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26/01/2016 | FRANCE | N°14/01027

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 26 janvier 2016, 14/01027


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



FS

Code nac : 30Z



12e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 26 JANVIER 2016



R.G. N° 14/01027



AFFAIRE :



SNC FRANPRIX EXPANSION





C/

SCI [Adresse 3]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 23 Janvier 2014 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 08

N° Section :

N° RG : 12/02899



Expéditions

exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Martine DUPUIS

Me Raphaël NACCACH





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT SIX JANVIER DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

FS

Code nac : 30Z

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 26 JANVIER 2016

R.G. N° 14/01027

AFFAIRE :

SNC FRANPRIX EXPANSION

C/

SCI [Adresse 3]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 23 Janvier 2014 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 08

N° Section :

N° RG : 12/02899

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Martine DUPUIS

Me Raphaël NACCACH

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SIX JANVIER DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SNC FRANPRIX EXPANSION

N° SIRET : 508 .64 1.3 62

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1452821

Représentant : Me Laurent RUBIO, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

SCI [Adresse 3]

N° SIRET : 518 313 713

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Raphaël NACCACH de la SELEURL IWan SELARL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R058

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Novembre 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Dominique ROSENTHAL, Président,

Monsieur François LEPLAT, Conseiller,

Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

Par acte sous seing privé en date du 22 juillet 2010, la SCI [Adresse 3] a donné à bail à la SNC FRANPRIX EXPANSION des locaux situés [Adresse 3]) composés d'un rez-de-chaussée 'd'une superficie de 971m²SHON à l'intérieur des murs selon plan joint en annexe 1" pour une durée de neuf ans à compter de la disposition effective du local au preneur, et sous condition suspensive, de l'obtention d'une décision d'autorisation de travaux visés à l'article 22 du contrat.

La SNC FRANPRIX EXPANSION a déposé le 30 juillet 2010 une déclaration préalable de travaux ( DP 092 024 10 00031) auprès des services de l'urbanisme de [Localité 1] mais par courrier du 2 août 2010 la mairie lui a demandé de produire ' la copie de servitude de passage de la sortie de secours'.

Une deuxième déclaration de travaux (DP 092 024 10 00035) au vu de plans différents ne comprenant pas la sortie de secours latérale a alors été faite le 3 septembre 2010 par la SNC FRANPRIX EXPANSION. Par courrier du 9 septembre 2010, les services de l'urbanisme lui ont indiqué que le récépissé de dépôt de la demande d'autorisation d'enseignes manquait à son dossier. Cette pièce a été produite par la SNC FRANPRIX EXPANSION le 11 octobre 2010.

La SNC FRANPRIX EXPANSION a bénéficié le 12 décembre 2010 d'une décision de non opposition tacite de la mairie, qui ne devenait définitive que le 12 février 2011 après purge du droit des tiers.

Un projet de prorogation du délai de réalisation de la condition suspensive a alors été envisagé par les parties mais le 14 janvier 2011 la SNC FRANPRIX EXPANSION a demandé la caducité du bail, en application de l'article 22 du contrat, n'ayant pas obtenu de décision définitive de non opposition au 31 décembre 2010.

C'est dans ces circonstances que la SCI [Adresse 3] a assigné le 15 mars 2011 la SNC FRANPRIX EXPANSION devant le tribunal de grande instance de Créteil en résolution du contrat de bail et en paiement de dommages et intérêts. Par ordonnance du 30 janvier 2012, le juge de la mise en état de ce tribunal a fait droit à l'exception d'incompétence soulevée et a renvoyé le dossier devant le tribunal de grande instance de Nanterre.

