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15/10/2014 | FRANCE | N°13/02257

France | France, Cour d'appel de Versailles, 9ème chambre, 15 octobre 2014, 13/02257


COUR D'APPEL DE VERSAILLES OL Arrêt prononcé publiquement le QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE QUATORZE, par Monsieur LARMANJAT, Président de la 9ème chambre des appels correctionnels, en présence du ministère public, Nature de l'arrêt : voir dispositif Sur appel d'un jugement du tribunal correctionnel de Versailles- 5ème chambre du 25 février 2013.

COMPOSITION DE LA COUR

lors des débats, du délibéré, et au prononcé de l'arrêt
Président : Monsieur LARMANJAT Conseillers : Monsieur ARDISSON, Monsieur AUBAC, DÉCISION : voir dispositif MINISTÈRE PUBLIC : Madame FOREY,

substitut général, lors des débats

GREFFIER : Madame LAMANDIN, greffier, lors...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES OL Arrêt prononcé publiquement le QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE QUATORZE, par Monsieur LARMANJAT, Président de la 9ème chambre des appels correctionnels, en présence du ministère public, Nature de l'arrêt : voir dispositif Sur appel d'un jugement du tribunal correctionnel de Versailles- 5ème chambre du 25 février 2013.

COMPOSITION DE LA COUR

lors des débats, du délibéré, et au prononcé de l'arrêt
Président : Monsieur LARMANJAT Conseillers : Monsieur ARDISSON, Monsieur AUBAC, DÉCISION : voir dispositif MINISTÈRE PUBLIC : Madame FOREY, substitut général, lors des débats

GREFFIER : Madame LAMANDIN, greffier, lors des débats et du prononcé de l'arrêt
PARTIES EN CAUSE Bordereau No du PRÉVENU

X...René Eugène
né le 17 décembre 1948 à LES BREVIAIRES (78), Fils de X...Léon et d'Y...Thérèse, de nationalité française, marié, agriculteur,

demeurant ...
Déjà condamné, libre,
Comparant, assisté de Maître KEROUREDAN Hervé, avocat au barreau de VERSAILLES (conclusions)
RAPPEL DE LA PROCÉDURE :
LA PRÉVENTION :
X...René Eugène est prévenu :
- d'avoir à l'intersection D191/ D60 commune de LES BREVIAIRES, le 12 avril 2012, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, déversé une substance nuisible dans les eaux souterraines, superficielles ou de la mer, en l'espèce : environ 4650 litres du produit azoté M39 et du synerspray dans les canalisations et fossés bordant les D191 et D60,
faits prévus par art. l. 216-6 al. l, art. l. 211-2 c. envir. et réprimés par art. l. 216-6 al. l, art. l. 216-11 c. env1r.

LE JUGEMENT :

Par jugement contradictoire en date du 25 février 2013, le tribunal correctionnel de Versailles :
Sur l'action publique :
a déclaré X...René, Eugène coupable des faits qui lui sont reprochés ;
Pour les faits de DEVERSEMENT DE SUBSTANCE NUISIBLE DANS LES EAUX SOUTERRAINES, SUPERFICIELLES OU DE LA MER commis le 12 avril 2012 à 11 h 15 à LES BREVIAIRES Voie publique

a condamné X...René, Eugène au paiement d'une amende de deux mille euros (2000 euros) ;
Vu les articles 132-29 à 132-34 du code pénal ;
a dit qu'il sera sursis partiellement pour un montant de mille euros (1000 euros) à l'exécution de cette peine, dans les conditions prévues par ces articles
Sur l'action civile :
a déclaré irrecevable la constitution de partie civile du Syndicat des Copropriétaires du camping des Bréviaires représenté par BOUTRY Gabrielle

LES APPELS :

Appel a été interjeté par :
Monsieur X...René, le 04 mars 2013, son appel étant limité aux dispositions pénales
M. le procureur de la République, le 04 mars 2013 contre Monsieur X...René
DÉROULEMENT DES DÉBATS :
Par arrêt rendu le 29 janvier 2014, la Cour a ordonné un supplément d'information et ordonné le renvoi de l'affaire au 10 septembre 2014.
A l'audience publique du 10 septembre 2014, Monsieur le Président a constaté l'identité du prévenu ;
Le Président informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire,
Ont été entendus :
Monsieur LARMANJAT, président, en son rapport et interrogatoire,
Le prévenu, en ses explications,
Madame FOREY, substitut général, en ses réquisitions,
Maître KEROUREDAN, avocat, en sa plaidoirie,
Le prévenu a eu la parole en dernier.
Monsieur le président a ensuite averti les parties que l'arrêt serait prononcé à l'audience du 15 OCTOBRE 2014 conformément à l'article 462 du code de procédure pénale.
********
DÉCISION
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, jugeant publiquement, a rendu l'arrêt suivant :
LE RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Par arrêt avant dire droit du 29 janvier 2014 auquel il convient de se reporter pour l'exposé des faits, cette chambre a déclaré les appels recevables et a ordonné un supplément d'information.
Ce supplément d'information tendait à intégrer dans la présente procédure l'analyse de la nappe effectuée, sur instructions de l'agence régionale de santé, par suite du déversement de la citerne chargée sur le tracteur conduit par M René X....
Cette analyse effectuée, sur le caravaning des Bréviaires, le 17 avril 2012, soit cinq jours après les faits, conclut dans les termes suivants : « eau d'alimentation conforme aux exigences de qualité en vigueur pour l'ensemble des paramètres mesurés ». Par conclusions déposées à l'audience de la cour, visées par le greffier et le président, l'avocat du prévenu sollicite la relaxe de ce dernier.

