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16/10/2014 | FRANCE | N°14/784

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0028, 16 octobre 2014, 14/784


COMPOSITION DE LA COUR

lors des débats, du délibéré, et au prononcé de l'arrêt
Président : Monsieur LARMANJAT Conseillers : Monsieur ARDISSON, Monsieur AUBAC, DÉCISION : voir dispositif MINISTÈRE PUBLIC : Madame FOREY, substitut général, lors des débats

GREFFIER : Madame LAMANDIN, greffier, lors des débats et du prononcé de l'arrêt
PARTIES EN CAUSE Bordereau No du PRÉVENU

S. A SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, no de SIREN : 552-120-222 représentée par Jean Pierre X...directeur service client

29 boulevard HAUSSMAN-75009 PARIS
Comparant, assisté

de Maître SANTACRU Dominique, avocat au barreau de PARIS (conclusions)

PARTIE CIVILE
SYNDICAT CFDT ...

COMPOSITION DE LA COUR

lors des débats, du délibéré, et au prononcé de l'arrêt
Président : Monsieur LARMANJAT Conseillers : Monsieur ARDISSON, Monsieur AUBAC, DÉCISION : voir dispositif MINISTÈRE PUBLIC : Madame FOREY, substitut général, lors des débats

GREFFIER : Madame LAMANDIN, greffier, lors des débats et du prononcé de l'arrêt
PARTIES EN CAUSE Bordereau No du PRÉVENU

S. A SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, no de SIREN : 552-120-222 représentée par Jean Pierre X...directeur service client

29 boulevard HAUSSMAN-75009 PARIS
Comparant, assisté de Maître SANTACRU Dominique, avocat au barreau de PARIS (conclusions)

PARTIE CIVILE
SYNDICAT CFDT BANQUES ET ASSURANCES-AGISSANT POURSUITES ET DILIGENCES DE SON SECRÉTAIRE GÉNÉRAL
78 rue de crimée-75019 PARIS
Représenté par Maître CADOT Jonathan, avocat au barreau de PARIS (conclusions)

RAPPEL DE LA PROCÉDURE :

LA PRÉVENTION :
LA S. A SOCIÉTÉ GÉNÉRALE est prévenue :
- d'avoir à NANTERRE, entre le 1er octobre 2009 et le 30 septembre 2010, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, conclu des contrats de mise à disposition de salariés temporaires pour pourvoir à au moins trois emplois durables et habituels,
faits prévus par art. l. 1254-3 al. 1, art. l. 1251-5, art. l. 1251-1 c. travail. et réprimés par art. l. 1254-3 al. 1, art. l. 1254-12 c. travail
LE JUGEMENT :
Par jugement contradictoire en date du 17 janvier 2014, le tribunal correctionnel de Nanterre :
Sur l'action publique :
a déclaré la SA SOCIETE GENERALE coupable des faits de :
conclusion par entreprise utilisatrice d'un contrat de mise à disposition de salarié temporaire pour un emploi durable et habituel, commis du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2010, à Nanterre
a condamné la SA SOCIETE GENERALE au paiement d'une amende de TROIS MILLE EUROS (3000 euros) ;
A titre de peine complémentaire
a ordonné à l'égard de la SA SOCIETE GENERALE l'affichage de la décision au siège social de la SOCIETE GENERALE boulevard Haussmann à PARIS 8eme pour une durée de QUINZE JOURS et ce aux frais de la condamnée ;
Sur l'action civile :
a reçu le syndicat CFDT Banques et Assurances en sa constitution de partie civile.
a déclaré la SA SOCIETE GENERALE responsable du préjudice subi par le syndicat CFDT Banques et Assurances, partie civile.
a condamné la SA SOCIETE GENERALE à payer au syndicat CFDT BANQUES ET ASSURANCES PARTIE CIVILE, LA SOMME DE deux mille euros (2000 euros) à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et en outre MILLE EUROS (1000 euros) au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale

LES APPELS :

Appel a été interjeté par :
S. A. SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, le 22 janvier 2014 contre SYNDICAT CFDT BANQUES ET ASSURANCES-AGISSANT POURSUITES ET DILIGENCES DE SON, son appel portant tant sur les dispositions pénales que civiles
M. le procureur de la République, le 22 janvier 2014 contre S. A. SOCIÉTÉ GÉNÉRALE

