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22/01/2015 | FRANCE | N°14/00050

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 22 janvier 2015, 14/00050


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 78E



16e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 22 JANVIER 2015



R.G. N° 14/00050



AFFAIRE :



[M] [Y]

...



C/



Société CAISSE MEDITERRANEENNE DE FINANCEMENT 'CAMEFI'



[K] [N]

...



Décision déférée à la cour : Arrêt rendu le 30 Octobre 2013 par la Cour de Cassation de PARIS suite à l'arrêt rendu le 14 Juin 2012 par la Cour d'appel de PARIS

sur un jugement rendu le 9 Février 2012 par le tribunal de grande instance de MEAUX

N° Chambre : 01

N° Section :

N° RG : 12-25-329



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Martine DUPUIS de la ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 78E

16e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 22 JANVIER 2015

R.G. N° 14/00050

AFFAIRE :

[M] [Y]

...

C/

Société CAISSE MEDITERRANEENNE DE FINANCEMENT 'CAMEFI'

[K] [N]

...

Décision déférée à la cour : Arrêt rendu le 30 Octobre 2013 par la Cour de Cassation de PARIS suite à l'arrêt rendu le 14 Juin 2012 par la Cour d'appel de PARIS sur un jugement rendu le 9 Février 2012 par le tribunal de grande instance de MEAUX

N° Chambre : 01

N° Section :

N° RG : 12-25-329

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Pierre GUTTIN, avocat au barreau de VERSAILLES

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT DEUX JANVIER DEUX MILLE QUINZE, après prorogation

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

DEMANDEURS devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation du 30 Octobre 2013 cassant et annulant l'arrêt rendu par la cour d'appel de PARIS le 14 Juin 2012 sur un jugement rendu par le tribunal de grande instance de MEAUX le 9 Février 2012

Monsieur [M] [Y]

né le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 11] (42)

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représenté par : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625

Représenté par : Me Alain CHEVALIER, Plaidant, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 179

Madame [V] [T] épouse [Y]

née le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 8] (78)

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représentée par Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625

Représentée par : Me Alain CHEVALIER, Plaidant, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 179

****************

DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

Société CAISSE MEDITERRANEENNE DE FINANCEMENT 'CAMEFI' Au capital de 2 423 926,00 € Immatriculée au RCS de MARSEILLE sous le n° 341 840 304

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 341 84 0 3 04

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par : Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 - N° du dossier 20140033

Représentée par : Me Virginie ROSENFELD, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

****************

Maître [K] [N]

Hôtel [1]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par : Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623

Représenté par : Me Philippe KLEIN de la SCP RIBON-KLEIN, Plaidant, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

SCP [N]

N° SIRET : 322 55 6 3 74

Hôtel [1] - [Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par : Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623

Représenté par : Me Philippe KLEIN de la SCP RIBON-KLEIN, Plaidant, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

PARTIES INTERVENANTES

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 Novembre 2014, Monsieur Jean-Baptiste AVEL, Président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Baptiste AVEL, Président,

Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller,

Madame Anne LELIEVRE, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO ;

FAITS ET PROCEDURE,

Suivant acte notarié du 26 septembre 2005 reçu par Maître [N], membre de la SCP [N], la CAISSE MEDITERRANEE DE FINANCEMENT (ci-après CAMEFI) a consenti à Monsieur [M] [Y] et Madame [V] [T], épouse [Y], un prêt d'un montant de 234.540 € destiné à l'acquisition d'un appartement en état futur d'achèvement situé à [Localité 9] (77) lieudit '[Localité 6]', les Jardins de [Localité 9].

Se prévalant de la copie exécutoire de ce prêt, la CAMEFI a fait délivrer le 26 février 2010 aux époux [Y] un commandement de payer valant saisie immobilière portant sur un bien immobilier leur appartenant situé à [Localité 9] (77), lieudit '[Localité 6]', les Jardins de [Localité 9]'.