Par jugement en date du 23 janvier 2014, le tribunal de grande instance de Nanterre statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort:

- Dit que la condition suspensive stipulée à l'article 22 du bail signé le 22 juillet 2010 entre la SCI [Adresse 3] et la SNC FRANPRIX EXPANSION est réputée accomplie en application de l'article 1178 du code civil;

- Dit que ledit bail a pris effet au 1er janvier 2011;

- Prononce la résiliation du bail du 22 juillet 2010 aux torts exclusifs de la SNC FRANPRIX EXPANSION,

- Condamne la SNC FRANPRIX EXPANSION à payer à la SCI [Adresse 3] les sommes suivantes à titre de dommages-intérêts :

- 1. 955 416, 61 € hors taxe au titre du prix du contrat, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision;

- 970 000 € hors taxe au titre du prix des travaux, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision;

- Condamne la SNC FRANPRIX EXPANSION à payer à la SCI [Adresse 3] la somme de 25 000 € au titre de l`article 700 du code de procédure civile;

- Déboute les parties du surplus de leurs demandes;

- Ordonne l`exécution provisoire de la présente décision à hauteur des deux tiers de l`ensemble des condamnations prononcées;

- Condamne la SNC FRANPRIX EXPANSION aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l`article 699 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 7 février 2014, la SNC FRANPRIX EXPANSION a interjeté appel de la décision.

Par dernières conclusions signifiées par RPVA le 15 octobre 2015, la SNC FRANPRIX EXPANSION demande à la cour,

vu les articles R 421-1 et suivants du code l'urbanisme,

vu les prescriptions imposées par le formulaire CERFA n°13404*01, de :

- Infirmer dans son intégralité le jugement de la 8ème chambre du tribunal de grande instance de Nanterre en date du 23 janvier 2014, sauf en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation de la SCI [Adresse 3] sur son préjudice financier.

Ce faisant et statuant à nouveau :

A titre principal:

1. Sur le devoir de cohérence

-Dire que la SCI [Adresse 3] a proposé le 30 décembre 2010 et le 11 janvier 2011 la signature d'un avenant de prorogation bail sous condition suspensive en date du 22 juillet 2010 dans lesquels il était précisé que les conditions suspensives n'étaient pas réalisées et que la date d'effet du bail n'était pas acquise.

- Dire que la SCI [Adresse 3] n'a pas mis en 'uvre le formalisme lié à la prise d'effet du bail

-Constater que la SCI [Adresse 3] s'est contredite au détriment de son adversaire.

En conséquence,

- Déclarer la SCI [Adresse 3] irrecevable en ses demandes pour manquement au devoir de cohérence.

2. Sur le non respect du formalisme contractuel

-Constater que la SCI [Adresse 3] n'a pas respecté les stipulations contractuelles relatives à la prise d'effet du bail

En conséquence,

- Déclarer la SCI [Adresse 3] irrecevable en ses demandes

A titre subsidiaire:

-Dire que l'article 9.1 du bail sous condition suspensive en date du 22 juillet 2010 autorisait tous les travaux visés en annexe 2 de celui-ci, laquelle prévoyait expressément : « le percement d'une porte de sortie de secours vers la copropriété voisine »

- Dire que la SCI [Adresse 3] a proposé le 30 décembre 2010 et le 11 janvier 2011 la signature d'un avenant de prorogation bail sous condition suspensive en date du 22 juillet 2010 dans lesquels il était précisé que les conditions suspensives n'étaient pas réalisées et que la date d'effet du bail n'était pas acquise.

- Dire que la SNC FRANPRIX EXPANSION a respecté les règles imposées par les articles R 421-1 et suivants du code de l'urbanisme

-Dire que la SNC FRANPRIX EXPANSION a respecté les prescriptions imposées par le formulaire CERFA n°13404*01,

- Dire que les demandes des services d'urbanisme de la maire de [Localité 1] en date des 2 août et du 9 septembre constituent des événements de force majeure ou une cause étrangère excluant que l'on puisse imputer toute faute à la société FRANPRIX conformément aux dispositions de l'article 1148 du code civil,

- Dire que la SCI [Adresse 3] n'a pas mise en demeure la SNC FRANPRIX EXPANSION d'exécuter les obligations contractuelles prévues dans le bail sous condition suspensive en date du 22 juillet 2010, et ce, en violation des dispositions de l'article 1146 du code civil,

- Dire que la SCI [Adresse 3] n'a jamais demandé la prise d'effet du bail en violation de l'article 4.1 du bail,

-Dire que la SNC FRANPRIX EXPANSION et la SCI [Adresse 3] avaient, en application de l'article 1150 du code civil, expressément prévu une sanction contractuelle concernant une faute du preneur relativement à la condition suspensive qu'elle soit accomplie ou réputée accomplie en application de l'article 1178 du code civil.