DÉROULEMENT DES DÉBATS :

A l'audience publique du 04 septembre 2014, Monsieur le Président a constaté l'identité prévenu ;
Le Président informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire,
Ont été entendus :
Monsieur LARMANJAT, président, en son rapport et interrogatoire,
Monsieur X..., prévenu, en ses explications,
Maître CADOT, avocat, en sa plaidoirie,
Madame FOREY, substitut général, en ses réquisitions,
Maître SANTACRU, avocat, en sa plaidoirie,
Monsieur le président a ensuite averti les parties que l'arrêt serait prononcé à l'audience du 16 OCTOBRE 2014 conformément à l'article 462 du code de procédure pénale.
*****
DÉCISION
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, jugeant publiquement, a rendu l'arrêt suivant :
LE RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Le 30 juillet 2010, l'inspection du travail effectuait un contrôle au sein du pôle service clients (PSC) de la Société Générale situé à Nanterre. Ce pôle, qui employait, alors, 230 salariés en contrat à durée indéterminée, constitue une unité chargée de tâches administratives mutualisées (« base arrière ») agissant pour le compte des directions d'exploitation commerciales et d'agences du réseau de la banque.
A l'examen du registre unique du personnel, les contrôleurs ont relevé qu'entre le 1er octobre 2009 et le 30 septembre 2010, soit sur une année, cinquante-six contrats de mise à disposition avaient été conclus avec des agences d'intérim, parfois plusieurs fois avec les mêmes salariés. Certaines des missions pouvaient durer jusqu'à cinq mois. Il est apparu également que certaines des tâches confiées à ces salariés intérimaires consistaient, pour l'essentiel, dans du traitement de-dossiers de prêts immobiliers et autres tâches de gestion administrative, rémunérées selon un taux horaire uniforme d'un montant de 11, 72 euros.
A l'issue de ces constatations, l'inspection du travail a évalué que le nombre de salariés, ainsi mis à disposition, dont elle a constaté qu'il variait, selon les mois, entre deux et douze », correspondait à une moyenne mensuelle de quatre emplois correspondant à des tâches liées à l'activité normale de l'entreprise et indépendantes de toute variabilité saisonnière.
Les représentants de l'administration ont estimé que ceci constituait un usage abusif du recours à des contrats de mise à disposition, contraires aux exigences des dispositions de l'article L. 1251-5 du code du travail.
Entendu sur instructions du parquet, le 9 janvier 2012, le directeur de l'établissement en cause, M Jean-Pierre X..., a contesté l'infraction et les conclusions de l'inspection du travail. Il a expliqué qu'il s agissait de remédier à l'absence de collaborateurs en congé de maladie ainsi qu'à un surcroît temporaire d'activité, notamment entre les mois de mars et d'août 2010 sur le secteur des crédits immobiliers, période à laquelle était intervenu le contrôle de l'inspection du travail. Il a soutenu n'avoir pas alerté de la situation par les représentants syndicaux. Selon, ce surcroît d'activité était temporaire et ne permettait pas d'embauches en code des impôts. Il a assuré qu'en sa qualité de chef d'établissement, il disposait de toute l'autonomie nécessaire pour l'embauche du personnel en intérim. Il a ajouté qu'à l'époque de son audition, en janvier 2012, ce surcroît d'activité n'existait plus et qu'aucun intérimaire n'était plus employé.
Le représentant du syndicat CFDT, M Thierry Y..., entendu le 3 avril 2012, connaissance prise des déclarations de M X..., a, quant à lui, souligné que, par courrier du 15 juin 2010, remis en main propre à ce dernier, il avait alerté la banque sur cette situation, dénonçant le fait que ces emplois étaient destinés, en réalité, à pallier des départs à la retraite non remplacés et pour anticiper un gain de productivité hypothétique. Ce courrier avait été envoyé en copie à l'inspection du travail. Compte tenu de l'absence de décision de la part de l'employeur, le syndicat a décidé de se constituer partie civile. Le courrier précité du 15 juin 2010, dans lequel il est notamment écrit que « les élus estiment que la présence d'intérimaires au delà d'une période de six mois démontre la nécessité d'embauche en cdi » a été joint à son audition.
Sur citation directe, la SA Société Générale a été prévenu d'avoir à Nanterre, entre le 1er octobre 2009 et le 30 septembre 2010, conclu des contrats de mise à disposition de salariés temporaires pour pourvoir à au moins trois emplois durables et habituels.
Devant le tribunal, ainsi qu'en attestent les notes d'audience, le représentant et directeur de l'établissement bancaire au moment des faits, M X...a indiqué que le pôle service clients de Nanterre avait fermé et que ses agents avaient été répartis sur d'autres établissements, pour l'essentiel ceux de Saint-Denis et du siège à La Défense.
Comme il l'avait soutenu lors de l'enquête préliminaire, il a exposé que l'activité de prêt immobilier avait connu un surcroît d'activité courant 2009, par suite d'une augmentation des transactions immobilières et de la concurrence entre les établissements bancaires. Il a également indiqué que l'établissement avait connu un taux d'absentéisme supérieur à la moyenne.
L'inspecteur du travail ayant procédé aux contrôles, serment préalablement prêté, a confirmé que le recours au travail intérim, sur la période considérée, avait été quotidien et permanent. L'employeur n'a pas régularisé malgré les remarques formulées. Sur les absences, le représentant de l'administration a signalé que l'établissement avait une activité classique.
Par jugement du 17 janvier 2014, le tribunal a :
--- sur l'action publique :
déclaré la SA Société Générale coupable des faits condamné la banque à une amende de 3000 euros, ordonné, à titre de peine complémentaire, à l'égard de la SA Société Générale l'affichage de la décision au siège social, boulevard Haussmann à PARIS 8ême pour une durée de 15 jours ;