Le 1er juin 2010, la CAMEFI a assigné les époux [Y] devant le tribunal de grande instance de MEAUX à l'audience d'orientation des saisies immobilières. Le 27 octobre 2011, la CAMEFI a assigné en intervention forcée Maître [N] et la SCP [N]. Par jugement du 9 février 2012, le tribunal de grande instance de MEAUX a notamment :

- déclaré les époux [Y] irrecevables en leur contestation tirée du défaut de pouvoir de la secrétaire qui les a représentés à l'acte notarié de prêt du 26 septembre 2005,

- rejeté la demande des époux [Y] tendant à faire juger que l'acte notarié de prêt ne vaut pas acte authentique exécutoire,

- rejeté la demande des époux [Y] d'annulation du commandement de payer et de mainlevée pour défaut de titre exécutoire,

- débouté les époux [Y] de leur demande tendant à dire que l'acte de prêt ne constate pas une créance liquide,

- rejeté leur demande d'annulation du commandement de payer et de mainlevée pour créance non liquide,

- constaté que la CAMEFI agit sur le fondement d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible,

- constaté que la saisie pratiquée porte sur des droits réels saisissables,

- débouté les époux [Y] de leurs demandes de mainlevée de la saisie sous astreinte et de dommages et intérêts pour saisie abusive,

- mentionné la créance dont le recouvrement est poursuivi par la CAMEFI à l'encontre des époux [Y] à la somme de 241.888,37 € en principal, intérêts, frais et accessoires selon décompte du 19 mai 2009,

- ordonné la vente forcée du bien immobilier appartenant aux époux [Y] situé à [Localité 9] (77), lieudit '[Localité 6]', les Jardins de [Localité 9]'.

Suivant appel interjeté par les époux [Y], par un arrêt rendu le 14 juin 2012, la cour d'appel de Paris a infirmé le jugement entrepris et dit nulle la procédure de saisie immobilière à l'encontre des époux [Y] par la CAMEFI.

La CAMEFI a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cet arrêt.

Vu la déclaration sur saisine de la cour d'appel de VERSAILLES faite par les époux [Y] le 27 décembre 2013 après renvoi devant cette cour par la Cour de cassation, par arrêt du 30 octobre 2013 qui a :

- cassé et annulé dans toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 14 juin 2012 par la cour d'appel de PARIS,

- remis la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt,

- renvoyé les parties devant la cour d'appel de VERSAILLES,

- condamné les époux [Y] aux dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 7 novembre 2014 par lesquelles les époux [Y], appelants, demandent à la cour de renvoi de :

- annuler le commandement de payer litigieux et en ordonner la mainlevée,

à titre subsidiaire,

- confirmer l'arrêt de la cour d'appel de PARIS du 14 juin 2012,

- débouter la CAMEFI de toutes ses demandes,

en tout état de cause,

- condamner la CAMEFI à donner mainlevée sous astreinte de 500 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de huit jours courant à compter de la signification du jugement à rendre,

- condamner la CAMEFI à leur payer les sommes de :

- 10.000 € au titre de l'article 22 de la loi du 9 juillet 1991 ou à défaut de l'article 32 du code de procédure civile,

- 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Me [I] [N] à leur payer les sommes de :

- 10.000 € à titre de dommages et intérêts,

- 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la CAMEFI et Me [I] [N] aux dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 13 novembre 2014 par lesquelles la CAMEFI, intimée, demande à la cour de renvoi de :

- confirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de MEAUX du 9 février 2012,

- débouter les époux [Y] de leur demande de nullité de la saisie immobilière,

- déclarer les époux [Y] irrecevables en leurs demandes nouvelles, prescrits sur l'ensemble des demandes et subsidiairement particulièrement mal fondés,

- condamner les époux [Y] à lui payer la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire commun et opposable aux notaires assignés la décision à intervenir,

- enjoindre Me [N] et la SCP [N] de :

