situé ... à Paris 15ème arrondissement ;
Considérant que pour soulever l'irrecevabilité de ces conclusions, Corine X... soutient que cette adresse n'est pas le domicile réel de son époux qui demeure en réalité chez sa maîtresse, dans la même résidence où se trouve le domicile conjugal à Maisons-Laffitte, le logement de l'...étant une simple boîte aux lettres ;
Considérant que sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, il apparaît que Jean-Robert Y..., s'il reconnaît passer du temps chez sa compagne à Maisons-Laffitte, n'en a pas moins conservé un domicile à Paris, ..., qu'il occupe comme en témoignent l'attestation de location délivrée le 17 juillet 2015 par son bailleur la mutuelle des affaires étrangères et européennes, la carte de stationnement résidentiel qui lui a été délivrée par la mairie de Paris jusqu'au 06 décembre 2016, les attestations délivrées les 20 décembre 2013 et 19 décembre 2015 par la gardienne de l'immeuble qui confirme avoir souvent l'occasion de le voir ; que cette adresse correspond en outre au domicile fiscal et administratif de Jean-Robert Y... ;
Qu'ainsi, l'exception soulevée par Corine X... doit être rejetée ;
Sur le fondement du divorce
Considérant selon les articles 212 et 215 du code civil que les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours et assistance ; qu'ils s'obligent mutuellement à une communauté de vie ;
Considérant selon l'article 242 du code civil que le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ;
Considérant que le divorce a été prononcé aux torts de l'époux contre lequel a été caractérisé un manquement à son devoir de fidélité, au demeurant non contesté, depuis 2009, soit bien antérieurement à l'introduction de la procédure de divorce, le premier juge ayant écarté les circonstances exposées par Jean-Robert Y... qui étaient selon lui de nature à excuser son comportement et à le dépouiller de son caractère fautif ;
Que Jean-Robert Y... reprend les mêmes arguments devant la cour ; qu'il soutient que l'adultère qui lui est reproché n'est que la résultante d'une vie de couple terne, sans communication et du comportement autoritaire et indifférent de son épouse à son égard qui s'est consacrée à ses parents et à son travail ;
Considérant que l'érosion des sentiments face au quotidien de la vie de couple, la présence des beaux-parents utilisés comme des aides pour s'occuper de l'enfant alors que les deux parents travaillent, les divergences progressives de conception tels que relatés par Jean-Robert Y..., retracent des éléments d'une grande banalité dans une vie de couple ; qu'aucun élément ne permet d'affirmer que la seule responsabilité de ce délitement progressif est exclusivement imputable à l'épouse qui aurait eu un comportement excessif et préjudiciable au maintien d'une union matrimoniale satisfaisante ;
Que si la lassitude éprouvée par Jean-Robert Y... lui permettait de chercher à mettre fin à son union par les voies légales qui sont ouvertes, elle ne l'autorisait pas à engager une relation intime avec une tierce personne sans avoir au préalable divorcé et à tenter de s'exonérer de toute responsabilité personnelle ;
Qu'ainsi, le jugement sera confirmé en ce que le divorce a été prononcé aux torts de l'époux ;

Sur l'usage du nom du conjoint

Considérant selon l'article 264 du code civil qu'à la suite du divorce, chacun des époux perd l'usage du nom de son conjoint ; qu'il n'en est autrement qu'avec l'accord de celui-ci ou sur autorisation du juge, s'il est justifié d'un intérêt particulier pour l'époux ou pour les enfants ;
Considérant que le premier juge a autorisé l'épouse à conserver l'usage du nom de son conjoint en retenant qu'elle était connue dans son univers professionnelle sous le nom de X...-Y...et que la disparition d'une partie de ce nom composé pourrait avoir un impact direct sur ses relations professionnelles au sein de l'Assemblée nationale où elle exerce les fonctions d'administrateur ;
Considérant cependant que Corine X... n'occupe pas une fonction élective la mettant en contact avec un large public mais joue un rôle administratif au sein d'un milieu professionnel resserré qui la connaît déjà son nom de jeune fille, exclusivement utilisé pour les communications électroniques au sein de l'institution sous la forme ...(pièce 60-1) ; que la perte de l'usage du nom de Y... n'est pas de nature à lui préjudicier ; qu'ainsi, faute d'intérêt particulier, l'appelante ne peut être autorisée à conserver l'usage du nom de son époux, le jugement étant réformé de ce chef ;

