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04/02/2016 | FRANCE | N°14/01833

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 04 février 2016, 14/01833


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80C



17e chambre



ARRET N°





contradictoire





DU 04 FÉVRIER 2016

R.G. N° 14/01833



AFFAIRE :



[W] [S]



C/

SA MATIS TECHNOLOGIES - MT





Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 18 Mars 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Encadrement

N° RG : F11/01904







Cop

ies exécutoires délivrées à :



Me Frédéric BENOIST

la SELARL HOCHE SOCIETE D AVOCATS





Copies certifiées conformes délivrées à :



[W] [S]



SA MATIS TECHNOLOGIES - MT







le : 5 février 2016

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

17e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 04 FÉVRIER 2016

R.G. N° 14/01833

AFFAIRE :

[W] [S]

C/

SA MATIS TECHNOLOGIES - MT

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 18 Mars 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Encadrement

N° RG : F11/01904

Copies exécutoires délivrées à :

Me Frédéric BENOIST

la SELARL HOCHE SOCIETE D AVOCATS

Copies certifiées conformes délivrées à :

[W] [S]

SA MATIS TECHNOLOGIES - MT

le : 5 février 2016

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE FEVRIER DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [W] [S]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Frédéric BENOIST, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0001

APPELANT

****************

La SA MATIS TECHNOLOGIES - MT

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Nicolas MANCRET de la SELARL HOCHE SOCIETE D AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0061 substitué par Me Agathe LEMAIRE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K 0061

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Décembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Martine FOREST-HORNECKER, Président chargé(e) d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé(e) de :

Madame Martine FOREST-HORNECKER, Président,

Madame Clotilde MAUGENDRE, Conseiller,

Madame Juliette LANÇON, Vice-président placé,

Greffier, lors des débats : Madame Amélie LESTRADE,

Par jugement du 18 mars 2014, le conseil de prud'hommes de NANTERRE (section encadrement) a :

- dit et jugé que le licenciement de Monsieur [W] [S] repose sur une cause réelle et sérieuse mais pas sur une faute grave,

- condamné la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT à verser à Monsieur [W] [S] les sommes suivantes :

. 8 862,00 euros à titre de rappel de salaire couvrant la période de mise à pied à titre conservatoire,

. 886 ,20 euros à titre de congés payés y afférents,

. 14 448,75 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

. 34 677,00 euros à titre d'indemnité de préavis,

. 3 467,70 euros à titre de congés payés y afférents,

. 11 496,00 euros à titre de complément de congés payés,

avec intérêts au taux légal à compter du 8 Septembre 2011, date de réception par le défendeur de la convocation en bureau de conciliation,

- dit que les intérêts échus depuis plus d'un an à compter du jugement seront eux-mêmes productifs d'intérêts,

- rappelé que sont exécutoires de droit à titre provisoire les condamnations ordonnant la délivrance de toutes pièces que l'employeur est tenu de remettre (bulletin de paie, certificat de travail...) ainsi que celles ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités visées à l'article R. 1454-14 du code du travail dans la limite de neuf mensualités étant précisé que la moyenne des salaires des trois derniers mois doit être fixée à 11 559 euros,

- dit qu'il n'y a pas lieu à exécution provisoire pour le surplus,

- condamné la SA MATIS TECHNOLOGIE -MT à verser à Monsieur [W] [S] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Monsieur [W] [S] du surplus de ses demandes,

- reçu et débouté la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT de sa demande reconventionnelle,

- condamné la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT aux entiers dépens.

Par déclaration d'appel adressée au greffe le 17 avril 2014 et par conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, Monsieur [W] [S] demande à la cour de :

- le déclarer recevable et bien fondé en ses demandes,

- constater que son licenciement pour faute grave est dénué de cause réelle et sérieuse,

- confirmer, en conséquence, le jugement entrepris s'agissant des condamnations suivantes de la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT :

. 8 862,20 euros à titre de rappel de salaire couvrant la période de mise à pied à titre conservatoire,

. 886,20 euros à titre de congés payés afférents,

. 14 448,75 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

. 34 667,00 euros à titre d'indemnité de préavis,

. 3 467,70 euros au titre des congés payés afférents,

. 11 496,00 euros au titre de complément de congés payés,

. 1 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré son licenciement comme reposant sur une cause réelle et sérieuse

- condamner la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT à payer les sommes suivantes :

- 130 000,00 euros sur le fondement de l'article L1235-3 du code du travail en compensation du préjudice financier et moral subi dans le cadre de la rupture de son contrat de travail dans des conditions brutales et vexatoires,

