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03/12/2014 | FRANCE | N°13/02513

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 03 décembre 2014, 13/02513


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES







17e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 03 DECEMBRE 2014



R.G. N° 13/02513



AFFAIRE :



[X] [Z]





C/

SA SOGERES









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Mai 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Commerce

N° RG : F 11/00723





Copies exécutoires délivrées à :



Me

Simon OVADIA

Me Fabrice ANDRE





Copies certifiées conformes délivrées à :



[X] [Z]



SA SOGERES







le : 04 décembre 2014

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE TROIS DECEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

17e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 03 DECEMBRE 2014

R.G. N° 13/02513

AFFAIRE :

[X] [Z]

C/

SA SOGERES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Mai 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Commerce

N° RG : F 11/00723

Copies exécutoires délivrées à :

Me Simon OVADIA

Me Fabrice ANDRE

Copies certifiées conformes délivrées à :

[X] [Z]

SA SOGERES

le : 04 décembre 2014

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TROIS DECEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [X] [Z]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparante en personne, assistée de Me Simon OVADIA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1007

APPELANTE

****************

SA SOGERES

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Fabrice ANDRE, avocat au barreau de PARIS,

vestiaire : C2585

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Octobre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Juliette LANÇON, Vice-président placé chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Martine FOREST-HORNECKER, Président,

Madame Clotilde MAUGENDRE, Conseiller,

Madame Juliette LANÇON, Vice-président placé,

Greffier, lors des débats : Madame Christine LECLERC,

Par jugement du 31 mai 2013, le conseil de prud'hommes de Nanterre (section commerce) a :

- fixé la rémunération brute mensuelle de Madame [Z] à 1 399,49 euros,

- requalifié le licenciement pour faute grave de Madame [Z] en un licenciement pour cause réelle et sérieuse,

- condamné la société SOGERES à verser à Madame [Z] les sommes suivantes :

. 1 002,32 euros à titre de rappel de salaire du 14 septembre 2010 au 6 octobre 2010 (mise à pied conservatoire),

. 100,23 euros à titre de congés payés y afférents,

. 1 049,60 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

. 2 798,98 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 279,89 euros à titre de congés payés y afférents,

. 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Madame [Z] du surplus de ses demandes,

- rappelé que ces sommes porteront intérêt au taux légal au jour de la saisine pour les salaires et le jour du prononcé pour les dommages et intérêts,

- constaté que l'exécution est de droit à titre provisoire sur les créances salariales selon l'article R.1454-28 du code du travail,

- débouté la société SOGERES de sa demande reconventionnelle,

- condamné la société SOGERES aux entiers dépens.

Par déclaration d'appel adressée au greffe le 13 juin 2013 et les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, Madame [Z] demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu le 31 mai 2013 par le Conseil de Prud'hommes de Nanterre en ce qu'il a disposé que la faute grave de Mme [Z] n'était pas établie, ainsi que les condamnations pécuniaires en conséquence, corrigées dans leur montant ci-après,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse,

statuant à nouveau, à titre principal,

- déclarer nul le licenciement prononcé à son encontre le 4 octobre 2010,

à titre subsidiaire,

- le dire sans cause réelle et sérieuse,

en conséquence,

- condamner, sous déduction de la somme de 4 302,50 € réglée en exécution des condamnations prononcées en première instance, la société SOGERES à lui payer les sommes suivantes :

. 37 078 euros à titre de dommages et intérêts,

. 3 089,98 euros au titre du préavis,

. 308,99 euros au titre du congé sur préavis,

. 1 107,25 euros bruts au titre de la rémunération de la période de mise à pied,

. 110,72 euros au titre du congé sur la période de mise à pied,

. 1 107,25 euros au titre de l'indemnité de licenciement conventionnelle,

. 2 000 euros au titre de son droit individuel à la formation,

outre les intérêts au taux légal à compter de la demande,

- condamner la société SOGERES à lui payer la somme de 4 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance,

- condamner la société SOGERES à lui payer la somme de 2 400 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

- condamner la société SOGERES aux entiers dépens.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, la société SOGERES demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 31 mai 2013 par le conseil de prud'hommes de Nanterre en ce qu'il a requalifié le licenciement pour faute grave de Madame [Z] en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

- ordonner en conséquence le remboursement par Madame [Z] des sommes versées au titre de l'exécution provisoire,

- subsidiairement, confirmer le jugement frappé d'appel,

- débouter purement et simplement Madame [Z] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Madame [Z] à payer à la société SOGERES la somme de 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Madame [Z] aux entiers dépens.

