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15/10/2015 | FRANCE | N°14/02097

France | France, Cour d'appel de Versailles, 2e chambre 2e section, 15 octobre 2015, 14/02097


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 20J



2e chambre 2e section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 15 OCTOBRE 2015



R.G. N° 14/02097



AFFAIRE :



[A] [Y] [G] [O]





C/



[M], [T], [V] [H] épouse [O]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Février 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : JAF

N° Cabinet : 9

N° RG : 09/01876>


Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

Me Pascal KOERFER

Me Stéphanie CHANOIR













REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 20J

2e chambre 2e section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 OCTOBRE 2015

R.G. N° 14/02097

AFFAIRE :

[A] [Y] [G] [O]

C/

[M], [T], [V] [H] épouse [O]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Février 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : JAF

N° Cabinet : 9

N° RG : 09/01876

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

Me Pascal KOERFER

Me Stéphanie CHANOIR

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [A] [Y] [G] [O]

né le [Date naissance 2] 1966 à [Localité 3] (CALVADOS)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentant : Me Pascal KOERFER de la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire: 31 - N° du dossier 0875732

APPELANT AU PRINCIPAL

INTIME INCIDEMMENT

****************

Madame [M], [T], [V] [H] épouse [O]

née le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 2] (HAUTS DE SEINE)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentant : Me Stéphanie CHANOIR, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 143

INTIMEE AU PRINCIPAL

APPELANTE INCIDEMMENT

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Septembre 2015 en chambre du conseil, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Odile BOUVENOT-JACQUOT, Président chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Odile BOUVENOT-JACQUOT, Président,

Madame Agnès TAPIN, Conseiller,

Madame Florence CASSIGNARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Carole GIBOT-PINSARD,

Greffier, lors du prononcé : Madame Claudette DAULTIER,

FAITS ET PROCEDURE,

M. [A] [O] et Mme [M] [H] se sont mariés le [Date mariage 1] 1993 à [Localité 2] (Hauts de Seine), sans contrat préalable.

Deux enfants sont issus de cette union :

- [K], née le [Date naissance 1] 1996,

- [N], né le [Date naissance 4] 1999.

Une ordonnance de non-conciliation a été rendue le 22 juin 2009 en présence des deux époux.

M. [O] a fait régulièrement assigner son conjoint en divorce.

Par jugement du 5 février 2014, le juge aux affaires familiales de Versailles a :

- prononcé le divorce aux torts exclusifs de l'époux,

- ordonné la liquidation des droits des parties,

- dit que le partage des actions de la société Ipsilan au bénéfice de Mme [H] se fera en valeur,

- constaté que les parents exercent en commun l'autorité parentale et a fixé la résidence habituelle des enfants chez la mère,

- dit que faute pour les parents de convenir d'autres mesures, le droit de visite et d'hébergement du père s'exercera librement et en cas de difficultés :

- les 1ère, 3ème et éventuellement 5ème fins de semaine de chaque mois du vendredi soir sortie des classes au dimanche 19 h,

- du mercredi sortie des classes au jeudi matin rentrée des classes,

- pendant la 1ère moitié de toutes les périodes de vacances scolaires les années paires et la

2ème moitié les années impaires,

- à charge pour le père d'aller chercher ou faire chercher, reconduire ou faire reconduire les enfants chez leur mère,

- condamné M. [O] à payer à Mme [H] à titre de contribution à l'entretien et l'éducation des enfants la somme de 1000 euros par mois, soit 500 euros par enfant,

- débouté Mme [H] de sa demande de prise en charge des frais d'ergothérapie pour [N] par M. [O],

- débouté Mme [H] de sa demande de prestation compensatoire,

- dit que les contributions à l'entretien et l'éducation seront indexées sur l'indice publié par l'INSEE,

- dit n'y avoir lieu à statuer sur la pension alimentaire versée à l'épouse et sur les avantages matrimoniaux,

- dit que le problème des dividendes sera réglé lors des opérations de liquidation,

- condamné M. [O] à payer à tire de dommages-intérêts à son conjoint la somme de

4000 euros,

- débouté Mme [H] de sa demande de 'décerner acte' quant au déblocage des fonds consignés à titre provisionnel,

- dit que la femme pourra conserver l'usage du nom de son mari,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement en ce qui concerne l'exercice de l'autorité parentale, la pension alimentaire, les droits de visite et d'hébergement,

- condamné M. [O] au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par déclaration du 18 mars 2014, M. [O] a interjeté appel de cette décision.