--- sur l'action civile,
¿ reçu le syndicat CFDT Banques et Assurances en sa constitution de partie civile ¿ déclaré la SA Société Générale responsable du préjudice subi par le syndicat CFDT Banques et Assurances, partie civile.

condamné la banque à payer au syndicat la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et celle de 1 000 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale.
Par actes du 22 janvier 2014, la Société Générale et, à sa suite, le parquet, ont relevé appel de ce jugement, l'appel de la prévenue portant sur les dispositions pénales et civiles de celui-ci.
Le casier judiciaire de la SA Société Générale fait mention d'une condamnation prononcée le 27 juin 2002 à 8 000 ¿ d'amende avec sursis pour prêt de main d'oeuvre, à but lucratif, par personne morale hors du cadre légal du travail intérim et marchandage. A l'audience de la cour, M X...ayant été le directeur du pôle service clients de Nanterre était présent et a été entendu.

Par conclusions déposées à l'audience de la cour, visées par le greffier et le président, par des moyens qui seront examinés dans les motifs ci-après, la Société Générale sollicite l'infirmation du jugement entrepris, la relaxe de la banque Société Générale et le rejet des demandes du syndicat partie civile.
Dans des conclusions déposées à l'audience de la cour, visées par le greffier et le président, le syndicat CFDT Banques demande la confirmation de la décision déférée et la condamnation, en cause d'appel, de la banque au paiement d'une somme de 2 000 ¿ au titre des frais irrépétibles.
Le procureur général a requis la confirmation de la décision déférée.
Le conseil de la prévenue a eu la parole en dernier.

