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09/10/2014 | FRANCE | N°12/00301

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 09 octobre 2014, 12/00301


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 50D



3e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 09 OCTOBRE 2014



R.G. N° 12/00301



AFFAIRE :



[H] [Y]

...



C/



[C] [T]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Novembre 2011 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 7

N° RG : 10/07172



Expéditions exécutoires

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Copies

délivrées le :

à :

Me Pierre GUTTIN,

Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS,

Me Mélina PEDROLETTI,

Me Martine DUPUIS de la SCP LISSARRAGUE DUPUIS & ASSOCIES, Me Sophie POULAIN



REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 50D

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 09 OCTOBRE 2014

R.G. N° 12/00301

AFFAIRE :

[H] [Y]

...

C/

[C] [T]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Novembre 2011 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 7

N° RG : 10/07172

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Pierre GUTTIN,

Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS,

Me Mélina PEDROLETTI,

Me Martine DUPUIS de la SCP LISSARRAGUE DUPUIS & ASSOCIES, Me Sophie POULAIN

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE NEUF OCTOBRE DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

1/ Monsieur [H] [Y]

ayant exercé à l'enseigne LM CONSEIL, entreprise aujourd'hui radiée

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 2]

2/ SA COVEA RISKS

RCS 378 716 419

[Adresse 2]

[Localité 7]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - N° du dossier 12000027

Représentant : Me Agnès PEROT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J109

APPELANTS

3/ SCI SEVILO

N° SIRET : D422 492 470

[Adresse 4]

[Localité 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20120077

Représentant : Me Régis COLLIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1000

APPELANTE et INTIMEE

****************

1/ Monsieur [C] [T],

exerçant sous l'enseigne ATELIER PLEIN CINTRE

né le [Date naissance 2] 1945 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 - N° du dossier 00021564

Représentant : Me Antoine TIREL de la SELAS LARRIEU ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J073

INTIME

2/ SCI DOUN

[Adresse 5]

[Localité 6]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

3/ SA FRANCARE

[Adresse 6]

[Localité 3]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SCP LISSARRAGUE DUPUIS & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1249943

Représentant : Me Martin LECOMTE de l'Association De CHAUVERON VALLERY-RADOT LECOMTE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R110

INTIMEES

4/ LA MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF)

[Adresse 7]

[Localité 4]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Sophie POULAIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 180 - N° du dossier 212059

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 Juillet 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique BOISSELET, Président et Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller chargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Véronique BOISSELET, Président,

Madame Annick DE MARTEL, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Lise BESSON,

--------------

FAITS ET PROCÉDURE

Après une promesse de vente en date du 3 octobre 2005, la société Sogefimur a acquis de la SCI Sevilo, par acte authentique du 23 mai 2006, un ensemble immobilier situé à Clichy au prix de 890.000 €.

La SCI Doun était le crédit preneur, la société Sogefimur étant le crédit bailleur.

La promesse de vente (qui a été signée avec la SCI Kar, qui a le même gérant que la SCI Doun) faisait état de la présence d'amiante dans l'immeuble révélée par un rapport du BET LM Conseil (M. [Y]) en date du 19 juillet 2005.

Entre la promesse de vente et l'acte authentique, la SCI Sevilo, venderesse, a fait réaliser des travaux de désamiantage pour satisfaire aux souhaits de l'acquéreur.

Après ces travaux, le 21 mars 2006, le BET LM Conseil a établi un rapport qui a conclu à l'absence de matériaux et de produits susceptibles de contenir de l'amiante, rapport qui sera repris dans l'acte authentique.

Sous la maîtrise d'ouvrage de la SCI Doun et de sa sous-locataire, la société Francare, des travaux de rénovation des locaux ont été entrepris. Plusieurs entreprises sont intervenues sous la maîtrise d'oeuvre de Monsieur [T].

Fin 2006, à la suite de l'intervention du syndic de l'immeuble pour une fuite, la présence d'amiante sera détectée.

A la demande de la SCI Doun, un expert a été désigné par ordonnance de référé du 2 juillet 2007. Il a déposé son rapport le 26 février 2010.

En février 2008, la SCI Doun a fait assigner la SCI Sevilo, la société LM Conseil et son assureur, la société Covea Risks, devant le tribunal de grande instance de Nanterre, puis, en novembre 2010, elle a fait assigner en intervention forcée Monsieur [T], maître d'oeuvre et coordinateur SPS, et son assureur, la MAF.