- 30 120,00 euros à titre de rappel de rémunération au titre des PCA,

- 3 012,00 euros à titre de congés payés afférents,

- dire que les sommes ci-dessus porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes,

- ordonner la capitalisations des intérêts :

. à titre de rappel de rémunération au titre des PCA : 200 000 €,

. À titre des congés payés afférents :20 000 €,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- condamner la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT à lui verser la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamnée au paiement des sommes suivantes :

. 8 862,00 euros à titre de rappel de salaire couvrant la période de mise à pied à titre conservatoire,

. 886 ,20 euros à titre de congés payés y afférents,

. 14 448,75 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

. 34 677,00 euros à titre d'indemnité de préavis,

. 3 467,70 euros à titre de congés payés y afférents,

. 11 496,00 euros à titre de complément de congés payés,

. 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur [W] [S] de ses autres demandes,

- constater que le licenciement de Monsieur [W] [S] est fondé sur une cause grave,

- condamner Monsieur [W] [S] à lui verser la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

LA COUR,

qui se réfère pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, à leurs écritures et à la décision déférée ;

Considérant que Monsieur [W] [S] a été engagé par la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT par contrat à durée indéterminée en date du 28 août 2007 à effet du 1er octobre 2007 en tant que responsable de département , statut cadre, position 2.3, coefficient 150 selon la convention collective SYNTEC ;

que la rémunération brute mensuelle fixe de Monsieur [W] [S] était de 3 200 € portée à 3 550 euros bruts mensuels aux termes de l'avenant n° 5 à son contrat de travail régulièrement signé entre les parties ;

que les stipulations du contrat de travail prévoyaient une rémunération variable fondée sur la réalisation de différents objectifs fixés chaque année ; qu'à cette rémunération s'ajoutait la possibilité de percevoir toute une série de primes détaillées dans cet avenant ;

que le 28 juillet 2009, Monsieur [W] [S] recevait un avertissement en raison de son comportement ;

que Monsieur [W] [S] y répondait en contestant la réalité des griefs invoqués ;

qu'au début de l'année 2010, Monsieur [W] [S] n'obtenait pas le poste de Directeur de département ;

que le 4 avril 2011 Monsieur [W] [S] recevait un nouvel avertissement en raison de son comportement qu'il contestait le 12 avril suivant mais que la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT confirmait le 18 avril ;

que par lettre remise en main propre en date du 19 mai 2011, Monsieur [W] [S] était convoqué à un entretien préalable fixé au 31 mai 2011 et était mis à pied à titre conservatoire ;

que la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT notifiait à Monsieur [W] [S] son licenciement pour faute grave par lettre recommandée avec avis de réception en date du 10 juin 2011 libellée en ces termes :

'Par lettre remise en main propre contre décharge du 19 mai 2011, nous vous avons convoqué à un entretien préalable en vue d'une sanction disciplinaire.

Au cours du long entretien d'une heure et demie qui s'est tenu le 31 mai 2011 et pour lequel vous étiez assisté de Monsieur [M] [R], nous vous avons fait part des griefs que nous formulions à votre encontre et vous avez pu nous faire connaître vos explications.

Vous avez été embauché à compter du 1er octobre 2007 en qualité de responsable de département par la société MATIS Technologies. Vous étiez en charge d'une business unit avec la responsabilité de négocier et d'obtenir des engagements contractuels avec les clients actuels et futurs de l'entreprise et, plus généralement, le développement d'affaires (prestations de service destinées aux grands groupes industriels) et la gestion du portefeuille confié , le tout en cohérence avec la stratégie de développement de l'entreprise.

Depuis que la société vous a refusé d'être promu directeur de Département, fin 2010, principalement pour des raisons comportementales très préjudiciables au bon fonctionnement de l'entreprise, votre attitude s'est profondément détériorée.

Vous avez alors créé une situation de conflit total avec la direction de l'entreprise dans le but de provoquer votre licenciement. Pour cela, vous avez entretenu sciemment une attitude irrespectueuse et provocatrice auprès de votre hiérarchie et de vos collègues de travail, par des interventions inappropriées lors des réunions et la tenue de propos savamment orchestrés, tant à l'écrit qu'à l'oral, pour déstabiliser les équipes. Nous avons relevé : du colportage de bureau en bureau de critiques négatives et de dénigrement de la direction, agressivité, remises en cause des règles de fonctionnement, critique des règles, refus de les appliquer, ingérence dans les autres départements en répandant auprès des autres managers des règles contraires aux principes de la société .

