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07/05/2015 | FRANCE | N°13/02863

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 07 mai 2015, 13/02863


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



11e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 07 MAI 2015



R.G. N° 13/02863



MCP/CA



AFFAIRE :



[W] [E]





C/

SAS POLY PREST EUROPE (PPE),









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Juin 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE



N° RG : 11/01515





C

opies exécutoires délivrées à :



Me Abdelaziz MIMOUN

Me Pierre BESSARD DU PARC





Copies certifiées conformes délivrées à :



[W] [E]



SAS POLY PREST EUROPE (PPE),







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SEPT MAI DEUX MILLE QUINZE,

La cour...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 MAI 2015

R.G. N° 13/02863

MCP/CA

AFFAIRE :

[W] [E]

C/

SAS POLY PREST EUROPE (PPE),

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Juin 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° RG : 11/01515

Copies exécutoires délivrées à :

Me Abdelaziz MIMOUN

Me Pierre BESSARD DU PARC

Copies certifiées conformes délivrées à :

[W] [E]

SAS POLY PREST EUROPE (PPE),

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT MAI DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [W] [E]

[Adresse 2]

[Adresse 4]

comparant en personne, assisté de Me Abdelaziz MIMOUN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 89

APPELANT

****************

SAS POLY PREST EUROPE (PPE),

[Adresse 1]

[Adresse 5]

représentée par Me Pierre BESSARD DU PARC, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0907, En présence de Mme [L] [R] (Employeur)

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Février 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Christine PLANTIN, Conseiller chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie BOSI, Président,

Monsieur Jean-Michel AUBAC, Conseiller,

Madame Marie-Christine PLANTIN, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,

Faits Procédure et Prétentions des parties

La société Poly Prest Europe (ci-après PPE) a été créée en novembre 1969 et développe son activité dans le secteur du nettoyage industriel et le nettoyage des bâtiments.

Cette société compte plus de 10 salariés.

Par contrat à durée indéterminée en date du 1er septembre 2003, ayant pris effet le même jour, la société PPE a engagé Monsieur [W] [E] en qualité d'Ingénieur commercial niveau CA 1 suivant la Convention collective des entreprises de propreté.

A compter du 1er novembre 2004, Monsieur [E] accédait aux fonctions de Directeur d'agence (niveau CA 2).

Dans son dernier état, le montant mensuel brut du salaire s'élevait à 4 929, 28 €.

Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 12 mai 2009, Monsieur [E] faisait l'objet d'un licenciement pour faute grave.

Contestant cette mesure, le salarié saisissait le Conseil de prud'hommes de Nanterre.

* * *

Par décision en date du 4 juin 2013, le Conseil déboutait le salarié de l'intégralité de ses prétentions en jugeant que le licenciement pour faute grave était justifié et condamnait Monsieur [E] au paiement d'une amende civile de 1 000 € pour procédure abusive. En outre, la société PPE était déboutée de sa demande en remboursement du trop perçu de salaire fixe et variable.

Enfin, Monsieur [E] était condamné aux éventuels dépens.

Monsieur [E] a régulièrement relevé appel de ce jugement par déclaration au greffe enregistrée le 2 juillet 2013.

Dans le dernier état de ses conclusions, Monsieur [E] demande :

= l'infirmation du jugement déféré et la condamnation de la société à lui verser les sommes suivantes :

. 147 729, 39 au titre des commissions et 14 772, 93 au titre des congés payés y afférents

. 1 496, 92 € au titre de la prime d'expérience et 149, 69 € au titre des congés payés y afférents

. 60 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

. 4 908, 06 € correspondant au salaire afférent à la mise à pied conservatoire augmentée de 490, 80 € au titre des congés payés y afférents

. 22 086, 30 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 2 208, 63 € au titre des congés payés y afférents

9 350, 44 € au titre de l'indemnité légale de licenciement

= de déclarer irrecevable à tout le moins mal fondée la demande en dommages-intérêts formée par la société et la débouter de sa demande en restitution de la somme de 145 748, 49 €

= en tout état de cause : condamner la société au versement d'une somme de 5 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens y compris ceux d'exécution.

Dans le dernier état de ses conclusions, la société demande :

= à titre principal, la confirmation du jugement entrepris et à titre incident, la condamnation du

salarié à lui verser la somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts par application des articles 1134 et 1382 Code civil

= à titre subsidiaire, la condamnation de Monsieur [E] au remboursement de la somme de 145 748, 49 € au titre du trop-perçu de salaire fixe et variable

= en tout état de cause, condamner Monsieur [E] au versement de la somme de 4 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience.

