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05/11/2015 | FRANCE | N°13/06078

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 05 novembre 2015, 13/06078


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 58C



3e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 05 NOVEMBRE 2015



R.G. N° 13/06078







AFFAIRE :





SA CARDIF LUX VIE venant aux droits de la société FORTIS LUXEMBOURG-VIE



C/



[N] [H]







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 1er Mars 2013 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° chambre : 06

N° RG : 11/084

67





Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES

Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE-FLICHY-MAIGNE-DASTE & ASSOCIÉS







REPUBLIQUE FRANCAISE



AU N...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 58C

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 05 NOVEMBRE 2015

R.G. N° 13/06078

AFFAIRE :

SA CARDIF LUX VIE venant aux droits de la société FORTIS LUXEMBOURG-VIE

C/

[N] [H]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 1er Mars 2013 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° chambre : 06

N° RG : 11/08467

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES

Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE-FLICHY-MAIGNE-DASTE & ASSOCIÉS

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE CINQ NOVEMBRE DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SA CARDIF LUX VIE,

venant aux droits de la société FORTIS LUXEMBOURG-VIE, SA

RCS de Luxembourg B 47 240

[Adresse 1]

[Adresse 1]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625- N° du dossier 1352111

Représentant : Me Florent BOUDERBALA, Plaidant, avocat au barreau de PARIS substituant Me Richard ESQUIER de l'ASSOCIATION Laude Esquier Champey, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R144

APPELANTE

****************

Monsieur [N] [H]

né le [Date naissance 1] 1947

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE-FLICHY-MAIGNE-DASTE & ASSOCIÉS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 365 - N° du dossier 016737

Représentant : Me Nicolas LECOQ VALLON, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0187

INTIME

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Septembre 2015, Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Véronique BOISSELET, Président,

Madame Françoise BAZET, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Carole GIBOT-PINSARD

FAITS ET PROCÉDURE

M. [H] a souscrit le 9 novembre 2006 auprès de la société Fortis Luxembourg Vie un contrat d'assurance vie dénommé Liberty 2 Invest sur lequel il a versé la somme de 3.000.000 euros.

Par courrier reçu le 23 décembre 2008, il a formé auprès de l'assureur une demande de rachat total de son contrat, demande qu'il a annulée par correspondance du 30 mars 2009.

Par lettre du 6 janvier 2011, se prévalant de manquements de l'assureur à son obligation d'information, il lui a indiqué qu'il souhaitait renoncer à son contrat.

La société Fortis Luxembourg lui a répondu que le contrat avait pris fin du fait de son rachat total.

Le 7 juin 2011, M. [H] a fait assigner la société Fortis Luxembourg Vie aux droits de laquelle se trouve la société Cardif Lux Vie devant le tribunal de grande instance de Nanterre afin d'obtenir sa condamnation à lui verser, notamment, la somme de 3.000.000 euros à la suite de sa renonciation au contrat.

Par jugement du 1er mars 2013, la juridiction a :

dit que M. [H] a valablement renoncé à sa demande de rachat total du contrat le liant à Cardif Lux Vie,

condamné la société Cardif Lux Vie à payer à M. [H] la somme de 3.000.000 euros avec intérêts au taux légal majoré de moitié durant deux mois du 10 février 2011 au 10 avril 2011, puis au double du taux légal à compter du 11 avril 2011,

dit que les intérêts échus seront capitalisés, dès lors qu'ils seront dus pour une année entière à compter du 7 juillet 2011,

dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

condamné la société Cardif Lux Vie à payer à M. [H] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

condamné la société Cardif Lux Vie aux dépens.

Le tribunal a jugé que M. [H] avait valablement renoncé le 30 mars 2009 à sa demande de rachat total du contrat, décision acceptée par l'assureur et que les dispositions légales applicables au litige sont conformes à la directive 2002/83/CE du 2 novembre 2002. Il a ensuite considéré que la nature du contrat n'était pas portée en caractères très apparents, que les frais n'étaient pas regroupés en une unique rubrique, que l'information sur la non garantie des montants investis en unités de compte ne satisfaisait pas non plus aux exigences légales et que la mention relative aux modalités de désignation des bénéficiaires comportait des informations supplémentaires la rendant non conforme aux dispositions légales. Par suite, les premiers juges ont constaté que M. [H] avait valablement exercé sa faculté de renonciation.