En dépit de la mise en garde adressée le 04 avril dernier, confirmée le 27 avril 2011, vous avez tenté de déstabiliser bon nombre de collaborateurs et tenté de pousser à bout votre hiérarchie pour satisfaire à votre seule ambition personnelle de départ de l'entreprise, alors que nous vous demandions une amélioration de votre comportement. Vous avez d'ailleurs ouvertement réclamé votre licenciement auprès de plusieurs membres de la Direction du Groupe.

Vous avez également tenté de créer un litige supplémentaire en étant le seul à refuser de signer votre avenant 2011, en dépit de plusieurs versions du texte proposées par la Direction dans un souci de conciliation, pour le calcul de la rémunération variable 2011, et pour cela vous avez demandé à y faire figurer des conditions nouvelles dont vous saviez pertinemment que la Société ne pouvait consentir. Fort heureusement, la Société a su identifier votre man'uvre inappropriée et vous a confirmé que faute d'accord sur l'avenant 2011, nous acceptions sans difficulté d'appliquer à l'identique les modalités de calcul de l'année précédente, telles qu'elles résultaient de l'avenant que vous aviez signé en 2010.

Plus grave encore, la mise en place d'un nouvel outil informatique (CRM), à compter de 2011, que chaque responsable de département doit renseigner afin de mesurer et contrôler l'activité, a mis en évidence vos pratiques fautives et frauduleuses.

Alors que tout responsable de département a l'obligation de renseigner le volume et la qualification des inter-contrats pour permettre à l'entreprise de connaître en permanence le staff disponible susceptible de répondre à toute nouvelle mission qui se présenterait, vous avez, pour répondre à votre intérêt personnel, gonflé fictivement votre chiffre d'affaires, dissimulé, au cours des quatre premiers mois de l'année, l'absence d'activité de Messieurs [A], [Q], [P] et [Y]. La Société a découvert la supercherie et la fausse activité de production des quatre collaborateurs rattachés à du chiffre d' affaires « constaté d'avance» sans motif, ce que vous avez finalement reconnu assez maladroitement par un courriel du 13 mai 2011 adressé à Monsieur [U] [F] pour tenter de vous dédouaner.

La Société, n'ayant pas eu connaissance de l'inactivité de ces quatre inter-contrats (IC) depuis le début de l'année, a du recruter quatre nouveaux collaborateurs pour répondre à des demandes de clients. Il en est résulté un vrai préjudice pour l'entreprise (coûts supplémentaires de recrutement, de salaires et de charges sociales) qui a procédé à quatre embauches uniquement parce que vous aviez dissimulé l'existence quatre salariés inoccupés.

Cette man'uvre est d'autant plus grave que vous avez sciemment introduit des données erronées dans le système informatique et manipulé les services de la Direction administrative et financière en tentant de leur imputer la responsabilité de vos actes.

A cela vient s'ajouter la découverte de plusieurs de vos manipulations comptables basées sur des fausses informations dans le but de tronquer votre résultat opérationnel 2010 (ayant atteint votre objectif 2010 avant la fin de l'exercice) et notamment le transfert de chiffre d'affaires et de marges sur l'exercice 2011, alors qu'il se rapportait à l'année 2010, dans le seul but d'accroître fictivement votre rémunération variable 2011 qui représente plus de 70% de votre salaire.

Enfin, et c'est plus grave encore, pour parvenir à un niveau anormalement élevé et constant

du chiffre d'affaires constaté d'avance (PCA) et tricher sur votre rémunération variable, vous

avez entrepris une attitude commerciale très agressive en proposant à certains clients des prestations légèrement surévaluées afin de dégager une marge supplémentaire injustifiée.

Face à cette situation, et n'ayant pu recueillir aucune explication valable de votre part, nous vous notifions, par la présente lettre, votre licenciement pour faute grave.