Parallèlement Madame [H] a signifié des conclusions d'incident aux termes desquelles elle sollicitait la désignation d'un expert ayant pour mission d'évaluer les actions de Monsieur [O] au sein de la société Ipsilan et le montant des dividendes perçus par lui depuis 2008 ainsi que la fiscalité inhérente à ces distributions.

Elle demandait également la condamnation de son époux sous astreinte de 150 euros par jour de retard à produire notamment sa déclaration des revenus 2013, des justificatifs comptables concernant ses dividendes perçus depuis 2008, le titre de propriété du ou des immeubles acquis par la SCI Joflo, les factures de pension du cheval ou l'acte de vente du cheval, ainsi que la condamnation de son mari à assumer l'intégralité des frais d'ergothérapie de [N] et à payer la moitié des frais de voyages scolaires, de stage, fourniture ou matériels coûteux ponctuellement achetés pour les enfants.

Par ordonnance d'incident en date du 20 novembre 2014, la cour d'appel de Versailles a :

- enjoint à M. [O] de transmettre à Mme [H] dans un délai d'un mois :

- sa déclaration des revenus 2013 et les différentes annexes,

- les justificatifs des dividendes perçus par lui depuis 2008 et des prélèvements fiscaux y afférents,

- le titre de propriété du ou des immeubles acquis par la SCI Joflo depuis sa constitution, dont celui de l'appartement du [Adresse 1],

- donné acte à M. [O] de son accord pour prendre en charge la moitié des frais exceptionnels scolaires et extra scolaires des enfants, sous réserve d'avoir consenti préalablement à la dépense,

- débouté les parties de leurs autres demandes,

- dit que les dépens de l'incident suivront le sort des dépens au fond.

Dans ses dernières conclusions en date du 20 août 2015, M. [O] demande à la cour dans le cadre de son appel de l'ordonnance de non conciliation :

- de déclarer M. [O] recevable et bien fondé en son appel,

- d'infirmer le jugement du 5 février 2014 en ce qu'il a dit que le partage des actions de

la société IPSILAN au bénéfice de Mme [H] se fera en valeur,

- confirmer le jugement du 5 février 2014 en ses autres dispositions.

Et statuant à nouveau,

- dire que le partage des actions de la société IPSILAN au bénéfice de Mme [H] sera réalisé en nature,

- débouter Mme [H] de sa demande de prestation compensatoire,

- débouter Mme [H] de sa demande tendant à ce que soit mis à la charge de M. [O] le coût des séances d'ergothérapie de [N],

- dire que les dépenses scolaires et extra-scolaires inhabituelles et exceptionnelles (stage

de formation, voyages scolaires) exposées pour [K] et [N] seront supportées

par moitié par les époux, sous réserve de l'accord préalable de M. [O] , et à l'exception des achats de type matériel informatique,

- débouter Mme [H] de sa demande tendant à voir ajouter que les effets du divorce entre les époux doivent être reportés au 1er novembre 2007,

- fixer la date des effets du divorce dans les rapports patrimoniaux des époux à la date de l'ordonnance de non-conciliation, soit le 22 juin 2009,

- débouter Mme [H] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,

- condamner Mme [H] à verser à M. [O] la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner Mme [H] aux entiers dépens dont distraction, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions en réponse en date du 1er septembre 2015, Mme [H] demande à la cour de recevoir M. [O] en son appel mais de le déclarer mal fondé.

En conséquence,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a été jugé que le partage des actions de la société IPSILAN se ferait en valeur et non pas en nature,

- de confirmer toutes les autres dispositions non critiquées du jugement du 5/2/2014

- de déclarer Mme [H] recevable et bien fondée en son appel incident.

