COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
11e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 23 OCTOBRE 2014
R.G. N° 14/00142
AFFAIRE :
MAB/CA
AGS CGEA IDF EST
C/
Me [W] [G] - ès-qualité de Mandataire liquidateur de SARL ETUDES GENERALES MULTI SERVICES
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Novembre 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY
Section : Encadrement
N° RG : 12/00700
Copies exécutoires délivrées à :
Me Oz rahsan VARGUN
la SCP TORRE & VERNHET-LANCTUIT
Copies certifiées conformes délivrées à :
AGS CGEA IDF EST
Me [W] [G] - Mandataire liquidateur de SARL ETUDES GENERALES MULTI SERVICES, [H] [N] [C]
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT TROIS OCTOBRE DEUX MILLE QUATORZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Me [G] [W] ès-qualité de mandataire liquidateur de SARL ETUDES GENERALES MULTI SERVICES
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Nadine VERNHET LANCTUIT de la SCP TORRE & VERNHET-LANCTUIT, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : T18
AGS CGEA IDF EST
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par Me Christian GUILLOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire: A0474 substitué par Me Oz rahsan VARGUN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0474
APPELANTS
****************
Monsieur [H] [N] [C]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Roger BISALU, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 85
INTIME
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Septembre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvie BOSI, Président,
Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,
Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Suivant contrat à durée indéterminée du 5 novembre 2007, M. [H] [N] [C] a été embauché à temps plein par la société Etudes générales multi service, en qualité de métreur et responsable de chantier pour un salaire brut fixé initialement à 2 500 euros.
Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective du bâtiment.
M. [N] [C] précise avoir travaillé au sein de la société , sur les chantiers en cours, jusqu'au 30 avril 2010 et qu'ensuite son employeur, qui lui avait indiqué qu'il rencontrait des difficultés financières, ne lui a 'plus donné de nouvelles'.
Il n'a fait l'objet d'aucune décision de licenciement.
Par jugement du 22 avril 2010, le tribunal de commerce de Pontoise a prononcé la liquidation judiciaire de la société Etudes générales multi services et a nommé M. [G] en qualité de liquidateur.
Soutenant que ses droits n'avaient pas été respectés, M. [N] [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Montmorency le ler août 2012.
En dernier lieu, devant le bureau de jugement du 26 juin 2013, le salarié demandait au conseil de:
* prononcer la résolution judiciaire de son contrat de travail avec les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* fixer sa créance aux sommes suivantes :
- 14 204,78 euros à titre de rappel de salaires de janvier à avril 2010,
- 7 102,39 euros au titre des congés payés pour 2009 et 2010,
- 10 298,45 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 21 307,14 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 2 792 euros à titre de remboursement de frais professionnels,
- 3 551,19 euros à titre de remboursement des frais de déplacements professionnels,
* dire que ces sommes seront prises en charge par l'AGS,
* ordonner la remise des documents sous astreinte,
* lui allouer la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [G] es qualités concluait au débouté de Monsieur [N] [C] et subsidiairement, concluait à la réduction du quantum sollicité à titre de dommages-intérêts en application de l'article L 1235-5 du code du travail, celui-ci s'en rapportant sur le montant de l'indemnité conventionnelle à hauteur de 1 875 euros net à l'exception de toute autre somme.
Il demandait en tout état de cause que le salarié soit débouté de sa demande d'astreinte et que le jugement à intervenir soit déclaré opposable à l'AGS.