Le procureur général a requis la confirmation du jugement entrepris.
le prévenu, qui a expliqué être exploitant agricole, céréalier, exploitant une surface d'environ 200 hectares, a indiqué avoir des revenus annuels de 20 000 ¿ environ. Il a eu la parole en dernier.

MOTIFS

Considérant que les faits reprochés à M René X..., tels que libellés dans la prévention, sont d'avoir, à l'intersection D 191/ D60, commune de Les Bréviaires, le 12 avril 2012, déversé une substance nuisible dans les eaux souterraines, superficielles ou de la mer, en l'espèce, environ 4650 litres du produit azoté M 39 et du synerspray dans les canalisations et fossés bordant les D 191 et D 60 ; que, selon les dispositions de l'article L 216-6 du code l'environnement, « le fait de jeter, déverser ou laisser s'écouler dans les eaux superficielles, souterraines, directement ou indirectement, un ou des substances quelconques dont l'action ou les réactions entraînent, même provisoirement des effets nuisibles sur la santé ou des dommages à la flore ou à la faune, à l'exception des dommages visés aux articles L 218-73 et L 432-2, ou des modifications significatives du régime normal d'alimentation en eau ou des limitations d'usage des zones de baignade, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 75 000 ¿ d'amende » ;
Considérant que, nonobstant les conclusions de cette analyse, effectuée au caravaning des Bréviaires, soit à un endroit éloigné du lieu de déversement, il résulte de l'enquête et des investigations que celui-ci a eu pour conséquence la nécessité de prendre, le 13 avril, soit le lendemain des faits, un arrêté préfectoral (no 000037/ 2012) interdisant la pêche et la consommation des poissons sur la commune des Bréviaires ; qu'il a également eu pour effet de suspendre le forage privé du camping précité alimentant les usagers de ce lieu en eau pour les besoins ménagers et sanitaires, obligeant, par voie de conséquence, les résidents de ce camping à se raccorder sur le réseau d'eau public ; qu'ainsi l'utilisation de l'eau par forage privé a été suspendu du 12 avril au 25 mai 2012 ;
Considérant que, s'agissant du produit contenu dans la cuve, il est établi qu'il s'agissait d'un mélange, d'une quantité supérieure à 4000 litres, composé d'une solution azotée M 39 et de Synerspray ; que comme l'indique le procès-verbal de transport et de constatations des gendarmes, le produit s'est déversé dans les fossés des routes départementales D 191 et D60 ; que ces fossés débouchent dans la rigole de liaison nord qui s'écoule jusque dans les étangs de Hollande (étangs de Bourneuf et de Pourras), situés au coeur de la forêt de Rambouillet, espace naturel protégé au titre de Natura 2000 ; que le procès-verbal précité souligne que « nous avons pu déterminer que l'engrais n'a pas été jusqu'aux étangs de Hollande, toutefois, à la première grosse pluie, l'engrais contenu dans les canalisations risque de se déverser dans les étangs » ;
Considérant que M Pascal Z..., directeur de la SMAGER, syndicat mixte d'aménagement de gestion des étangs et rigoles, a déclaré que ce type d'engrais provoque un enrichissement important des plans d'eau en les poussant à eutrophisation (accroissement des algues et des mortalités piscicoles) ; qu'après avoir déposé plainte à l'encontre du prévenu, M Z...a confirmé qu'à la première pluie, « le produit risque de se déverser dans la rigole de liaison et d'aller se déverser dans les deux étangs » ;
Considérant que M René X...a lui même précisé que le produit M 39 est composé de 30 % d'azote, 30 % d'azote totale, 7, 5 % de N ammoniacal, 7, 5 % N Nitrique et 15 % N uréique ; que le synerspray est composé de 8 % d'azote, 6, 6 % d'oxyde de potassium et de soufre ;
Considérant que les fiches techniques relatives aux compositions de ces produits mentionnent :
Synerspray : 75 % de thiosulfate d'ammonium (Agrifix) et 25 % de thiosulfate de potasse solution ;
que les fiches de données de sécurité mentionnent :
- pour l'agrifix (nom commercial du thiosulfate d'ammonium : « le produit déchargé dans l'eau peut donner lieu à une diminution importante de l'oxygène et à une augmentation de l'ammoniaque avec des conséquences négatives pour les organismes vivants », « protections pour l'environnement : éviter que le produit atteigne les égouts et les canalisations » ;
- pour Urea Ammonium Nitrate solution : dangers pour la santé : catégorie 2 : provoque une sévère irritation des yeux, l'ingestion accidentelle d'engrais à base d'urée entraîne des nausées, des vomissements violents et persistants, une excitation et des convulsions... , « conseils de prudence : porter un appareil de protection des yeux et du visage..... éviter un déversement ou une fuite supplémentaire, si cela est possible sans danger. Ne pas laisser le produit pénétrer dans les canalisations, les égouts ou les cours d'eau. » ;
Considérant qu'il est donc établi que le mélange de produits contenu dans la cuve qui s'est accidentellement déversé sur la chaussée puis dans les fossés était bien constitué, en référence aux termes de l'article L 216-6 du code de l'environnement visé dans la prévention, de substances chimiques dont l'action ou les réactions entraînent, même provisoirement des effets nuisibles sur la santé ou des dommages à la flore ou à la faune ; qu'il est surtout établi que le déversement survenu le 12 avril 2012 a eu pour conséquence de décider, par arrêté préfectoral, l'interdiction de la pêche et la consommation des poissons sur la commune des Bréviaires et que, sur instructions de l'agence régionale de la santé, il a contraint les résidents du camping des bréviaires de se raccorder, durant plusieurs semaines, du jour des faits jusqu'au 25 mai suivant, au réseau public d'alimentation en eau plutôt que d'utiliser le forage rivé les alimentant en temps normal ; qu'ainsi, ce déversement a modifié provisoirement, durant plusieurs semaines, sur instructions des autorités sanitaires, le régime normal d'alimentation en eau des personnes résidant au camping des bréviaires ;
Considérant que, dans ses écritures, par la voix de son conseil, le prévenu sollicite sa relaxe en invoquant, sur le fondement des dispositions de l'article 121-3 du code pénal, le caractère non intentionnel du déversement et l'absence de pollution soulignée par les résultats de l'analyse ; que, compte tenu de la nature du délit visé à la prévention et de ses éléments constitutifs, il n'est pas utile d'invoquer les dispositions précités relatives aux infractions non intentionnelles ; que, de surcroît, les circonstances dans lesquelles M Gérard X...a transporté la citerne, dont l'usure a été constatée, sur une remorque, vieille de quarante ans, elle même non équipée de sangles, laissent apparaître qu'en sa qualité d'agriculteur, expérimenté, le prévenu ne pouvait ignorer qu'un tel transport était dangereux et nécessitait des précautions qu'il n'a manifestement pas prises ; que ce comportement, délibéré, a eu pour résultat le déversement litigieux ; qu'en conséquence, l'intention coupable exigée par l'article 121-3 alinéa 1er du code pénal est en l'espèce constituée ;
Considérant que le jugement entrepris sera confirmé quant à la déclaration de culpabilité ; qu'il sera également confirmé sur la sanction prononcée, prise en adéquation de la gravité des faits mais aussi de leur caractère exceptionnel en regard de l'absence d'antécédent du prévenu ;
PAR CES MOTIFS :
la cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,
- confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions
Dit que l'avertissement prévu par l'article 132-29 du code pénal a été donné au condamné ;