LA COUR,

qui se réfère pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, à leurs écritures et à la décision déférée,

Considérant que suivant contrat à durée indéterminée, Madame [X] [Z] a été engagée par la société ASCOGER, aux droits de laquelle vient la société SOGERES, en qualité d'employée de restauration niveau IA à compter du 1er mars 2007, moyennant un salaire brut mensuel initial de 1.221,30 euros ;

Qu'il n'est pas contesté que sa dernière rémunération brute mensuelle était fixée à 1 338 euros ;

Qu'elle était affectée sur le site de l'Oréal au centre [1] et que son supérieur hiérarchique, chef de restaurant était Monsieur [T] [R] ;

Que les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective du personnel des entreprises de restauration de collectivités ;

Que Madame [X] [Z] a fait l'objet d'une mise en garde le 6 juillet 2009 au motif qu'elle aurait quitté son poste de travail à 14 heures 50, alors que ses horaires de travail étaient de 7h30 à 15h ;

Qu'elle a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 29 juillet 2009 puis reporté au 14 septembre car elle était en congés payés ; que la teneur de cet entretien et ses conséquences ne sont pas connues ;

Que par courrier du 12 novembre 2009, elle a fait l'objet d'une nouvelle mise en garde pour une non transmission de ses arrêts de travail originaux dans les 48 heures suivant son absence ;

Qu'elle a fait l'objet d'un premier avertissement le 24 novembre 2009, pour un retard d'embauche de 15 minutes ; puis d'un deuxième, le 10 mars 2010, pour avoir hurlé le 4 mars 2010 sur Monsieur [T] [R], en lui disant 'je n'ai pas de chef et mon seul chef c'est Dieu' ;

Que le 24 mars 2010, elle a été convoquée à un entretien prélable au licenciement fixé au 1er avril 2010 ;

Qu'un nouvel avertissement lui a été notifié le 13 avril 2010 pour des faits de dénigrement de l'entreprise, pour s'être plainte auprès du client l'Oréal de ce que son employeur mettait tout en oeuvre pour la licencier ;

Que par lettre du 30 août 2010, Madame [X] [Z] a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement fixé au 21 septembre 2010 et par lettre du 4 octobre 2010, elle a été licenciée pour faute grave.

Que la lettre de licenciement était libellée en ces termes :

Madame,

Nous faisons suite à notre entretien du 21 septembre 2010 au cours duquel nous vous avons fait part des faits qui me conduisent à vous notifier votre licenciement pour faute grave.

En effet, il apparaît que vous avez eu à l'égard de votre collègue, Monsieur [U] une attitude extrêmement déplacée notamment durant la semaine du 21 juillet 2010 (semaine d'absence des gérants) où vous avez profité d'être en face de lui pour placer votre pied entre les jambes de ce dernier ce qui l'a conduit à quitter précipitamment sa place afin d'échapper à votre attitude particulièrement stressante pour ce salarié.

De même, que vous avez profité notamment à partir du 11 août 2010 de la proximité existante, durant la préparation des entrées, à ce même collègue pour lui toucher le sexe et de vous frotter à lui le mettant dans une situation extrêmement embarrassante.

Votre comportement, de par sa multiplicité et des conséquences malsaines qu'il engendre sur le comportement et l'état d'esprit de votre collègue est inacceptable et relève de la faute grave.

Votre licenciement pour faute grave, empêchant votre maintien dans l'entreprise pour la durée de votre préavis, ne vous sera pas rémunéré de même que la mise à pied qui a pris effet le 20 septembre 2010.

