La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/01/2016 | FRANCE | N°14/01779

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 28 janvier 2016, 14/01779


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



17e chambre



ARRET N°



contradictoire



DU 28 JANVIER 2016



R.G. N° 14/01779



AFFAIRE :



[Q] [G]





C/

[R] [I]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 05 Mars 2014 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE



N° RG : 12/02381





Copies exécutoires délivrées Ã

  :



Me Delphine ZOUGHEBI

Me Frédéric REICHERT





Copies certifiées conformes délivrées à :



[Q] [G]



[R] [I]







le : 29 Janvier 2016

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT HUIT JANVIER DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 28 JANVIER 2016

R.G. N° 14/01779

AFFAIRE :

[Q] [G]

C/

[R] [I]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 05 Mars 2014 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE

N° RG : 12/02381

Copies exécutoires délivrées à :

Me Delphine ZOUGHEBI

Me Frédéric REICHERT

Copies certifiées conformes délivrées à :

[Q] [G]

[R] [I]

le : 29 Janvier 2016

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT HUIT JANVIER DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [Q] [G]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Delphine ZOUGHEBI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0445 substitué par Me Julia CRIQUI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0445

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 78646/2/2015/4569 du 07/09/2015 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)

APPELANTE

****************

Monsieur [R] [I]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Frédéric REICHERT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J036

INTIME

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 04 Décembre 2015, en audience publique, devant la cour composé(e) de :

Madame Martine FOREST-HORNECKER, Président,

Madame Clotilde MAUGENDRE, Conseiller,

Madame Juliette LANÇON, Vice-président placé,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Amélie LESTRADE

Par jugement du 5 mars 2014, le conseil de prud'hommes de Nanterre (section Activités), statuant en sa formation de départage, a :

- dit que le licenciement dont Madame [Q] [G] a fait l'objet de la part de Monsieur [I] a une cause réelle et sérieuse,

- débouté les parties de toutes leurs demandes,

- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 1 427,21 euros,

- laissé les dépens à la charge de Madame [G], qui seront recouvrés conformément à l'aide juridictionnelle.

Madame [G] a interjeté appel par déclaration d'appel adressée au greffe le 4 avril 2014.

Par arrêt du 1er octobre 2015 la cour a ordonné la réouverture des débats et invité les parties à conclure sur la motivation de la lettre de licenciement.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, Madame [Q] [G] demande à la cour, infirmant le jugement, de :

- constater que son licenciement a été motivé par son état de grossesse et est donc discriminatoire,

en conséquence,

- prononcer la nullité du licenciement,

- condamner Monsieur [R] [I] à lui payer les sommes suivantes :

. 12 131,28 euros à titre de salaires dus pendant la période de protection,

. 1 213,13 euros au titre des congés payés afférents,

. 2 854,42 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 285,44 euros au titre des congés payés afférents,

. 356,17 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement,

. 8 563,26 euros à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement,

. 3 857,80 euros à titre de remboursement de frais de transport,

- condamner Monsieur [I] à lui remettre les documents suivants, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document, à compter du prononcé de la décision à intervenir :

. certificat de travail conforme,

. bulletins de salaire des mois de septembre 2011 à octobre 2012,

. attestation Pôle emploi conforme,

- dire que les sommes mises à la charge de Monsieur [I] porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,

- ordonner la capitalisation des intérêts.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, Monsieur [R] [I] demande à la cour de :

- confirmer le jugement,

- débouter Madame [G] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Madame [G] à lui verser la somme de 1 euro symbolique au titre de l'article 559 du code de procédure civile,

- condamner Madame [G] aux entiers dépens et au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La cour n'ayant pas autorisé les parties à transmettre une note en cours de délibéré, le courrier du 7 décembre 2015 adressé par le conseil de Monsieur [I] est écarté des débats.