Statuant à nouveau,

-d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté l'épouse de sa demande de prestation compensatoire,

-de condamner M. [O] au paiement d'une prestation compensatoire sous forme de capital de 100.000 €

- d'ajouter que les effets du divorce entre les époux doivent être reportés au 1er novembre 2007,

- de décerner acte à M. [O] de son accord pour assumer la moitié des frais extra scolaires et des frais exceptionnels scolaires des enfants sous réserve d'avoir préalablement consenti à la dépense et, en tant que de besoin, de le condamner à payer ces sommes,

- de condamner M. [O] à assumer l'intégralité des frais d'ergothérapie non remboursés de [N],

- de confirmer toutes les autres dispositions non critiquées du jugement du 5/2/2014,

- de débouter M. [O] de toutes ses demandes fins et conclusions contraires,

- de condamner M. [O] au paiement d'une somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner M. [O] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Chanoir.

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie à leurs écritures conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 8 septembre 2015.

SUR CE, LA COUR,

Les dispositions non critiquées de la première décision seront confirmées.

En préambule de ses conclusions Madame [H] souligne que Monsieur [O] n'a que très partiellement respecté l'injonction de communication de pièces mise à sa charge par le conseiller de la mise en état et persiste entretenir le doute sur sa situation financière et patrimoniale

En l'état de ses dernières conclusions, Monsieur [O] fait valoir, que contrairement à ce qui est argué par Madame [H], il a produit tous les documents nécessaires pour justifier de ses revenus et qu'il n'y a donc aucune opacité sur sa situation financière.

Sur la date des effets du divorce entre époux (cohabitation - collaboration)

En application de l'article 262-1 du Code civil, le jugement de divorce prend effet dans les rapports entre les époux, en ce qui concerne leurs biens, à la date de l'ordonnance de non conciliation lorsqu'il est prononcé pour faute ; à la demande de l'un des époux, le juge peut fixer les effets du jugement à la date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer ;

Mme [H] demande à ce que les effets du divorce dans les rapports entre époux en ce qui concerne leurs biens soient reportés au mois de novembre 2007, date à laquelle Monsieur [O] a quitté le domicile conjugal et pris un appartement pour y vivre de façon indépendante.

Monsieur [O], qui n'était pas sur ce point en désaccord avec Madame [H] dans le cadre de la première instance, s'y oppose dans la présente procédure d'appel.

Il est produit par Madame [H] une déclaration de main courante du 13 mai 2008 dans laquelle elle précise qu'elle a commencé les démarches pour une procédure de séparation dans la mesure où son époux a quitté le domicile conjugal le 8 novembre 2007 et d'autre part un contrat de bail daté du 21 août 2008 portant le nom de Monsieur [O] en qualité de locataire, établissant qu'à tout le moins il ne résidait plus au domicile conjugal à cette date.

En outre il a été indiqué par Monsieur [O] lui-même en première instance qu'il avait pris un bien en location à compter du 2 octobre 2007. Cet élément noté à la procédure de première instance fait foi et il est difficilement contestable en appel par Monsieur [O] qui, après l'avoir admis, le remet en cause sans pour autant apporter de nouveaux éléments pertinents pour étayer sa nouvelle thèse .

La cessation de la cohabitation fait présumer la cessation de la collaboration ; il incombe à celui qui s'oppose au report des effets du divorce à la date de cessation de cohabitation de prouver que des actes de collaboration ont eu lieu postérieurement entre les époux .

En l'espèce, Monsieur [O] ne prouvant pas l'existence de relations patrimoniales entre les époux après leur séparation pouvant être qualifiées de collaboration au sens de l'article susvisé .

Dès lors, les conditions établissant que toute communauté de vie et d'intérêts à cessé entre Monsieur et Madame [O] à compter de la date mentionnée dans la main courante soit dès le mois de novembre 2007, sont réunies, et il sera fait droit à la demande de Madame [H] tendant au report des effets du divorce entre les époux au 1er novembre 2007.

