COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
FL
Code nac : 58E
12e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 1ER DECEMBRE 2015
R.G. N° 14/00744
AFFAIRE :
SA GENERALI IARD
C/
SA AXA FRANCE IARD RCS de NANTERRE N° 722 057 460
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 16 Janvier 2014 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° Chambre : 03
N° Section :
N° RG : 2012F0278
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Véronique [E]
Me Audrey GAILLARD
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE PREMIER DECEMBRE DEUX MILLE QUINZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SA GENERALI IARD
N° SIRET : 552 062 663
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 3114
Représentant : Me Olivier DECOUR de l'AARPI GODIN ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R259 -
APPELANTE
****************
SA AXA FRANCE IARD RCS de NANTERRE N° 722 057 460
N° SIRET : 722 05 7 4 600
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Audrey GAILLARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 59 - N° du dossier 41104 - Représentant : Me Franck LE CALVEZ, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0318
SARL FRANCILIENNE DE MECANIQUE NAVALE ET INDUSTRIELLE S.F.M.N.I RCS de VERSAILLES N° 377 780 739,
N° SIRET : 377 78 0 7 399
[Adresse 3]
(anciennement avenue de fin d'Oise)
[Adresse 3]
Représentant : Me Audrey GAILLARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 59 - N° du dossier 41104 - Représentant : Me Franck LE CALVEZ, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0318
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 29 Octobre 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François LEPLAT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Dominique ROSENTHAL, Président,
Monsieur François LEPLAT, Conseiller,
Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 21 août 2009, le pousseur PRETORIA appartenant à la société à responsabilité limitée Sequanienne d'Investissement et de Transport, ci-après dénommée la société SIT, a été confié au chantier de la société à responsabilité limitée Francilienne de Mécanique Navale et Industrielle, ci-après dénommée la SFMNI, afin de procéder au remplacement d'un arbre porte-hélice endommagé. Le pousseur a été placé le 21 août 2009 sur le dock flottant du chantier de la SFMNI, dont l'activité est couverte en responsabilité par la société anonyme AXA FRANCE IARD.
Dans la nuit du 22 au 23 août 2009, un incendie s'est déclaré dans la salle des machines provoquant des dommages au pousseur.
Suite à ce sinistre, le président du tribunal de commerce de Versailles, par ordonnance de référé du 17 février 2010 sur assignation de la société anonyme GENERALI IARD, assureur corps de la société SIT et au contradictoire des sociétés SFMNI et SIT, a désigné [I] [W] en qualité d'expert.
L'expert, qui a déposé son rapport le 6 septembre 2011, conclut (page 23) que la mise à feu est volontaire et la source d'inflammation a très probablement été amenée par la victime elle-même, l'auteur non identifié ayant péri suite à l'incendie.
Par avenant au protocole d'accord du 12 avril 2010 entre les sociétés GENERALI IARD et SIT, la société GENERALI IARD a payé à la société SIT, à titre de solde d'indemnité, la somme de 141.000 euros. Cette somme résulte de la garantie corps, d'un montant de 300.000 euros, abondée de la garantie mobilier pour 45.000 euros, sous déduction de l'acompte de 200.000 euros, de la valeur résiduelle de 3.000 euros et de la franchise de 1.000 euros.
C'est dans ces circonstances que, par actes d'huissier du 17 juillet 2012 pour la SFMNI et du 19 juillet 2012 pour la société AXA FRANCE IARD, la société GENERALI IARD a fait assigner ces sociétés devant le tribunal de commerce de Nanterre, lui demandant de :
- Condamner in solidum la société FRANCILIENNE DE MÉCANIQUE NAVALE ET
INDUSTRIELLE (SFMNI) et la société AXA FRANCE IARD à lui payer les sommes de :
- 341.000 euros outre intérêts légaux à compter de l'assignation ;
- 11.494,86 euros montant des frais et honoraires de l'expert judiciaire ;
- 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervertir nonobstant opposition ou appel et sans caution ;
- Condamner la société FRANCILIENNE DE MÉCANIQUE NAVALE ET INDUSTRIELLE (SFMNI) et la société AXA FRANCE IARD aux dépens.