En toute hypothèse et statuant à nouveau,

- Débouter la SCI [Adresse 3] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, en ce y compris celles de son appel incident,

-Condamner la SCI [Adresse 3] à verser à la SNC FRANPRIX EXPANSION la somme de 20 000 € de dommages et intérêts pour abus de droit,

En toute hypothèse,

-Condamner la SCI [Adresse 3] à payer à la SNC FRANPRIX EXPANSION la somme de 30.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile , ainsi qu'aux entiers dépens.

- Dire que les dépens pourront être directement recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions signifiées par RPVA le 15 septembre 2015, la SCI [Adresse 3] prie la cour de:

- Dire que la SCI [Adresse 3] recevable et fondée en l'ensemble de ses demandes,

- Dire que le contrat de bail signé entre les parties le 22.07.2010 a pris effet le 01.01.2011, la condition suspensive qui y était inscrite étant réputée accomplie compte tenu des agissements délibérés de la société FRANPRIX EXPANSION, obligée sous cette condition, pour en empêcher l'accomplissement,

- Dire par conséquent que ledit bail n'a pas été éteint par une caducité au 31.12.2010,

Par suite:

- Constater que la SNC FRANPRIX EXPANSION n'a pas respecté ses obligations,

- Prononcer la résiliation du bail aux torts de la société FRANPRIX EXPANSION,

-Réformant partiellement le jugement attaqué, condamner par conséquent la SNC FRANPRIX EXPANSION , en réparation du préjudice du bailleur, à payer à la demanderesse les sommes suivantes :

*1.123.750€ au titre du prix du contrat,

* 896.500€ au titre des travaux inexécutés par l'appelante,

* 705.000€ au titre du préjudice financier

* 25.000€ au titre des frais de procédure irrépétibles,

Y ajoutant,

- Condamner par ailleurs la SNC FRANPRIX EXPANSION aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- La condamner à une somme supplémentaire de 25.000€ au titre des frais de procédure

irrépétibles exposés en cause d'appel,

- Débouter la SNC FRANPRIX EXPANSION de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions des parties et au jugement déféré conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 22 octobre 2015 et l'affaire a été fixée à l'audience du 12 novembre 2015 pour y être plaidée.

MOTIFS

sur les fins de non recevoir:

En application de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L'article 124 du code de procédure civile dispose que les fins de non recevoir doivent être accueillies sans que celui qui les invoque ait à justifier d'un grief et alors même que l'irrecevabilité ne résulterait d'aucune disposition expresse.

La SNC FRANPRIX EXPANSION met en avant le manquement de la SCI [Adresse 3] au devoir de cohérence puisque cette dernière l'a assignée aux fins de dire que la condition suspensive prévue au contrat de bail était accomplie du fait des agissements de la SNC FRANPRIX EXPANSION alors qu'elle lui a adressé antérieurement des projets d'avenant de prorogation de ce bail, ce qui caractérise également sa renonciation au droit de se prévaloir de la prétendue réalisation de la condition suspensive. Elle explique qu'en outre la SCI [Adresse 3] n'a pas mis en oeuvre le formalisme prévu en cas de réalisation de la condition suspensive pour que le preneur prenne possession des lieux.

