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19/02/2015 | FRANCE | N°12/00287

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 19 février 2015, 12/00287


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 57B



3e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 19 FEVRIER 2015



R.G. N° 12/00287







AFFAIRE :







[B] [O]



C/



[N], [W], [E] [Z] née [D]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Janvier 2012 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° chambre : 2

N° RG : 11/00001




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Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Christophe DEBRAY

Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-

DE CARFORT



REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE DIX NEUF FEVRIER DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel de Versai...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 57B

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 FEVRIER 2015

R.G. N° 12/00287

AFFAIRE :

[B] [O]

C/

[N], [W], [E] [Z] née [D]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Janvier 2012 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° chambre : 2

N° RG : 11/00001

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Christophe DEBRAY

Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-

DE CARFORT

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DIX NEUF FEVRIER DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [B] [O]

né le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - N° du dossier 12000035

Représentant : Me Bruno QUINT de la SCP GRANRUT Société d'Avocats, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0014

APPELANT

****************

1/ Madame [N], [W], [E] [Z] née [D]

née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 4] (MAROC)

de nationalité Française

La Mataffe, Bâtiment A

[Adresse 1]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentant : Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 4612

Représentant : Me Marie-claude ALEXIS de la SDE SAINT-ADAM, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0194

INTIMEE

2/ Madame [R] [T]

née le [Date naissance 4] 1959 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 2]

ès qualités de tutrice de Madame [J] [D] épouse [T], née le [Date naissance 3] 1928 à [Localité 3] (17) , [Adresse 5], en vertu d'une décision du juge des tutelles du 26 avril 2013

Représentant : Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 4612

Représentant : Me Marie-claude ALEXIS de la SDE SAINT-ADAM, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0194

ASSIGNEE EN INTERVENTION FORCEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Janvier 2015, Madame Véronique BOISSELET, Président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Véronique BOISSELET, Président,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Monsieur Georges DOMERGUE, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Lise BESSON

-------------------------------------------

Le 30 janvier 1995, [H] [K] a désigné son compagnon, [A] [C], comme étant l'unique bénéficiaire du capital-décès d'un contrat AFER qu'elle avait souscrit. Au décès de ce dernier le 14 janvier 1998, elle a désigné comme bénéficiaire [B] [O], par ailleurs légataire universel de [A] [C].

Suivant déclaration enregistrée au greffe du tribunal de grande instance de Nanterre le 27 mars 1998, [H] [K] a déclaré renoncer purement et simplement au profit de [B] [O] au bénéfice du leg à titre particulier consistant en l'usufruit du pavillon [C], situé à Chatou, et qui constituait le domicile du couple. Elle s'est installée à la même époque à proximité immédiate du domicile de sa fille, à Boulogne.

En 2007, [H] [K] est décédée, laissant pour lui succéder sa fille, [J] [D] épouse [T], et sa petite fille, [N] [D] épouse [Z].

Estimant que tant la renonciation à usufruit que la désignation de [B] [O] en qualité de bénéficiaire du capital-décès souscrit résultaient de pressions exercées par ce dernier sur la défunte, les dames [T] et [Z] ont assigné [B] [O] devant le tribunal de grande instance de Versailles aux fins d'indemnisation de leurs préjudices, au visa des articles 1108, 1109, 1116, 1192 et 1382 du code civil.

Par jugement du 3 janvier 2012, le tribunal a :

- rejeté leurs demandes au titre du contrat AFER,

- dit que l'acte relatif à la renonciation de l'usufruit sur la [Adresse 3] à [Localité 5] est entaché de dol et que [B] [O] est l'auteur de la fraude,

- condamné, en conséquence, [B] [O] à payer aux dames [T] [Z] la somme de 83 160 € à titre de dommages et intérêts, et celle de 5 000 € en réparation de leur préjudice moral,

- ordonné l'exécution provisoire.

