COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
11e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 24 SEPTEMBRE 2015
R.G. N° 12/03652
MCP/AZ
AFFAIRE :
[S] [U]
C/
Association LES POINTS CARDINAUX
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Juillet 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PONTOISE
N° RG : 10/00609
Copies exécutoires délivrées à :
Me Carole DUTHEUIL
Me Olivier PLACKTOR
Copies certifiées conformes délivrées à :
[S] [U]
Association LES POINTS CARDINAUX
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT QUATRE SEPTEMBRE DEUX MILLE QUINZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [S] [U]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Comparant en personne, assisté de Me Carole DUTHEUIL, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 13 - N° du dossier 110609
APPELANT
****************
Association LES POINTS CARDINAUX
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Olivier PLACKTOR, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D2036
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Avril 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Christine PLANTIN, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvie BOSI, Président,
Madame Clotilde MAUGENDRE, Conseiller,
Madame Marie-Christine PLANTIN, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,
Vu le jugement du Conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise en date du 26 juillet 2012 qui a :
- dit que le licenciement de Monsieur [S] [U] est fondé sur une faute grave
- débouté le salarié de sa demande relative au non respect de la procédure de convocation à l'entretien préalable
- débouté le salarié de sa demande d'indemnité pour précarité
- débouté le salarié de ses autres demandes
- condamné le salarié à verser à l'Association Points Cardinaux la somme de 1000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens,
Vu l'appel interjeté par Monsieur [U] par déclaration au greffe de la Cour le 2 août 2012,
Vu les conclusions déposées et soutenues oralement le 15 avril 2015 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens de Monsieur [U] qui demande :
- la condamnation de l'Association à lui verser la somme de 10000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect des dispositions sur le travail à temps partiel
- la condamnation de l'Association à lui verser la somme de 5000 € pour non-respect de l'amplitude journalière et le repos quotidien
- la condamnation de l'Association à lui verser la somme de 2813, 24 € pour non-respect de la procédure de licenciement
- l'annulation de la lettre d'avertissement du 13 juillet 2005
- de dire que le licenciement ne repose ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse
- la condamnation de l'Association à lui verser les sommes suivantes :
. 3375, 88 € au titre de la mise à pied conservatoire et 337, 58 € au titre des congés payés
. 8439, 74 € au titre de l'indemnité de préavis et 843, 97 € au titre des congés payés
. 14066, 20 € au titre de l'indemnité de licenciement
. 33758 € au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ces sommes devant être assorties des intérêts au taux légal à compter de la demande,
- la condamnation de l'Association à supporter les dépens et à verser la somme de 3000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile,
Vu les conclusions déposées et soutenues oralement le 15 avril 2015 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens de l'Association qui demande :
- la confirmation du jugement déféré et le rejet des prétentions de Monsieur [U]
- la condamnation de l'appelant au versement de la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens,
LA COUR,
Considérant que Monsieur [U] qui est médecin psychiatre a été embauché par l'Association Points Cardinaux le 5 décembre 1995 dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel en qualité de - Médecin pour gardes - ; que l'intéressé a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave par lettre datée du 25 octobre 2005 ;
Sur les motifs du licenciement
Considérant que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et justifie la cessation immédiate du contrat de travail ; que la preuve de la faute grave incombe exclusivement à l'employeur et si un doute subsiste il doit profiter au salarié ;
Considérant que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige faisait état de l'absence de Monsieur [U] le dimanche 4 septembre 2005 pour assurer un service de garde durant la journée et la nuit alors qu'il était inscrit sur le tableau affiché depuis plusieurs semaines dans les locaux de l'établissement et il était précisé, en outre, que l'intéressé n'avait pas informé l'Association de son absence ;
Considérant sur ces faits que le Docteur [Y] [K] s'est exprimé en ces termes le 'dimanche 4 septembre 2005 à neuf heures du matin, le relais devait être assuré par le Docteur [U] jusqu'au lundi 5 septembre 2005 à neuf heures du matin. Le Docteur [U] ne s'est pas présenté ce jour là à la clinique pour assurer sa garde. Il n'a pas non plus téléphoné pour prévenir qu'il était éventuellement empêché par un contre temps incontournable. J'ai donc dû informer le Docteur [F], psychiatre en chef de la clinique pour qu'il assure ou fasse assurer la relève... A noter que le planning des gardes était connu puisqu'il est affiché pour le quinze du mois précédent au plus tard. Le Docteur [U] ne pouvait donc ignorer qu'il était de garde ce jour là...' ;
Considérant que Monsieur [U] ne démontre ni même n'allègue que l'affichage considéré ne serait pas intervenu et / ou aurait été modifié ; qu'en tous cas, il ne produit aucun témoignage en ce sens ; que, dès lors, la matérialité des faits lui ayant été reprochés est établie ;
Considérant sur les conséquences de l'absence considérée qu'il importe de rappeler que l'Association a la charge de la gestion d'une maison de santé psychiatrique ; qu'il ne peut être sérieusement contesté qu'une présence médicale permanente est indispensable ; qu'à tout le moins, la direction doit être prévenue de toute indisponibilité dans la mesure où elle est tenue d'assurer la continuité des soins ;