La société Cardif Lux Vie a interjeté appel de cette décision et, aux termes de conclusions du 11 août 2015, demande à la cour de :

juger que la demande de rachat total de son contrat d'assurance-vie par M. [H] a mis fin à ce contrat et privé de tout effet la faculté de renonciation qu'il a cru pouvoir exercer postérieurement ; infirmer en conséquence le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Cardif Lux Vie à verser à M. [H] la somme de 3.000.000 euros avec intérêts au taux légal majoré de moitié à compter du 10 février 2011 au 10 avril 2011, puis, à compter du 11 avril 2011, du double de l'intérêt légal, et ordonné la capitalisation des intérêts, ainsi que la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

à titre subsidiaire, juger que la société Cardif Lux Vie, venant aux droits de la société Fortis Luxembourg-Vie a respecté l'obligation d'information précontractuelle mise à sa charge, infirmer en conséquence le jugement entrepris,

à titre plus subsidiaire : si la cour venait à s'interroger sur la contrariété des termes de la loi française à la directive 2002/83/CE, poser à la CJUE une ou plusieurs question(s) préjudicielle(s) relatives à l'interprétation du droit de l'Union,

à titre très subsidiaire : juger que la société Cardif Lux Vie a bien remis à M. [H] une note d'information ; infirmer en conséquence le jugement entrepris,

à titre encore plus subsidiaire : juger que M. [H] a abusé de sa faculté de renonciation, infirmer en conséquence le jugement entrepris,

sur la demande subsidiaire de M. [H] : juger que la société Cardif Lux Vie n'a commis aucune faute prudentielle ou contractuelle, en conséquence, le débouter de l'ensemble de ses moyens, fins et conclusions,

en tout état de cause : condamner M. [H] à lui verser la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec recouvrement direct.

Dans des conclusions du 29 juillet 2015, M. [H] demande à la cour :

A titre principal, sur l'exercice de la faculté de renonciation :

de dire l'appel de la société Cardif Lux Vie venant aux droits de la société Fortis Luxembourg Vie non-fondé,

débouter la société Cardif Lux Vie de sa demande de renvoi préjudiciel,

confirmer le jugement entrepris dans l'ensemble de ses dispositions favorables au concluant,

à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour ne confirmait pas le jugement entrepris : constater que la société Fortis Luxembourg Vie a commis une faute en proposant des unités de compte constituées de valeurs mobilières n'offrant pas une protection suffisante de l'épargne, la condamner au paiement de la somme de 2.100.675,80 euros à titre de dommages et intérêts,

en tout état de cause : rejeter toutes les demandes de la société Fortis Luxembourg Vie,

ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil,

condamner la société Fortis Luxembourg Vie au paiement de la somme de 20.000 euros au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens avec recouvrement direct.

Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 3 septembre 2015 .

SUR CE,

- Sur le rachat total

Il est de principe que le rachat total d'un contrat d'assurance-vie interdit l'exercice ultérieur de la faculté de renonciation, le contrat n'existant plus.

En l'espèce, si M. [H] a effectivement formé auprès de l'assureur, par lettre reçue le 23 décembre 2008, une demande de rachat total de son contrat, il a écrit le 30 mars 2009 qu'il renonçait à cette demande ; or, la société Cardif Lux Vie a manifesté par son comportement ultérieur qu'elle avait bien accepté cette renonciation au rachat total, puisque le contrat a continué à s'exécuter, l'assureur adressant même à M. [H] un avenant au contrat daté du 30/09/2011 faisant état de sa valeur à cette même date, soit 2.093.783,43 euros.

D'ailleurs, ce n'est que dans un courrier du 9 février 2011, faisant suite à la demande de renonciation de M. [H] au contrat, qu'elle s'est prévalue de la demande de rachat total pour lui dénier la possibilité de renoncer.

Elle n'a en outre jamais remboursé à M. [H] les sommes investies en exécution du rachat total. Pourtant, aux termes des dispositions de l'article L 132-21 du code des assurances, il est prévu que l'assureur dispose d'un délai de deux mois pour verser la valeur de transfert du contrat à l'assuré qui procède à un rachat total, et les conditions générales du contrat, en leur article 19-4, ramènent ce délai à quinze jours, sauf circonstances exceptionnelles qui doivent immédiatement être portées à la connaissance de l'assuré.

La société Cardif Lux Vie n'a jamais informé M. [H] que le paiement des sommes dues dans le cadre de sa demande de rachat total ne pourrait intervenir dans la quinzaine en raison de circonstances exceptionnelles, de sorte qu'elle ne saurait sérieusement prétendre que le contrat 'était toujours en cours de liquidation', plus de deux ans après la demande de rachat total.