Les premiers juges ont considéré en ce qui concerne le contrat AFER que les demanderesses n'établissaient pas la preuve de la fraude du défendeur, mais qu'en revanche, en ce qui concerne la renonciation à usufruit, il ressortait d'un faisceau d'indices précis et concordants que [B] [O] avait profité de son statut de conseiller en gestion de patrimoine pour tromper [H] [K], agissant à son insu ou s'abstenant de l'éclairer sur la portée de son acte, sur les conséquences de cette renonciation à l'usufruit. Ces manoeuvres ont été qualifiées de manoeuvres dolosives.

[B] [O] a interjeté appel de la décision.

Par conclusions du 4 décembre 2014, [B] [O] demande à la Cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a validé sa désignation en qualité de bénéficiaire du contrat d'assurance vie AFER,

- infirmer le jugement rendu le 3 janvier 2012 par le tribunal de grande instance de Versailles en ce qu'il a accueilli les autres demandes des dames [T] [Z],

- condamner in solidum les dames [T] [Z] à lui restituer les sommes qu'il a réglées au titre de l'exécution provisoire.

Il soutient qu'il n'a jamais été mandataire d'[H] [K] en dehors de la souscription des contrats conclus auprès de la société Cardif Assurance Vie dont il n'a nullement bénéficié, n'a jamais géré ses fonds, intervenant seulement en tant que courtier pour les contrats souscrits auprès de la société Cardif Assurance Vie.

- sa désignation en qualité de bénéficiaire du contrat AFER est incontestablement conforme aux dispositions légales et règlementaires en vigueur, tant sur le fond que sur la forme, et ne peut être valablement remise en cause.

- les deux seuls documents versés aux débats faisant référence à l'usufruit du pavillon de [Localité 5] émanent d'[H] [K] et démontrent son souhait de renoncer à l'usufruit. Sa prétendue fraude n'est pas caractérisée.

Par conclusions du 17 décembre 2014, les dames [T] [Z], ainsi qu'[R] [T], ès qualités de tutrice de [J] [T], demandent à la Cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

dit l'acte relatif à la renonciation de l'usufruit sur la [Adresse 3] à [Localité 5] entaché de dol commis par [B] [O],

admis le principe de réparation du préjudice ainsi causé,

- infirmer le jugement pour le surplus,

condamner [B] [O] à leur payer la somme de 408.000 € correspondant à la valeur de l'usufruit de la [Adresse 3] à [Localité 5],

condamner [B] [O] à leur payer la somme de 67.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la fraude relative au contrat AFER,

condamner [B] [O] à payer à [J] [T] la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral distinct que son comportement déloyal lui a fait subir,

condamner [B] [O] à leur payer la somme totale de 50.000 € à titre de dommages et intérêts au titre de leurs préjudices matériels et moraux.

Elles soutiennent que [B] [O], reconnaissant prodiguer des conseils à [H] [K], est incontestablement l'auteur de manoeuvres dolosives, ayant manifestement conseillé à la défunte de renoncer à son leg à son bénéfice personnel. Cette situation a été facilitée par l'état d'[H] [K], très agée et vulnérable, ignorante des règles de droit relatives aux successions, aux libéralités, à la fiscalité et bien incapable de gérer son patrimoine. Elles font valoir que [B] [O], en sa qualité de conseil d'[H] [K], a violé son obligation de conseil en devenant le bénéficiaire des opérations qu'il conseillait à sa cliente, ne produisant, en sens contraire, aucun document établissant avoir mis en garde [H] [K] sur les conséquences d'une renonciation à son leg. Celle-ci a commis une erreur déterminante, excusable et portant sur les qualités substantielles de [B] [O], pensant qu'il était non seulement un mandataire loyal et fidèle mais aussi un ami avec lequel elle entretenait une relation singulière. L'erreur sur la substance doit être retenue.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 décembre 2014.