Dès lors, votre contrat de travail sera rompu dès la première présentation par les services postaux de la présente lettre, date à laquelle nous tiendrons à votre disposition votre certificat de travail ainsi que votre solde de tout compte et votre attestation Pôle Emploi (...) ;

Considérant, sur le licenciement, que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que la charge de la preuve incombe à l'employeur qui l'invoque ;

Considérant que selon le principe non bis in idem, une même faute ne peut faire l'objet de deux sanctions successives ; que l'employeur qui, bien qu'informé de l'ensemble des faits reprochés à un salarié choisit de lui notifier un avertissement seulement pour certains d'entre eux, a épuisé son pouvoir disciplinaire et ne peut prononcer ultérieurement un licenciement pour les autres faits connus avant la date de notification de la première sanction ;

que Monsieur [W] [S] soutient que la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT a épuisé son pouvoir disciplinaire par la notification de l'avertissement du 4 avril 2011 ;

qu'aux termes de cet avertissement, la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT reproche à

Monsieur [W] [S] les points suivants :

' votre remise en cause régulière des décisions prises par votre hiérarchie ainsi que votre attitude très agressive et irrespectueuse ne sont pas admissibles.

Cette attitude se répète très régulièrement ( lors de réunions et par voie d'émail) et vous ne tenez pas compte des mises en garde qui vous sont adressées oralement.

Nous considérons que votre comportement perturbe l'organisation de l'entreprise, dégrade la motivation de vos collègues et discrédite l'autorité de la Direction' ;

que, dans sa réponse du 18 avril 2011 aux contestations de Monsieur [W] [S] du 12 avril 2011concernant l'avertissement, la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT indique expressément que ce dernier concerne exclusivement 'votre comportement au sein de l'entreprise et nullement vos performances commerciales , ni nos discussions actuelles sur votre plan de commissionnement pour l'année 2011" ;

qu'elle précise néanmoins que concernant votre comportement, nous vous confirmons les reproches qui vous sont faits :

- votre remise en cause régulière des décisions prises par la direction qui perturbe l'organisation de la société,

- votre attitude agressive et irrespectueuse à l'égard de vos collègues et de votre hiérarchie qui dégrade la motivation des équipes,

- le non respect des règles de bonne gestion applicables au sein de l'entreprise,

- la manipulation des données économiques de votre département dans le seul but d'améliorer artificiellement vos résultats (et donc votre rémunération variable) ;

que la lettre se poursuit en citant des exemples en date des 18 octobre 2010, 1er décembre 2010, 10 janvier 2011, 25 février 2011 et 30 mars 2011 relatifs à la remise en cause des décisions de la direction et de l'attitude irrespectueuse à l'égard des collègues et de la hiérarchie ;

que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige invoque 5 griefs à l'encontre de Monsieur [W] [S] :

- la création d'un conflit artificiel avec l'entreprise,

- le refus de signature de son avenant 2011,

- des irrégularités relevées en matière de gestion des inter-contrats,

- le transfert artificiel de son chiffre d'affaires,

- la surévaluation de prestation auprès des clients ;

qu'en outre, la poursuite par un salarié d'un fait fautif autorise l'employeur à se prévaloir de faits similaires, y compris ceux ayant été sanctionnés, pour justifier une sanction aggravée ;

qu'il s'ensuit qu'il appartient à la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT de justifier que des faits fautifs de même nature se sont reproduits ou qu'un nouveau comportement s'est révélé fautif depuis l'avertissement ;

que sur le refus de signature de l'avenant 2011, le changement de système de rémunération constitue une modification du contrat de travail qui ne peut intervenir sans l'accord du salarié ;

que Monsieur [W] [S] a refusé le changement de rémunération que la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT lui proposait dans l'avenant 2011 ; que cependant la relation contractuelle s'est poursuivie suivant les modalités prévues par l'avenant 2010 signé ;

qu'il s'ensuit que le refus de la modification ne peut constituer par lui-même une cause de licenciement ;

que le grief n'est pas établi ;

qu'il est reproché à Monsieur [W] [S] d'avoir artificiellement crée une situation de conflit total avec le direction de l'entreprise afin de provoquer son licenciement ;

que Monsieur [T], ingénieur commercial responsable produits, atteste que 'ses attitudes de dénigrement et de rébellion se sont fortement accentuées allant crescendo durant les six derniers mois, lors de ces réunions hebdomadaires réunissant de 15 à 20 personnes , [W] [S] contestait régulièrement les règles définies et les décisions prises par la direction, avait une attitude de remise en cause fréquente de la hiérarchie à la limite de l'agressivité sur ses 6 derniers mois d'activité ';

que Monsieur [K], directeur de département, confirme le comportement de Monsieur [W] [S] en ces termes : 'de nombreux échanges par mails très agressifs et directifs aussi bien entre responsables de département qu'avec la direction, à de nombreuses reprises l'ensemble de la société était en copie de ces échanges de mails....les réunions commerciales organisées tous les lundis matin où [W] [S] était régulièrement en opposition avec la direction ou avec ses collègues devant tout le monde parfois même de façon très agressive' ;