Il résulte donc de l'ensemble de ces éléments que la société Cardif Lux Vie a bien accepté que son assuré renonce à sa demande de rachat total du contrat.

Le jugement sera ainsi confirmé de ce chef.

- Sur la conformité des dispositions légales en cause avec le droit communautaire

Les dispositions légales applicables au présent litige résultent de la transposition de la directive européenne 2002/83/CE (dite directive Vie) applicable en matière d'assurance sur la vie et en particulier ses articles 35 et 36 relatifs à l'information d'information précontractuelle à la charge de l'assureur au profit du souscripteur.

L'objectif de cette directive résulte de ses considérants n°46 et 52 :

N°46 : dans le cadre d'un marché intérieur, il est dans l'intérêt du preneur d'assurance que celui-ci ait accès à la plus large gamme de produits d'assurance offerts dans la Communauté pour pouvoir choisir parmi eux celui qui convient le mieux à ses besoins. Il incombe à l'Etat membre de l'engagement de veiller à ce qu'il n'y ait aucun obstacle sur son territoire à la commercialisation de tous les produits d'assurance offerts dans la Communauté, pour autant que ceux-ci ne soient pas contraires aux dispositions légales d'intérêt général en vigueur dans l'Etat membre de l'engagement et dans la mesure où l'intérêt général n'est pas sauvegardé par les règles de l'Etat membre d'origine, étant entendu que ces dispositions doivent s'appliquer de façon non discriminatoire à toute entreprise opérant dans cet Etat membre et être objectivement nécessaires et proportionnées à l'objectif poursuivi .

N°52 : dans le cadre d'un marché intérieur de l'assurance, le consommateur aura un choix plus grand et plus diversifié de contrats. Afin de profiter pleinement de cette diversité et d'une concurrence accrue, il doit disposer des informations nécessaires pour choisir le contrat qui convient le mieux à ses besoins. Cette nécessité d'informations est d'autant plus importante que la durée des engagements peut être très longue. Il convient, en conséquence, de coordonner les dispositions minimales pour que le consommateur reçoive une information claire et précise sur les caractéristiques essentielles des produits qui lui sont proposés et sur les coordonnées des organismes habilités à connaître des réclamations des preneurs, assurés ou bénéficiaires du contrat.

L'article 36 de cette directive intitulé 'information des preneurs' dispose :

Avant la conclusion du contrat d'assurance, au moins les informations énumérées à l'annexe III, point A, doivent être communiquées au preneur.

Le preneur d'assurance doit être tenu informé pendant toute la durée du contrat de toute modification concernant les information énumérées à l'annexe III, point B.

L'Etat membre de l'engagement ne peut exiger des entreprises d'assurance la fourniture d'informations supplémentaires par rapport à celles énumérées à l'annexe III que si ces informations sont nécessaires à la compréhension effective par le preneur des éléments essentiels de l'engagement.

Les modalités d'application du présent article et de l'annexe III sont arrêtées par l'Etat membre de l'engagement.

L'annexe III visée dans ce texte est intitulée 'information des preneurs' et contient une liste en seize points des informations à communiquer au souscripteur avant la conclusion du contrat.

Les directives lient les États membres destinataires quant aux résultats à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens à mettre en oeuvre.

Les mesures assurant en droit français la transposition de la directive résultent de la loi du 15 décembre 2005.

Aux termes de l'article L 132-5-2 du code des assurances dans sa rédaction issu de ce texte et applicable au présent litige : avant la conclusion d'un contrat d'assurance sur la vie ou d'un contrat de capitalisation, par une personne physique, l'assureur remet à celle-ci, contre récépissé, une note d'information sur les conditions d'exercice de la faculté de renonciation et sur les dispositions essentielles du contrat. Un arrêté fixe les informations qui doivent figurer dans cette note, notamment en ce qui concerne les garanties exprimées en unités de compte. Toutefois, la proposition d'assurance ou le projet de contrat vaut note d'information, pour les contrats d'assurance comportant une valeur de rachat ou de transfert, lorsqu'un encadré, inséré en début de proposition d'assurance ou de projet de contrat, indique en caractères très apparents la nature du contrat. L'encadré comporte en particulier le regroupement des frais dans une même rubrique, les garanties offertes et la disponibilité des sommes en cas de rachat, la participation aux bénéfices, ainsi que les modalités de désignation des bénéficiaires. Un arrêté du ministre chargé de l'économie fixe le format de cet encadré ainsi que, de façon limitative, son contenu.

La forme et le contenu de l'encadré sont définis par l'article A 132-8 du même code.

