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14/01/2016 | FRANCE | N°12/04171

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 14 janvier 2016, 12/04171


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



11e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 14 JANVIER 2016



R.G. N° 12/04171



MCP/CA



AFFAIRE :



SA GAZTRANSPORT & TECHNIGAZ





C/

[Z] [Y]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Juin 2012 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de RAMBOUILLET



N° RG : 09/00446


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Copies exécutoires délivrées à :



Me Isabelle FRANCOU

Me Renaud SEMERDJIAN





Copies certifiées conformes délivrées à :



SA GAZTRANSPORT & TECHNIGAZ



[Z] [Y]







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUATORZE JANVIER DEUX MILLE SEIZE...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 14 JANVIER 2016

R.G. N° 12/04171

MCP/CA

AFFAIRE :

SA GAZTRANSPORT & TECHNIGAZ

C/

[Z] [Y]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Juin 2012 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de RAMBOUILLET

N° RG : 09/00446

Copies exécutoires délivrées à :

Me Isabelle FRANCOU

Me Renaud SEMERDJIAN

Copies certifiées conformes délivrées à :

SA GAZTRANSPORT & TECHNIGAZ

[Z] [Y]

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATORZE JANVIER DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SA GAZTRANSPORT & TECHNIGAZ

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Isabelle FRANCOU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D2082, M. [X] [O] (Membre de l'entrep.)

APPELANTE

****************

Monsieur [Z] [Y]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Renaud SEMERDJIAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R049

INTIME

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 18 Novembre 2015, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Sylvie BOSI, Président,

Madame Marie-Christine PLANTIN, Conseiller,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT

Vu le jugement du Conseil de prud'hommes de Rambouillet statuant en formation de départage le 26 septembre 2012 qui a :

- condamné la société GazTransport & Technigaz (ci-après GTT) à verser à Monsieur [Z] [Y] les sommes suivantes :

. 2833, 33 € au titre de l'indemnité légale de licenciement

. 21250 € au titre de l'indemnité de préavis et les congés payés y afférents

. 9916 € au titre du rappel de salaire durant la mise à pied et les congés payés y afférents

. 70000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

. 3000 € à titre de dommages-intérêts pour les conditions vexatoires du licenciement

. 24000 € au titre de la participation

. 3000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile

- ordonné la remise d'une attestation Pôle Emploi et d'un certificat de travail rectifiés

- ordonné à la société GTT de rembourser les indemnité de chômage versées au salarié à concurrence de 6 mois

- mis les dépens à la charge de la société,

Vu l'appel interjeté par la société GTT par déclaration au greffe de la Cour le 3 octobre 2012,

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement le 18 novembre 2015 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens de la société GTT qui demande :

- l'infirmation du jugement intervenu et la validation du licenciement pour faute lourde et le rejet des demandes formées par le salarié et ordonner à ce dernier de rembourser les sommes lui ayant été versées en exécution du jugement avec intérêt au taux légal

- le rejet de la demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire et le rejet de la demande formée au titre de la participation au titre de l'année 2009

- la condamnation de Monsieur [Y] à verser la somme de 15000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens de 1ère instance et d'appel,

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement le 18 novembre 2015 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens de Monsieur [Y] qui demande :

- la confirmation du jugement entrepris en ajoutant au titre des condamnations prononcées contre la société la somme de 991 € au titre des congés payés sur rappel de salaire et 2125 € au titre des congés payés sur l'indemnité compensatrice de préavis

- l'infirmation sur le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse devant être portés à 85000 € et les dommages-intérêts pour procédure vexatoire devant être portés à 42500 €

- la condamnation de la société à verser 15000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens,

LA COUR,

Considérant que Monsieur [Y] a été engagé par la société GTT dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à compter du 12 mars 2007 en qualité de Délégué à l'organisation et à la qualité ; qu'il a fait l'objet d'un licenciement pour faute lourde par lettre datée du 9 novembre 2009 ;

Sur la prescription des faits fautifs invoqués

Considérant selon l'article L 1332-4 du Code du travail qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ;

Que ces dispositions ne font pas obstacle à la prise en considération d'un fait antérieur à deux mois dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi dans ce délai ;

Considérant qu'il ressort de l'examen des pièces versées aux débats que :

- s'agissant du premier grief - opposition et critiques répétées sur les choix opérés par la société - qu'est évoqué, à ce propos, en dernier lieu le contenu d'un mail en date du 24 septembre 2009