En réplique, la SCI [Adresse 3] soutient que c'est la SNC FRANPRIX EXPANSION qui a été à l'initiative de la proposition de prorogation, qu'il ne peut lui être reproché de ne pas s'être opposée à cette demande, que le projet indiquait à la fois que la condition suspensive n'était pas acquise au 31 décembre 2010 et qu'elle ne voulait pas supporter les conséquences financières d'un report de délai, qu'elle n'a pas changé de position en droit, qu'elle a dû assigner au vu du revirement de la SNC FRANPRIX EXPANSION du 14 janvier 2011, qu'en tout état de cause la prise d'effet du bail était automatique au 1er janvier 2011, que celle-ci était indépendante de la prise de possession des lieux par le preneur, que de toute façon aucun formalisme n'est prévu au cas d'une condition suspensive non réalisée, qu'il n'est pas justifié par le preneur qu'elle ait renoncé à se prévaloir de l'inaccomplissement de la condition suspensive.

Certes l'obligation de loyauté s'imposant aux parties dans une instance comporte l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui. Cependant ce principe ne permet pas d'opposer le barrage de la recevabilité aux allégations contradictoires des parties, qui ressortent de l'appréciation de la juridiction.

En l'occurrence, la SNC FRANPRIX EXPANSION ne conteste pas avoir elle-même pris l'initiative de proposer le 21 décembre 2010 à la SCI [Adresse 3] ( pièce N°11) de prolonger le délai de réalisation de la condition suspensive prévue au bail du 22 juillet 2010 pour tenir compte du délai de recours des tiers de l'autorisation accordée le 15 décembre 2010 et de retenir une date au plus tard le 15 mars 2011. En faisant cette proposition, la SNC FRANPRIX EXPANSION admettait implicitement que la condition suspensive ne pouvait être réalisée au 31 décembre 2010. Mais il ne peut être reproché à la SCI [Adresse 3] de ne pas avoir à ce stade demandé la caducité du bail alors, qu'en proposant le 31 décembre 2010 et le 11 janvier 2011 des projets d'avenant au bail, elle n'a fait que répondre à la sollicitation de la SNC FRANPRIX EXPANSION pour permettre l'exécution du contrat, ce qui ne peut nullement caractériser une quelconque renonciation de la société bailleresse à ses droits nés du contrat. C'est dans ce contexte d'existence de pourparlers en cours sur les projets d'avenant que la SNC FRANPRIX EXPANSION a adressé une lettre le 14 janvier 2011 à la SCI [Adresse 3] l'informant de la caducité du bail, avec absence de toute indemnité pour les parties. Ce courrier de renonciation de la part de la SNC FRANPRIX EXPANSION est pour le moins inattendu car c'est elle-même qui avait sollicité une prorogation de délai moins d'un mois avant, et par conséquent elle ne peut maintenant utilement imputer à la SCI [Adresse 3], qui a tiré les conséquences de la nouvelle position de la société preneuse en l'assignant en résolution du bail en réponse à ce courrier, un manquement au devoir de cohérence en matière contractuelle.

En ce qui concerne le manquement au formalisme allégué, s'il n'est pas discuté par les parties que la condition suspensive n'a pas été réalisée le 31 décembre 2010 à 16h, la SCI [Adresse 3] demande cependant de juger que la condition doit être réputée accomplie du fait des manquements de la SNC FRANPRIX EXPANSION dans sa réalisation, ce que conteste cette dernière. Par conséquent, il ne peut être reproché à la SCI [Adresse 3] le non respect du formalisme de l'article 22 du contrat, qui ne porte que sur le cas où la condition suspensive, tenant à une décision de non opposition expresse ou tacite des travaux d'autorisation des travaux, est effectivement réalisée, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, ni celui de l'article 4.1 du contrat qui concerne la prise de possession par la société preneuse des locaux lors de la prise d'effet du bail. Au surplus, aucun formalisme particulier n'est prévu en application de l'article 1178 du code civil au cas d'une condition suspensive réputée accomplie.

Il convient donc de rejeter les fins de non recevoir invoqués par la SNC FRANPRIX EXPANSION.

Sur la responsabilité contractuelle:

La SNC FRANPRIX EXPANSION fait tout d'abord valoir l'absence de toute mise en demeure de la part de la SCI [Adresse 3], qui de son côté soutient qu'elle n'était pas nécessaire.