Compte tenu des dispositions du 3° de l'article 36 précité de la directive, il apparaît que le formalisme des articles L. 132-5-2 et A 132-8 du code des assurances dont les dispositions d'ordre public tendent à assurer la plus claire information du preneur qualifié de consommateur par le considérant n° 52 de la directive, constitue une simple modalité d'application de l'article-36-I de l'annexe III de la directive et ne la contredit nullement.

En conséquence, en l'absence de contrariété entre la législation française et la réglementation communautaire, et de caractère discriminatoire, toutes les entreprises d'assurances communautaires exerçant en France y étant soumises en vertu des dispositions de l'article L 363-3 de ce code, il ne sera pas fait droit au moyen soulevé par la société Cardif Lux Vie relatif à la non conformité des textes français à la directive européenne, sans qu'il soit nullement nécessaire de poser une question préjudicielle.

Par ailleurs, s'agissant de la faculté de renonciation, les Directives européennes avaient laissé à chaque Etat membre le soin de préciser les conditions dans lesquelles la renonciation à un contrat d'assurance pouvait être effectuée ; il n'est donc ni incohérent, ni contraire à l'unité du droit communautaire que chaque législation nationale édicte des règles particulières quant aux modalités d'exercice de la faculté de renonciation, tant qu'elle respecte les principes posés en la matière par les textes communautaires.

En édictant des règles plus protectrices du consommateur que certaines autres législations de pays européens, la loi française, en ce qu'elle sanctionne le défaut de remise des documents et informations en vertu du même article L. 132-5-1 par la prorogation du délai de renonciation prévu à son deuxième alinéa, reste conforme à la finalité du droit communautaire, qui est de veiller à garantir au preneur d'assurance le plus large accès aux produits d'assurance et en lui assurant les informations nécessaires pour choisir le contrat convenant le mieux à ses besoins. Par ailleurs, la sanction de la restitution des fonds placés est inhérente à l'exercice de la faculté de renonciation, qui implique que les parties soient remises dans l'état où elles se trouvaient avant la souscription du contrat.

Cette sanction présente un caractère effectif, proportionné et dissuasif, conformément aux exigences du droit communautaire.

Il n'y a donc pas lieu à question préjudicielle de ce chef.

- Sur l'obligation d'information

La société Cardif Lux Vie a remis à M. [H] une proposition d'assurance comprenant six pages, composée de trois documents intitulés 'Informations préalables', 'Proposition d'assurance' et 'Suite à la proposition d'assurance' et un exemplaire des conditions générales du contrat Liberty 2 Invest.

Le débat porte en premier lieu sur le contenu de l'encadré figurant en page 1 et intitulé 'informations préalables'.

Aux termes des dispositions de l'article 132-5-2 du code des assurances, la proposition d'assurance ou le projet de contrat vaut note d'information ... lorsqu'un encadré, inséré en début de proposition d'assurance ou de projet de contrat, indique en caractères très apparents (souligné par la cour) la nature du contrat ...

En l'espèce, dans le contrat Liberty 2 Invest, cet encadré intitulé 'informations préalables' ne respecte pas la disposition légale susvisée s'agissant de l'indication de la nature du contrat (contrat d'assurance individuelle sur la vie), insuffisamment apparente puisqu'elle figure dans la même police que les autres informations, alors que l'article L 132-5-2 du code des assurances exige qu'elle figure en caractères 'très apparents'.

Aux termes de l'article A 132-8 du code des assurances, dans sa rédaction applicable au présent litige : Sont indiqués dans une même rubrique les frais et indemnités de toute nature mentionnés à l'article R. 132-3 ainsi que, le cas échéant, l'existence de frais pouvant être supportés par l'unité de compte. Il est renvoyé à une clause du contrat ou au document mentionné au dernier alinéa de l'article A. 132-6 pour le détail de ces derniers frais, et l'encadré le précise. Pour les frais et indemnités mentionnés à l'article R. 132-3, la rubrique distingue :

- "frais à l'entrée et sur versements" : montant ou pourcentage maximum des frais prélevés lors de la souscription et lors du versement des primes ;

- "frais en cours de vie du contrat" : montant ou pourcentage maximum, sur base annuelle, des frais prélevés et non liés au versement des garanties ou des primes ;

- "frais de sortie" : montant ou pourcentage maximum des frais sur quittances d'arrérages, indemnités mentionnées à l'article R. 331-5 ;

- "autres frais" : montant ou pourcentage maximum des frais et indemnités non mentionnés aux trois alinéas précédents.