Par jugement du 20 novembre 2013, le conseil de prud'hommes de Montmorency a:
-reconnu le contrat de travail et la subordination de Monsieur [N] [C] dans la société Etudes générales multi services et son rôle de salarié,
- dit que le liquidateur a manqué à son rôle, qu'il n'a pas licencié Monsieur [N] [C] [H], ce qui 'justifie la résiliation judiciaire',
- fixé la créance de Monsieur [N] [C] au passif de la société Etudes générales multi services , en liquidation judiciaire, aux sommes suivantes':
* au titre du retard de salaire de janvier à avril 2010, 14 204,76 euros,
*au titre des congés payés sur préavis, 1 065,35 euros,
* au titre de l'indemnité de licenciement sur la base de 3/10 ème de mois par année de présence du 5 novembre 2007 au 30 avril 2010, 3 639,88 euros,
* 'au titre de la résiliation judiciaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse', 21 307,14 euros,
* au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, trois mois de salaire soit 10 653,57 euros,
- dit que ces sommes seront opposables à l'AGS -CGEA Ile de France est dans le cadre de sa garantie prévue aux articles L.3253-8 et suivants du code du Travail et dans la limite du plafond fixé aux articles L.3253-17 alinéa 1er et D.3253-5 du même code,
- dit que la Société Etudes générales multi services par le biais de M. [G] es qualités devra remettre à M. [N] [C], les documents suivants, établis en conformité avec les dispositions du jugement, à savoir le certificat de travail du 5 novembre 2007 au 30 avril 2010, les bulletins de salaire de janvier, février, mars et avril 2010, la lettre de licenciement, l'attestation pôle emploi, le certificat pour la caisse des congés payés,
- déboute M. [N] [C] du surplus de ses demandes pour manque de preuve,
- laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens éventuels.
Le jugement a été notifié par lettre recommandée dont M. [G], es qualités de mandataire liquidateur de la société Etudes générales multi services, et l'AGS ont signé l'avis de réception le 28 novembre 2013.
M. [G] es qualités et l'AGS-CGEA d'Ile de France Est ont régulièrement relevé appel de la décision, par lettres recommandées respectivement postées le 16 et le 18 décembre 2013.
Ces deux appels ont été enregistrés sous les numéros de répertoire général suivants, 14/00142 et 14/00045.
Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, leur jonction a été ordonnée le 18 juin 2014 sous le seul numéro 14/00142.
Dans ses dernières conclusions , M. [G] es qualités de liquidateur de la société Etudes générales multi services, demande à la cour de :
* déclarer irrecevable M. [N] [C] en sa demande tendant à voir engagée sa responsabilité dans ses fonctions de liquidateur,
* débouter M. [N] [C] de ses demandes de condamnation dirigées à son encontre à titre personnel,
* infirmer le jugement en ce qu'il a jugé qu'il avait manqué à son rôle à titre personnel,
* fixer le salaire mensuel de M. [N] [C] à la somme de 2 500 euros brut,
et en conséquence,
A titre principal,
* infirmer le jugement sur le prononcé de la résiliation judiciaire et sur l'ensemble des sommes fixées au passif de la société,
* lui donner acte de ce qu'il 's'en rapporte' sur les chefs de créance suivants :
* 9 333,33 euros brut au titre des rappels de salaires de janvier à avril 2010 et qu'il conviendra d'en déduire la somme de 2 835,70 euros,
* 7 500 euros brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
* 750 euros brut au titre des congés payés afférents,
* 1 875 euros à titre d'indemnité de licenciement calculée du 5 novembre 2007 au 22 avril 2010,
A titre subsidiaire, en cas de confirmation du jugement sur le prononcé de la résiliation judiciaire,
* confirmer la date de rupture au 30 avril 2010, date de rupture de fait du contrat reconnue par le salarié ou à titre infiniment subsidiaire au 20 novembre 2013 et non au prononcé de l'arrêt,
* réduire strictement le montant des dommages-intérêts pour rupture abusive dès lors que le salarié ne justifie d'aucun préjudice et qu'il était le seul salarié au sein de l'entreprise,
* infirmer le jugement en ce qu'il lui a ordonné d'établir une lettre de licenciement,
* confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de Monsieur [N] [C] au titre des congés payés, des frais professionnels et de déplacement,
* déclarer l'arrêt opposable à l'AGS,
* rejeter toute demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