L'obligation de mise en demeure à la SNC FRANPRIX EXPANSION est satisfaite par la délivrance de l'assignation du 15 mars 2011 en résolution du bail et en paiement de dommages et intérêts. Il ne peut être reproché à la SCI [Adresse 3] de ne pas avoir délivré une mise en demeure à la SNC FRANPRIX EXPANSION alors que celle-ci avait clairement exprimé le 14 janvier 2011 sa volonté de ne pas exécuter le contrat et de demander la caducité du bail, et que les parties avaient vainement tenté de trouver un accord sur la prorogation du contrat. Ce moyen sera dès lors rejeté.

La SNC FRANPRIX EXPANSION fait valoir qu'elle a respecté ses obligations contractuelles, explique qu'elle avait le droit contractuellement de déposer un plan prévoyant une issue de secours sur la copropriété voisine, que le plan était suffisant au regard des prescriptions imposées par le formulaire CERFA n°13404*01, que la commune [Localité 1] ne pouvait lui demander ni la copie de la servitude de passage ni le dépôt de la demande d'autorisation d'enseignes. Elle ajoute qu'elle a été contrainte de déposer une nouvelle demande de déclaration préalable à la demande expresse du bailleur, que le bailleur a ainsi provoqué une nouvelle instruction du dossier qui a empêché la réalisation de la condition dans le délai imparti par le bail.

En réplique, la SCI [Adresse 3] soutient que la SNC FRANPRIX EXPANSION n'a pas déposé le bon plan lors de la première déclaration préalable de travaux puisqu'elle a inclus des travaux que la société bailleresse n'avait pas autorisés, à savoir l'ouverture d'une issue de secours latérale ouvrant sur la copropriété voisine, que dès lors la violation contractuelle est caractérisée, que d'ailleurs la SNC FRANPRIX EXPANSION a redéposé le 3 septembre 2010 une seconde demande d'autorisation de travaux, qu'elle n'a cependant pas annexé les pièces nécessaires, ce qui a retardé d'autant l'examen du dossier. Elle ajoute qu'en tout état de cause la SNC FRANPRIX EXPANSION n'avait pas obtenu l'accord de la copropriété pour l'ouverture de l'issue de secours latérale, que dès lors sa demande de déclaration préalable ne pouvait aboutir.

L'article 1178 du code civil dispose que la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement. C'est au créancier de cette obligation sous condition suspensive de rapporter la preuve que le débiteur a empéché la réalisation de celle-ci.

L'article 22 du contrat de bail du 22 juillet 2010 stipule que le présent bail ne deviendra définitif qu'après la réalisation de la condition suspensive suivante stipulée dans l'intérêt du preneur: 'obtention par le preneur d'une décision de non opposition expresse ou tacite devenue définitive autorisant les travaux modifiant la façade des locaux loués et la mise en place d'enseigne' étant précisé que 'la déclaration préalable obligatoire accompagnée des pièces nécessaires devra être déposée au plus tard le 31 juillet 2010", que 'la condition suspensive devait être réalisée au plus tard le 31 décembre 2010 à 16h et si à cette date et heure, la condition suspensive n'est pas réalisée, le présent contrat sera de plein droit caduc, sans aucune formalité et sans aucune indemnité de part et d'autre'.

Si certes l'article 9-1 du contrat intitulé 'travaux d'aménagement du preneur à la signature du bail' indique que le bailleur autorise la réalisation des travaux visés dans l'annexe 2, et que le bailleur autorise le preneur à déposer auprès des services compétents de la mairie de [Localité 1] une déclaration préalable telle que visée par l'article R421-7 du code de l'urbanisme, que la déclaration préalable accompagnée des pièces nécessaires devra être déposée au plus tard le 31 juillet 2010, que l'annexe 2 comprend le percement d'une porte de sortie de secours vers copropriété (sous réserves des accords), il n'en demeure pas moins que l'article 22 constituant la condition suspensive du contrat de bail ne mentionne que les travaux modifiant la façade des locaux loués, que l'annexe 2 comprend au titre des travaux de façade la mise en place de 2 portes de sortie de secours, que tel n'est pas le cas d'une issue de secours latérale qui par hypothèse ne trouve pas sur la façade des locaux mais sur le coté.