Par jugement du 8 novembre 2011, le tribunal de grande instance de Nanterre a :

déclaré recevable l'action de la SCI Doun et de la SA Francare ;

écarté l'application de la clause d'exclusion de garantie figurant dans l'acte de vente du 23 mai 2006 entre la société Sevilo et la société Sogefimur ;

déclaré la société Sevilo et Monsieur [Y], exerçant sous l'enseigne LM Conseil, responsables des désordres liés à la découverte d'amiante dans les locaux sis à [Localité 9], objet de l'acte de vente du 23 mai 2006 ;

condamné la société Sevilo à payer à la SCI Doun la somme de 274.634,45 € H.T. à titre de dommages-intérêts ;

condamné Monsieur [Y], exerçant sous l'enseigne LM CONSEIL, et la SA Covea Risks à payer à la SCI Doun la somme de 202.526,68 € H.T. ;

condamné Monsieur [Y], exerçant sous l'enseigne LM CONSEIL, et la SA Covea Risks à payer à la SA Francare la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts ;

débouté la SCI Doun de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'indisponibilité de son dirigeant ;

débouté la SCI Doun et la société Sevilo de toutes leurs demandes à l'encontre de Monsieur [C] [T] et de la Mutuelle des Architectes Français ;

dit que ces sommes, hormis celle due à la SA Francare, seront assorties de la T.V.A. en vigueur à la date du présent jugement et seront indexées sur les variations de l'indice BT01 du coût de la construction à compter du 26 février 2010 et jusqu'au présent jugement ;

dit que les compagnies d'assurance ne sont tenues au paiement de ces sommes que dans les limites contractuelles de leurs polices respectives ;

condamné in solidum la société Sevilo et Monsieur [Y], exerçant sous l'enseigne LM Conseil, et son assureur, la société Covea Risks, à payer à la SCI Doun et la SA Francare la somme de 20.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté la SCI Doun et la société Sevilo de leur demande tendant à voir assortir la condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile de la T.V.A. ;

condamné in solidum la société Sevilo et Monsieur [Y], exerçant sous l'enseigne LM Conseil, et son assureur, la société Covea Risks, à payer à la SCI Doun et à la SA Francare le montant du droit proportionnel qui sera versé à l'huissier de justice en application de l'article 10 du décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996 tel que modifié par le décret n° 2001-212 du 8 mars 2001 ;

condamné in solidum la société Sevilo et Monsieur [Y], exerçant sous l'enseigne LM Conseil, et son assureur, la société Covea Risks, à payer à la MAF la somme de 2.000 € pour frais irrépétibles, à Monsieur [C] [T] exerçant sous l'enseigne Atelier Plein Cintre la somme de 2.000 € pour frais irrépétibles ;

condamné la société Sevilo et Monsieur [Y], exerçant sous l'enseigne LM Conseil, et son assureur, la société Covea Risks, aux dépens comprenant les frais de l'expertise.

Les premiers juges ont notamment considéré que :

l'acte de vente contient une clause d'exclusion de garantie des vices cachés, mais elle n'est pas applicable car la société Sevilo est un vendeur professionnel ;

la responsabilité de la société Sevilo est engagée pour la présence d'amiante qu'elle soit classée 3 ou 1 ou 2, le seul fait de devoir faire effectuer des mesures régulières diminuant l'usage des lieux et 'laissant à penser' que l'acquéreur aurait sollicité une réduction du prix de vente s'il en avait eu connaissance ;

la responsabilité de Monsieur [Y] est engagée pour ne pas avoir signalé à l'acquéreur la présence d'amiante dans les zones accessibles, 1 et 3 et écartée pour les autres zones, sa mission de repérage étant limitée aux zones accessibles ;

la SCI Doun est bien fondée à obtenir le coût du désamiantage dans tout le bâtiment 'dans la mesure où elle a manifesté sa volonté d'acheter un bien dépourvu d'amiante'.

Le tribunal a réparti les condamnations selon les zones entre le vendeur et le diagnostiqueur, et a mis hors de cause le maître d'oeuvre et coordonnateur SPS des travaux entrepris par l'acquéreur aucune faute n'étant caractérisée à son encontre (il n'avait pas à solliciter des investigations supplémentaires puisque le diagnostiqueur n'avait pas détecté la présence d'amiante et qu'il n'est pas spécialiste de l'amiante).