L'AGS -CGEA Ile de France Est, également appelante, demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, de:
* juger que Monsieur [N] [C] ne peut démontrer l'existence d'un lien de subordination, la concluante faisant notamment valoir que celui- ci a été le gérant de la société du 8 juin 2007 au 28 mars 2008,
* juger que Monsieur [N] [C] n'a fait l'objet d'aucune mesure de licenciement par le mandataire liquidateur dans les quinze jours suivant l'ouverture de la procédure collective de Etudes générales multi services, et ce de son propre fait dès lors qu'en sa qualité d'ancien dirigeant de la société, il n'a pas transmis à M. [G] es qualités la liste du personnel de la société,
* juger que Monsieur [N] [C], en revendiquant le paiement de 47 mois de salaire, soit 166 905 euros a nécessairement abandonné ses salaires en compte courant au sein de la société,
* juger en conséquence que Monsieur [N] [C] ne justifie pas de l'existence d'un contrat de travail et infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,
* subsidiairement, juger que Monsieur [N] [C] qui n'a fait l'objet d'aucun licenciement dans les quinze jours suivant l'ouverture de la procédure collective, ne peut bénéficier de la garantie de l'AGS et le dire irrecevable en l'ensemble de ses demandes.
M. [H] [N] [C], qui est appelant incident, demande à la cour de :
* confirmer le jugement entrepris :
- en ce qu'il a retenu sa qualité de salarié,
- en ce qu'il a prononcé la résiliation de son contrat de travail avec effet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, au motif que le mandataire liquidateur a manqué à sa mission,
- en ce qu'il a fixé sa créance à la liquidation judiciaire de la société aux sommes suivantes :
* 10 653,57 euros à titre d'indemnité de préavis et 1 065,35 euros au titre des congés payés afférents,
* 21 307,14 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- en ce qu'il a jugé que M. [G] es qualités devait lui remettre la lettre de licenciement, l'attestation pôle emploi, le certificat pour la caisse des congés payés,
- en ce qu'il a jugé ces condamnations opposables à l'AGS,
* l'infirmer pour le surplus et jugeant à nouveau,
* fixer sa créance à la liquidation judiciaire de la société aux sommes suivantes :
- 166 905,93 euros à titre de rappel de salaires du mois de janvier 2010 jusqu'au 20 novembre 2013, date du jugement déféré , à laquelle devra s'ajouter une somme mensuelle de 3 551,19 euros jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir,
- 7 279,76 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 3 551,19 euros au titre des frais de déplacement,
- 10 653,57 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
* ordonner à M. [G] es qualités de lui remettre le certificat de travail du 5 novembre 2007 jusqu'à l'arrêt à intervenir, les bulletins de salaire non seulement de janvier à avril 2010 mais aussi sur la période postérieure jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir,
* lui allouer la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
* juger que l'intégralité des sommes demandées seront opposables à l'AGS.
Le salarié, ajoutant à ses demandes de première instance, demande également à la cour de :
* condamner M. [G] à titre personnel à lui verser la somme de 34 091,42 euros en réparation du préjudice qu'il a subi du fait de l'absence de décision de licenciement,
* le condamner à titre personnel à lui verser toutes les sommes qui ne seront pas prises en charge au titre de la garantie de l'AGS ,
* le condamner à lui verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties , aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience.
MOTIFS :
Sur la qualité de salarié de M. [N] [C] :
L'AGS conteste cette qualité à l'intimé en faisant valoir qu'il ne justifie pas de l'existence d'un lien de subordination avec la société Etudes générales multi services.
L'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles s'est exercée l'activité .
Si en l'absence d'un contrat de travail apparent, il incombe à la partie qui invoque l'existence d'une relation salariale d'apporter la preuve du contrat de travail qui se caractérise par l'existence d'un lien de subordination dont il résulte que l'activité est exercée sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements, il doit être rappelé que par contre, en présence d'un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve.