LA COUR,

qui se réfère pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties à leurs écritures et à la décision déférée,

Considérant que Madame [G] a été engagée en qualité de garde d'enfants à domicile par Monsieur et Madame [I], à compter du 1er février 2010 ;

Qu'elle bénéficiait d'un contrat de travail à plein temps et percevait une rémunération mensuelle brute d'un montant de 1 427 euros ;

Que Madame [I] a été diagnostiquée comme étant atteinte d'une grave maladie au mois de mai 2011 ;

Qu'alors, qu'à l'issue des vacances d'été, elle devait reprendre son travail le 5 septembre 2011, Madame [G] a avisé ses employeurs qu'elle était en arrêt de maladie ;

Qu'elle a bénéficié d'arrêts de travail pour maladie renouvelés du 19 septembre 2011 au 15 janvier 2012 ;

Que Madame [G], convoquée par lettre recommandée avec avis de réception du 1er novembre 2011, à un entretien préalable fixé le 14 novembre 2011, a été licenciée par lettre du 21 novembre 2011 ainsi libellée :

' (...)

Comme nous vous l'avons indiqué lors de notre dernier entretien téléphonique, nous vous confirmons notre volonté de modifier le mode de garde de nos enfants [C], [V] et [M] compte tenu de la cessation d'activité de Madame [S] [I] pour raisons médicales.

Nous vous indiquons donc que nous sommes dans l'obligation de supprimer votre poste et de vous licencier. (...) ' ;

Considérant, sur le licenciement, que Madame [G] soutient avoir informé ses employeurs de sa grossesse d'abord par téléphone le 16 octobre 2011 puis par courrier du 25 octobre 2011 ; qu'elle affirme que cette annonce est la cause réelle de son licenciement ;

Que Monsieur [I] admet avoir été informé de l'état de grossesse de Madame [G] mais se prévaut des dispositions de l'article L. 1225-4 du code du travail qui autorise l'employeur à licencier une salariée en état de grossesse en cas d'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ;

Que l'article L. 1225-4 prévoit que l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressée, non liée à l'état de grossesse ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement ;

Qu'en application des dispositions de l'article L. 1232-6, l'employeur est tenu d'énoncer dans la lettre de licenciement le ou les motifs de licenciement ;

Que le moyen tiré du défaut de motivation de la lettre de licenciement est nécessairement dans le débat ; que le juge doit le relever d'office et le soumettre au débat contradictoire ;

Que la lettre de licenciement ne mentionnant pas l'un des motifs exigés par l'article L. 1225-4 du code du travail à savoir la faute grave ou l'impossibilité, pour un motif étranger à la grossesse, de maintenir le contrat, le licenciement est nul ; qu'elle ne précise pas en quoi consiste la modification du mode de garde invoquée et en quoi elle rend impossible le maintien du contrat de travail de la salariée ;

Qu'en l'absence d'énoncé dans la lettre de licenciement d'un des motifs prévus par la loi le licenciement est nul ;

Qu'il convient donc, infirmant le jugement, de dire le licenciement nul ;

Considérant, sur les conséquences du licenciement nul, que la salariée dont le licenciement est nul et qui ne demande pas sa réintégration dans l'entreprise a droit d'une part aux indemnités de rupture, d'autre part à une indemnité réparant intégralement le préjudice résultant du caractère illicite du licenciement dont le montant est au moins égal à celui prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail ;

Qu'en application des dispositions de l'article L. 1225-71 du code du travail, elle a également droit au montant du salaire qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité ;

Que Madame [G] ayant bénéficié d'une protection à partir de l'annonce de son état de grossesse, Monsieur [I] est mal fondé à lui opposer, en ce qui concerne la demande de salaire, que le licenciement n'a pas été prononcé pendant la période de suspension du contrat de travail et les quatre semaines suivant cette période ; que dès lors que son congé de maternité devait prendre fin le 9 juillet 2012, la période couverte par la nullité se prolongeait sur les quatre semaines suivantes, soit jusqu'au 6 août 2012 ;

Que Madame [G] est bien fondée à obtenir le paiement de 8,5 mois de salaire soit 12 131,28 euros outre les congés payés afférents ;