Monsieur [Y] (ayant exercé sous l'enseigne LM Conseil) et la société Covea Risks ont interjeté appel de cette décision le 12 janvier 2012 ; la SCI Sevilo a fait de même le 19 janvier 2012. Les procédures ont été jointes.

Dans leurs dernières conclusions du 17 juin 2014, Monsieur [Y] et la société Covea Risks demandent à la cour :

de confirmer le jugement en ce qu'il a écarté la responsabilité de Monsieur [Y] ' [Q] pour les zones 2 et 4 ;

d'infirmer le jugement en toutes ses autres dispositions ;

de débouter en conséquence la SCI Doun et la SA Francare de leurs demandes à leur encontre ;

de les condamner en tant que de besoin à restituer les sommes réglées au titre

de l'exécution provisoire ;

Subsidiairement,

de limiter toute éventuelle condamnation de LM Conseil à la somme de 53.598,55 € H.T., correspondant aux travaux dans la zone 1 ;

de débouter en tout état de cause la SCI Doun de ses demandes au titre des préjudices immatériels ;

de condamner en tout état de cause la SCI Sevilo, au titre de son obligation de délivrance, à les garantir intégralement de toute éventuelle condamnation prononcée contre eux ;

de dire que Monsieur [T] a engagé sa responsabilité en sa double qualité de maître d''uvre et de coordonnateur SPS pour n'avoir pas fait réaliser de diagnostic amiante avant travaux ;

de condamner en conséquence Monsieur [T] et son assureur, la MAF, à les garantir de toute éventuelle condamnation prononcée contre eux ;

Encore plus subsidiairement :

de dire que toute éventuelle condamnation de la société Covea Risks en qualité d'assureur de LM Conseil sera limitée à 230.000 €, montant du plafond de garantie ;

de dire qu'en cas de condamnation de LM Conseil pour une somme inférieure au plafond de garantie s'appliquera la franchise contractuelle de 450 € ;

de condamner solidairement la SCI Doun, Monsieur [T] et son assureur, la MAF, à leur payer une indemnité de 10.000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

de condamner tout succombant aux entiers dépens de première instance et d'appel.

M. [Y] rappelle les limites de sa mission, il n'a pas été mandaté dans le cadre d'un repérage avant travaux que la SCI Doun avait l'obligation de faire au regard de l'ampleur de ceux-ci. Il reconnaît son erreur pour les zones 1 et 3 mais conteste devoir une indemnisation en raison de l'absence d'obligation de désamiantage (pour la zone 3) et de l'absence de tout lien de causalité puisque c'est en réalité une perte de chance de négocier le prix de vente qui a été perdue du fait de son erreur, le diagnostiqueur n'étant pas responsable de la présence d'amiante et ne pouvant en conséquence être condamné à l'enlever. Il considère que c'est la faute de la société Doun qui n'a pas fait réaliser le diagnostic avant travaux qui est à l'origine de son préjudice et qu'il y a une faute du même point de vue de la part du maître d'oeuvre.

Aux termes de conclusions du 25 juin 2014, la société Sevilo demande à la cour, au visa des articles 1134, 1147, 1382 et 1641 du code civil, R 1334-14 et suivants du code de la santé publique, d'infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau :

de faire application de la clause d'exclusion de garantie figurant dans l'acte de vente intervenu le 23 mai 2006 entre la société Sogefimur et la société Sevilo ;

en conséquence, de juger irrecevable la SCI Doun, agissant en vertu des pouvoirs qui lui ont été conférés par la société Sogefimur, en ses demandes telles que dirigées à l'encontre de la société Sevilo, de l'en débouter ;

subsidiairement, de juger qu'il n'existe aucun engagement spécifique de sa part, tant à l'égard de la société Sogefimur que de la SCI Doun, de livrer un immeuble exempt d'amiante ;

de débouter en conséquence la SCI Doun de toutes ses demandes, fins et conclusions telles que dirigées à son encontre ;

de juger la société Francare et la SCI Doun mal fondées en leur appel incident, de les en débouter ;

plus subsidiairement, de juger que la présence d'amiante classée 1 ou 2 n'est pas constitutive d'un vice caché, ne rendant pas les lieux impropres à leur usage ni le diminuant ;

en tout état de cause, de juger que l'enlèvement de l'amiante n'est pas nécessaire dans les zones où il est classé 1 (ou 2) par l'expert judiciaire, la réglementation résultant du code de la santé publique n'exigeant qu'un contrôle périodique ;