Le fait que dans le même contrat sous l'article 9 le bailleur autorise certains autres travaux d'aménagement est sans incidence sur la mise en oeuvre de la condition suspensive portant sur les travaux de façade, qu'en tout état de cause l'accord de la copropriété voisine était nécessaire pour le percement d'une ouverture latérale de secours donnant sur la cour de l'immeuble voisin, qu'aucun élément ne permet de dire qu'il a été accordé voire même sollicité, que cet accord nécessitant une réunion de l'assemblée générale des copropriétaires était un préalable nécessaire à une demande d'autorisation de ces travaux auprès de la mairie, que sans cet accord la SNC FRANPRIX EXPANSION ne pouvait pas obtenir l'autorisation de la mairie.

Il résulte de ces éléments que c'est en violation manifeste des termes mêmes de la condition potestative décidés par les parties que la SNC FRANPRIX EXPANSION a déposé à l'appui de sa demande de déclaration préalable de travaux le 30 juillet 2010 à la mairie de [Localité 1] un plan qui n'était pas conforme aux travaux de façades autorisés par le bailleur, puisque le plan ne comportait qu'une issue de secours en façade et une latérale, comme elle le reconnaît d'ailleurs implicitement dans son courriel du 30 août 2010, dans lequel elle indique que le plan tel annexé au bail sera remis demain à la mairie en tant que plan B.

La SNC FRANPRIX EXPANSION a alors déposé une seconde déclaration préalable de travaux le 3 septembre 2010 qui comprend les deux issues de secours en façade de l'immeuble. Cependant le 9 septembre 2010, le service urbanisme de la mairie de [Localité 1] sollicite de la SNC FRANPRIX EXPANSION la demande d'autorisation d'enseigne qui manque au dossier et indique que ce projet nécessite la consultation de l'architecte des bâtiments de France, ce qui reporte le délai d'instruction du dossier à deux mois après réception de toutes les pièces nécessaires. Cette pièce complémentaire nécessaire à l'instruction du dossier, qui ne saurait constituer un cas de force majeure ou une cause étrangère comme allégué par la SNC FRANPRIX EXPANSION alors qu'elle est un professionnel de la création de magasins, ne sera déposée par elle que le 11 octobre 2010, retardant d'autant l'instruction du dossier, et les délais ne pourront pas alors être respectés.

Il ressort de l'examen des déclarations préalables de travaux déposées par la SNC FRANPRIX EXPANSION successivement le 30 juillet 2010 et le 3 septembre 2010 que c'est le non respect par elle de ses obligations contractuelles, notamment d'un plan conforme lors de la première déclaration de travaux, et son manque de diligences dans le dépôt des pièces qui ont empêché l'accomplissement de la condition potestative incluse dans le contrat de bail. Cette condition sera réputée dès lors accomplie et le bail prendra effet au 1er janvier 2011, avec toutes les conséquences que cela entraîne pour la SNC FRANPRIX EXPANSION.

Alors que la SNC FRANPRIX EXPANSION n'a pas respecté son obligation de prendre possession des locaux loués, que l'assignation vaut mise en demeure, qu'elle n'a cependant pas exprimé l'intention d'occuper les lieux loués, que ces faits sont constitutifs de violations graves par le preneur de ses obligations contractuelles, il convient, en application de l'article 1184 du code civil, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de bail du 22 juillet 2010, confirmant sur ce point la décision du tribunal.

Sur le préjudice de la SCI [Adresse 3]:

La SCI [Adresse 3] réclame outre le prix du contrat comprenant le droit d'entrée et les loyers du 1er janvier 2011 au mois de mars 2015, réduisant sa demande étant donné la mise en location des locaux à compter de cette date, le prix des travaux inexécutés par l'appelante et la réparation de son préjudice financier.