En l'espèce, il est établi qu'un contrat de travail à durée indéterminée a été signé entre la société Etudes générales multi services - aujourd'hui liquidée- et M. [N] [C], ce contrat prévoyant qu'à compter du 5 novembre 2007celui-ci exerçait les fonctions de métreur et responsable de chantier ; il a également été justifié de sa déclaration unique d'embauche effectuée auprès de l'Urssaf.
En présence de ce contrat de travail, il ne peut être demandé au salarié de faire la preuve de son lien de subordination avec son employeur, celui-ci résultant directement du contrat convenu entre les parties et il incombe à l'AGS de faire la preuve du caractère fictif de ce contrat de travail.
S'il est exact, au vu des pièces produites par l'appelante, que M. [N] [C], associé à 50 % des parts de la société, a été nommé aux fonctions de gérant sur décision de l'assemblée des associés du 8 juin 2007, il n'a cependant exercé ces fonctions de gérant que jusqu'au 28 mars 2008, un successeur lui ayant été désigné à compter du 2 avril 2008, avant que le gérant, en activité à la date de la liquidation judiciaire de la société, ne soit désigné aux termes d'une assemblée générale extraordinaire de la société du 16 novembre 2008.
A la date de la liquidation judiciaire, M. [N] [C] n'était donc plus gérant et sa seule qualité d'associé égalitaire de la société qui n'est pas exclusive de celle de salarié ne démontre pas le caractère fictif de son contrat de travail.
Le jugement en ce qu'il a reconnu la qualité de salarié à M. [N] [C], sera confirmé.
Sur les demandes en rapport avec l'exécution du contrat de travail :
M.[N] [C] qui fait état qu'il n'a plus été payé de ses salaires depuis janvier 2010 en demande le paiement, et porte sa demande, qui était limitée en première instance au paiement des salaires échus de janvier à avril 2010, à la somme totale de 166 905,28 euros, représentant le montant des salaires échus à la date du jugement déféré, outre les salaires devenus exigibles ensuite.
M. [G] es qualités s'oppose à cette demande en observant, s'agissant des salaires dus jusqu'à la liquidation de la société, qu'il a été versé à M. [N] [C] une somme de 2 835,70 euros par virement bancaire du 5 février 2010, que le salaire mensuel brut de ce dernier s'établit à 2 500 euros mensuels et non à la somme de 3 551,19 euros revendiquée par le salarié et qu'au delà du jugement de liquidation judiciaire, le tribunal de commerce n'a pas autorisé la prorogation d'activité de la société.
Alors même que M. [N] [C] soutient ne pas avoir été payé de ses salaires depuis janvier 2010, la société Etudes générales multi services dont une des obligations essentielles est le paiement des salaires de ses employés n'a pas justifié s'être acquittée de cette obligation au delà du mois de décembre 2009, à la seule exception d'un virement bancaire effectué au profit du salarié le 5 février 2010, lequel s'impute nécessairement sur les sommes dues à compter du mois de janvier dès lors qu'il n'a pas été fait état d'une créance de salaires antérieure à cette date.
La société reste donc débitrice des salaires jusqu'à la date de sa liquidation judiciaire.
Pour la période postérieure, M. [N] [C]- qui ne fournit aucun justificatif de sa situation professionnelle ni des revenus qu'il a ensuite pu percevoir, se contentant d'affirmer qu'il n'a pu s'inscrire au Pôle emploi sans justifier d'aucune démarche avant 2014- n'établit pas qu'il est resté à la disposition de son employeur, étant observé que, comme le souligne le mandataire liquidateur, le jugement de liquidation judiciaire n'a pas autorisé la poursuite de l'activité de la société pour une période temporaire.