Votre licenciement prendra effet à réception de la présente ou de sa première présentation, et nous vous adresserons par courrier, à votre domicile, votre solde de tout compte ainsi que votre certificat de travail (...). ;

Considérant, sur le licenciement de Madame [X] [Z], que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que la charge de la preuve incombe à l'employeur qui l'invoque ;

Que la société SOGERES verse aux débats trois attestations relatant les faits que Madame [X] [Z] aurait commis dans le courant du mois d'août 2010 :

- une de Monsieur [A] [U] qui indique que pendant la semaine du 21 juillet au 28 juillet Madame [X] [Z] à l'heure du déjeuner de 11 h à 11h30 s'est assise en face de moi et m'a touché le sexe avec son pied devant mes collègues. Cela m'a énervé et choqué, je voulais rentrer chez moi. Le 11 août au début du ramadan elle a commencé à me toucher le sexe avec sa main ce jour là je travaillais à la légumerie cela m'a énervé toute la journée et souvent elle s'est mise à côté de moi pour lacher des gazs, j'ai essayé de l'ignorer pour qu'elle me laisse tranquille ;

- une de Madame [C] [K] épouse [V] et une de Monsieur [S] [E] qui décrivent les mêmes faits en inversant les dates ;

Que, nonobstant cette inversion des dates, les faits décrits sont précis et situés dans le temps ;

Que Madame [X] [Z] argue du fait qu'elle a demandé une confrontation avec Monsieur [U] qui était parti en congés pour deux mois et que son employeur n'a pas diligenté d'enquête concernant ces faits, préférant la licencier ;

Que le compte-rendu du CHSCT de la fin du mois de septembre 2010 mentionne qu'ayant appris les faits reprochés à Madame [X] [Z], deux des membres du CHSCTont demandé une enquête mais que la société n'y a pas répondu ;

Que, néanmoins, les faits décrits par Monsieur [U] étaient récents et corroborés par deux témoins ; que dans ces conditions, une enquête ne se justifiait pas ; que les faits commis par Madame [X] [Z] sont constitutifs d'une faute grave rendant impossible la poursuite du contrat de travail ; que le licenciement de Madame [X] [Z] est donc justifié ; que le jugement entrepris sera infirmé ;

Considérant, sur la nullité du licenciement sollicitée par Madame [X] [Z] suite aux faits de harcèlement sexuel et moral dont elle aurait été victime et sa demande de dommages intérêts, que l'article L. 1152-1 du code du travail alors en vigueur prévoyait qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits ou à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;

Que l'article L. 1152-2 disposait qu'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés ;

Que l'article L. 1153-1 disposait que les agissements de harcèlement de toute personne dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d'un tiers sont interdits ;

Que l'article L. 1153-2 du même code prévoyait qu'aucun salarié, aucun candidat à un recrutement, à un stage ou à une période de formation en entreprise ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements de harcèlement sexuel ;

Que lorsque survient un litige relatif à l'application de ce texte, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Que Madame [X] [Z] a dénoncé des faits de harcèlement sexuel lors de son entretien du 1er avril 2010, pour un fait qui serait survenu en décembre 2007 ;

Qu'elle a réitéré ses propos dans un courrier du 8 avril 2010 où elle indique que :

Ce jour-là il y avait une panne en caisse, [C] la chef de groupe tenait la caisse de absence de congé payé de [H]. Je me suis proposé pour relever les plateaux des clients par le badge sur un cahier, et soudainement, j'ai ressenti les mains du chef gérant [T] sur mes deux épaules et j'ai ressenti l'attouchement de son sexe dans mon derrière, sur le coup, j'ai été choqué, je me suis confiée à mon collègue, [D] [W] à ce moment sur le site. La semaine suivant cet incident nous avons eu une réunion avec [I], j'ai évoqué cet incident, en présence de [I], [D], Mr [R] et moi-même. [I] m'a demandé, si je porte plainte, contre Mr [R], s'étant excusé, j'ai préféré avoir du coeur au lieu de suivre ce conseil ;

Que Madame [X] [Z] verse aux débats :

- une attestation de Monsieur [Q] [P] qui indique que [T] [R] a reconnu lors d'une réunion de travail en janvier 2008 en présence de [D] [L] et [X] [Z], [T] [R] et lui-même s'être frotté à Madame [X] [Z] lorsque celle-ci se tenait derrière la caisse du restaurant du centre [1] mais qu'il n'y avait aucune perversité de sa part ;

- une attestation de Monsieur [B] [F], délégué syndical et membre du CHSCT de la société SOGERES, qui a assisté cette dernière lors de son entretien le 1er avril 2010 et qui confirme la dénonciation des faits qu'elle a faite ;