que dans le même sens Monsieur [H], directeur du développement détaille les difficultés rencontrées avec Monsieur [W] [S] consistant en 'une contestation de façon récurrente, quasi systématique frontale et publique des orientations et choix stratégiques formulés par sa hiérarchie directe, une agressivité de ses propos qui perturbaient le bon déroulement de la réunion, tous les lundi matin, de 11h à 13h30 et mettaient mal à l'aise l'ensemble des participants à la réunion, des propos ironiques et vexatoires envers Monsieur [B] [J], directeur administratif et financier qui remettaient en cause ses compétences professionnnelles ;

que de la même manière Monsieur [B], responsable avant-vente, Monsieur [E], responsable de département, Madame [G] assistant de direction, Monsieur [X] directeur recherche et technologie et Monsieur [W] responsable de la qualité et des systèmes d'informations métiers attestent du comportement agressif et négatif de Monsieur [W] [S] dans ces termes ' quasiment à chaque réunion commerciale ( réunion hebdomadaire) il remettait en question et en public les règles de fonctionnement de la société et avec une attitude aggressive en prenant à partie notre direction' ;

que Monsieur [L] [B], directeur administratif et financier parle d'agressivité à la limite insultante 'allant jusqu'à dire que je ne comprenais rien et se positionnant par rapport aux équipes financiers comme celui qui 'sait', le patron' ;

que Monsieur [M] [J], dirigeant d'une des filiales de groupe MATIS qui participait aux réunions commerciales hebdomadaires, fait état de remarques déplacées de Monsieur [W] [S] , coupures de paroles , ricanement lors de mes interventions , prises de position péremptoire ;

que Monsieur [W] [S] argue du bénéfice d'un droit d'expression au sein de l'entreprise dont il soutient qu'il n'en a nullement abusé ;

que cependant, si le salarié jouit dans l'entreprise de sa liberté d'expression, ces propos ne doivent pas revêtir un caractère injurieux, diffamatoire ou excessif et doivent être analysés en tenant compte notamment du cadre dans lequel ils ont été tenus et de la qualité du salarié ;

qu'en l'espèce il résulte suffisamment des nombreuses attestations que le comportement fautif de Monsieur [W] [S] ne s'est pas manifesté dans un cadre restreint de direction mais au cours de réunions de 15 à 20 personnes ; qu'une telle attitude qui s'est répétée quasiment à chaque réunion commerciale hebdomadaire et sur ses 6 derniers mois d'activité ne peut qu'être excessif provenant d'un salarié à ce niveau de responsabilité ;

que la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT justifie que des faits fautifs de même nature se sont reproduits après l'avertissement et a établi en conséquence le grief reproché ;

que sur les irrégularités relevées en matière de gestion des inter-contrats, la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT reproche à Monsieur [W] [S] alors que tout responsable de département avait l'obligation de renseigner le volume et la qualification des salariés en inter- contrats afin d'avoir une visibilité sur les salariés disponibles susceptibles d'être affectés sur une nouvelle mission, d'avoir dissimulé au cours des 4 premiers mois de l'année 2011 l'absence d'activité de Messieurs [A], [Q], [P] et [N] ;

que Monsieur [F], directeur général adjoint atteste ' qu'en avril 2011 j'ai découvert que [U] avait introduit des informations fausses dans plusieurs systèmes d'information pour manipuler ses résultats et cacher le fait que plusieurs consultants étaient actuellement sans projet pour ne pas que d'autres départements les fassent redémarrer sur leurs projets. Voyant que j'investiguais sur ces sujets, [U] m'a envoyé un mail le 13 mai pour donner sa version des faits sans que je ne lui en aie jamais fait la demande. Certains éléments indiqués dans ce mail sont en contradiction avec les informations renseignées par [U] dans les différents systèmes d'information de la société' ;

qu'outre le fait que Monsieur [W] [S] ne dément pas que son mail du 13 mai 2011 n'était pas une réponse sollicitée par Monsieur [F], et, si ce dernier a informé les équipes de [Localité 1], [Localité 2] et [Localité 3] des fins de projets de salariés de l'entreprise mi-décembre 2010, il ne justifie pas de l'affectation sur des missions des 4 salariés sur le premier trimestre 2011 et de la non déclaration de ces consultants dans le tableau des inter contrats qui est le tableau de référence sur lequel toute l'ingénierie d'affaire se base pour savoir quels sont les consultants pour lesquels il faut rechercher un projet ;