La SNC FRANPRIX EXPANSION s'oppose à ces demandes, arguant des termes du contrat.

Il ne peut être appliqué les conditions financières prévues par l'article 4 et l'article 22 en cas de condition suspensive non réalisée, alors qu'il a été établi que la condition a été réputée accomplie et toute demande de la SNC FRANPRIX EXPANSION de paiement d'une indemnité forfaitaire et irréductible d'une année de loyers de base toutes taxes comprises sera dès lors rejetée.

Les manquements de la SNC FRANPRIX EXPANSION à ses obligations contractuelles ont causé un préjudice certain à la SCI [Adresse 3], dont ce dernier doit cependant en rapporter la preuve.

En ce qui concerne le prix du contrat, la SCI [Adresse 3] réclame la somme de 1.123.750€. L'article 5 du contrat prévoit un droit d'entrée de 300.000€ HT et un loyer annuel de 290.000€ HT. Puisqu'il est indiqué sous l'article 2 que le preneur ne peut donner congé qu'à l'expiration de la 6ème année du bail, et qu'il est précisé sous l'article 4.1 une franchise de trois mois et demi de loyers à compter de la date de prise d'effet du bail, la SNC FRANPRIX EXPANSION est redevable à la SCI [Adresse 3] à ce titre de la somme de: ( 290.000 x 8,5/12) pour l'année 2011, de (290.000 x3) pour les années 2012 à 2014 et de (290.000x 2/12) pour l'année 2015 jusqu'en mars 2015, soit la somme globale de 1.123.750€ HT.

Au titre des travaux inexécutés par l'appelante, la SCI [Adresse 3] sollicite la confirmation de la décision du tribunal qui a chiffré le poste de travaux à 970.000€ HT, sauf à déduire les sommes de 68.000€ et 5.500€ correspondant aux chambres froides et enseigne et demande une somme de 896.000€. La SNC FRANPRIX EXPANSION conteste ce montant faisant valoir que la valeur des travaux qui devaient revenir par accession au bailleur en fin de bail ne peut être une valeur à neuf, et qu'en tout état de cause le nouveau bail prévoit que le bailleur bénéficiera par voie d'accession de tous les travaux faits par le nouveau preneur.

Il est expressément prévu dans l'article 9 du contrat de bail que le preneur prendra à sa charge tous les travaux d'aménagement des locaux loués, et que le bailleur bénéficiera par voie d'accession et en fin de jouissance des locaux loués, sans que le preneur puisse y porter atteinte et sans aucune indemnité d'aucune sorte, de tous les travaux effectués soit lors de la prise de possession des locaux loués soit en cours de bail, et ce quelque soit la nature des travaux. Il s'ensuit que la SNC FRANPRIX EXPANSION est redevable à l'égard de la SCI [Adresse 3] des travaux qu'elle aurait dû effectuer et qui n'ont pas été réalisés, sans que les termes d'un contrat de bail postérieur ne puissent exonérer la SNC FRANPRIX EXPANSION de son obligation contractuelle. Il ne peut être reproché au bailleur de produire un chiffrage unilatéral des travaux, d'ailleurs réalisé par un architecte lot par lot au vu de l'annexe 2 du contrat de bail, puisque par hypothèse la SNC FRANPRIX EXPANSION n'a pas procédé à ces travaux.