Qu'une enquête du CHSCT a été diligentée par la société SOGERES dès le mois de mai 2010 sur les différents faits dénoncés par Madame [X] [Z] ;

Que les conclusions de cette enquête n'ont été connues qu'en septembre 2010, soit postérieurement au licenciement de Madame [X] [Z] ;

Qu'il ressort de cette enquête que, sur la plainte d'attouchement, les faits se seraient produits en décembre 2008 et non 2007, Monsieur [T] [R] n'étant arrivé sur le site de l'Oréal Zviask qu'en septembre 2008 ; que Monsieur [T] [R] aurait dit aux membres du CHSCT 'mot pour mot' : peut-être que j'ai bousculé Madame [X] [Z] et qu'en la tenant par l'épaule mon sexe l'aurait frôlé, en ajoutant il est bien possible qu'elle m'ait fait la réflexion et que je me sois excusé ;

Considérant que le harcèlement suppose la répétition des agissements ; que Madame [X] [Z] n'établit qu'un fait à caractère sexuel ; que le fait dénoncé ne s'est jamais reproduit et que Madame [X] [Z] a continué à travailler avec Monsieur [T] [R] ; que le fait ainsi établi ne permet pas de présumer l'existence d'agissements répétés de harcèlement sexuel ; que le jugement entrepris sera infirmé ;

Que, concernant le harcèlement moral, Madame [X] [Z] a contesté les différents mises en gardes et avertissements dont elle avait fait l'objet dans différents courriers qu'elle a adressés à son employeur ; qu'elle précise que l'accumulation de mesures pré-disciplinaires ou disciplinaires sur la dernière année de collaboration portant sur des faits anodins et infondés est un des éléments du harcèlement moral invoqué ;

Que s'appuyant sur l'enquête du CHSCT précitée, elle indique que :

- la mise en garde du 6 juillet 2009 est infondée, puisqu'il lui est reproché d'être partie 10 minutes en avance ; qu'elle travaillait de 7h30 à 15 heures, comprenant les temps d'habillage et de déshabillage ; qu'elle devait donc quitter son poste un peu avant 15 heures pour se déshabiller avant de quitter le restaurant ; que le CHSCT ajoute que l'entreprise contrairement à l'obligation qui lui est faite de mettre en place un pointage ou un document pouvant justifier des horaires de travail des salariés n'a rien mis en place ;

- sur l'avertissement du 10 mars 2010 où il lui est reproché d'avoir mal parlé à Monsieur [T] [R], cette dernière a écrit deux courriers, l'un à Monsieur [M] et l'autre à Madame [J], la directrice des ressources humaines pour demander un rendez-vous pour donner sa version des faits ; qu'aucune de ces deux personnes n'a donné de suite à ces courriers ; qu'elle a expliqué au CHSCT qu'elle avait répondu à Monsieur [T] [R] parce que ce dernier lui aurait proféré des grossièretés, sans préciser lesquelles et l'aurait insultée, en ajoutant qu'il était son chef ;

- sur l'avertissement du 13 avril 2010 où il lui est reproché d'avoir dénigré son entreprise, aucune date des faits n'est mentionnée et aucun écrit du client n'est produit ; qu'elle dément formellement avoir eu cette attitude ;

Que Madame [X] [Z] a également dénoncé des propos racistes et grossiers que Monsieur [T] [R] aurait tenu à l'égard d'autres collègues et à son égard, sans préciser lesquels et à quel moment il aurait pu avoir été tenus ;

Qu'elle ajoute qu'elle a demandé une mutation et que son employeur n'a pas donné suite à cette demande, préférant la licencier ;

Que, sur le harcèlement moral, les faits ainsi établis par Madame [X] [Z], pris dans leur ensemble, permettant de présumer l'existence d'agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, il incombe à la société SOGERES de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Que, concernant la mutation, l'employeur indique qu'il a précisé au CHSCT lors de la réunion de mai 2010 que Madame [X] [Z] aurait demandé une mutation pour laquelle il faisait des recherches, sans en justifier ;