Sur la prestation compensatoire

Considérant selon les dispositions de l'article 270 du code civil que le divorce met fin au devoir de secours ; que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ; cette prestation a un caractère forfaitaire, elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge ; que toutefois, le juge peut refuser d'accorder une telle prestation si l'équité le commande, soit en considération des critères prévus à l'article 271, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture ;
Qu'en l'espèce, Corine X... soutient que la rupture s'entoure de circonstances particulières justifiant le rejet de la demande de prestation compensatoire ; qu'elle fait valoir que son époux a entretenu une relation extra conjugale avec une voisine ce qui a entraîné une vie de mensonges et de dissimulation, qu'il n'a pas hésité à stocker sur l'ordinateur familial des photos d'une rare indécence le représentant avec sa maîtresse dans une totale nudité, ce qui procède d'une intention destructrice à son égard, qu'il s'est installé chez sa maîtresse dans la même résidence alors qu'elle est connue de tous les copropriétaires en sa qualité de présidente du conseil syndical, qu'il a quitté le foyer conjugal dans des circonstances malhonnêtes en rejetant la faute sur son épouse et qu'enfin, il n'a cessé de la provoquer pendant l'instance en cours ;
Considérant que comme l'a justement apprécié le premier juge, si les circonstances entourant la rupture du mariage ont causé un préjudice certain à l'épouse, l'équité ne commande pas de priver Jean-Robert Y... du droit de réclamer une prestation compensatoire ;
Considérant que l'article 271 dispose notamment que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; qu'à cet effet, le juge prend en considération notamment : la durée du mariage, l'âge et l'état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles, les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, leurs droits existants et prévisibles, leur situation respective en matière de pension de retraite ;
Considérant que la durée du mariage est de 17 ans au jour du prononcé du divorce par la cour, la durée de la vie commune durant le mariage jusqu'à l'ordonnance de non conciliation de 15 ans ;
Que la situation des époux, mariés sous le régime de la séparation des biens est la suivante :
- Corine X... est âgée de 42 ans et ne fait pas état de pathologie ayant une incidence sur ses conditions de vie ; elle est administrateur au sein de l'Assemblée nationale et perçoit une rémunération fixe mensuelle complétée par des primes liées au nombre de jours siégés et de séances de nuit ; selon les pièces fiscales produites, elle a perçu un salaire mensuel net imposable de 8. 966 euros en 2013, et de 9. 493 euros en 2014 ; elle ne donne aucun élément sur la rémunération perçue en 2015 mais se projette déjà en 2017 pour affirmer qu'il s'agira pour elle d'une année " noire " en raison du changement de législature où elle aura peu de primes, oubliant sans doute que le second semestre sera chargé sur un plan législatif ;
Corine X... déclare supporter des charges mensuelles de 7. 378 euros qui ne sont pas intégralement justifiées et dont certains postes apparaissent exagérés pour les besoins de la procédure ou entachés d'erreurs de calcul en sa faveur ; qu'ainsi, à titre d'exemples :
* un impôt sur le revenu de 25. 620 euros (pièce 60-1) fractionné sur 12 mois donne des échéances mensuelles de 2. 135 euros et non de 2. 562 comme elle l'indique,
*la carte Navigo annuelle donne lieu à 11 prélèvements mensuels et non 12 de telle sorte qu'elle ne peut présenter un prélèvement mensuel de 102 euros comme étant uniforme sur 12 mois,
*elle fait état de charges de copropriété mensuelles de 259 euros sur la base d'un état mentionnant des charges de 776 euros sur la période du 1er octobre au 30 septembre, soit une période annuelle,
* la cotisation Préfon de 95 euros n'est pas une charge mais résulte d'un choix personnel pour améliorer sa retraite et bénéficier d'un avantage fiscal,
