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17/03/2016 | FRANCE | N°14/04652

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 17 mars 2016, 14/04652


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80C



19e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 17 MARS 2016



R.G. N° 14/04652



AFFAIRE :



SARL JSB AMBULANCES



C/



[T] [O]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 septembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ST GERMAIN EN LAYE



N° RG : F 13/00460





Copies exécutoires délivré

es à :



Me Laure GODIVEAU

Me Delphine BORGEL





Copies certifiées conformes délivrées à :



SARL JSB AMBULANCES



[T] [O]







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX SEPT MARS DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAIL...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

19e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 17 MARS 2016

R.G. N° 14/04652

AFFAIRE :

SARL JSB AMBULANCES

C/

[T] [O]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 septembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ST GERMAIN EN LAYE

N° RG : F 13/00460

Copies exécutoires délivrées à :

Me Laure GODIVEAU

Me Delphine BORGEL

Copies certifiées conformes délivrées à :

SARL JSB AMBULANCES

[T] [O]

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT MARS DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SARL JSB AMBULANCES

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Laure GODIVEAU, avocat au barreau de VERSAILLES, (vestiaire : 464) - N° du dossier JSB AMBU

APPELANTE

****************

Monsieur [T] [O]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Comparant en personne, assisté de Me Delphine BORGEL, avocat au barreau de PARIS, (vestiaire : D2081)

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 décembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé de :

Madame Aude RACHOU, Président,

Madame Marie-Christine HERVIER, Conseiller,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Arnaud DERRIEN,

Monsieur [T] [O] a été embauché à compter du 9 décembre 2009 par la SARL JSB Ambulances en qualité d'ambulancier selon contrat de travail à durée indéterminée, moyennant une rémunération mensuelle qui était en dernier lieu de 2 304,09 euros bruts, à raison de 39 heures de travail par semaine.

La convention collective applicable est la convention collection nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 12 décembre 2012, M. [O] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 20 décembre 2012, avec mise à pied conservatoire.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 3 janvier 2013, la société a notifié à M. [O] son licenciement pour faute grave.

Au moment de la rupture, la société employait habituellement moins de onze salariés.

Contestant son licenciement et ne s'estimant pas rempli en ses droits, M. [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye (section activités diverses) le 26 septembre 2013. Par jugement du 24 septembre 2014, le conseil de prud'hommes a :

- dit n'y avoir lieu à sursis à statuer ;

- dit que le licenciement de M. [O] était abusif ;

- condamné la société JSB Ambulances à lui payer :

* 4 608,18 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

* 460,81euros au titre des congés payés y afférents ;

* 1 386,42 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

* 14 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ;

* 10 431 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires ;

* 104,31 euros au titre des congés payés afférents ;

* 13 169,08 euros à titre de dommages et intérêts pour repos compensateurs non pris ;

* 1 316,90 euros au titre des congés payés afférents ;

* 13 824,54 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

* 2 304,09 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire ;

* 203,40 euros au titre des congés payés afférents ;

* 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que les sommes allouées seront assorties de l'intérêt au taux légal à compter de la réception de la convocation devant le bureau de conciliation soit le 1er octobre 2013 pour les créances de nature salariale et à compter du prononcé du jugement pour les créances de nature indemnitaire avec capitalisation des intérêts selon les dispositions de l'article 1154 du code civil ;

- ordonné l'exécution provisoire en application de l'article 515 du code de procédure civile ;

- débouté la société JSB Ambulances de ses demandes.

Le 30 octobre 2014, la société JSB Ambulances a régulièrement interjeté appel de ce jugement. Aux termes de ses conclusions du 26 novembre 2015, soutenues oralement à l'audience, la société JSB Ambulances demande à la cour l'infirmation du jugement et le débouté de M. [O], outre 5 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de ce dernier aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions du 11 décembre 2015, soutenues oralement à l'audience,

M. [O] demande à la cour la confirmation de la décision en ce qu'elle a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et lui a alloué :

* 4 608,18 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

* 460,81euros au titre des congés payés y afférents ;

* 1 386,42 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

* 10 431 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires ;

* 104,31 euros au titre des congés payés afférents ;

* 13 169,08 euros à titre de dommages et intérêts pour repos compensateurs non pris ;

* 1 316,90 euros au titre des congés payés afférents ;

* 13 824,54 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

* 2 304,09 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire ;

* 203,40 euros au titre des congés payés afférents ;

* 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il conclut à sa réformation sur le montant des dommages et intérêts pour rupture abusive et sollicite l'allocation d'une somme de 40 695 euros à ce titre.