MOTIFS

Considérant que, selon les dispositions de l'article L. 1242-1 du code du travail, « un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise » ; que, selon les dispositions de l'article L. 1251-5 du même code, « le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice » ; que les articles L 1242-6 et L 1251-6 du code précité énumèrent dans les mêmes termes les cinq cas dans lesquels il peut être conclu un contrat de travail à durée déterminée ou recouru à un emploi temporaire, pour « l'exécution d'une tâche précise et temporaire », notamment le remplacement d'un salarié et l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise ou les emplois à caractère saisonnier ;
Considérant que, comme le soulignent, de manière pertinente et adaptée à l'espèce les premiers juges, de ces dispositions, il ressort qu'un contrat de travail temporaire, à durée déterminée ou accompli dans le cadre d'une mission d'intérim, ne saurait avoir pour effet de pourvoir et remplacer, de manière durable et régulière, des emplois liés à l'activité normale et permanente de l'entreprise ; que ces mêmes dispositions légales induisent que le recours à l'intérim, et même toute embauche hors le cadre du contrat à durée indéterminée, qui constitue le cadre de droit commun de l'embauche comme assurant au salarié une stabilité professionnelle ainsi qu'un parcours sécurisé dans l'emploi, ne peut être justifié que par un surcroît temporaire et occasionnel d'activité ou par le caractère saisonnier de l'activité ; que, dans ce cas, il incombe nécessairement à l'employeur d'en démontrer la réalité et l'ampleur ;
Considérant que le contrôle réalisé par les fonctionnaires de l'inspection du travail, ayant porté sur la période du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2010, soit sur une année d'activité de l'entreprise, a permis de relever que la direction du pôle service clients de Nanterre, qui avait, sur la même période, entre 201 et 213 salariés à durée indéterminée, a décidé d'embaucher quarante intérimaires pour pourvoir à trente-sept emplois postes de travail ; que, pour justifier le recours à ces emplois intérimaires, la direction a invoqué le remplacement de salariés absents, en arrêts de maladie, et, d'autre part, un accroissement de l'activité au sein du service commercial ; que le contrôle de l'administration a laissé apparaître que les tâches assurées par les agents intérimaires étaient décrites dans des termes similaires ; qu'enfin, les inspecteurs du travail ont calculé que durant cette année, quatre emplois permanents avaient, chaque mois et en moyenne, été occupés, par des salariés intérimaires sans démonstration corrélative, pour en justifier, d'un accroissement d'activité ;
Considérant que, de l'examen des contrats de travail eux mêmes et des tableaux figurant en procédure ou joints aux conclusions de la Société Générale, il apparaît qu'au cours de la période sous contrôle, sur les cinquante six contrats d'intérim, dix-sept ont été conclu pour le remplacement d'employés absents ou en arrêts maladie ; que ces contrats ont concerné : Mesdames et messieurs Z..., A..., B..., C..., D..., E..., F..., Z..., G...et H...; que, sur ce point, conformément aux dispositions précitées, comme l'ont relevé avec exactitude les premiers juges, le recours aux contrats d'intérim pour pourvoir à ces remplacements était justifié ;
Considérant que, pour les autres contrats d'intérim, les investigations de l'administration ont révélé que les postes occupés par des salariés intérimaires, durant la période visée dans la prévention ont été répartis, sur l'ensemble de l'établissement, pour l'exécution de tâches de gestion administrative courante et au service du traitement des prêts immobiliers ; qu'il ressort de l'examen des contrats d'intérimaires, dont les contrats ont été renouvelés et qui ont donc travaillé sur plusieurs mois, que ces employés ont été affectés dans des services différents au sein du pôle service clients de Nanterre ; qu'il en est ainsi de Mme Rebecca K..., qui a été affectée au service chargé du traitement des successions, puis à celui chargé du projet Orchestra, enfin à celui de la saisie et la préparation de dossiers ; que M Kamal I..., sur une période de onze mois successifs, a été successivement affecté au traitement des livrets d'épargne populaire, à la cellule d'opposition des chèques, au service du fichier produits et au remplacement partiel d'une salariée absente ; que, pour M Dario J..., employé sur une période consécutive de sept mois, il a été affecté a la cellule chargée précitée, à un projet de refonte DAR avant d'être affecté au service du traitement des moyens de paiement ;

Considérant que, sur l'ensemble des mois observés, sans que la méthode de calcul adoptée, fondée sur une moyenne, soit critiquable, l'inspection du travail a chiffré le nombre de salariés en contrat de mission effectivement employés : 5 salariés, le 19 octobre 2009, 10 salariés le 27 novembre, 11 salariés le 19 mars 2010, 13 salariés le 7 juin 2010 ; que, sur la période visée dans la prévention, 56 contrats ont été recensés, ce qui représentait environ le quart de l'effectif permanent de l'établissement de Nanterre et équivalait à une moyenne de quatre emplois permanents chaque mois ; que, mis à part les dix sept contrats destinés à pourvoir des employés absents ou malades, les trente neuf contrats restants laissent apparaître que les employés ayant occupé ces emplois ont exécuté des tâches de gestion administrative similaires à celles occupées par les agents titulaires, relevant, en tout état de cause, des tâches normales de l'établissement ;