- fournir toutes explications utiles concernant les circonstances dans lesquelles les actes susvisés ont été reçus,

- prendre position sur les griefs formulés contre les actes notariés dans les conclusions notifiées par les époux [Y],

- condamner les époux [Y] ou tout autre succombant aux dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 25 août 2014 par lesquelles me [N] et la SCP [N], intimés, demandent à la cour de renvoi de :

- dire infondés les moyens fondés sur le défaut d'annexion de la procuration ou sur l'absence de qualité de mandataire,

à titre subsidiaire,

- débouter tout prétendant à la perte du caractère exécutoire des actes délivrés en copie aux parties pour défaut d'annexion des procurations à ces copies,

- dire qu'il résulte expressément de l'acte de procuration une faculté de substitution consentie par le mandant qui ne peut arguer des conséquences de cette substitution alors qu'il ne conteste pas avoir reçu l'acte de prêt depuis l'origine,

- dire que les emprunteurs ne rapportent pas la preuve de ce qu'ils ont voulu que l'acte soit reçu par un clerc habilité à la place du notaire et qu'ils ont fait de cette situation une condition substantielle de leur engagement,

- dire que la mention 'A tous clercs de l'étude' s'analyse :

- soit comme une procuration à personne inommée,

- soit en une substitution de mandataire en cas de représentation par une secrétaire de l'étude n'ayant pas la qualité de clerc,

- dire qu'en exécutant le prêt pour lequel ils étaient représentés, les époux [Y] ont ratifié l'acte en application de l'article 1998 alinéa 2 du code civil,

- constater la prescription des critiques contre la validité des actes notariés, notamment relatives à la validité de la procuration ou la qualité du représentant,

- condamner les époux [Y] à lui payer les sommes de :

- 3.000 € à titre de dommages et intérêts,

- 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les époux [Y] aux dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture du 18 novembre 2014 ;

SUR CE, LA COUR :

Considérant que, référence étant faite au jugement entrepris pour l'exposé des faits et de la procédure, il sera rappelé qu'au soutien de leur appel, les époux [Y] exposent qu'ils font partie des centaines de personnes qui ont été 'victimes des agissements frauduleux de la société Apollonia', cette dernière s'étant présentée à eux en qualité de gestionnaire de patrimoine et agent immobilier, qu'une plainte pénale a été déposée devant le tribunal de grande instance de Marseille par les victimes regroupées en association, qui donne lieu à une information judiciaire des chefs d'escroquerie en bande organisée, faux et usage de faux, association de malfaiteurs, abus de confiance, et exercice illégal de la profession d'intermédiaire en banque ;

Qu'ils indiquent que le bien immobilier qu'ils ont acquis à [Localité 10], le 26 septembre 2005 par l'intermédiaire d'un prêt bancaire souscrit auprès de la CAMEFI et suivant procuration donnée à Maître [E], notaire à [Localité 7], le 16 septembre 2004, au profit de Madame [U], secrétaire notariale à l'étude de Maître [N], notaire à [Localité 4], avait une valeur de 234.540 € et une valeur locative mensuelle de 835,56 € ; qu'ils ajoutent que pendant les premières années, ils n'ont pas pu se rendre compte de la supercherie dont ils étaient victimes, alors que de 2004 à 2008, sur procurations demandées par la société Apollonia, quinze actes d'acquisition furent signés par les notaires pour un montant de 2.720.982 € ;

Considérant que les époux [Y] font valoir que la découverte du vice du consentement ne date que de 2009 alors que l'assignation devant le juge de l'exécution date du 1er juin 2010, et que l'exception de nullité est perpétuelle sauf en cas de ratification justifiée de l'acte qui n'est pas établie en l'espèce ;

Qu'ils ajoutent que le juge de l'exécution est compétent pour se prononcer sur la nullité d'un engagement résultant d'un acte notarié exécutoire, sur le fondement de l'article L 216-6 du code de l'organisation judiciaire, que l'article 313 du code de procédure civile n'est pas applicable à l'espèce ;