SUR QUOI LA COUR :

- Sur la désignation de [B] [O] en qualité de bénéficiaire du contrat AFER :

Le tribunal a en premier lieu rappelé que la cour de Paris a, par arrêt du 10 juin 2009, condamné le GIE AFER, qui avait contesté pour des raisons éthiques la désignation de [B] [O] en qualité de bénéficiaire, à lui régler le capital décès. En second lieu, il a rappelé la teneur d'attestations rédigées par [J] [T] elle-même à la demande du GIE AFER, et produites dans le cadre de cette procédure, aux termes desquelles elle avait formellement approuvé et accepté la désignation de [B] [O] en qualité de bénéficiaire. Le tribunal a, au vu de ces éléments, estimé que n'était pas rapportée la preuve d'une fraude à l'occasion de la désignation de [B] [O] en qualité de bénéficiaire du capital décès.

Au soutien de leur recours, les dames [T] [Z] font valoir qu'[H] [K], déjà très âgée, mal voyante et malentendante, a cédé aux pressions de [B] [O] et que le consentement de [J] [T] a été surpris lors de la signature des deux attestations produites par le GIE AFER. Elles rappellent que cette dernière est atteinte de la maladie d'alzheimer.

[B] [O] expose pour sa part que ce contrat a été souscrit à l'aide de fonds appartenant à [A] [C], ce qui explique sa désignation initiale en qualité de bénéficiaire, précisant qu'ils avaient été antérieurement prêtés à [R] [T], qui les lui avait rendus, et qu'en le désignant en qualité de bénéficiaire, [H] [K] s'était bornée à respecter la volonté de son compagnon, qui était de transmettre ses biens à [B] [O].

La désignation litigieuse a été effectuée par lettre recommandée du 20 août 1998 d'[H] [K] (non produite, mais mentionnée par l'arrêt de la cour de Paris p.6). Il n'est pas fait état de ce que cette dernière aurait fait l'objet d'une mesure de protection, même si elle était déjà très âgée à l'époque, comme née en 1909. Au contraire, le témoignage de [F] [S], aide à domicile en 2005, soit bien postérieurement, ne fait état que d'une dépendance liée à une difficulté à se déplacer, une quasi-cécité et une surdité partielle. L'attestation de [P] [L] [U], infirmière, et celle de [G] [I] confirment la parfaite lucidité d'[H] [K] jusqu'à sa mort en 2007.

Il est vrai que [J] [T], s'est vue reconnaître une invalidité à 100 % pour cécité en 1996. Néanmoins le certificat de son ophtalmologiste précise que son acuité visuelle est seulement limitée. Elle ne conteste d'ailleurs pas avoir écrit elle-même et signé les deux attestations qu'elle critique, datées des 25 janvier et 8 avril 2009 et produites par [B] [O] dans le cadre de l'instance qui l'a opposée au GIE AFER, selon lesquelles elle était parfaitement au courant de la désignation de [B] [O] en qualité de bénéficiaire du contrat AFER et l'avait approuvée. Le fait que [J] [T] ait été placée sous tutelle en avril 2013, après examen médical du 21 novembre 2012, n'est pas non plus pertinent pour démontrer qu'elle aurait été dans l'incapacité de comprendre le sens et la portée de ces deux attestations, rédigées en janvier et avril 2009, étant observé que [J] [T] était valide à tout le moins jusqu'au décès de sa mère en 2007, puisque divers témoins relatent qu'elle s'est occupée de cette dernière à son domicile, et qu'un certificat médical relate que ses troubles cognitifs ont été diagnostiqués en 2012, leur début se situant entre 2009 et 2012. Un bilan orthophonique pour troubles mnésiques en janvier 2009 n'a pas révélé de trouble du langage oral ou écrit. Un nouveau bilan, réalisé en septembre 2010, soit près d'un an et demi après la date des attestations contestées, conclut à la nécessité d'une prise en charge orthophonique pour traiter un 'manque du mot' cependant dans un contexte de communication très favorable (souligné par la cour). L'affirmation de [J] [T], représentée par sa tutrice, selon laquelle à la date de rédaction des attestations, soit début 2009, elle était hors d'état d'en comprendre le sens, ne peut ainsi être retenue, étant observé que ces attestations, dans leur rédaction, se rapportent sans aucune ambiguïté au contrat souscrit par [H] [K], en sorte que [J] [T] ne peut, comme elle le soutient, affirmer avoir compris qu'il s'agissait d'un contrat différent. Les cartes postales produites par [B] [O], notamment celle datée de mai 2009, confirment par ailleurs que [J] [T] était encore, à cette époque, en pleine possession de ses moyens, apte à écrire et autonome.