Considérant que les mentions figurant sur les contrats conclus, au cours de la période de prévention, sur la base d'un surcroît temporaire d'activité, font état de : « situation provisoire dans l'attente du projet de refonte du DAR (divers à régulariser) » ; « retard de traitement » ; « volume important de dossiers prêts immobiliers à traiter » ; « charge supplémentaire de travail induite par la reprise des stocks » ; « surcharge de travail liée à l'apurement du retard de traitement des ouvertures de comptes migrants de la cellule OCM » ; « augmentation du volume d'ouverture des comptes » ; « surcharge de travail » ; « charge de travail de décembre non apurée et arrivée d'Orchestra » ; « mise en place d'un nouveau logiciel au service successions » ; « surcharge de travail dans la cellule opposition/ chèques » ; « mises en conformité des livrets d'épargne du personnel, situation particulière du PSC de Nanterre » ; « tâche occasionnelle définie liée à la mission d'inspection » ; « mission audits clients » ; « tâche exceptionnelle confiée à l'ensemble des PSC » ; « travaux exceptionnels dus au traitement des livrets d'épargne populaire » ; « surcroît d'activité liée une hausse de l'activité de change » ; « surcroît de travail lié au retard dans les MAJ et relances des dec » ; que, dans ses conclusions, la Société Générale invoque, à l'appui du recours aux contrats intérim, le litige avec la banque des états d'Afrique centrale (BEAC), la création d'Amundi Group intervenue en novembre 2009, la gestion de documentation d'opérations de crédits documentaires d'Automotor France, le déploiement du logiciel Orchestra et la migration des données correspondantes ainsi que la modification des comptes sur livret (CSL) du personnel ; que la banque produit divers documents justifiant, selon elle, le surcroît d'activité provoqué par ces activités ;
Considérant qu'il ressort toutefois, de cette énumération d'activités, que comme l'ont relevé les premiers juges, à l'exception du déploiement du logiciel Orchestra qui a motivé les contrats successivement conclus avec Mme Rebecca K..., celle-ci ayant été spécialement affectée à cette tâche, au cours de la période des douze mois visée à la prévention, les autres intérimaires ont assuré des tâches diverses au sein des services de l'établissement ; que ces tâches ne revêtaient aucune spécificité ni technicité particulière ni ne correspondaient au motif indiqué comme justifiant leur embauche ; que c'est à juste titre que le tribunal a souligné que, par l'embauche d'intérimaires durant quarante-neuf mois et demi, correspondant ainsi à une moyenne de quatre emplois chaque mois, la banque a engagé, dans le cadre de contrats intérim, des salariés interchangeables qui ont ainsi « constitué un simple variable d'ajustement dans le cadre d'une politique programmée « , qui consistait, en prévision, tout particulièrement, de la suppression de l'établissement, à obtenir une baisse des effectifs ; que cette situation avait pour conséquence de devoir recourir à l'emploi intérimaire, ce, en violation des prescriptions des articles L. 1242-1 et 1251-5 du code du travail ;
Considérant que c'est également de manière pertinente que les premiers juges ont fait remarquer que le recrutement de salariés intérimaires, dans des proportions massives et de manière régulière et même permanente, d'octobre 2009 à fin septembre 2010, a évité à l'employeur de gratifier ces employés des primes et avantages pécuniaires réservés aux salariés internes et permanents et facilité la fermeture, programmée et effectivement intervenue à la fin de l'année 2012, de l'établissement, nécessitant le redéploiement des seuls salariés précités ;
Considérant que ces éléments démontrent donc que l'élément matériel de l'infraction est établi, la preuve étant rapportée que les embauches de travailleurs intérimaires affectés, pour la plupart d'entre eux, à des tâches courantes et généralistes, ont eu pour volonté d'éviter, de manière durable et non temporaire, sur une année entière, dans des proportions importantes par rapport à l'ensemble de l'effectif, l'embauche de salariés en contrats à durée indéterminée ; que, s'agissant de l'élément moral, ces mêmes circonstances, conjuguées, démontrent la réelle volonté de l'employeur, et, plus spécialement, du directeur du PSC, M X..., agissant pour le compte et l'intérêt de la personne morale poursuivie, qui n'a pas contesté qu'il bénéficiait d'une entière autonomie sur le recrutement et les modalités de celui-ci ainsi que les affectations des personnes ainsi embauchées, alors que l'organisation syndicale, s'étant constituée partie civile, avait dénoncé, par courrier du 15 juin 2010, le recours excessif au travail intérim ; que la déclaration de culpabilité ne peut qu'être confirmée ;
Considérant que, s'agissant de la sanction à prononcer, le casier judiciaire de la Société Générale porte mention d'une condamnation prononcée le 27 juin 2002 à 8 000 ¿ d'amende avec sursis pour prêt de main d'oeuvre et marchandage ; qu'en application combinée des articles L 1254-3 du code du travail et 131-38 du code pénal, l'amende prononcée sera de 18 750 ¿ ; qu'en effet, même si l'article 131-38 du code pénal n'est pas mentionné dans la prévention, ces dispositions ne sont que la stricte application de la loi s'agissant de l'amende applicable aux personnes morales ; que, sur le montant de l'amende, la décision déférée sera donc infirmée ; que, de même, la peine complémentaire d'affichage prononcée sera également infirmée ;
Considérant, sur l'action civile, que les sommes allouées en première instance au syndicat dont la constitution de partie civile a été déclarée recevable, seront confirmées ; qu'en cause d'appel, une somme supplémentaire de 1 000 ¿ sera allouée à la partie civile ;