Qu'ils considèrent que la responsabilité personnelle de Maître [N], qui a été placé en détention provisoire et condamné disciplinairement par la cour d'appel d'[Localité 4], est engagée, que son comportement, qui démontre un manque total d'indépendance à l'égard de la société Apollonia et un manquement au devoir d'information et de conseil à l'égard de ses clients, était en réalité inspiré par la recherche de réalisation d'un nombre toujours plus important d'actes en contrepartie d'honoraires évalués à plusieurs millions d'euros ;

Qu'ils considèrent également qu'à la suite de la procuration donnée le 16 septembre 2004, ils n'ont pas été régulièrement représentés par Madame [U], secrétaire notariale qui n'avait aucune habilitation à recevoir les actes, que leur consentement a été vicié dans l'acte en date du 26 septembre 2005, les dispositions de l'article 1998 alinéa 2 du code civil n'étant pas applicables en l'espèce en l'absence de connaissance du vice par les clients avant qu'ils ne décident d'agir en justice et de toute intention de le réparer, et que la procuration n'ayant pas été signée par les parties est nulle ;

Qu'ils font valoir que la responsabilité de la banque est engagée ; que la CAMEFI s'est associée à l'entreprise frauduleuse, n'a jamais répondu aux demandes de règlement de ses clients, ne pouvait ignorer que les mentions manuscrites des offres de prêt qu'elle recevait n'étaient pas de la main des emprunteurs et ne s'est jamais étonnée que l'ensemble des demandes de prêt qu'elle recevait étaient postés depuis la Côte d'Azur alors que les emprunteurs habitaient ailleurs, eux-mêmes dans la Loire ; qu'ils invoquent la faute dolosive de la CAMEFI sur le fondement de l'article 1116 du code civil, le manquement au devoir d'information, de conseil et de mise en garde de la banque en violation du code monétaire et financier (article L 533-11 à L 533-13), la violation de son devoir de vigilance et de recherches et du contrôle interne prévu par l'article 511-41 du code monétaire et financier et en omettant d'indiquer le montant des commissions versées à son mandataire et non reprises dan le taux effectif global ;

Considérant que la CAMEFI expose que le juge de l'exécution est incompétent face aux moyens de faux argués contre l'acte authentique ou contestant la sincérité de cet acte, que les époux [Y] ne justifient nullement d'une déclaration d'inscription de faux, fut-elle incidente, contre l'acte authentique ou contre la procuration, qu'aucune plainte visant l'acte de prêt du 26 septembre 2005 n'est versée aux débats ;

Qu'elle ajoute que les époux [Y] sont irrecevables en leur contestation, alors qu'ils ne poursuivent pas l'annulation de l'acte de prêt du 26 septembre 2005, qu'ils ne s'inscrivent pas en faux contre l'acte, et que l'exception de nullité n'est pas perpétuelle, et que les moyens qu'ils soulèvent sont dénués de fondement alors qu'ils ne contestent pas avoir poursuivi l'exécution du contrat sans difficultés pendant plusieurs années et qu'elle-même n'a commis aucune faute ;

Qu'elle fait valoir que tant les dispositions légales et réglementaires que la jurisprudence de la Cour de cassation indiquent qu'il n'y a aucune exigence d'annexion de la procuration à la copie exécutoire, que l'absence d'annexion de la procuration à l'acte n'est en toute hypothèse pas sanctionnée par la perte du caractère authentique et exécutoire de l'acte, que la contestation élevée sur la représentation de Madame [U] est sans objet et n'est plus recevable alors que l'action est prescrite par cinq ans, et l'exécution même partielle fait obstacle à toute contestation de ce chef, que subsidiairement, la qualité de clerc de notaire est indifférente dès lors que le mandat a en toute hypothèse expressément autorisé la substitution du mandataire sans désignation d'une personne pour l'exécution du mandat, que le mandat a été ratifié de manière claire et non équivoque par l'exécution du contrat de prêt, et que l'article 1998 autorise précisément le tiers, c'est à dire la CAMEFI à considérer que le mandant est pleinement engagé par les actes passés pour son compte par le mandataire sans avoir à vérifier les pouvoirs du mandataire sur le fondement du mandat apparent ; que les autres demandes des appelants sont des demandes nouvelles qui sont irrecevables ;