Par conséquent, l'intimé ne peut prétendre au paiement des salaires au delà du 22 avril 2010 ; compte tenu de son salaire mensuel brut convenu contractuellement qui lui a été versé jusqu'en décembre 2009, à hauteur de 2 500 euros brut d'après ses bulletins de salaire, et du règlement effectué par son employeur en février 2010, sa créance salariale sera fixée à la somme de 6 497,63 euros brute ; le jugement sera infirmé de ce chef.
M. [N] [C] sollicite également, comme en première instance, le paiement de frais de déplacement , qu'il a fixés à la somme de 3 551,19 euros en expliquant qu'il avait droit au remboursement de ses frais de déplacement en sa qualité de cadre et ce, en équivalence du remboursement de ses frais de transport, demande à laquelle s'oppose le mandataire liquidateur.
Si les derniers bulletins de salaire de M. [N] [C] mentionnent le remboursement de frais professionnels- pour une somme variable chaque mois- et d'une indemnité de grand déplacement, M. [N] [C] ne saurait pour autant en solliciter le paiement à compter du mois de janvier 2010 alors même qu'il ne justifie pas des déplacements effectués, le remboursement de tels frais étant subordonné au fait que le salarié les a réellement exposés ; de même le paiement d'une indemnité de grand déplacement, dont le paiement est certes prévu conventionnellement, est soumis à des conditions dont il n'est pas démontré par le salarié qu'il les remplissait durant la période de janvier à avril 2010.
Le contrat de travail du salarié ne prévoit aucune disposition relative au paiement de ces frais et indemnités de grand déplacement.
Il sera pas conséquent débouté de toute demande à ce titre et le jugement sera confirmé sur ce point.
Au titre de ses congés payés, M. [N] [C] qui fait valoir qu'il n'a jamais pris de congé annuel depuis son embauche, réclame à ce titre la somme de 10 653,57 euros.
Les bulletins de salaire produits par M. [N] [C] et correspondants à la période de la fin de l'année 2009, établissent qu'il avait accumulé sur l'année précédente et l'année en cours, un droit à congé de 42,50 jours.
Eu égard à la finalité qu'assigne aux congés payés la directive 2003/88/CE du parlement européen et du conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement.
En l'espèce, la société Etudes générales multi services , par l'intermédiaire de son liquidateur, ne justifie pas avoir mis en oeuvre les mesures permettant au salarié d'exercer son droit à congé; par conséquent, compte tenu du droit à congés payés acquis par le salarié au 31 décembre 2009 puis pour la période du 1er janvier au 22 avril 2010 à hauteur de 2,5 jours de congés payés par mois travaillé, sa créance à ce titre sera fixée à la somme de 4 319,17 euros brute ; le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur la demande de résiliation du contrat de travail :
M. [N] [C] sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire de son contrat de travail ; le salarié qui rappelle que la liquidation judiciaire n'entraîne pas par elle même la rupture des contrats de travail, reproche au mandataire liquidateur de ne pas l'avoir licencié, d'avoir ainsi commis une faute personnelle et d'avoir engagé sa responsabilité à son égard ; il soutient que dans ces conditions, sa demande de résiliation judiciaire est manifestement fondée.
Indépendamment de l'appréciation de la faute reprochée au mandataire liquidateur qu'il conviendra d'examiner dans le cadre de la demande indemnitaire formulée par le salarié à son encontre, il ne peut qu'être jugé qu'à le supposer avéré, un manquement du mandataire liquidateur dans l'exercice de ses fonctions n'est pas imputable à la société ; un tel motif ne peut justifier le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié qui ne peut être motivée que par l'existence de manquements graves de l'employeur ; la demande de résiliation qui n'est fondée que sur la faute reprochée au mandataire liquidateur ne pourra donc qu'être rejetée.