Par jugement entrepris du 16 janvier 2014, le tribunal de commerce de Nanterre a :
Débouté la SA GENERALI IARD de l'ensemble de ses demandes ;
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;
Condamné la SA GENERALI IARD à payer à la SARL Société Francilienne de Mécanique Navale et Industrielle - SFMNI et la SA AXA France IARD la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné la SA GENERALI IARD aux dépens.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu l'appel interjeté le 28 janvier 2014 par la société GENERALI IARD;
Vu les dernières écritures en date du 1er septembre 2014 par lesquelles la société GENERALI IARD demande à la cour de :
Infirmer le jugement et statuant à nouveau,
S'entendre la société FRANCILIENNE DE MÉCANIQUE NAVALE ET INDUSTRIELLE et la société AXA France IARD condamner in solidum à payer à la société GENERALI IARD les sommes de 341.000 euros outre intérêts légaux à compter du 17 juillet 2012, voir ordonner leur capitalisation à compter du 3 avril 2013.
S'entendre en outre la société FRANCILIENNE DE MÉCANIQUE NAVALE ET INDUSTRIELLE et la société AXA France IARD condamner in solidum à payer à la société GENERALI IARD la somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
Les condamner aux dépens de première instance qui comprendront les frais et honoraires de l'expert judiciaire qui se sont élevés à 11.494,86 euros (pièce n°3) et d'appels, qui seront recouvrés par Maître [E], Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu les dernières écritures en date du 18 juin 2014 au terme desquelles la société Francilienne de Mécanique Navale et Industrielle et la société AXA FRANCE IARD demandent à la cour de :
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 16 janvier 2014 rendu par le Tribunal de commerce de Nanterre,
Débouter Generali de l'intégralité de ses demandes à rencontre de SFMNI et d'AXA France,
Condamner Generali à payer à SFMNI et d'AXA France la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile outre les dépens.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées par les parties et au jugement déféré.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la prise en charge du sinistre :
Les conditions générales de construction et de réparations de la société SFMNI stipulent, en ce qui concerne le gardiennage : Le gardiennage est à la charge de l'Armateur ; Celui-ci conserve l'entière responsabilité de son bien et devra maintenir un équipage suffisant pour les man'uvres de navigation. Vol, incendie, accident de navigation et, plus généralement, toutes avaries qui n'engagent pas la responsabilité civile du Réparateur, sont à la charge de l'Armateur.
La société GENERALI IARD, assureur de la société SIT, armateur du pousseur PRETORIA incendié, pour solliciter de la part de la société SFMNI, à laquelle elle l'avait confié pour réparation, et de son assureur, la société AXA FRANCE IARD, le remboursement des indemnités versées à son assurée, fait tout d'abord valoir que les conditions générales de construction et de réparations dont les intimées se prévalent, ne sont pas opposables à la société SIT, car il n'est pas établi qu'elle les aurait connues et acceptées.
Elle fait état d'une production tardive par la société SIT des conditions générales litigieuses, d'une simple copie du devis, au demeurant non signé, qui ne permet pas d'apprécier si ces conditions générales figuraient bien au verso, auquel le recto ne renvoie d'ailleurs pas.
Les intimées lui opposent que la société SIT est un client habituel du chantier, que chaque devis mentionne au verso les conditions générales de construction et de réparation avec la précision que le client accepte les conditions générales par la remise de sa commande. Elles produisent, à cet égard trois factures adressées à la société SIT, des 4 mai 2006, 18 septembre 2007 et 27 juin 2008 auxquelles sont jointes les conditions générales, mais outre le fait qu'il s'agit de factures et non de devis, ces conditions générales figurent sur une page agrafée et non au verso des dites factures.
Ainsi, la société SFMNI et son assureur, la société AXA FRANCE IARD sur lesquelles pèse la charge de la preuve de la connaissance par la société SIT des conditions générales dont elles se prévalent, ne la rapportent pas.
