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18/12/2014 | FRANCE | N°12/06341

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 18 décembre 2014, 12/06341


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 58E



3e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 18 DECEMBRE 2014



R.G. N° 12/06341







AFFAIRE :







SCI DAMI



C/



Compagnie d'assurances LE GAN









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Août 2012 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 6

N° RG : 10/02703





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Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Claire RICARD

Me Anne laure DUMEAU





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX HUIT DECEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire e...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 58E

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 18 DECEMBRE 2014

R.G. N° 12/06341

AFFAIRE :

SCI DAMI

C/

Compagnie d'assurances LE GAN

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Août 2012 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 6

N° RG : 10/02703

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Claire RICARD

Me Anne laure DUMEAU

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX HUIT DECEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SCI DAMI

N° SIRET : D411 240 674

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Claire RICARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 - N° du dossier 2012424

Représentant : Me Vanessa COHEN LAMY, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1893

APPELANTE

****************

Compagnie d'assurances LE GAN

[Adresse 2]

[Localité 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Anne laure DUMEAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 - N° du dossier 40323

Représentant : Me Jacques HUILLIER de l'AARPI LEFEBVRE & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1226

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 Novembre 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Annick DE MARTEL, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Véronique BOISSELET, Président,

Madame Annick DE MARTEL, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Lise BESSON,

La société DAMI est appelante d'un jugement rendu le 31 août 2012 par le tribunal de grande instance de Nanterre dans un litige l'opposant à la compagnie d'assurance GAN.

*

Le 21 janvier 2008, la société DAMI, propriétaire d'un immeuble à usage de bureaux situé à [Localité 2], a subi un dégât des eaux causé par une infiltration provenant d'une toiture terrasse.

Elle a déclaré ce sinistre à son assureur, GAN ASSURANCES IARD, avec lequel elle a souscrit une police "multirisque immeuble".

Dans le cadre d'une expertise amiable, le cabinet POLYEXPERT, mandaté par le GAN, et le cabinet OUDINEX, mandaté par la société DAMI, ont procédé à des constats divergents, notamment quant à l'évaluation des dommages.

Par ordonnance du 24 novembre 2008, un expert judiciaire a été désigné aux fins de procéder à cette évaluation. M. [T] a déposé son rapport le 19 juin 2009.

La société DAMI a commencé les travaux de remise en état mais a dû faire délivrer à la compagnie GAN une assignation en référé provision, à la suite de laquelle le GAN a procédé à trois versements pour un total de 76.327,11 €.

*

La SCI DAMI a fait assigner le GAN ASSURANCES IARD aux fins d'obtenir sa garantie au titre de la perte de loyers et des honoraires d'expert. Le GAN lui oppose un défaut d'entretien.

Par jugement du 31 août 2012, le tribunal a débouté la SCI DAMI de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné la société DAMI à restituer à la société GAN ASSURANCES IARD la somme de 61.327 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

- débouté le GAN ASSURANCES IARD de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Les premiers juges ont considéré que, au vu du rapport d'expertise, la cause principale du sinistre réside dans un défaut d'entretien caractérisé de la terrasse, permanent et connu de la société DAMI. La cause d'exclusion de garantie opposée par le GAN était donc applicable. La société DAMI doit donc restituer la somme qu'elle a perçue par provision.

La société DAMI a fait appel de cette décision.

*

Dans ses dernières conclusions visées le 6 octobre 2014, la société DAMI demande à la Cour d'infirmer la décision ;

- débouter la compagnie GAN de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner le GAN :

* à garantir les dommages à l'aménagement, contractuellement dus selon la police n° 051313365 conformément à l'avis et à l'évaluation du tiers expert, par versement entre ses mains de la somme de 155.889 € ;

* à garantir la perte de loyer contractuellement due selon la police n° 051313365 et l'intercalaire conformément à la valeur locative chiffrée par le tiers expert mais sur toute la surface du bâtiment, par versement entre ses mains la somme de 1.117.216 €';

- A titre subsidiaire':

- condamner le GAN :

* à garantir la perte de loyer contractuellement due selon la police n° 051313365 et l'intercalaire conformément à la valeur locative chiffrée par le tiers expert mais sur la totalité des deux étages sinistrés, par versement entre ses mains la somme de 617.356 €';

- En tout état de cause,

- condamner le GAN à garantir les honoraires d'expert contractuellement dus selon la police n° 051313365 conformément à l'avis et l'évaluation du tiers expert par versement entre les mains à l'assuré, la société DAMI la somme de 38.594 €';