Sur le partage des actions de la société IPSILAN acquises par la communauté :

Aux termes de l'article 267 du Code civil ' à défaut d'un règlement conventionnel par les époux, le juge, en prononçant le divorce, ordonne la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux. Il statue sur les demandes de maintien dans l'indivision ou d'attribution préférentielle. Il peut aussi accorder à l'un des époux ou aux deux une avance sur sa part de communauté ou de biens indivis.

Si le projet de liquidation du régime matrimonial établi par le notaire désigné sur le fondement du 10° de l'article 255 contient des informations suffisantes, le juge, à la demande de l'un ou l'autre des époux, statue sur les désaccords persistant entre eux'.

Monsieur [O] critique le jugement déféré, notamment le fait que le juge aux affaires familiales a fait droit à la demande de Madame [H] tendant à voir trancher un des points de désaccord existant entre les époux, en l'espèce le partage en nature ou en valeur des actions de la société IPSILAN, sur la base du projet d'état liquidatif établi par Maître [J] -[E]l.

Monsieur [O] estime que ce projet de liquidation ne contient pas d'informations suffisantes qui pouvaient permettre au premier juge de trancher le point de désaccord en cause et il ajoute que ledit projet ne fait pas mention du désaccord entre les époux quant au partage des actions de la société . Monsieur [O] soutient, que dans ces conditions, le juge aux affaires familiales a outrepassé les pouvoirs que lui accorde l'article 267 du Code civil.

Il ajoute dans son argumentation que le juge a pris comme base d'évaluation des actions la somme de 900'000 € retenue par le notaire, occultant totalement le fait que cette valeur n'est pas acceptée par les deux époux, qu'elle n'est pas définitivement arrêtée et pourrait faire parfaitement l'objet d'une réévaluation dans le cadre de la liquidation.

Monsieur [O] soutient aussi que c'est à tort que le juge aux affaires familiales a estimé devoir faire droit à la demande de Madame [H] de voir trancher ce point de désaccord, au motif que cela lui permettait de mieux apprécier la disparité née de la rupture quant au patrimoine de chacun après la liquidation du régime matrimonial.

Enfin il prétend que la solution retenue en première instance soit un partage en valeur des actions de la société IPSILAN est irréalisable en pratique et ne peut que conduire à compromettre gravement sa situation financière car il devrait bien évidemment emprunter de l'argent pour être en mesure de faire face à ses obligations financières, alors même que sa capacité d'endettement est d'ores et déjà largement affectée par la prise en charge du passif de la communauté ; que dans ces conditions, il est fort peu probable qu'une banque accepte de lui consentir un crédit au vu de sa situation d'endettement déjà existante.

Madame [H] réplique que le juge aux affaires familiales n'a, à aucun moment, outrepassé les pouvoirs lui sont accordés par l'article 267 du Code civil ; qu'en effet le notaire a, certes, pris comme base de la valeur des parts possédées par Monsieur [O] la somme de

900'000 euros, mais a bien précisé qu'il retenait cette évaluation, faute par lui- même de pouvoir en apprécier la valeur.

D'autre part madame [H] insiste sur le fait que le notaire a bien noté sous forme de

NB : « cette évaluation est contestée par Madame [H] qui propose de retenir une valeur de 1'300'000 euros qu'elle estime être un intermédiaire entre les différentes valeurs fournies par son époux ».

Que pour Madame [H], le notaire a clairement fait mention du désaccord des époux quant à la valeur des actions ajoutant dans son projet que Madame [H] n'étant pas associée de la société IPSILAN , l'attribution des parts de cette société par moitié à chacun des époux telle que proposée par Monsieur [O] ne semble pas envisageable.

Madame [H] faisant référence aux dispositions de l'article chiffre 9.6 des statuts de la société en cas de cession aboutit à la conclusion que ses actions ne sont pas librement négociables et que le statut d'associé au sein de cette société doit donc être assimilé à celui des sociétés de personnes.

Il résulte de la jurisprudence de la chambre civile de la Cour de cassation établie en la matière, que lors du partage de communauté, les parts sociales doivent nécessairement être attribuées à l'époux associé qui a seul cette qualité , le titre d'associé restant propre, seule la valeur des actions tombant dans la communauté mais pas la qualité d'actionnaire, et que ces parts sociales acquises pendant la durée du mariage n'entrent en communauté que pour leur valeur patrimoniale.