* les postes " entretien chat " à 60 euros, " sports et loisirs " à 200 euros cumulés avec " entretien " à 700 euros apparaissent fantaisistes.....
Les charges mensuelles supportées par Corine X... sont donc inférieures à ce qu'elle avance ;
Corine X... n'a pas cru utile de déposer une déclaration sur l'honneur pourtant prescrite par l'article 272 du code civil qui impose aux parties de fournir au juge une déclaration certifiant sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie ;
Elle indique posséder un patrimoine immobilier composé :
* du logement familial de Maisons-Laffitte estimé par agence entre 350 et 360. 000 euros et grevé d'un passif de 80. 070 euros selon le tableau d'amortissement produit,
*d'une part indivise du pavillon occupé par ses parents à Sartrouville, le pavillon étant estimé par agence à 310. 000 de telle sorte que sa part s'élève à 155. 000 euros, ce bien étant grevé d'une passif qui n'a pas été actualisé depuis 2012 (pièce 53) ;
Elle mentionne une épargne d'un montant de l'ordre de 50. 000 euros ;
Jean-Robert Y... critique les valeurs des biens immobiliers avancés par son épouse mais seulement sur la base d'une évaluation du prix du m ² résultant d'une consultation Internet que sa généralité prive de pertinence ;
Corine X... émet des généralités sur ses droits en matière de retraite faisant valoir que ses primes ne rentrent pas dans l'assiette de calcul de ces droits ; il ne peut lui être fait grief de son imprécision compte tenu de son âge et du temps à parcourir avant de bénéficier de ses droits ;
- Jean-Robert Y... est âgé de 57 ans et ne fait pas état de pathologie ayant une incidence sur ses conditions de vie ; il est informaticien au sein du ministère des affaires étrangères et perçoit un salaire mensuel net imposable de 3. 439 euros selon le cumul figurant sur son bulletin de paye de décembre 2014 ; il a une activité d'auto-entrepreneur qui lui a permis de dégager en 2014 des revenus bruts déclarés à hauteur de 14. 500 euros ;
Jean-Robert Y... fait valoir qu'il s'est investi dans la vie familiale notamment pour compenser l'indisponibilité de son épouse, retenue par des séances de nuit à l'Assemblée nationale et qu'il a renoncé à s'expatrier contrairement à ce qu'il avait fait avant la naissance de l'enfant commun ce qui a un impact sur son niveau de vie, la cour observant cependant qu'il n'explique pas comment il aurait pu concilier une vie de couple durable avec une expatriation ;
Jean-Robert Y... fait état de charges mensuelles fixes de l'ordre de 1. 325 euros comprenant le loyer de 550 euros établi par l'attestation de location du 17 juillet 2015 ; le jugement dont appel a mis à sa charge une contribution de 340 euros pour l'entretien de son fils qui s'ajoute à la somme précitée ; le divorce qui intervient lui permettra de réaménager ses conditions de vie en partageant plus largement ses charges avec sa compagne, elle-même salariée ;
Selon sa déclaration sur l'honneur du 20 juillet 2015, Jean-Robert Y... n'a aucun patrimoine immobilier et possède une épargne de l'ordre de 34. 000 euros ; les époux n'ont aucun patrimoine indivis ;
Jean-Robert Y... ne donne aucune estimation chiffrée de sa retraite, se bornant à faire remarquer la disparité qui résultera en termes de pension, de celle existante dans les rémunérations respectives des époux ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments qu'il existe une disparité en termes de revenus et de patrimoine entre les époux au détriment de Jean-Robert Y... ; que s'il doit être rappelé que la prestation compensatoire n'a pas pour but de corriger les effets d'un régime de séparation des biens librement choisi par les époux, force est de constater que Corine X... a constitué à son seul profit pendant le cours du mariage un important patrimoine immobilier alors que les deux époux étaient réputés participer aux charges du mariage en proportion de leurs facultés respectives ;