- au paiement d'une somme de 3.000 € pour résistance abusive et 10.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions visées le 21 octobre 2014, le GAN demande à la Cour de constater que la société DAMI a reconnu un défaut d'entretien caractérisé en contravention avec la norme française NF 84-204-1 annexe III du 5 juillet 1994 ; cette contravention à la norme française est constitutive d'un défaut d'entretien caractérisé ; elle est exclusive de la garantie GAN ;

- Au surplus'le GAN fait valoir :

- que préalablement à l'aveu de ce défaut d'entretien, la société DAMI l'a volontairement dissimulé dans le cadre des opérations d'expertise amiable';

- que la société DAMI a volontairement aggravé son propre préjudice en ne prenant aucune mesure, se reposant sur son indemnisation ;

- que ces fautes impliquent déchéance de garantie ;

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

- débouter la société DAMI de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la société DAMI à lui rembourser la somme de 65.070,50 € indûment versée, outre les intérêts au taux légal à compter du 17 juin 2009 pour la somme de 57.456 € et du 15 juillet 2009 pour celle de 3.871,11 €';

- condamner la société DAMI à lui verser la somme de 20.000 € pour procédure malicieuse ;

- Très subsidiairement :

- constater les règlements d'ores et déjà effectués par elle et les déduire de la condamnation à intervenir ;

- réduire à la somme de 120.000 € le montant des condamnations';

- dire et juger qu'elle ne saurait être tenue que dans les limites contractuelles de sa garantie.

Elle soutient que les dispositions de l'article L 113-1 du code des assurances sur la prise en charge par l'assureur des pertes et dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré ne sont pas applicables en l'espèce car le défaut d'entretien des toits-terrasses répond à des critères précis fixés par la loi du 5 juin 1994. Le défaut d'entretien étant caractérisé par le non respect des normes exigées par la loi, celle-ci est applicable à la situation en cause.

- la société DAMI n'a pas révélé la cause véritable du sinistre ; elle tente frauduleusement de faire supporter à son assureur un sinistre dont elle savait être responsable.

- les préjudices allégués ne sont pas caractérisés.

La cour renvoie aux conclusions signifiées par les parties, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile.

MOTIFS

- Sur le défaut d'entretien et la garantie du GAN

Il est constant que le 21 janvier 2008, les locaux de l'immeuble appartenant à la SCI DAMI ont subi un dégât des eaux consécutif à de fortes précipitations soutenues par des vents forts, ce qui n'est pas contesté par le GAN à qui le sinistre a été déclaré. Au demeurant, la seule constatation des retenues d'eau importantes sur la terrasse telles qu'elles résultent des clichés photographiques, prouve qu'il y a eu de fortes pluies et des vents violents.

Il s'agit bien d'un dégât des eaux ainsi d'ailleurs que le qualifie l'expert judiciaire, M. [T].

Le cabinet OUDINEX expert mandaté par la SCI DAMI, a considéré que la cause de ce sinistre tenait à 'l'accumulation d'eau sur la terrasse en raison de l'engorgement et de l'obstruction de la grille de descente d'eau pluviale par divers éléments se trouvant sur le toit (morceaux de sacs de nylon, os d'oiseaux, feuilles et autres...)'.

Les mêmes constatations ont été faites par le cabinet POLYEXPERT mandaté par le GAN qui fonde sur ces éléments son refus de garantie en raison, selon l'assureur, d'un défaut d'entretien qui constitue une cause d'exclusion de garantie selon l'article 12 de la police.

Si les experts ont noté que la grille de descente d'eau pluviale était obstruée par divers éléments se trouvant sur le toit (un sac en plastique, deux os de poulet, des feuilles d'arbres) la présence de ces éléments n'établit pas nécessairement le défaut d'entretien dont on sait qu'en matière d'assurance, il doit être défini de manière précise, pour constituer une clause d'exclusion de garantie.

En effet, il n'est pas contesté que la terrasse ne comporte pas d'arbre et encore moins de poulailler ; que pourtant on y trouve des éléments qui ne proviennent pas de la terrasse mais qui ont pu tout simplement être transportés par le vent violent de la nuit ; il en est ainsi pour le moins du sac en plastique et des feuilles qui ont joué un rôle important dans l'engorgement de la grille d'évacuation, l'os de poulet n'ayant joué qu'un rôle anecdotique puisqu'il ne pouvait boucher la grille à côté de laquelle il a été trouvé. La présence d'un sac en plastique comme de feuilles d'arbre apparaissent comme étant la conséquence normale des rafales de vent de la nuit et non celle d'un défaut d'entretien.