Que, concernant les mesures disciplinaires, l'employeur verse aux débats un mail transféré par Monsieur [G], chef de secteur adressé à Madame [O] [N], de la société SOGERES, le 4 mars 2010 pour justifier de l'avertissement du 10 mars 2010 ; que le mail d'origine daté du même jour est signé '[T] et [C]' et émane de l'adresse mail '[Courriel 1]' ;

Que ce mail indique : suite à mon appel téléphonique de ce matin au sujet de Mme [Z] [X] et de son altercation avec M. [R] [T] chef gérant, étant donner que cela n'est pas la première fois et que cela empire, je vous demande de réagir car cela n'est plus vivable au sein de l'équipe, M. [R] est resté calme et correct envers elle, ce qui n'a pas été son cas. En plus de ses hurlements elle a ameuté tout le site, ce qui n'est pas agréable vis à vis du client, [T] lui a demandé de se calmer, que c'était lui le chef, elle a répondu qu'elle n'avait pas de chef, celui qu'elle a est dieu.

Que dire et faire contre une personne provocatrice et hystérique '

Une partie du personnel est témoin de cet incident.

En attente d'une réponse favorable à ce problème au plus rapide ;

Que pour le reste l'employeur se contente de dire que Madame [X] [Z] ne demande pas l'annulation des mises en garde et avertissements qui seraient selon elle constitutifs de faits de harcèlement moral ;

Que la société SOGERES ne prouve pas que les agissements dénoncés par Madame [X] [Z], notamment la mise en garde du 6 juillet 2009 et l'avertissement du 13 avril 2010, ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le harcèlement moral est donc établi ; qu'il sera octroyé à Madame [X] [Z] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Considérant, sur la nullité du licenciement, que pour prononcer la nullité d'un licenciement suite à un harcèlement, le juge doit constater que la salariée a été licenciée pour avoir subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement de la personne ayant commis le harcèlement ;

Qu'il a été jugé que Madame [X] [Z] a été licenciée à juste titre pour faute grave ; qu'elle n'établit pas qu'elle ait été licenciée pour avoir dénoncé des faits de harcèlement moral ou sexuel ; que la demande de cette dernière de nullité de son licenciement sera rejetée ;

Considérant, sur l'indemnité sollicitée au titre du DIF, que l'article L. 6323-17 du code du travail prévoit que sauf en cas de licenciement pour faute lourde, le salarié peut utiliser les heures acquises au titre du droit individuel de formation et non utilisées sous réserver d'en faire la demande pendant la période de préavis ;

Que le nombre d'heures qui s'apprécie au terme de ce préavis et la possibilité d'en demander le bénéfice pendant cette période doivent être expressément mentionnés dans la lettre de licenciement ;

Qu'en l'absence de mention relative au DIF dans la lettre de licenciement le salarié a droit à la réparation du préjudice qu'il a nécessairement subi ;

Qu'il convient d'allouer à Madame [X] [Z] la somme de 1 000 euros ;

Considérant, sur la demande de remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire, que la restitution des sommes versées en exécution de la décision infirmée est, sans qu'il y ait lieu de l'ordonner, la conséquence de l'arrêt infirmatif rendu ;

Qu'il convient d'ajouter que la partie qui doit restituer une somme qu'elle détenait en vertu d'une décision de justice exécutoire n'en doit les intérêts au taux légal qu'à compter de la notification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à répétition ;

Considérant que l'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Que Madame [X] [Z], partie succombante sera condamnée aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRMANT le jugement entrepris,

FIXE le salaire brut mensuel à la somme de 1 338 euros,

DIT le licenciement pour faute grave de Madame [X] [Z] fondé,

CONDAMNE la société SOGERES à payer à Madame [X] [Z] les sommes de :

- 5 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du harcèlement moral,

- 1 000 euros au titre de la non information sur le DIF,

avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt,

DEBOUTE Madame [X] [Z] de l'ensemble de ses demandes,

DEBOUTE la société SOGERES de ses demandes reconventionnelles,

CONDAMNE Madame [X] [Z] aux dépens.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Martine FOREST-HORNECKER, président et Madame Christine LECLERC, greffier.

Le GREFFIER Le PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 13/02513
Date de la décision : 03/12/2014

Références :

Cour d'appel de Versailles 17, arrêt n°13/02513 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-12-03;13.02513 ?
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