Par ailleurs les pièces produites par [B] [O] montrent que de nombreux rachats partiels ont été opérés par [H] [K] au titre du contrat AFER, alors qu'elle était domiciliée à Boulogne. Or celle-ci ne se déplaçant qu'avec de très grandes difficultés et toujours accompagnée de sa fille (attestation [X]) il ne peut être raisonnablement soutenu que [J] [T] ait ignoré, comme elle le soutient de façon confuse, l'existence de ce contrat, les rachats partiels exigeant la mise à l'encaissement matérielle de chèques.

Enfin les dames [T] [Z] laissent sans réponse les précisions apportées par [B] [O] sur l'origine des fonds affectés au contrat AFER, et la justification en découlant sur sa désignation en qualité de bénéficiaire du contrat, étant observé qu'aucune contestation n'est évoquée sur la volonté de [A] [C] de transmettre ses biens à [B] [O].

Ainsi, aucun des éléments avancés par les dames [T] et [Z] ne résistant à l'examen, rien ne permet de remettre en cause la validité de la désignation de [B] [O] en qualité de bénéficiaire du contrat d'assurance vie AFER souscrit par [H] [K], et le jugement sera confirmé sur ce point.

- Sur la renonciation à usufruit :

Le tribunal a rappelé que [A] [C] a, par testament olographe du 3 septembre 1997, déposé en l'étude de Maître [M], notaire, transmis l'usufruit de la maison qui lui appartenait personnellement et qu'il occupait avec [H] [K] à cette dernière, et institué [B] [O] légataire universel. Les premiers juges ont également relevé que la renonciation par [H] [K] à son usufruit sans contrepartie financière ne s'expliquait pas au regard de la volonté notoire de cette dernière de faire profiter sa famille de ses biens, alors surtout que ses revenus étaient modestes, en sorte que cette renonciation était à l'origine d'un préjudice pour ses héritières.

Au soutien de son recours, [B] [O] fait valoir qu'[H] [K] a clairement et à plusieurs reprises manifesté sa volonté de renoncer à l'usufruit de la maison, ce qui lui permettait de ne pas assumer les droits de succession ainsi que les charges et tracas d'un immeuble à rénover. Il conteste avoir été le conseil d'[H] [K], soulignant que son rôle s'était limité à lui faire souscrire des contrats 'Cardif', et expose également n'avoir même pas été consulté sur la renonciation à usufruit.

Les dames [T] [Z] exposent que [B] [O], qui était le conseiller d'[H] [V] dans toutes les opérations de gestion de son patrimoine, ne justifie pas avoir attiré son attention sur les conséquences d'une renonciation à usufruit sans contrepartie, et a abusé de la vulnérabilité d'[H] [K] pour lui faire effectuer une démarche contraire à ses intérêts, et au seul profit de [B] [O].

Il a été exposé que, bien qu'âgée et handicapée, [H] [K] avait conservé toutes ses facultés intellectuelles. Or elle a à deux reprises manifesté clairement son souhait de renoncer à l'usufruit de la maison de Chatou, une première fois dans un courrier adressé à son notaire, annoté de sa main et signé, et une seconde fois en souscrivant au greffe du tribunal de grande instance de Versailles la déclaration légale, étant observé qu'une telle renonciation, établie par un greffier en chef, suppose, au minimum, un entretien entre ces deux personnes, tendant, précisément, à la vérification par un fonctionnaire judiciaire, de la réalité de la volonté exprimée. Ces circonstances excluent toute erreur d'[H] [K] sur la portée de cet acte.