Il demande la condamnation de la société JSB Ambulances au paiement des intérêts légaux sur le montant des dommages et intérêts alloués à compter du jour de l'introduction de l'instance à titre de réparation complémentaire conformément aux dispositions de l'article 1153 du code civil, avec application de l'article 1154 du code civil.

Il demande enfin la condamnation de la société à lui verser une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ainsi qu'aux dépens.

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 11 décembre 2015 ;

Vu la lettre de licenciement ;

SUR CE :

Sur le licenciement et ses conséquences :

Considérant que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que la charge de la preuve incombe à l'employeur qui l'invoque ; que la lettre de licenciement fixe les limites du litige ;

Considérant que la société JSB Ambulances a reproché à M. [O] dans la lettre de licenciement d'avoir utilisé une carte de paiement d'essence 'BP' mise à sa disposition pour l'exercice de son activité professionnelle à des fins personnelles à onze reprises entre le 21 juillet et le 16 novembre 2012, pour un montant de 1 571,93 euros ;

Considérant que pour établir la réalité de ces faits, l'employeur se borne à verser aux débats :

- les tableaux établis par la compagnie BP récapitulant les achats d'essence effectués au moyen des diverses cartes de paiement utilisées au sein de la société,

- un PV de plainte déposée contre M. [O] pour les faits d'usage de la carte de paiement en cause,

- une attestation de M. [F] [D], salarié de la société et coconducteur de l'ambulance utilisée par M. [O], indiquant ' j'atteste sur l'honneur n'avoir pas utilisé la carte de carburant de la société JSB à des fins personnelles mais que mon ancien collègue [T] [O] l'avait en sa possession et qu'il l'a utilisée' ;

Considérant qu'en l'absence notamment de tout élément sur les jours de travail de M. [O], ces éléments sont insuffisants pour établir que M. [O], qui nie les faits qui lui sont reprochés, a utilisé une carte de paiement d'essence de l'entreprise à des fins personnelles ; qu'en conséquence, l'employeur n'établit pas la faute grave qu'il impute à M. [O] ; qu'il n'est pas non plus établi que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse ; que le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il dit le licenciement abusif ;

Considérant sur les dommages et intérêts pour rupture abusive, qu'au moment de son licenciement, monsieur [O] avait plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés ; qu'en application de l'article L.1235-5 du code du travail, il peut donc prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi ; que compte tenu de son ancienneté dans l'entreprise, de son âge (38 ans), des circonstances de la rupture du contrat de travail, de sa situation personnelle depuis cette rupture, son préjudice sera intégralement réparé par l'allocation d'une somme de 16 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ; que le jugement entrepris sera donc infirmé quant au quantum de ces dommages et intérêts ;

Considérant qu'il y a lieu de confirmer le jugement en qu'il statue sur le rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire et les congés payés afférents, sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents ainsi que sur l'indemnité légale de licenciement, dont les montants ont été exactement appréciés par le conseil de prud'hommes et ne sont pas contestés ;

Sur le rappel d'heures supplémentaires, les dommages et intérêts pour repos compensateurs non-pris et l'indemnité pour travail dissimulé :

Considérant qu'en vertu de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, mais qu'il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;

que M. [O] soutient qu'il a accompli 719 heures supplémentaires en 2010, 723 heures supplémentaires en 2011 et 736 heures supplémentaires en 2012, pour un montant total de 22 491 euros ; que déduction faite des heures supplémentaires qui lui ont été payées, il réclame la somme de 10 431 euros à titre de rappel de salaire ;

qu'à l'appui de sa demande, M. [O] produit d'une part un cahier manuscrit rempli par ses soins mentionnant jour après jour l'heure du début et de la fin de service et le nombre d'heures de travail total ainsi accompli semaine par semaine et d'autre part un décompte effectué par ses soins récapitulant par semaine les heures supplémentaires revendiquées, les majorations appliquées, les sommes versées par son employeur à ce titre et les sommes réclamées ;