PAR CES MOTIFS,

la cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,
--- sur l'action publique,
confirme le jugement entrepris sur la culpabilité de la SA Société Générale,
l'infirmant sur la peine d'amende et sur la peine complémentaire d'affichage au siège social de la société, statuant à nouveau, condamne la SA Société Générale au paiement d'une amende correctionnelle de 18 750 ¿ et dit n'y avoir lieu à affichage,
--- sur l'action civile,
confirme le jugement entrepris,
y ajoutant,
condamne la SA Société Générale à payer à la partie civile la somme de 1 000 ¿ en cause d'appel sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale,
Si le condamné s'acquitte du montant des droits fixes de procédure et, s'il y a lieu, de l'amende dans un délai d'un mois à compter de ce jour, ce montant est diminué de 20 % sans que cette diminution puisse excéder 1. 500 ¿, le paiement de l'amende ne faisant pas obstacle à l'exercice des voies de recours et ce, en application de l'article 707-3 du code de procédure pénale. Dans le cas d'une voie de recours contre les dispositions pénales, il appartient à l'intéressé de demander la restitution des sommes versées.

La partie civile, s'étant vue allouer des dommages-intérêts mis à la charge du condamné, est informée de la possibilité de saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infraction, dans le délai d'une année à compter du présent avis, lorsque sont réunies les conditions édictées par les articles 706-3 et 706-14 du nouveau code de procédure pénale.

La personne condamnée est informée de la possibilité pour la partie civile, non éligible à la commission d'indemnisation des victimes d'infraction, de saisir le service d'aide au recouvrement des victimes d'infractions si elle ne procède pas au paiement des dommages-intérêts auxquels elle a été condamnée dans le délai de 2 mois courant à compter du jour où la décision est devenue définitive.

Et ont signé le présent arrêt, Monsieur LARMANJAT président et Madame LAMANDIN greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT

Décision soumise à un droit fixe de procédure (article 1018A du code des impôts) : 120, 00 ¿


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0028
Numéro d'arrêt : 14/784
Date de la décision : 16/10/2014

Analyses

Arrêt rendu le 16 octobre 2014 par la 9ème chambre correctionnelle des appels correctionnels de la Cour d'appel de Versailles RG 14/00784 Selon les dispositions de l'article L. 1242-1 du code du travail, « un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise ». Selon les dispositions de l'article L. 1251-5 du même code, « le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice »; Les éléments soumis à la cour démontrent que l'élément matériel de l'infraction est établi, la preuve étant rapportée que les embauches de travailleurs intérimaires affectés, pour la plupart d'entre eux, à des tâches courantes et généralistes, ont eu pour volonté d'éviter, de manière durable et non temporaire, l'embauche de salariés en contrats à durée indéterminée. S'agissant de l'élément moral, ces mêmes circonstances, conjuguées, démontrent la réelle volonté de l'employeur, d'avoir recours de manière excessive au travail intérim.


Références :

Décision attaquée : Tribunal correctionnel de Nanterre, 17 janvier 2014


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2014-10-16;14.784 ?
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