Il s'ensuit, que dans le cas de l'espèce il sera jugé que ces actions doivent figurer en valeur dans l'indivision post communautaire et le partage doit intervenir en valeur et non pas en nature.

Sur la prestation compensatoire:

Suivant l'article 270 du Code civil, l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans leurs conditions de vie respectives, en fonction de la situation au moment du prononcé du divorce et de l'évolution dans un avenir prévisible.

Il y a lieu de tenir compte, notamment, de la durée du mariage, de l'âge et de l'état de santé des époux, de la qualification et de la situation professionnelles des époux, des conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, du patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, de leurs droits existants et prévisibles, et leur situation respective en matière de pension de retraite.

Selon l'article 274 du Code civil, le juge décide des modalités selon lesquelles s'exécutera la prestation compensatoire en capital ; celles-ci sont limitativement prévues par la loi et l'article 275 du Code civil précise que lorsque le débiteur n'est pas en mesure de verser le capital dans les conditions prévues à l'article 274, le juge fixe les modalités de paiement du capital, dans la limite de huit années, sous la forme de versements périodiques indexés selon les règles applicables aux pensions alimentaires.

Les simples espérances successorales, par définition incertaines, n'ont pas à être prises en compte pour l'appréciation de la prestation compensatoire.

Monsieur et Madame [O] se sont mariés sans contrat de mariage préalable le [Date mariage 1] 1993. De leur union sont nés deux enfants : [K] le [Date naissance 1] 1996, et [N] le [Date naissance 4] 1999.

Le mariage a duré 20 ans.

Madame [H] est âgée de 50 ans. Monsieur [O] a 49 ans.

Ni l'un, ni l'autre ne font état de problème de santé particulier. En revanche leur fils [N] a nécessité des soins spécifiques et importants pendant plusieurs années .

Madame [H] soutient que la dissolution du mariage va nécessairement entraîner à son détriment une disparité patrimoniale qu'il convient de compenser par l'attribution à son profit d'une prestation compensatoire sous forme d'un capital de 100'000.€

Madame [H] est employée au sein de la société DORMA située à [Localité 4] en qualité d'animatrice commerciale.

Elle a perçu entre 2012 et 2014 un salaire net mensuel imposable variant de 2700 à 2800 €

Pour les trois premiers mois de l'année 2015 son revenu mensuel s'est élevé à environ 3000 € car elle a bénéficié des primes .

Monsieur [O] lui reverse la moitié des dividendes qu'il perçoit de la société IPSILAN correspondant à la somme de 1387 € environ par mois, en tout cas jusqu'à la date du partage.

Madame [H] est locataire de son logement et acquitte un loyer de 1006 € charges comprises. Son impôt sur le revenu est de 227 € par mois ( sur 12 mois ). Les frais liés à son véhicule personnel, et qui figurent sur ses bulletins de paie, sont de 167€ environ par mois. Elle justifie de charges incompressibles, notamment de sa taxe d'habitation, de ses frais de téléphone, d'assurance, de gaz, ( documents fournis ) et évalue de façon plus générale son budget global moyen à la somme de 4182 € par mois.

Elle a commencé à travailler en 1987 et a toujours occupé un emploi à plein temps sauf à la naissance de [N] elle s'est mise à 80 % pendant quatre ans. Elle indique qu'elle a mis entre parenthèses ses ambitions professionnelles pour être plus présente auprès de ses enfants et elle produit plusieurs attestations de ses proches ou de ses connaissances faisant état du temps qu'elle consacrait à ses enfants contrairement au père qui était très peu présent .

Elle maintient que son époux a profité du fait qu'elle s'investissait dans sa vie de famille pour pouvoir évoluer professionnellement, contrairement à elle qui n' a pu bénéficier de cette même évolution de carrière ou d'une promotion .