que, contrairement à ce que prétend la société, ces éléments sont suffisamment précis quant aux horaires réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;

que la société JSB Ambulances objecte, d'une part, que la demande en ce qu'elle porte sur un rappel de salaire antérieur au 26 septembre 2010 est prescrite ; que, d'autre part, le salarié a calculé à tort ses heures supplémentaires sans tenir compte des règles spécifiques prévues dans le secteur des ambulances par l'accord cadre du 4 mai 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire, qui institue un régime d'heures d'équivalence ;

que la cour relève que les dispositions de l'accord cadre du 4 mai 2000 et du décret n°2009-32 du 9 janvier 2009 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport sanitaire prévoient que la durée du travail effectif des salariés à temps plein est décomptée d'une manière spécifique dans le secteur des ambulances et précisent que la durée du travail effectif est calculée après application de coefficients sur les amplitudes journalières d'activité en contrepartie des temps d'inaction, ce qui constitue un régime d'équivalence ; que l'équivalence est déterminée en principe par application d'un coefficient fixé pour l'année 2010 à 83%, pour l'année 2011 à 86% et à compter de l'année 2012 à 90% ;

qu'en l'espèce, M. [O] a décompté comme temps de travail effectif la durée totale de l'amplitude journalière, sans faire application du coefficient précité, en méconnaissance de l'accord-cadre en vigueur ; qu'il ne peut utilement prétendre, pour justifier un tel calcul, que l'absence de fourniture de feuilles de route par l'employeur, en méconnaissance des dispositions de l'article 7 de l'accord cadre, rend inapplicable le régime d'équivalence ;

qu'il s'ensuit que M. [O], qui, comme l'établit l'employeur, n'a pas fait application de l'accord-cadre du 4 mai 2010, sera débouté de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires en sus de celles déjà rémunérées et de paiement des congés payés y afférents, sans qu'il soit besoin de statuer sur sa prescription partielle ; que le jugement sera donc infirmé sur ce point ;

Considérant que, par voie de conséquence, M. [O] sera également débouté de ses demandes subséquentes relatives aux dommages et intérêts pour non-respect des repos compensateurs et

à l'indemnité pour travail dissimulé par mention sur les bulletins de salaire d'un nombre d'heure de travail inférieur à celui réellement accompli ; que le jugement sera également infirmé sur ces points ;

Sur les autres demandes :

Considérant que les sommes allouées porteront intérêts, à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, pour ce qui est des créances de nature salariale et, eu égard aux circonstances de l'espèce, à compter du jugement qui en a fixé le principe en ce qui concerne les créances à caractère indemnitaire ; que la capitalisation des intérêts sollicitée par M. [O] s'appliquera dans les conditions fixées par l'article 1154 du code civil ; que le jugement sera confirmé sur ces points ;

Considérant que l'équité commande de condamner la société JSB Ambulances à verser à

M. [O] une somme de 1 500 euros pour les frais irrépétibles exposés en appel en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de la société JSB Ambulances les dépens d'appel;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il statue sur le montant des dommages et intérêts pour rupture abusive, le rappel d'heures supplémentaires et les congés payés afférents, les dommages et intérêts pour repos compensateurs non pris et les congés payés afférents ainsi que sur l'indemnité pour travail dissimulé,

statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

condamne la société JSB Ambulances à payer à M. [T] [O] une somme de 16 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,

déboute M. [T] [O] de ses demandes de rappel d'heures supplémentaires et de congés payés afférents, de dommages et intérêts pour repos compensateurs non pris et de congés payés afférents, et d'indemnité pour travail dissimulé,

déboute la société JSB Ambulances de ses autres demandes,

condamne la société JSB Ambulances à verser à M. [T] [O] une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamne la société JSB Ambulances aux dépens de l'instance d'appel,

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Aude RACHOU, Président et par Monsieur Arnaud DERRIEN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 14/04652
Date de la décision : 17/03/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 19, arrêt n°14/04652 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-17;14.04652 ?
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