Le salarié sera débouté de ses demandes en paiement subséquentes et le jugement sera infirmé de ce chef,
Sur la mise en cause de la responsabilité de M. [G] es qualités de mandataire liquidateur de la société EGMS:
M. [N] [C] reproche à M. [G], es qualités de mandataire liquidateur de la société Etudes générales multi services, de ne pas avoir procédé à son licenciement et sollicite, en réparation du préjudice qu'il soutient avoir subi de ce chef, non seulement sa condamnation à lui verser la somme de 34 091,42 euros en expliquant qu'il a été privé de l'indemnisation par le Pôle emploi du fait de la carence du liquidateur mais aussi, ainsi qu'il le précise en page 21 de ses écritures, à lui verser les sommes qui ne seront pas prises en charge au titre de la garantie de l'AGS.
M. [G] es qualités, avant toute défense au fond, conclut à l'irrecevabilité de cette demande indemnitaire de M. [N] [C] en faisant valoir que la cour, en tant que juridiction d'appel du conseil de prud'hommes, n'a pas compétence pour statuer sur sa responsabilité professionnelle ; il conteste ensuite toute responsabilité en expliquant que s'il n'a pu effectivement procéder au licenciement de M. [N] [C] dans les quinze jours du jugement de liquidation judiciaire, c'est qu'il n'avait pas eu connaissance de son existence par le gérant de la société Etudes générales multi services auprès duquel il avait pourtant fait toutes diligences pour qu'il lui adresse la liste des salariés de la société.
La cour, investie de la plénitude de juridiction, est compétente pour connaître de l'action en responsabilité à l'encontre de M. [G] es qualités de mandataire liquidateur dès lors qu'elle est juridiction d'appel des décisions du tribunal de grande instance qui est compétent pour statuer sur la responsabilité professionnelle des mandataires judiciaires.
Il est établi par les pièces communiquées que :
* à la suite du prononcé de la liquidation judiciaire intervenue par jugement du 22 avril 2010, M. [G] es qualité de mandataire liquidateur de la société, par courrier recommandé avec avis de réception du 23 avril 2010, a convoqué M. [R], gérant de la société, pour qu'il se présente en son étude le 29 avril 2010 muni de tous les éléments concernant le passif de la société et de tous documents se rapportant à l'aspect social de la société , notamment à la présence de salariés dans la société ( liste complète des salariés présents et inscrits à l'effectif à la date de l'ouverture de la procédure collectif, le livre d'entrée et de sortie du personnel, le livre des appointements et salaires sur les 36 derniers mois, la copie des contrats de travail ou des lettres d'embauche, le double des fiches de paie sur les 36 derniers mois, la copie des arrêts de travail, la copie d'un accord de participation ou d'intéressement, la liste du personnel protégé, outre tout renseignement sur les créances dues au personnel,
* par courrier du 23 avril 2010, M. [G] a également pris attache avec la caisse nationale d'assurance vieillesse pour obtenir la liste des salariés figurant sur la dernière déclaration des données sociales de la société,
* aucun salarié n'a été déclaré par le gérant à l'ouverture de la procédure collective, étant précisé que M. [R], gérant de la société lors de la mise en liquidation judiciaire, ne s'est pas présenté au tribunal de commerce,
* ce n'est que par une attestation du 12 mai 2010, que ce dernier a informé M. [G] qu'il employait un salarié, M. [N] [C], au sein de la société, la caisse nationale d'assurance vieillesse n'ayant quant à elle fourni la liste des salariés qu'elle avait à sa disposition que le 30 août 2010.
Au vu de ces éléments, aucune pièce n'étant apportée par le salarié pour les contredire, il ne peut être reproché à M. [G] qui a entrepris sans tarder toutes démarches auprès du gérant de la société, de ne pas avoir procédé au licenciement de M. [N] [C] dans le délai de quinze jours de la liquidation judiciaire puisqu'aucun élément n'établit qu'il avait connaissance de l'existence de ce salarié ; M. [N] [C] aurait pu d'ailleurs lui même se signaler auprès de M. [G], étant observé qu'en sa qualité d'ancien gérant de la société, il n'ignorait pas les règles relatives au fonctionnement des sociétés.