La société GENERALI IARD soutient dès lors que la garde du pousseur ayant été transférée au chantier de la SFMNI, celle-ci avait la charge de son gardiennage et de sa conservation.
Elle fait valoir les négligences de la société SFMNI exposées par l'expert judiciaire (page 24 du rapport), à savoir :
- un libre accès sur le dock flottant depuis le quai ;
- un libre accès au pont du pousseur depuis le bajoyer du dock flottant par une passerelle mobile installée par le chantier et qui n'avait pas été retirée pendant la durée de la nuit ;
- un libre accès à la salle de machine depuis le pont du pousseur dont la porte était restée ouverte;
- une absence totale de surveillance du pousseur et de son environnement.
ce qui a rendu possible l'introduction de la victime sur le dock flottant, puis sur le pont du pousseur "PRETORIA", puis dans la salle des machines du « PRETORIA » pour la mise à feu.
La société SFMNI et la société AXA FRANCE IARD rappellent les dispositions de l'article 1927 du code civil, selon lesquelles : Le dépositaire doit apporter, dans la garde de la chose déposée, les mêmes soins qu'il apporte dans la garde des choses qui lui appartiennent.
Elles exposent que le dépositaire de la chose n'est tenu, en application de ce texte, que d'une obligation de moyens, dont il peut s'exonérer en rapportant la preuve qu'il est étranger à la détérioration, ce qui est le cas en l'espèce, l'incendie étant d'origine criminelle.
A cet égard, l'article 1933 du code civil précise que : Le dépositaire n'est tenu de rendre la chose déposée que dans l'état où elle se trouve au moment de la restitution. Les détériorations qui ne sont pas survenues par son fait sont à la charge du déposant.
Il est acquis aux débats que l'incendie qui a causé la détérioration du pousseur PRETORIA, mis en dépôt par la société SIT auprès de la société SFMNI est d'origine criminelle, et qu'il est le fait d'un tiers au dépositaire. Des énonciations de l'expert, il apparaît néanmoins que l'accès de l'auteur de l'infraction à ce pousseur a été facilité par un manque de précautions élémentaires, ce d'autant qu'aucune mesure de surveillance particulière n'était assurée par la société SFMNI, qui ne saurait ainsi justifier du soin qu'elle devait apporter à la garde de la chose et qui a donc failli à son obligation de moyens.
Il convient, dans ces conditions, infirmant le jugement entrepris, de faire droit à la demande indemnitaire formée par la société GENERALI IARD, subrogée dans les droits de la société SIT pour le montant, non contesté, qu'elle réclame, correspondant à la somme versée à son assurée, somme au paiement de laquelle la société SFMNI et la société AXA FRANCE IARD seront condamnées in solidum et qui portera intérêts au taux légal avec capitalisation des intérêts à compter de l'arrêt par application des articles 1153-1 et 1154 du code civil.
Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Il est équitable d'allouer à la société GENERALI IARD une indemnité de procédure de 3.000 euros. La société SFMNI et la société AXA FRANCE IARD, qui succombent, seront, en revanche, déboutées de leur demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
INFIRME le jugement entrepris du tribunal de commerce de Nanterre du 16 janvier 2014 en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau,
CONDAMNE in solidum la société à responsabilité limitée Francilienne de Mécanique Navale et Industrielle et la société anonyme AXA FRANCE IARD à payer à la société anonyme GENERALI IARD la somme de 341.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, outre capitalisation des intérêts à compter de la même date,
Et y ajoutant,
REJETTE toutes autres demandes,
CONDAMNE in solidum la société à responsabilité limitée Francilienne de Mécanique Navale et Industrielle et la société anonyme AXA FRANCE IARD à payer à la société anonyme GENERALI IARD à payer à la société anonyme GENERALI IARD la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société à responsabilité limitée Francilienne de Mécanique Navale et Industrielle et la société anonyme AXA FRANCE IARD aux dépens d'appel, en ceux compris les frais d'expertise judiciaire, avec droit de recouvrement direct, par application de l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Dominique ROSENTHAL, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,