Elle précise que monsieur [O] a commencé comme technicien et elle comme dessinateur projeteur mais que l'évolution du cursus professionnel de chacun d'eux qui a suivi est le reflet d'une inversion des priorités famille/ travail au sein du couple. Selon elle, alors qu'ils ont à la base le même niveau d'études jusqu'à la terminale , la différence de revenus entre les époux est très importante et se retrouvera donc au moment de la liquidation de leurs droits à la retraite.

Les droits à retraite de Monsieur et Madame [H] ne sont pas renseignés.

Monsieur [O], après avoir été technicien dans le domaine informatique, est cadre directeur commercial, gérant de la société IPSILAN.

Entre 2011 et 2014 son salaire net imposable mensuel a évolué de 7000 à 7495 €. Il a perçu des dividendes qui se sont élevés en 2013 et 2014 à une somme nette d'impôt de 33'289 €

dont il a reversé la moitié à son épouse.

Il perçoit également 260 € de revenus fonciers concernant un appartement se trouvant à l'île de la Réunion. Il rembourse deux crédits immobiliers qu'il chiffre à 2570 € ( son épouse en conteste le montant qu'elle évalue à 2200 € dont une somme de 1435 € relative à l'appartement de l'île de la Réunion).

Le deuxième prêt sur lequel Madame [H] est en désaccord est au nom d'une SCI JO FLO et aurait servi à financer un appartement acquis au prix de 220'000 € qu'il occupe actuellement.

Il évalue ses charges incompressibles à environ 4450 € par mois en y incluant la contribution à l'entretien des enfants soit (500 € par enfant).

Il verse à la procédure une attestation émanant de Madame [W] [D], sa concubine, indiquant ne pas participer aux charges du ménage.

Madame [H], au vu des éléments financiers fournis par son ex époux, soutient que le disponible de Monsieur [O] est à minima équivalent au montant de son propre salaire voire plus qu'au double , et que Monsieur [O] est en capacité de lui régler une prestation compensatoire d'autant qu'il parvient à verser mensuellement sur un compte épargne logement la somme de 304,90 euros. Elle ajoute que si Monsieur [O] accepte d'entretenir sa concubine cela le regarde et il doit en assumer seul les conséquences.

Concernant le patrimoine estimé ou prévisible des époux tant en capital qu'en revenus après la liquidation du régime matrimonial :

Les époux se sont mariés sous le régime de la communauté légale et ne disposent d'aucun patrimoine propre.

Le notaire a estimé la part de chacun des ex époux à la somme de 715'000€, la masse active de la communauté à partager étant essentiellement constituée du produit net de la vente du domicile conjugal situé à [Localité 6] pour une somme de 503'644,93 euros, d' un bien situé à [Localité 5] à l'île de la Réunion évalué à 60'000 € et de 8065 actions de la société IPSILAN Corporationes évaluées à minima à la somme de 900'000 €, outre divers contrats de placement et divers comptes courants.

Tandis que Monsieur [O] faisait ses choix professionnels pour poursuivre sa carrière, Madame [H] s'est trouvée dans l'obligation de ne travailler pendant 4 ans qu'à 80% pour s'occuper de ses deux enfants, en particulier de [N] qui a nécessité une surveillance accrue et des soins particuliers car il a été détecté chez lui une hyperactivité traitée médicalement avec de gros problèmes de dysorthographie et de dysorthomathématique. Il a été pris en charge par divers intervenants (orthophoniste, neuro- pédiatre, psychologue, psychomotricien, ergothérapeute etc).

Il s'en suit que les droits à la retraite de Madame [H], qui ne dispose actuellement d'aucune perspective d'évolution professionnelle, sont affectés par la nécessité devant laquelle elle s'est trouvée d'être davantage présente auprès de ses enfants et de leur consacrer tous les mercredis pendant 4 ans.

Eu égard à la durée du mariage des époux, à leur âge, aux conséquences des choix professionnels faits par les époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants, au patrimoine prévisible de ceux-ci après la liquidation du régime matrimonial , à leurs droits prévisibles et leur situation respective en matière de pension de retraite qui sera nettement en défaveur de Madame [H] qui n' a pas toujours travaillé à temps complet, et qui a perçu des rémunérations inférieures à celles de son époux, est établie la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux, disparité qui s'effectue au détriment de Mme [H].