S'il résulte de la profession exercée par [B] [O], qui est celle de courtier notamment en produits d'assurance-vie, que ce dernier est particulièrement informé sur la gestion patrimoniale, aucune pièce ne démontre, comme le soutiennent les dames [T] [Z], qu'il avait été investi par [H] [K] d'un mandat de gestion patrimoniale, dans le cadre duquel il aurait en effet été débiteur d'une obligation d'information et de conseil. [B] [O] n'a donc pas à rapporter la preuve de l'exécution d'une obligation qu'il n'avait pas à remplir. Au contraire, les photos et cartes postales produites démontrent que [B] [O] était bien, à titre tout à fait privé, proche d'[H] [K], et d'ailleurs également de [J] [T] et du reste de la famille [T], et que c'est bien en cette seule qualité qu'il a recueilli de façon anticipée et à titre gratuit la pleine propriété de la maison de [Localité 5].

Au demeurant, alors que la situation de fortune d'[H] [K], selon les éléments non contestés produits par [B] [O], lui permettaient facilement de vivre confortablement auprès de sa fille, sa décision de renoncer à son usufruit peut très facilement s'expliquer par son souhait de s'épargner le souci de l'entretien d'une maison devenue inadaptée à ses besoins, les charges de tous ordres et notamment fiscales y afférentes, ainsi que le souci de sa mise en location, tout en allant dans le sens de la volonté de son compagnon prédécédé de laisser sa maison à [B] [O]. Il n'est par ailleurs pas démontré que cette décision, en effet constitutive d'un avantage au profit de [B] [O], a eu pour effet de spolier en quoi que ce soit les héritières d'[H] [K]. En effet ces dernières, qui se contentent d'évoquer une éventuelle atteinte à leur réserve, se gardent bien de fournir le moindre élément sur la consistance de la succession d'[H] [K], en sorte qu'il est impossible d'apprécier si l'abandon de cet usufruit est ou non constitutif d'un appauvrissement excèdant la quotité disponible de la succession.

Le jugement sera donc infirmé en ce que la demande des dames [T] [Z] intéressant l'abandon de l'usufruit de la maison de [Localité 5] a été accueillie, et ces demandes seront rejetées.

Le présent arrêt valant en lui même titre de restitution, il n'y a pas lieu d'ordonner spécifiquement la restitution des sommes payées au titre de l'exécution provisoire du jugement déféré.

- Sur les autres demandes :

Au regard de ce qui vient d'être jugé, [J] [T] et [N] [Z] ne démontrent pas avoir subi un préjudice moral indemnisable et seront déboutées de leurs demandes à ce titre, le jugement étant également infirmé en ce que [B] [O] a été condamné à leur payer la somme de 5 000 € sur ce fondement.

Succombant en toutes leurs demandes devant la cour, [J] [T] et [N] [Z] seront également déboutées de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et supporteront les dépens de première instance et d'appel. Elles contribueront en équité aux frais irrépétibles exposés par [B] [O] à hauteur de 3 000 €.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement déféré en ce que [J] [T] et [N] [Z] ont été déboutées de leurs demandes au titre du contrat AFER,

Infirmant le jugement déféré en toutes ses autres dispositions et statuant à nouveau,

Déboute [J] [T], représentée par sa tutrice [R] [T], et [N] [Z] de leurs demandes au titre de la renonciation d'[H] [K] à l'usufruit de la [Adresse 3] sise à [Localité 5], et de leurs demandes au titre du préjudice moral subi,

Les déboute également de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Les condamne en revanche à payer à [B] [O] la somme de 3 000 € à ce titre,

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire,

Condamne [J] [T], représentée par sa tutrice [R] [T], et [N] [Z] aux dépens de première instance et d'appel, avec recouvrement direct.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 12/00287
Date de la décision : 19/02/2015

Références :

Cour d'appel de Versailles 03, arrêt n°12/00287 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-02-19;12.00287 ?
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