Qu'à titre subsidiaire, la CAMEFI fait valoir qu'elle n'a commis de faute ni dans l'octroi de ces encours, ni en raison des fautes commises par la société APOLLONIA qui s'est présentée dans le dossier en qualité de mandataire des époux [Y] ;

Que la CAMEFI soutient enfin qu'elle est légitime à appeler en la cause les notaires rédacteurs d'actes afin que soient fournies toutes explications quant aux circonstances dans lesquelles les actes ont été reçus et qu'ils prennent position sur les irrégularités soulevées ;

Considérant que Maître [N] et la société [N], notaires, au soutien de leur demande tendant à ce que les époux [Y] soient déboutés de leurs demandes, rappellent la jurisprudence récente de la Cour de cassation qui selon eux doit conduire la cour à confirmer le jugement entrepris en raison de la position de la cour suprême tant sur l'absence d'exigence d'annexion des procurations que sur la ratification ;

Qu'ils soulignent la distinction qui doit être faite entre le rôle du notaire qui authentifie et celui du mandataire qui le signe pour le compte de l'emprunteur acquéreur, allèguent que la procuration, même notariée, reste un mandat régi par le droit commun du code civil, que l'acte de procuration constitue un acte distinct et autonome, que la loi n'exige aucune qualité particulière pour la personne du mandataire qui n'a qu'une obligation consistant à respecter son mandat, que le dépôt d'un acte principal auquel il est annexé en brevet respecte les exigences réglementaires et que la remise en cause de l'acte par l'investisseur est prescrite pour n'avoir pas été diligentée dans le délai de cinq ans, et affirment que les actes de prêt et de vente étaient systématiquement adressés aux investisseurs dès qu'ils étaient signés ;

Sur la compétence du juge de l'exécution :

Considérant que selon les dispositions de l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire , le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;

Que selon l'alinéa 3 de cet article, le juge de l'exécution connaît, sous la même réserve, de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s'élèvent à l'occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit ainsi que de la procédure de distribution qui en découle ;

Considérant que la présente action s'analyse en une demande formée par les époux [Y] de mainlevée du commandement de payer valant saisie-immobilière en date du 26 février 2010 ;

Qu'ainsi que l'ont rappelé les premiers juges, le juge de l'exécution est compétent pour apprécier la régularité formelle de l'acte ainsi que son caractère exécutoire sans qu'il ne puisse être utilement reproché aux époux [Y] de ne pas justifier d'une déclaration d'inscription de faux au sens des dispositions des articles 306 et suivants du code de procédure civile ;

Sur l'existence d'un titre exécutoire :

Considérant que tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière ; que les actes notariés revêtus de la formule exécutoire constituent des titres exécutoires ;

Mais considérant que la CAMEFI se fonde sur la copie exécutoire d'un acte notarié reçu par Maître [N], notaire associé à [Localité 4], en date du 26 septembre 2005, contenant un prêt immobilier octroyé aux époux [Y] qui contestent leur représentation à l'acte par Madame [U] ;

Qu'il est expressément admis par les intimés aux termes de leurs écritures que, selon acte en date du 16 septembre 2004, les époux [Y] avaient donné procuration devant Maître [E], notaire à [Localité 7], en précisant donner mandat 'à tous clercs de notaire de l'étude de Maître [N] [K], notaire à [Localité 4] [Localité 5] pouvant agir ensemble ou séparément' ;