- s'agissant du deuxième grief - immobilisme volontaire -celui-ci est matérialisé par une question posée au salarié le 18 septembre 2009

- s'agissant du troisième grief - violation des règles de sécurité informatique - le 7 septembre 2009 le service informatique détectait un virus sur le poste de Monsieur [Y]

- s'agissant du quatrième grief - détournement d'informations et de documents confidentiels - un témoignage faisait état des propos tenus par le salarié à la date du 21 octobre 2009 ;

Considérant en définitive, au regard de ce qui précède, qu'est établie la persistance des faits imputés au salarié dont les agissements avaient été mis à jour au cours des deux années précédentes ; qu'il n'y a lieu, en conséquence, de faire droit au moyen tiré de la prescription ;

Sur les motifs du licenciement

Considérant que la faute lourde est celle qui est commise par le salarié avec l'intention de nuire à l'employeur et / ou à tout le moins avec la volonté de causer un dommage ; que la charge de la preuve d'une telle faute appartient exclusivement à l'employeur ; que si un doute subsiste, il doit profiter au salarié ;

Considérant que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige mentionnait quatre types de manquements ;

Que la dite lettre, en l'espèce, est suffisamment motivée dès lors qu'elle fait référence à des faits qui sont matériellement vérifiables ;

Considérant concernant le premier grief qu'il ressort notamment de l'examen des pièces communiquées que si l'on se réfère aux plus récents propos du salarié :

- s'adressant à trois reprises le 1er septembre 2009 à Monsieur [P], Monsieur [Y] suggérait à ce dernier la façon de gouverner et de sanctionner les anciens dirigeants et poursuivait dans le même esprit le 22 septembre puis le 24 septembre suivant et évoquait une réorganisation et les principes devant y présider

- un échange avec Monsieur [S] [Q] auquel le salarié avait l'habitude de transférer les messages reçus témoignait de l'ironie à l'égard de Monsieur [P] en relevant les fautes de français commises par ce dernier et le 1er avril 2009 des critiques étaient formulées sur les décisions prises par la Direction

- des critiques étaient également formées à l'encontre des Chefs de projet et le 24 juin 2009 Monsieur [Y] s'exprimait en ces termes 'les crabes sont faits pour la fricassée pas pour le management. Qu'on mettre l'eau à bouillir'

- un ton agressif voire menaçant était employé contre Monsieur [F] qui témoignait des relations difficiles avec le salarié et de l'impossibilité du travail en équipe tandis que Madame [E] évoquait, à son tour, les difficultés de collaboration avec l'intéressé ;

Considérant concernant le deuxième grief qu'il ressort des éléments du dossier que Monsieur [Y] avait été chargé de promouvoir une organisation renforçant la cohésion interne de la société ainsi que de mesures destinées à améliorer la qualité des prestations et du système d'information ce qui avait été rappelé à l'occasion de l'entretien individuel pour l'année 2008 ; qu'il avait, ainsi, la charge de la certification ISO 9001 pour la nouvelle activité de la société portant sur les - Tuyaux cryogéniques - ce qui résulte du compte-rendu d'une réunion en date du 10 décembre 2007 ;

Considérant que l'examen des échanges de messages relatifs à ces missions fait apparaître qu'en dépit de ses compétences techniques, Monsieur [Y] n'a pas accompli ces missions ; que la certification ISO avait été, en définitive, obtenue par son successeur le 1er décembre 2010 après moins d'une année de travail consacré à cette tâche ;

Considérant concernant le troisième grief qu'il doit être observé que Monsieur [Y] avait pris connaissance (entre le 7 mars et le 2 avril 2007) des instructions relatives à l'utilisation de l'outil informatique ;

Qu'à plusieurs reprises, il lui avait été rappelé que son ordinateur présentait des virus compte tenu de téléchargements prohibés et / ou de connections interdites ; que dès le 19 décembre 2007, le salarié avait admis avoir contrevenu à ses obligations dans l'utilisation de l'outil informatique ; que, par la suite toutefois, et en dépit de son engagement de se 'plier à la loi' il avait poursuivi ses agissements ; que le 7 septembre 2009, un virus était, à nouveau, détecté sur son ordinateur ;

Considérant concernant le quatrième grief  ;

Qu' il doit être rappelé qu'un dispositif externe (clef USB et / ou disque dur), dès lors qu'il est connecté à un outil informatique mis à la disposition du salarié par l'employeur pour l'exécution du contrat de travail, est présumé être utilisé à des fins professionnelles ce qui autorise l'employeur hors la présence du salarié à avoir accès aux fichiers non identifiés comme personnels;