Que c'est donc à bon droit que le premier juge a reconnu à Jean-Robert Y... un droit à prestation compensatoire ; qu'il a cependant fait une appréciation excessive des droits de l'époux qu'il convient de réduire à la perception d'un capital d'un montant de 45. 000 euros ;

Sur la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux

Considérant qu'en l'absence de tout patrimoine indivis entre les époux, il n'y a pas lieu d'ordonner la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux ;

Sur les dommages et intérêts

Considérant que des dommages et intérêts peuvent être alloués à un époux sur le fondement de l'article 266 du code civil lorsque la dissolution du mariage entraîne des conséquences d'une particulière gravité, soit lorsqu'il était défendeur à un divorce prononcé pour altération définitive du lien conjugal et qu'il n'avait lui-même formé aucune demande en divorce, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de son conjoint ;
Considérant que Corine X... soutient que le divorce va entraîner des conséquences d'une particulière gravité pour elle puisque, bien que son époux soit à l'origine de la rupture du lien conjugal, elle va être exposée à devoir lui verser une prestation compensatoire, ce qui va la déposséder d'une grande partie de son patrimoine, constitué par le seul fruit de son travail ; qu'elle ajoute qu'elle va être dans l'obligation de déménager dès que le divorce sera définitif pour éviter toute cohabitation, dans la même résidence, avec son ex-époux et sa maîtresse ;
Considérant que l'obligation au versement d'une prestation compensatoire n'est pas liée à la dissolution du mariage mais à la constatation d'une disparité dans les conditions de vie des époux, ce qui interdit à Corine X... de pouvoir prétendre que la prestation compensatoire entre dans la catégorie des conséquences d'une particulière gravité prévues par l'article 266 ;
Considérant que bien que l'adultère commis par Jean-Robert Y... dure depuis 2009 dans les mêmes circonstances de lieu, soit au sein de la même résidence, Corine X... n'a pas cru nécessaire de déménager jusqu'à présent pour échapper à une situation pourtant décrite comme particulièrement intolérable ; qu'elle n'établit pas qu'elle déménagera comme elle le prétend de telle sorte que le préjudice allégué n'est pas démontré ;
Que l'action fondée sur l'article 266 doit être rejetée ;
Considérant qu'indépendamment du divorce et de ses sanctions propres, l'époux qui invoque un préjudice étranger à celui résultant de la rupture du lien conjugal peut demander réparation à son conjoint dans les conditions du droit commun sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;
Considérant que pour allouer une indemnité de 2. 000 euros à Corine X..., le premier juge a retenu que les circonstances de la rupture ont été particulièrement difficiles pour l'épouse puisque la relation extra-conjugale de son époux impliquait une voisine, habitant la même résidence alors qu'elle-même était présidente du conseil syndical ; que Corine X... conteste le montant de l'indemnité allouée et sollicite de la cour qu'elle soit portée à 20. 000 euros ;
Considérant que c'est pourtant par une exacte appréciation des faits qui lui étaient soumis que le premier juge a complètement indemnisé le préjudice éprouvé par Corine X... en lui allouant la somme de 2. 000 euros, étant rappelé que l'appelante a elle-même participé à la publicité donnée à son infortune par l'information qu'elle en a donnée aux représentants des parents d'élèves (pièce 23 Jean-Robert Y...) ;

Sur les mesures concernant l'enfant

Sur le droit de visite et d'hébergement du père
Considérant que lorsqu'ils fixent les modalités d'exercice de l'autorité parentale d'un parent à l'égard de ses enfants, les juges ne peuvent déléguer les pouvoirs que la loi leur confère et notamment subordonner l'exécution de leur décision à la volonté d'un enfant mineur ;
Que la demande d'instauration d'un droit de visite et d'hébergement libre en accord avec Pierre-Louis doit donc être rejetée ;
Sur la contribution mensuelle du père à l'entretien et l'éducation de l'enfant
Considérant que, conformément aux dispositions de l'article 371-2 du code civil, chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant ; que cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur ;
Considérant que les ressources des parents ont été examinées ;
Que les besoins mensuels de Pierre-Louis sont évalués par Corine X... à 722 euros (frais de scolarité et cantine, carte Imagine'R, inscription et entraînement de golf, frais d'entretien) ;
Qu'il n'est pas justifié d'augmenter la contribution du père fixée à 340 euros au seul motif que, postérieurement au Bac qu'il doit passer à l'été 2016, Pierre-Louis envisage d'entamer des études coûteuses dans une école de commerce ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Considérant que chaque partie succombant partiellement dans ses prétentions, chacune conservera la charge de ses propres dépens ;
Considérant que l'équité ne commande pas de faire application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en raison de la nature familiale du litige ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE, en dernier ressort et après débats en chambre du conseil,

REJETTE l'exception d'irrecevabilité des conclusions de Jean-Robert Y...,

CONFIRME le jugement du 05 mars 2015 sauf en ce qui concerne la conservation de l'usage du nom du conjoint, le montant de la prestation compensatoire, la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux,

STATUANT à nouveau,

DIT que Corine X... perd l'usage du nom de son conjoint dès que le divorce est passé en force de chose jugée,

FIXE à 45. 000 euros le montant du capital dû par Corine X... à Jean-Robert Y... à titre de prestation compensatoire, et la condamne en tant que de besoin au paiement de cette somme,

DIT n'y avoir lieu à liquidation des intérêts patrimoniaux des époux,

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d'appel,

REJETTE toute autre demande des parties,

arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Xavier RAGUIN, président, et par Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 15/02921
Date de la décision : 17/03/2016
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Analyses

Arrêt rendu le 17 mars 2016 par la 2ème chambre 1ère section de la cour d’appel de Versailles RG 15/02921 Divorce- conséquences d'une particulière gravité- dommages et intérêts article 266 du code civil - versement d'une prestation compensatoire (non). Le droit à prestation compensatoire ne résulte pas de la dissolution du mariage mais de la disparité qu'elle engendre dans les conditions de vie respectives des époux. Un époux est donc mal fondé à réclamer des dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du code civil en invoquant comme conséquence d'une particulière gravité le préjudice résultant pour lui de l'obligation dans laquelle il se trouve de verser une prestation compensatoire au bénéfice de son conjoint aux torts duquel le divorce est prononcé.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2016-03-17;15.02921 ?
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