Que, contrairement à ce qu'affirme la CAMEFI, les mandataires ont reçu pouvoir de substituer le mandant mais pas celui de se faire substituer par toute personne non désignée ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que Madame [U], désignée à l'acte de prêt comme mandataire, était secrétaire notariale et à ce titre occupait des fonctions purement administratives ne nécessitant pas de connaissances juridiques spécifiques comme celles que possèdent les notaires, ou les clercs de notaire en raison de leur qualité de collaborateurs de l'étude accomplissant des tâches juridiques avec une formation et une qualification adaptées ;

Que la CAMEFI n'établit pas que les termes du mandat litigieux signifient que les époux [Y] aient entendu autoriser les clercs de l'étude notariale à se substituer une secrétaire notariale dans la passation des actes ; que Madame [U], en sa qualité de secrétaire notariale de l'étude [N], était dépourvue de tout pouvoir pour passer ces actes ; que, contrairement à ce qui est allégué par les intimés, l'emprunteur n'était pas valablement représenté à l'acte litigieux ;

Considérant qu'il convient de rechercher si les époux [Y], dont il n'est pas contesté qu'ils ont réglé plusieurs mensualités de remboursement du prêt, n'ont pas ainsi ratifié le mandat litigieux du fait de l'exécution, fut-elle partielle, du contrat de prêt ;

Que la ratification requiert la volonté claire et non équivoque des emprunteurs de ratifier le mandat en dépit du manque de pouvoir de Madame [U], ce qui suppose, au moment de l'exécution de l'acte, leur connaissance du défaut de pouvoir ou de capacité de la personne qui les représentait ;

Que la preuve n'est pas rapportée que les époux [Y] aient su, lors des actes d'exécution de leurs propres obligations d'emprunteur, qu'ils étaient représentés à l'acte par une secrétaire notariale, et qu'ils aient délibérément souhaité valider cette irrégularité ; que dès lors, nonobstant les premiers remboursements intervenus, la volonté des emprunteurs de ratifier n'est pas établie ;

Qu'en effet, la disposition des fonds par l'emprunteur ainsi que le remboursement de mensualités ne suffisent pas à établir la preuve que l'emprunteur ait eu connaissance du vice

allégué ; qu'il ne résulte d'aucun élément du dossier que les époux [Y] aient connu le vice et voulu le réparer antérieurement à l'instruction qui a été ouverte à partir de l'année 2008 et qui a abouti à la mise en examen de la société APOLLONIA en février 2009, pour des faits d'escroquerie en bande organisée, abus de confiance, faux et usage de faux et exercice illégal de la profession d'intermédiaire en opération de banque et à la mise en examen des notaires à partir de l'année 2010, et enfin à la mise en examen de la société CAMEFI en juillet 2012 ; qu'en outre, il convient de relever qu'il s'agissait de ventes en état futur d'achèvement et de remboursements échelonnés dans le temps ; qu'il est établi que les époux [Y] ont déposé une plainte pénale à l'encontre de la société CAMEFI à la fin de l'année 2009 et ont engagé à la même époque une action en responsabilité civile devant le tribunal de grande instance de Marseille ; que les emprunteurs n'ont jamais exprimé leur intention de réparer le vice affectant l'acte litigieux ni de renoncer aux moyens et exceptions pouvant être opposés à cet acte ;