Motifs de la décision

Sur les demandes afférentes à la mise à pied conservatoire

Considérant que selon les dispositions de l'article L 3245-1 du Code du travail, dans sa version en vigueur à l'époque des faits examinés, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2224 du Code civil ;

Considérant que par voie de conclusions déposées et développées oralement au cours de l'audience du 11 février 2015, Monsieur [E] sollicite un rappel au titre de la mise à pied conservatoire et les congés payés y afférents ;

Considérant que les sommes réclamées correspondent à une mise à pied conservatoire mise en oeuvre le 25 avril 2009 et, par application du texte sus-visé, il convient de déclarer cette demande irrecevable en raison de l'acquisition de la prescription ;

Sur les motifs du licenciement

Considérant que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et justifie la cessation immédiate de son contrat de travail ;

Considérant que la preuve de la faute grave incombe exclusivement à l'employeur et selon l'article L 1235-1 du Code du travail si un doute subsiste, il doit profiter au salarié ;

Considérant que la lettre de licenciement adressée au salarié le 12 mai 2009 et qui fixe les limites du litige mentionnait les griefs suivants :

'Création d'une société dénommée Aelys, directement concurrente de Poly Prest Europe dont vous détenez 50 % du capital social.

Exploitation de cette société par vous-même et votre associé depuis octobre 2008 en concurrence directe avec Poly Prest Europe.

Etablissement de devis et de propositions commerciales en utilisant la méthodologie et les descriptifs mis au point par Poly Prest Europe ainsi que ses conditions générales de vente.

Tentative de détournement au profit d'Aelys du marché accordé par Foncier Renoir pour la [Adresse 6].

Utilisation à des fins de concurrence déloyale des moyens mis à votre disposition pour Poly Prest Europe : ordinateur portable, téléphone portable...

Fourniture à des personnes ou organismes extérieurs de produits achetés par Poly Prest Europe cf votre agenda semaine 16, 17, 18 et 20.

Par ailleurs, nous avons constaté la présence sur le disque dur de votre ordinateur de plusieurs milliers d'images à caractère pornographique' ;

Considérant en ce qui concerne le premier grief qu'il ressort de l'examen des pièces du dossier que le 10 avril 2009, la Directrice générale de la société PPE avait écrit à la société Clean Service en lui rappelant sa désignation en tant que nouveau titulaire du marché de nettoyage du site de la [Adresse 6] et qu'elle souhaitait, en conséquence, recevoir le dossier correspondant au salarié dont elle devait, dans ces circonstances, reprendre le contrat de travail;

Considérant que le 23 avril 2009, la société Clean Service avait répondu à cette demande en précisant avoir déjà transmis les éléments nécessaires au transfert du contrat considéré à la société Aelys, [Adresse 3] à l'attention de Monsieur [W] [E] et avait précisé, en outre, que par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 décembre 2008, le syndic de la copropriété [Adresse 6] avait notifié à la société Clean Service que la société Aelys avait été désignée en qualité de nouveau titulaire du marché ;

Considérant, selon un extrait du Registre du commerce et des sociétés obtenu le 23 avril 2009, qu'il apparaissait que la société Aelys avait été immatriculée le 3 novembre 2008, avait commencé son exploitation le 6 octobre 2008 et que son activité portait sur le nettoyage et remise en état de propreté et les statuts de la dite société consultés le 30 avril suivant révélaient que Monsieur [W] [E] était l'un des associés et porteur de parts à hauteur de 50 % du capital dans cette société constituée depuis le 18 septembre 2008 ;

Considérant en réponse aux faits ainsi révélés que :

- d'une part, Monsieur [E] soutient que compte tenu de la date de constitution de la société Aelys, le délai de prescription de deux mois édictée par l'article L 1332-4 du Code du travail était expiré lorsque la société PPE lui a reproché ces faits ; toutefois, il est constant que le délai précité ne commence à courir que lorsque l'employeur a eu connaissance des faits et en l'espèce, il apparaît, au regard de ce qui précède, que la société PPE a été informée de l'existence de la société Aelys et de son activité concurrente à la sienne par la lettre précitée du 23 avril 2009 de telle sorte que la société PPE était recevable à invoquer ces faits au soutien du licenciement notifié au salarié par lettre du 12 mai 2009 ;

- d'autre part, Monsieur [E] expose que la connaissance de ces faits résulte d'un mode de preuve obtenu de manière irrégulière par la société PPE s'agissant du procès-verbal de constat établi par huissier le 8 juin 2009 mais, en réalité, les critiques formées, à ce titre, sont inopérantes dans la mesure où la preuve de la constitution de la société Aelys et la preuve de l'implication du salarié dans cette société ont été mises à jour à l'origine par des vérifications conduites auprès du Registre du commerce et des sociétés indépendamment des constatations ultérieures faites par l'huissier ;

Considérant, en définitive, que la société PPE établit qu'alors qu'il était au service de son employeur et sans l'en informer, Monsieur [E] a créé un société dont l'activité était directement concurrente de la sienne et que le salarié a, ainsi, manqué à son obligation de loyauté ce qui, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs formulés par la société PPE, est constitutif d'une faute grave ayant rendu impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que le jugement dont appel qui a retenu le bien fondé du licenciement pour faute grave et a, en conséquence, rejeté l'intégralité des prétentions formées par Monsieur [E] doit, en conséquence, être confirmé ;