La SCI DAMI invoque les critères retenus par la Cour de Cassation : seule l'infiltration progressive, visible et prévisible peut être sanctionnée par une exclusion de garantie pour défaut d'entretien ce qui n'est nullement le cas, l'engorgement provenant d'un phénomène brutal et ponctuel et la SCI DAMI ne pouvant savoir ce que le vent allait entraîner sur la terrasse.

Ainsi, le GAN ASSURANCES IARD ne démontre pas un 'défaut d'entretien caractérisé', qui ne résulte pas des faits ; cette expression étant au demeurant trop vague pour servir de fondement à une exclusion de garantie.

Le GAN invoque à cet égard la norme française du 5 juin 1994 comme caractérisant sans contestation possible le défaut d'entretien et la dispensant d'établir l'exclusion de garantie.

Cependant rien ne permet de penser que l'entretien de la terrasse n'est pas fait régulièrement, une personne étant affectée à cette tâche par la SCI DAMI.

De plus, l'article 11 de la police garantit par exemple les infiltrations par les joints d'étanchéité -qui pourraient relever d'un défaut d'entretien- ce qui démontre bien que le respect strict des normes n'est pas une condition de la garantie.

Enfin, le GAN ne peut prétendre sérieusement que son assuré se comportant de manière frauduleuse, doit être déchu de son droit à indemnisation. La dissimulation frauduleuse qui lui est imputée n'est pas établie puisque la cause déterminante du dommage est la mise en charge de la toiture et non la dégradation d'une partie du toit.

Le GAN ASSURANCES IARD doit donc garantie à son assurée.

- Sur les dommages

An vu des conclusions de l'expert judiciaire, M. [T], qui a formulé sur ce point des avis justifiés, il convient de dire qu'en raison d'un projet de bail produit par la SCI, la garantie 'pertes de loyers' s'applique. Elle ne peut cependant concerner que les deux étages endommagés.

Le GAN fait valoir qu'il ne garantit que les loyers 'dont le locataire se trouve légalement privé' ; si bien qu'en n'effectuant pas les réparations nécessaires, la SCI DAMI s'est elle-même privée des revenus locatifs. Cependant, il résulte du dossier et plus particulièrement de l'expertise que la perte de loyers est due largement à la résistance de la compagnie d'assurance.

Il convient ainsi, retenant les conclusions justifiées de l'expert, M. [T], de fixer :

- à la somme de 232.217 € l'indemnité immédiate due à la SCI DAMI selon le calcul opéré (p.9) par l'expert ;

- et d'évaluer à 35.405 € l'indemnité différée correspondant à la valeur à neuf.

Le GAN sera condamné à payer à la SCI DAMI la somme totale de 267.622 €.

- Sur les dommages-intérêts

L'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et il ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol. Tel n'est pas le cas du GAN, si bien que la SCI DAMI sera déboutée de sa demande de condamnation au paiement d'une somme de 3.000 €.

- Sur les frais irrépétibles

Il est inéquitable de laisser à la charge de la SCI DAMI les frais non compris dans les dépens de l'instance. Le GAN sera condamné à lui payer la somme de 8.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant en audience publique, par décision contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nanterre le 31 août 2012 en toutes ses dispositions,

Et, statuant à nouveau,

Dit que ni le défaut d'entretien ni la fraude de l'assuré ne sont établis,

Dit que le GAN ASSURANCES IARD doit garantir son assuré des conséquences du dégât des eaux survenu le 21 janvier 2008,

Condamne le GAN ASSURANCES IARD à payer à la SCI DAMI la somme de 267.622 € sous déduction des provisions qui ont pu être versées en avance sur cette indemnisation,

Y ajoutant,

Condamne le GAN ASSURANCES IARD à payer à la SCI DAMI la somme de 8.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais d'appel,

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,

Condamne le GAN ASSURANCES IARD aux dépens de première instance et d'appel et autorise leur recouvrement dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 12/06341
Date de la décision : 18/12/2014

Références :

Cour d'appel de Versailles 03, arrêt n°12/06341 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-12-18;12.06341 ?
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