Considérant, en définitive, que l'absence de Monsieur [U] était de nature à priver des patients particulièrement vulnérables et parfois imprévisibles des soins que leur état requiert de manière permanente ; que c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le licenciement reposait sur une faute grave et ont débouté l'appelant de l'intégralité de ses demandes formées au titre de la rupture du contrat de travail ;
Sur la demande afférente au non-respect de la procédure de licenciement
Considérant selon l'article L 122-14 du Code du travail applicable à l'époque des faits examinés qu'un délai minimum de cinq jours doit séparer la présentation de la lettre de convocation à l'entretien préalable et la date du dit entretien ;
Considérant en l'espèce que Monsieur [U] à été convoqué à l'entretien préalable par lettre datée du 22 septembre 2005 pour un entretien fixé au 28 septembre suivant ; qu'il ressort des pièces du dossier que la lettre a été présentée le 23 septembre 2005 ;
Considérant, dès lors, que le délai prévu par la loi n'a pas été respecté ; que Monsieur [U] est recevable et fondé à solliciter des dommages-intérêts en réparation de son préjudice ;
Considérant que le salaire mensuel moyen perçu par Monsieur [U] au cours des douze derniers mois est de 2 546,27 euros (30.555,27 euros /12) ;
Que la somme de 2 546,27 euros lui sera allouée à titre de dommages-intérêts de ce chef ;
Sur le contrat de travail à temps partiel
Considérant que Monsieur [U] qui ne demande aucune requalification de son contrat de travail expose cependant que celui-ci ne respectait pas les dispositions légales dans la mesure où il ne prévoyait aucune durée de travail ce qui, de manière permanente, l'aurait contraint à rester à la disposition de son employeur et lui aurait causé un préjudice méritant réparation ;
Considérant qu'il ressort de l'examen des pièces du dossier que :
- à compter du 5 décembre 1995, Monsieur [U] a été embauché en qualité de Médecin pour gardes
- depuis le 30 octobre 1999, il a été désigné pour assurer le remplacement de deux autres praticiens les samedi, dimanche et jours fériés selon une liste de garde établie chaque mois et dans les mêmes conditions que par le passé a dû assurer des gardes de nuit compte tenu des plannings mis au point chaque mois ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions contractuelles que Monsieur [U] ne peut affirmer qu'il se trouvait de manière permanente à la disposition de l'Association alors, au surplus, que sans être contredite l'Association fait observer que l'intéressé travaillait par ailleurs dans d'autres établissements ce qui établit qu'il ne se trouvait pas en permanence au service de l'Association ;
Considérant , en conclusion, qu'il convient de confirmer le jugement qui a rejeté la demande de dommages-intérêts formée par l'appelant ;
Sur la demande relative au non-respect de l'amplitude journalière et au repos quotidien
Considérant selon la Convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif en date du 31 octobre 1951 que 'la répartition entre les médecins, du temps de travail, des astreintes à domicile et des gardes est faite de manière à couvrir l'ensemble des besoins 24 h / 24 tout au long de l'année. Cette répartition est portée à la connaissance des médecins dans les conditions légales et réglementaires notamment en matière d'affichage' (article M. 05. 01. 2. 1) ; que par ailleurs (article M. 05. 01. 2. 2) il est prévu que lorsque l'aménagement du temps de travail est établi sur deux semaines, le nombre de jours de repos est fixé à 3 par quatorzaine dont 2 consécutifs ;
Considérant qu'il est constant que ces dispositions sont applicables à la situation de Monsieur [U] lequel ne peut revendiquer le bénéfice des dispositions générales édictées par le Code du travail prévoyant un repos minimal quotidien de onze heures consécutives ; que la demande formée, de ce chef, par l'intéressé est mal fondée et ne peut qu'être rejetée ;
Sur la lettre du 13 juillet 2005
Considérant que par lettre datée du 13 juillet 2005, après avoir été informée par Monsieur [U] que celui-ci n'entendait pas se soumettre au planning des gardes et vacations prévues pour le mois de juillet, l'Association a demandé à l'appelant de communiquer 'la liste des gardes que vous êtes en mesure d'effectuer pour les trois mois à venir' ;
Considérant qu'au-delà de cette demande d'information, la correspondance considérée ne contenait aucun avertissement de quelque nature que ce soit et ne faisait pas davantage état d'une quelconque sanction à venir ;
Considérant , en conséquence, que la demande d'annulation de la dite correspondance est mal fondée et doit être rejetée ;
Sur les dépens et l'indemnité de procédure
Considérant que l'Association Points Cardinaux et Monsieur [U] succombent partiellement aux demandes ;
Qu'ils devront conserver la charge de leurs dépens en première instance comme en appel ;
Considérant au regard de la situation respective des parties que l'équité ne commande pas de leur allouer une quelconque indemnité pour frais irrépétibles de procédure ;
Qu'elles seront déboutées de leurs demandes respectives ;
Que le jugement de première instance sera réformé de ces chefs ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement du Conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise en date du 26 juillet 2012 en ce qu'il a :
- dit que le licenciement de Monsieur [S] [U] est fondé sur une faute grave
- rejeté les demandes de Monsieur [S] [U] formées au titre de la rupture du contrat de travail
- débouté Monsieur [S] [U] de sa demande de dommages-intérêts pour non-respect des dispositions des contrats de travail à temps partiel,
L'infirme en ce qui concerne la demande relative au non-respect de la procédure de licenciement,
Condamne l'Association Points Cardinaux à verser à Monsieur [S] [U] la somme de 2 546,27 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,
Y ajoutant,
Déboute Monsieur [S] [U] de ses demandes relatives au non-respect de l'amplitude journalière et au repos quotidien et à la lettre datée du 13 juillet 2005,
L'infirmant et y ajoutant,
Déboute Monsieur [S] [U] et l'Association Points Cardinaux de leurs demandes formées par application 700 de l'article du Code de procédure civile en première instance et en appel,
Dit que Monsieur [S] [U] et l'Association Points Cardinaux conserveront la charge de leurs dépens.
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Mme Sylvie BOSI, président, et Mme Claudine AUBERT, greffier.
Le GREFFIERLe PRESIDENT