Comme le souligne la SNC FRANPRIX EXPANSION, l'article 9.3 indique que 'les équipements, matériels et installations, tels que cloisonnements par exemple, non fixés à demeure, et qui de ce fait ne peuvent être considérés comme immeuble par destination, resteront la propriété du preneur et devront être enlevés par lui lors de son départ, à charge pour lui de remettre les lieux en l'état, après cet enlèvement. Préalablement à la restitution des locaux loués, le preneur devra restituer à ses frais exclusifs tous ses aménagements et installations spécifiques tels que par exemple: chambres froides, rayonnages, caisses, stand d'accueil, etc, étant expressément convenu que l'autorisation éventuelle donnée par le bailleur à la réalisation des travaux du preneur ne limite aucunement l'obligation de supprimer les aménagements et installations spécifiques du preneur'. Par conséquent, la SNC FRANPRIX EXPANSION n'est pas redevable, comme elle le prétend, des travaux concernant les chambres froides et les enseignes qui sont par nature démontables. La SCI [Adresse 3] indique dans ses dernières écritures que le nouveau preneur a pris en charge les travaux nécessaires à l'installation et à l'équipement de ces chambres froides et elle déclare réduire la demande de ce chef et ne pas s'opposer pas à la déduction portant sur le bandeau d'enseigne.

En ce qui concerne les frais d'étude à hauteur de 116.520€ que conteste la SNC FRANPRIX EXPANSION, à partir du moment où les travaux n'ont pas été effectués, ne peuvent pas être comptabilisés dans leur intégralité les honoraires de l'architecte et les différents diagnostics avant travaux, les bureaux d'étude et de contrôles. Il sera ainsi alloué à la SCI [Adresse 3] une somme forfaitaire de 30.000€ correspondant à la visite des lieux par l'architecte et au chiffrage des différents postes de travaux.

Au vu de ces éléments, il convient de condamner la SNC FRANPRIX EXPANSION à payer à la SCI [Adresse 3] la somme de 970.000 - (96.000 +5.500+116.520) +30.000 soit la somme de 781.980€ HT au titre des travaux.

Enfin, la SCI [Adresse 3] demande la somme de 705.000€ au titre de son préjudice financier correspondant aux loyers qu'elle aurait dû percevoir pour le 1er étage de son immeuble, alors que l'absence de travaux au rez-de chaussée et notamment ceux portant sur la séparation du rez-de-chaussée et le 1er étage ne lui ont pas permis de procéder à la location des locaux à usage commercial du 1er étage avant le 1er décembre 2015. La SNC FRANPRIX EXPANSION conteste ce chef de préjudice.

Aucun élément n'est produit par la SCI [Adresse 3] pour caractériser l'incidence des travaux d'aménagement du rez-de-chaussée sur la location du 1er étage. Dès lors la preuve n'est pas rapportée d'un lien de causalité direct entre l'absence des travaux effectués par la SNC FRANPRIX EXPANSION et l'absence de location du 1er étage. La SCI [Adresse 3] sera déboutée de ce chef de préjudice.

Sur la demande de dommages et intérêts de la SNC FRANPRIX EXPANSION:

La SNC FRANPRIX EXPANSION ne caractérise pas l'abus de droit de la SCI [Adresse 3] et sa demande de dommages et intérêts à ce titre sera rejetée.

Sur les demandes annexes:

Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dont il a fait une équitable application.

En cause d'appel, il convient de condamner la SNC FRANPRIX EXPANSION à verser à la SCI [Adresse 3] la somme de 25.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens d'appel seront à la charge de la SNC FRANPRIX EXPANSION.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le quantum des condamnations de la SNC FRANPRIX EXPANSION au titre du prix du contrat et des travaux,

L'infirme sur ce point,

Statuant à nouveau:

Condamne la SNC FRANPRIX EXPANSION à verser à la SCI [Adresse 3] les sommes suivantes:

- 1.123.750€ HT, au titre du prix du contrat, avec intérêts à taux légal à compter de la présente décision,

- 781.980€ HT au titre des travaux, avec intérêts à taux légal à compter de la présente décision,

Y ajoutant,

Condamne la SNC FRANPRIX EXPANSION à payer à la SCI [Adresse 3] la somme de 25.000€ au titre des frais irrépétibles d'appel,

Rejette toutes les autres demandes des parties,

Condamne la SNC FRANPRIX EXPANSION aux dépens d'appel et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Mme Dominique ROSENTHAL, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre
Numéro d'arrêt : 14/01027
Date de la décision : 26/01/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 12, arrêt n°14/01027 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-26;14.01027 ?
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