Dès lors, M. [N] [C] ne peut faire supporter à M. [G] es qualités le préjudice résultant du non paiement des créances non garanties par l'AGS qui, aux termes de l'article L 3253-8 du code du travail - garantit uniquement les créances résultant de la rupture des contrats de travail lorsqu'elle intervient dans les quinze jours suivant le jugement de liquidation.
Il ne peut davantage, dès lors que le gérant de la société n'avait pas informé le mandataire liquidateur de l'existence de M. [N] [C] dans ce délai de quinze jours, lui faire supporter le défaut d'indemnisation par le Pôle emploi.
Sur ce dernier point, il doit être au surplus relevé que M. [N] [C] n'établit pas avoir fait des démarches auprès du Pôle emploi avant l'année 2014 puisqu'il ne produit qu'une lettre du Pôle emploi datée du 12 juin 2014 qui lui demande d'adresser des pièces justificatives de sa situation et notamment une copie de sa lettre de licenciement de la société EGMS, le Pôle emploi se référant à une précédente demande de pièces du 26 mai 2014, M. [N] [C] étant âgé de 60 ans depuis 2012.
Sur l'intervention de l'AGS
Le présent arrêt sera opposable à l'AGS (CGEA Ile de France) dans la limite des dispositions des articles L. 3253-6 et suivants et D 3253-5 du code du travail ; en l'espèce, en application de l'article L 3253-8 1° du code du travail, l'AGS ne devra garantir que les créances salariales et de congés payés qui étaient dues au jugement d'ouverture.
Cet organisme ne devra faire l'avance de la somme représentant les créances garanties que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à son paiement.
Sur les autres demandes :
Il convient d'accueillir partiellement la demande de production de pièces de M. [N] [C] concernant les bulletins de salaire de janvier à avril 2010, ordonnée à juste titre par les premiers juges.
Compte tenu de la solution apportée au litige, il n'y a pas lieu d'ordonner la remise des autres pièces dont M. [N] [C] a sollicité la production ; le jugement sera infirmé de ce chef.
La solution apportée au litige ne justifie pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de M. [N] [C].
PAR CES MOTIFS
La COUR,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme partiellement le jugement du conseil de prud'hommes de Montmorency en date du 20 novembre 2013 et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :
Déboute M. [H] [N] [C] de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de ses demandes en lien avec la rupture de son contrat de travail,
Fixe ainsi qu'il suit la créance de M. [H] [N] [C] à la liquidation judiciaire de la société Etudes générales multi services :
* la somme de 6 497,63 euros brute à titre de rappel de salaires sur la période de janvier au 22 avril 2010,
* la somme de 4 319,17 euros brute à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
Déboute M. [N] [C] de sa demande de production de pièces, sauf en ce qui concerne la remise des bulletins de salaire de janvier à avril 2010 ordonnée par le conseil de prud'hommes,
Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions non contraires et notamment en ce qu'il a reconnu à M. [N] [C] la qualité de salarié de la société Etudes générales multi services,
Dit que l'AGS -CGEA Ile de France Est ne devra garantir que les créances salariales et de congés payés qui étaient dues au jugement d'ouverture et qu'elle ne devra faire l'avance de la somme ainsi garantie que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à son paiement,
Y ajoutant :
Dit que la cour est compétente pour statuer sur la demande de dommages-intérêts présentée M. [N] [C] à l'encontre de M. [G] à titre personnel,
Déboute M. [N] [C] de sa demande indemnitaire à l'encontre de M. [G] à titre personnel et le déboute de toute autre demande,
Condamne la société Etudes générales multi services en liquidation judiciaire aux dépens.
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Mme Marie-Andrée BAUMANN, conseiller, en remplacement du président empêché et par Mme Claudine AUBERT, greffier.
Le GREFFIERLe PRESIDENT