Si le condamné s'acquitte du montant des droits fixes de procédure et, s'il y a lieu, de l'amende dans un délai d'un mois à compter de ce jour, ce montant est diminué de 20 % sans que cette diminution puisse excéder 1. 500 ¿, le paiement de l'amende ne faisant pas obstacle à l'exercice des voies de recours et ce, en application de l'article 707-3 du code de procédure pénale. Dans le cas d'une voie de recours contre les dispositions pénales, il appartient à l'intéressé de demander la restitution des sommes versées.

Et ont signé le présent arrêt, Monsieur LARMANJAT président et Madame LAMANDIN greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.

Décision soumise à un droit fixe de procédure (article 1018A du code des impôts) : 120, 00 ¿


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 13/02257
Date de la décision : 15/10/2014

Analyses

Arrêt rendu le 15 octobre 2014 par la 9ème chambre des appels correctionnels de la Cour d'appel de Versailles RG 13/02257 Il est établi que le mélange de produits contenu dans la cuve qui s'est accidentellement déversé sur la chaussée puis dans les fossés était constitué de substances chimiques dont l'action ou les réactions ont entraîné des effets nuisibles sur la santé ou des dommages à la flore ou à la faune. La Cour constate que le prévenu, en sa qualité d'agriculteur expérimenté, qui a transporté la citerne, dont l'usure a été constatée, sur une remorque, vieille de quarante ans, elle-même non équipée de sangles, ne pouvait ignorer qu'un tel transport était dangereux et nécessitait des précautions qu'il n'a pas prises. Ce comportement délibéré a eu pour résultat le déversement litigieux, la Cour retenant que l'intention coupable exigée par l'article 121-3 alinéa 1er du code pénal est constituée confirmant le jugement entrepris quant à la déclaration de culpabilité en référence aux termes de l'article L 216-6 du code de l'environnement.


Références :

Décision attaquée : Tribunal correctionnel de Versailles, 25 février 2013


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2014-10-15;13.02257 ?
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