Que la nullité du licenciement ouvre droit automatiquement au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis quand bien même la salariée aurait été dans l'incapacité de l'effectuer ; qu'il sera donc fait droit aux demandes de la salariée au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

Que le licenciement nul prend effet à la fin de la période de protection laquelle est assimilée à une période effectivement travaillée ; que Madame [G] est donc fondée à se prévaloir d'une ancienneté, comprenant la période de préavis, mais dont doivent être déduites les périodes d'arrêt de travail pour maladie, soit une ancienneté de 2 ans et 4 mois, donnant droit à une indemnité conventionnelle de licenciement de 666,02 euros ; que dès lors qu'elle a déjà perçu la somme de 405 euros, il lui sera alloué un complément d'indemnité conventionnelle de licenciement d'un montant de 261,02 euros ;

Qu'il lui sera en outre alloué à titre d'indemnité pour licenciement illicite le minimum légal sollicité d'un montant de 8 563,26 euros ;

Considérant, sur le remboursement des frais de transport, que Madame [G] soutient qu'elle vivait à [Localité 1] et prenait chaque jour le TGV pour se rendre sur son lieu de travail ; qu'elle affirme que Monsieur [I] lui est redevable de la moitié des frais d'abonnement ;

Que Monsieur [I] réplique que lors de son embauche Madame [G] a indiqué avoir un domicile à [Localité 2], a précisé qu'elle préférait que son courrier lui soit envoyé chez ses parents à [Localité 1] et que chaque mois elle a bénéficié du remboursement de la carte orange ;

Que dès lors que le contrat de travail mentionne que Madame [G] est domiciliée à [Localité 2] et que sa correspondance doit être expédiée à [Localité 1], que ses bulletins de paie portent mention d'un remboursement de carte orange et que les attestations de prix d'achat d'un abonnement Paris-Le Mans qu'elle communique ne sont pas nominatives, il convient de dire que Madame [G], qui n'a d'ailleurs formulé aucune demande à ce titre pendant l'exécution du contrat de travail, ne justifie pas avoir exposé quotidiennement des frais de trajet [Localité 3] -[Localité 4];

Que le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de ce chef ;

Considérant que, sans qu'il soit besoin d'assortir cette mesure d'une astreinte, il convient d'ordonner à Monsieur [I] de remettre à Madame [G] une attestation Pôle emploi, un certificat de travail et un bulletin de salaire récapitulatif conformes au présent arrêt ;

Considérant que l'appel de Madame [G] prospérant Monsieur [I] sera débouté de sa demande fondé sur les article 32-1 et 559 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Ecarte des débats le courrier adressé le 7 décembre 2015 par le conseil de Monsieur [I],

Infirme partiellement le jugement,

Et statuant à nouveau,

Dit le licenciement nul,

Condamne Monsieur [R] [I] à payer à Madame [Q] [G] les sommes suivantes :

. 12 131,28 euros à titre de salaires dus pendant la période de protection,

. 1 213,13 euros au titre des congés payés afférents,

. 2 854,42 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 285,44 euros au titre des congés payés afférents,

. 261,02 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jour de la réception par l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation,

. 8 563,26 euros à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement,

cette somme avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Ordonne à Monsieur [I] de remettre à Madame [G] une attestation Pôle emploi, un bulletin de salaire récapitulatif et un certificat de travail conformes au présent arrêt,

Dit que les intérêts échus des capitaux porteront eux- mêmes intérêts au taux légal dès lors qu'ils seront dus pour une année entière,

Confirme pour le surplus le jugement,

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [I] de ses demandes fondées sur les articles 32-1 et 559 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

Déboute Monsieur [I] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [I] aux dépens.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Martine FOREST-HORNECKER, président et Madame Amélie LESTRADE, greffier en pré-affectation.

Le GREFFIER Le PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 14/01779
Date de la décision : 28/01/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 17, arrêt n°14/01779 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-28;14.01779 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award