qu'il s'ensuit que compte tenu de la date de la découverte des faits et des investigations nécessaires et de celle du mail de Monsieur [W] [S] , la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT n'avait pas épuisé son pouvoir disciplinaire ; que ce grief est établi ;

que sur le transfert artificiel de son chiffre d'affaires il résulte suffisamment des attestations des Mesdames [D], [O] contrôleurs de gestion que lors des points mensuels effectués pour clôturer chaque période de facturation, Monsieur [W] [S] 'considérait qu'il était le responsable du département de ses projets m'a demandé de manière ferme de valoriser du produit constaté d'avances sur certains des projets en cours, d'imputer les jours d'inter-contrats de certains de ses collaborateurs sur des projets précis car selon lui

leurs imputations sur ce projets étaient financés par des produits constatés d'avance et ce malgré mes objections dont il n'a pas tenu compte ;qu'il faisait preuve d'une telle pression que je devais me résoudre à obéir à ses demandes ;

que Madame [O] ajoute que lorsque la direction lui a demandé de rendre des comptes sur l'imputation inexistante des inter-contrats sur certains projets il m'a injustement mise en cause ;

que Monsieur [J], directeur administratif et financier confirme que Monsieur [W] [S] a demandé 'au mois de mai 2011aux contrôleurs de gestion à valoriser le solde des produits constatés d'avance. Or ces derniers ne pouvaient en aucun cas être valorisés mais devaient être restitués au client ;

que ce grief qui date du mois de mai 2011 soit postérieurement à l'avertissement est établi ;

que sans analyser les autres griefs allégués par la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT les comportements fautifs établis de Monsieur [W] [S]  qui manifestait notamment une insubordination réitérée à l'égard de la direction dont il critiquait la politique et dénigrait celle-ci ainsi que d'autres salariés de l'entreprise revêtent une particulière gravité, compte tenu de son niveau de responsabilité et sont suffisamment graves pour être caractérisés de faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise  ;

que le jugement entrepris sera infirmé de ce chef et les demandes subséquentes de Monsieur [W] [S] rejetées ;

que sur la demande de rappel de la rémunération variable Monsieur [W] [S]  soutient qu'au jour de son licenciement aucun accord n'avait été trouvé par les parties sur la détermination des critères de détermination de sa rémunération variable ;

que cependant il a déjà été précisé que Monsieur [W] [S] ayant refusé de signer l'avenant 2011, sa rémunération variable a été fixée en fonction de l'avenant 2010 signé ;

qu'au 31 décembre 2010, sa rémunération variable s'est élevé à 88 850 € ; que le bulletin de paie de juin 2011 fait état au titre des commissions d'une régularisation pour la période du 1er janvier 2011 au 14 juin 2011 d'une somme de 23 061, 63 € ; qu'il n'est pas établi, aucun élément n'étant donné à la cour, que Monsieur [W] [S] n'a pas été rempli de ses droits ;

que ces demandes tant au titre de la rémunération des produits constatés d'avance, ni au titre du rappel de salaire dû au titre de sa part sur PCA seront rejetées ;

que le jugement entrepris sera confirmé sur ce point ;

que sur la demande au titre des congés payés,le conseil de prud'hommes a justement retenu que l'indemnité des congés payés avait été calculée sur la base du salaire mensuel brut fixe sans que sa rémunération variable ne soit prise en compte dans la détermination de son salaire moyen brut ;

qu'il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SA MATIS TECHNOLOGIES-MT à verser à Monsieur [W] [S] la somme de 11496, 26 € dont le montant n'est pas contesté ;

Considérant que Monsieur [W] [S], qui succombe, doit supporter la charge des dépens d'appel et ne saurait bénéficier de l'article 700 du Code de procédure civile ; que toutefois, pour des raisons d'équité, il n'y a pas lieu de faire application à son encontre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme partiellement le jugement entrepris,

Et, statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de Monsieur [W] [S]  est fondé sur une faute grave,

Rejette en conséquence ses demandes à ce titre,

Confirme le jugement entrepris pour le surplus,

Rejette les autres demandes des parties,

Condamne Monsieur [W] [S] aux dépens d'appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Martine FOREST-HORNECKER, présidente et Madame Amélie LESTRADE, greffier en préaffectation.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 14/01833
Date de la décision : 04/02/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 17, arrêt n°14/01833 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-02-04;14.01833 ?
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