Considérant que la CAMEFI ne peut, au soutien de sa demande de validation du commandement de payer valant saisie immobilière, prétendre utilement, sur le fondement des dispositions de l'article 1998 du code civil, que l'emprunteur s'est trouvé pleinement engagé par les actes passés pour son compte par le mandataire sans avoir à vérifier les pouvoirs de ce dernier ; qu'en l'espèce, en sa qualité de professionnel spécialisé dans le domaine des prêts immobiliers, la CAMEFI se devait, compte tenu de l'importance du concours financier consenti à un particulier, s'agissant d'un prêt d'un montant de 234 540 €, de la circonstance que les époux [Y] n'étaient pas présents à l'acte, de la mention selon laquelle procuration avait été donnée à une secrétaire notariale, de la multiplicité des actes, et du caractère systématique du recours à la procuration, de vérifier si le mandataire agissait en vertu d'un mandat qui lui avait été régulièrement donné par le mandant ; que la CAMEFI, qui n'a pas vérifié la nature et l'étendue des pouvoirs donnés par les époux [Y], ne peut prétendre que l'emprunteur soit engagé sur le fondement du mandat apparent ;

Considérant que l'exception de nullité n'est pas prescrite ; qu'en effet, si la procuration a été signée le 16 septembre 2004 et l'acte de prêt conclu le 26 septembre 2005, il n'est pas établi que les époux [Y] aient découvert l'irrégularité de l'acte avant l'année 2009 au cours de laquelle la CAMEFI a inscrit une hypothèque judiciaire provisoire sur leurs biens avant qu'ils ne déposent eux-mêmes une plainte pénale et n'introduisent une action en responsabilité devant le tribunal de grande instance de Marseille le 30 septembre 2009 ;

Qu'en outre, la nullité invoquée par voie d'exception est perpétuelle sauf en cas de ratification justifiée de l'acte qui n'est pas établie en l'espèce ;

Qu'en l'absence de preuve suffisante qu'ils aient entendu ratifier l'acte litigieux, les époux [Y] sont fondés à invoquer l'irrégularité de l'acte de prêt en tant que titre exécutoire en raison du défaut de pouvoir du mandataire ; que celui-ci ne saurait donc servir de fondement au commandement de payer valant saisie-immobilière critiqué ;

Que la décision déférée à la cour sera en conséquence infirmée en ce qu'elle a débouté les époux [Y] de leur demande d'annulation du commandement de payer et de mainlevée ;

Que la demande de la CAMEFI visant à ce qu'il soit fait sommation aux notaires d'avoir à fournir toutes explications sur la validité des titres qu'ils ont reçus, de prendre position sur les griefs et de produire tout élément utile pour apprécier la validité des actes en cause est sans objet au vu des explications et éléments fournis par Maître [N] et la société notariale, et ne sera pas accueillie ;

Que le commandement de payer en date du 26 février 2010 sera déclaré nul et sa mainlevée sera ordonnée, sans qu'il n'y ait lieu de prévoir à cette fin une astreinte ;

Qu'il ne sera pas fait droit aux demandes de dommages-intérêts formées par les époux [Y] à l'encontre de Maître [N] et de la CAMEFI, les appelants ne démontrant pas l'existence d'un préjudice non réparé par la présente décision ;

Qu'eu égard au contenu de la présente décision infirmative du jugement déféré à la cour, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de dommages-intérêts formulée par Maître [N] et la société civile professionnelle de notaires ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes qui s'analysent en réalité en moyens venant au soutien des prétentions des parties ;

Qu'il convient de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner les intimés, in solidum, à verser aux époux [Y] la somme de 5.000 € au titre de leurs frais irrépétibles de procédure de première instance et d'appel ;

Que les dépens de première instance et d'appel seront supportés par les parties qui succombent conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Statuant contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Prononce l'annulation et ordonne la mainlevée du commandement de payer en date du 26 février 2010,

Rejette le surplus des demandes,

Condamne in solidum la CAMEFI, d'une part, et Maître [N] et la société [N], d'autre part, à verser aux époux [Y] la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la CAMEFI, d'une part, et Maître [N] et la société [N], d'autre part, aux entiers dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Baptiste AVEL, Président et par Madame RUIZ DE CONEJO, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 16e chambre
Numéro d'arrêt : 14/00050
Date de la décision : 22/01/2015

Références :

Cour d'appel de Versailles 16, arrêt n°14/00050 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-01-22;14.00050 ?
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