Sur la condamnation à une amende civile

Considérant que l'article 32-1 du Code de procédure civile prévoit que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile ;

Considérant qu'il est constant que le droit d'agir en justice ne dégénère en un abus que dans l'hypothèse d'une intention de nuire et / ou en cas de malice ou de mauvaise foi ;

Considérant en l'espèce que pour faire application des dispositions précités, les premiers juges ont relevé que Monsieur [E] avait violé ses obligations contractuelles ;

Considérant que ce motif n'est pas de nature à caractériser un abus du droit d'agir en justice et il y a lieu, en conséquence, d'infirmer le jugement déféré qui a condamné le salarié au paiement d'une amende civile ;

Sur la demande en dommages-intérêts formée par la société PPE

Considérant selon l'article 1134 du Code civil que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ;

Considérant que la société PPE demande la condamnation de Monsieur [E] à lui verser la somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts en retenant que les fautes commises par le salarié lui ont causé un préjudice dont elle est fondée à demander réparation ;

Considérant, au regard des explications qui précèdent, qu'il est établi que Monsieur [E] n'a pas exécuté de manière loyale ses obligations contractuelles et a tenté de détourner des clients de son employeur au profit d'une société dans laquelle il était directement intéressé et cette faute a causé un préjudice qui peut être réparé par la condamnation de l'appelant à verser à la société la somme de 2 000 € à titre de dommages-intérêts ;

Sur la demande de Monsieur [E] relative au paiement des commissions

Considérant que Monsieur [E] demande la condamnation de la société à lui verser les sommes dues au titre de la rémunération variable dont les modalités avaient été arrêtées par un avenant en date du 11 mars 2004 ;

Considérant en premier lieu, qu'il apparaît que le salarié n'a pas signé l'avenant considéré ;

Considérant en second lieu, qu'il ressort de l'examen des bulletins de paie produits par le salarié que ce dernier a occupé un poste d'Ingénieur commercial jusqu'à la fin du mois d'octobre 2004, et à compter du 1er novembre 2004, a accédé au poste de Directeur d'agence en remplacement de Monsieur [P] qui venait de démissionner et il est établi que dans le cadre de ces dernières fonctions aucune commission n'était prévue mais une augmentation du salaire brut de 110 % était intervenue ;

Considérant au regard de ce qui précède que la demande de Monsieur [E] est mal fondée et doit être rejetée ;

Sur la demande de Monsieur [E] relative au paiement de la prime d'expérience

Considérant selon l'article 11. 7 de la Convention collective des entreprises de propreté qu'après 4 ans d'expérience professionnelle, le salarié doit percevoir une prime de 2 % calculée sur la base de la rémunération minimale hiérarchique correspondant au coefficient de l'intéressé ;

Considérant qu'au regard des éléments du dossier, il apparaît que Monsieur [E] a reçu à ce titre pour l'année 2007 : 109, 84 €, pour l'année 2008 : 439, 36 € et pour l'année 2009 : 163, 54 € soit au total 712, 74 € ;

Considérant que le salarié réclame, à ce propos, la somme de 1 496, 72 € mais il apparaît que cette demande n'est pas fondée au regard du montant du salaire conventionnel applicable au 1er janvier 2007 soit 2 493 € et 2 589 € le 1er juillet 2007 ; au 1er janvier 2008 : 2 640 € et 2 694, 44 € à compter du 1er juillet 2008 ;

Considérant, en conséquence, que la demande formée par Monsieur [E] n'est pas fondée et doit être rejetée ;

Sur les demandes accessoires

Considérant que Monsieur [W] [E] qui succombe doit supporter les dépens et qu'il y a lieu, en outre, de le condamner à verser à la société Poly Prest Europe une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme de 1 500 € ;

Que Monsieur [W] [E] doit être débouté de cette même demande ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement du Conseil de prud'hommes de Nanterre en date du 4 juin 2013 en ce qu'il a déclaré justifié le licenciement pour faute grave de Monsieur [W] [E] et a débouté ce dernier de l'ensemble de ses réclamations,

Infirme cette décision en ce qu'elle a condamné Monsieur [W] [E] à une amende civile de 1000€,

Y ajoutant,

Déclare irrecevable la demande de Monsieur [W] [E] relative aux salaire et congés payés y afférents durant la mise à pied conservatoire,

Condamne Monsieur [W] [E] à verser à la société Poly Prest Europ la somme de 2 000 € à titre de dommages-intérêts,

Déboute Monsieur [W] [E] de ses demandes relatives au paiement des commissions et au paiement de la prime d'expérience,

Condamne Monsieur [W] [E] à verser à la société Poly Prest Europe la somme de 1 500 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne Monsieur [W] [E] aux dépens,

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Sylvie BOSI, président, et Madame Claudine AUBERT, greffier.

Le GREFFIERLe PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11e chambre
Numéro d'arrêt : 13/02863
Date de la décision : 07/05/2015

Références :

Cour d'appel de Versailles 11, arrêt n°13/02863 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-05-07;13.02863 ?
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