Qu'en l'espèce, Monsieur [Y] a refusé de remettre à la société le disque dur externe qu'il avait utilisé alors que l'expertise ultérieure de l'ordinateur de l'intéressé a révélé que différents fichiers avaient été copiés sur ce dispositif ; que ces agissements ont été commis en violation de la clause de confidentialité inscrite dans la charte informatique dont Monsieur [Y] avait parfaite connaissance ;

Qu'en ce qui concerne en revanche le détournement de ces informations, en l'état des pièces de la procédure, la matérialité de ces faits ne peut être caractérisée de manière certaine ;

Considérant, au regard de ce qui précède, que la preuve est apportée que Monsieur [Y] a adopté un comportement critique vis-à-vis de la direction de la société, n'a pas mené les tâches qui lui avaient été confiées, n'a pas respecté les règles de sécurité informatique et a violé le principe de confidentialité en matière informatique ;

Que s'il ne peut être établi que le salarié a agi dans l'intention de nuire à son employeur ni même dans le but de lui causer un dommage, il apparaît toutefois, que par leurs conséquences sur le fonctionnement de la société et compte tenu du niveau de responsabilité du salarié, l'ensemble des ces manquements était de nature à rendre impossible le maintien de l'intéressé dans l'entreprise et constituait une faute grave justifiant la cessation immédiate de ses fonctions ;

Considérant en conséquence qu'il convient de débouter ce dernier de ses demandes relatives à l'indemnité de licenciement, à l'indemnité compensatrice de préavis, de rappel de salaire durant la mise à pied, et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant s'agissant de la demande de dommages-intérêts liée aux circonstances violentes et vexatoires du licenciement que Monsieur [Y] retient que la société a fait intervenir un huissier pour notifier la mise à pied et la convocation à l'entretien préalable ce qui, selon lui, ne se justifiait pas au regard des circonstances de l'espèce ;

Que toutefois compte tenu de la mise en cause de Monsieur [Q] dans le cadre d'une procédure pénale et des liens entretenus par celui-ci avec le salarié, il apparaît que lors de la mise en oeuvre de la procédure de licenciement, la société a pu s'interroger sur l'aide éventuelle apportée par l'intimé à son collègue condamné par la suite de manière à ce jour définitive par une juridiction correctionnelle ;

Que de ce fait il apparaît que la société a pu souhaiter se prémunir contre toute contestation ultérieure ; que dans cette perspective, les conditions de la convocation ne peuvent être jugées vexatoires ; que la demande , de ce chef, doit être rejetée ;

Sur la demande afférente à la participation

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'au titre de la participation pour l'année 2009, Monsieur [Y] a perçu la somme de 21924, 87 € ; que, dès lors, compte tenu de la somme lui ayant été allouée à ce titre par les premiers juges, le salarié est redevable envers la société de la somme de 2075, 13 € ;

Sur les dépens et sur l'indemnité de procédure

Considérant que Monsieur [Y], qui succombe pour l'essentiel dans la présente instance, doit supporter les dépens ;

Qu'il y a lieu, en conséquence, de le débouter de sa demande d'indemnité sur le fondement de

l'article 700 du Code de procédure civile ;

Considérant qu'au regard de la situation respective des parties, il apparaît équitable de laisser à la charge de la société les frais irrépétibles par elle exposés ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement du Conseil de prud'hommes de Rambouillet en date du 26 septembre 2012,

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de Monsieur [Z] [Y] notifié le 9 novembre 2009 repose sur une faute grave,

Déboute Monsieur [Z] [Y] de ses demandes relatives à l'indemnité légale de licenciement, à l'indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés y afférents, au rappel de salaire sur la mise à pied et aux congés payés y afférents, aux dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Déboute Monsieur [Z] [Y] de sa demande de dommages-intérêts pour conditions vexatoires du licenciement,

Déboute Monsieur [Z] [Y] de sa demande au titre de la participation,

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [Z] [Y] et la société GazTransport et Technigaz de leur demande formée par application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne Monsieur [Z] [Y] aux dépens,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Mme Sylvie BOSI, président, et Mme Claudine AUBERT, greffier.

Le GREFFIERLe PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11e chambre
Numéro d'arrêt : 12/04171
Date de la décision : 14/01/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 11, arrêt n°12/04171 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-14;12.04171 ?
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