Le paiement d'une prestation compensatoire en capital à son bénéfice lui permettra de compenser sa situation financière avec celle de Monsieur [O]. Il convient dans ces conditions de fixer sous la forme d'un capital de 20.'000 € , le montant de la prestation compensatoire que Monsieur [O] devra verser à son épouse et d'infirmer le jugement de ce chef.

Sur les demandes portant sur les frais des enfants :

- concernant les dépenses scolaires et extra- scolaires inhabituelles et exceptionnelles :

Monsieur [O] a donné son accord au conseiller de la mise en état pour un partage par moitié de ces frais sous réserve d'avoir consenti préalablement à la dépense et à la condition expresse qu'il soit prévenu en amont de la nature de toute dépense de ce type . Il maintient donc le fait d'accepter le partage par moitié des dépenses scolaires et extra-scolaires inhabituelles et exceptionnelles sous réserve que la condition selon laquelle il a consenti préalablement à la dépense soit reconduite.

Madame [H] demande qu'il soit également indiqué de façon formelle que son ex époux y soit « condamné en tant que de besoin ».

Ces demandes des parties relatives aux frais annexes paraissant conformes à l'intérêt des enfants, il y sera fait droit dans leur ensemble.

- s'agissant des frais d'ergothérapie de [N] :

Il a été indiqué à l'audience de plaidoiries par les avocats des deux parties que ces frais n'existaient plus.

Par décision en date du 20 novembre 2014, le conseiller de la mise en état dans une ordonnance d'incident a indiqué, concernant ces frais, que les dispositions du jugement de divorce déboutant Madame [H] de sa demande de prise en charge par le père des frais d'ergothérapie de l'enfant n'étant pas assorties de l'exécution provisoire, les dispositions de la décision du 14 février 2012 prévoyant que le père continuera de prendre en charge les frais de psychomotricité de [N], s'appliquaient donc jusqu'à l'arrêt sur le fond.

Au vu de l'ensemble des éléments financiers ci-dessus évoqués il apparaît justifié de juger que Monsieur [O] doit conserver à sa charge le coût des séances d' ergothérapie, sous réserve de l'éventuelle prise en charge par la MDPH , doit régler celles en cours qui n' auraient pas été payées et en tant que de besoin, devra assumer la totalité du coût non remboursé des futures séances, si elles devaient reprendre.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

S'agissant d'un litige d'ordre familial il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les sommes exposées et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort, après débats en chambre du conseil,

INFIRME partiellement le jugement du 5 février 2014,

ET STATUANT à nouveau,

DIT que le partage des actions de la société IPSILAN au bénéfice de Madame [H] sera réalisé en valeur,

FIXE à la somme de vingt mille euros ( 20 000 euros ) le montant de la prestation compensatoire en capital dûe par Monsieur [O] à Madame [H], net de frais et de droits, et au besoin l'y condamne,

DIT que les effets du divorce entre les époux doivent être reportés au 1er novembre 2007,

DIT que les dépenses scolaires et extra -scolaires inhabituelles et exceptionnelles exposées pour [K] et [N] seront supportés par moitié par les époux, sous réserve de l'accord préalable de Monsieur [O] et à l'exception des achats de type matériel informatique, et en tant que de besoin, le condamne à payer ces sommes,

DIT que Monsieur [O] conserve à sa charge le coût des séances d'ergothérapie sous réserve de l'éventuelle prise en charge par la MDPH , qu'il devra régler celles en cours qui n'auraient pas été payées, et en tant que de besoin, devra assumer la totalité du coût non remboursé par la MDPH des futures séances, si elles devaient reprendre,

DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus,

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes,

DIT que chaque partie conserve la charge de ses propres dépens.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Odile BOUVENOT-JACQUOT, Présidente et par Madame Claudette DAULTIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 2e chambre 2e section
Numéro d'arrêt : 14/02097
Date de la décision : 15/10/2015

Références :

Cour d'appel de Versailles 2J, arrêt n°14/02097 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-10-15;14.02097 ?
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