Le fait que la société Cardif Lux Vie ait donné les informations relatives aux frais générés par le contrat non pas dans une seule rubrique, mais dans cinq se faisant suite, portant l'intitulé des frais concernés (frais d'entrée, frais de gestion administrative, frais d'arbitrage, autres frais et frais supportés par l'unité de compte) suffit à satisfaire l'exigence de l'article A 132-8 qui prévoit seulement que les frais doivent être indiqués 'dans une même rubrique', le but de cette disposition étant précisément que les informations de ce chef ne soient pas dispersées.

En revanche, la rubrique dédiée aux 'autres frais' ne comporte pas le montant ou le pourcentage maximum de ceux-ci puisque l'assureur y procède à un renvoi aux conditions générales du contrat, contrevenant ainsi aux exigences du texte précité.

La société Cardif Lux Vie reproche au tribunal de ne pas avoir recherché si, au-delà de son libellé, le document intitulé 'conditions générales fiches fiscales et dispositions spécifiques' remis à M. [H] ne constituait pas une note d'information.

Cependant, il est de principe que la note d'information est un document distinct des conditions générales et particulières du contrat, et il n'est pas remédié aux insuffisances de l'encadré figurant en page 1 de la proposition d'assurance dans les pages 2 à 6 de ce document (intitulé 'proposition d'assurance 'et 'suite à la proposition d'assurance').

L'encadré figurant en tête de la proposition d'assurance ne respectant pas, tant en la forme qu'en son contenu, les dispositions légales et réglementaires applicables, l'assureur n'était pas dispensé de remettre à M. [H] la note d'information prévue par l'article L 132-5-2 du code des assurances, laquelle, destinée à l'information précontractuelle du preneur d'assurance, ne doit contenir que les dispositions essentielles du contrat, telles que définies par l'article A 132-4 du même code, note d'information que la société Cardif Lux Vie ne lui a pas remise.

Par ailleurs, il n'est pas contesté que la société Cardif Lux Vie n'a pas communiqué à M. [H] les informations prévues par les articles L 132-5-2 et A 132-4-1 du code des assurances, aux termes desquelles lorsque les valeurs de rachat ou de transfert ne peuvent être établies en euros ou devises lors de la remise du projet de contrat, cette information est fournie par un tableau des valeurs de rachat à partir d'un nombre générique initial de cent unités de compte et, au cas particulier des contrats comprenant des garanties en unités de compte, à titre d'exemple par trois simulations intégrant les frais prélevés pratiqués à partir de trois hypothèses explicites, dont le cas de la stabilité de la valeur des unités de compte, ceux d'une hausse, et symétriquement d'une baisse de même amplitude.

Il en résulte que la société Cardif Lux Vie n'a pas remis à M. [H] les informations légalement requises.

La sanction du défaut d'information est prévue par les dispositions de l'article 132-5-2 du code des assurances aux termes desquelles le défaut de remise des documents et information prévus entraîne de plein droit la prorogation du délai de renonciation prévu à l'article L 132-5-1 jusqu'au trentième jour calendaire résolu suivant la date de remise effective de ces documents dans la limite de huit ans à compter de la date où le souscripteur est informé que le contrat est conclu.

La société Cardif Lux Vie considère que l'exercice de la faculté de renonciation, fût-elle discrétionnaire, peut dégénérer en abus de droit, ce qui est le cas en l'espèce puisque M. [H], 'partner d'un fonds de private equity', personne avertie, n'a souhaité renoncer à son contrat qu'en raison de l'évolution négative de son épargne et nullement en raison d'une insuffisance d'information, en sorte que le droit de renoncer audit contrat est détourné de sa finalité, ce qui constitue un abus.

Il est cependant de principe que l'exercice de la faculté de renonciation, qui vient sanctionner un manquement de l'assureur, est discrétionnaire pour l'assuré dont la bonne foi n'est pas requise.

En conséquence, peu importe que M. [H] ait eu en réalité une bonne connaissance du fonctionnement de son contrat.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a fait droit à la demande de renonciation.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement sera confirmé sur ces points.

La société Cardif Lux Vie qui succombe sera condamnée aux dépens. Il n'y a pas lieu d'allouer à M. [H] une indemnisation au titre des frais exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Y ajoutant :

Condamne la société Cardif Lux Vie aux dépens d'appel lesquels pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,

Déboute M. [H] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 13/06078
Date de la décision : 05/11/2015

Références :

Cour d'appel de Versailles 03, arrêt n°13/06078 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-11-05;13.06078 ?
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