de juger que la SCI Doun est elle-même responsable de son préjudice pour ne pas avoir fait procéder à un diagnostic avant les travaux de rénovation qui impliquaient certaines démolitions ; subsidiairement à cet égard, de juger qu'une large part de responsabilité devra être laissée à sa charge ;

plus subsidiairement encore, de juger que les sommes allouées à la SCI Doun, en vertu des pouvoirs qui lui ont été conférés par la société Sogefimur, ne doivent pas être assorties de la T.V.A., la société Sogefimur récupérant ladite taxe ; de juger que la société Francare récupère la T.V.A. ; de juger que la SCI Doun est elle-même assujettie à la T.V.A., la récupère et ne peut bénéficier de la T.V.A. sur les condamnations prononcées à son profit ; de l'en débouter ;

très subsidiairement, de condamner in solidum Monsieur [C] [T] et la Mutuelle des Architectes Français à la relever et garantir de toute condamnation prononcée à son encontre à la requête et au profit de la SCI Doun au titre des travaux de remise en état chiffrés à la somme H.T. de 163.192,77 €, T.V.A. en sus si applicable, avec actualisation, intérêts, frais et dépens ;

de juger Monsieur [C] [T] tant irrecevable que mal fondé en son appel incident dirigé à l'encontre de la société Sevilo, de l'en débouter ;

de condamner in solidum Monsieur [Y] et la société Covea Risks à la relever et garantir de toutes les condamnations qui seraient prononcées à son encontre à la requête et au profit de la SCI Doun en principal, actualisation, intérêts, frais et dépens ;

de juger irrecevables et subsidiairement mal fondés Monsieur [Y] et la société Covea Risks en leur appel en garantie dirigé à son encontre, de les en débouter ;

de condamner in solidum la SCI Doun, Monsieur [C] [T] et la Mutuelle des Architectes Français, Monsieur [Y] et la société Covea Risks à lui payer la somme de 6.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

de condamner la SCI Doun, Monsieur [T] et la M.A.F., Monsieur [Y] et la société Covea Risks sous la même solidarité aux entiers dépens.

Elle indique notamment que l'acte de vente comporte une clause spécifique à la présence d'amiante de laquelle il ne résulte nullement que l'acquéreur ait entendu acquérir un immeuble dépourvu d'amiante et une clause de non garantie des vices cachés et conteste être un vendeur professionnel. Elle souligne par contre que la société Sogefimur, qui a acquis le bien, est une professionnelle, et qu'à supposer même qu'elle-même soit jugée professionnelle, en pareil cas la clause de non garantie des vices cachés est opérante ; elle en déduit une irrecevabilité des demandes de la SCI Doun.

Sur les sommes allouées, elle conteste devoir payer le coût du désamiantage dans les zones où seules des mesures de surveillance sont préconisées (il y a un récent contrôle du 7 janvier 2013 qui révèle qu'aucune fibre d'amiante n'a été détectée dans l'atmosphère), cette situation ne constituant pas un vice caché car l'usage de l'immeuble n'est pas diminué, les mesures de surveillance à réaliser tous les 3 ans étant d'un coût modeste.

Elle souligne les fautes de la SCI Doun qui n'a pas cru faire établir un diagnostic avant travaux de démolition alors que cela est obligatoire (R 1334-19 du code de la santé publique) et aurait permis de mettre en évidence la présence d'amiante plus tôt, rendant moins coûteux les travaux de retrait ou de confinement et inutiles les travaux de remise en état.

Elle ajoute que la demande de garantie formée à son encontre par Monsieur [Y] et la société Covea Risks, nouvelle en cause d'appel, et donc irrecevable.

Aux termes de conclusions en date du 24 juin 2014, la SCI Doun et la société Francare demandent à la cour de débouter la SCI Sevilo, Monsieur [Y] et son assureur, la société Covea Risks, de leurs appels, de confirmer le jugement prononcé le 8 novembre 2011 par le tribunal de grande instance de NANTERRE, excepté du chef de l'indemnísation de leurs préjudices et vus la réponse ministérielle n° 58693 du 27 septembre 2005, les articles R. 1334-14 et suivants du code de la santé publique, l'arrêté du 22 août 2002, de :

- Sur les responsabilités

de juger que la présence d'amiante dans l'immeuble vendu par la SCI Sevilo à la SCI Doun constitue un vice caché ;

de juger que toute clause d'exclusion de garantie est inapplicable ;

de juger que la SCI Sevilo est tenue de garantir la SCI Doun à raison du vice

caché que constitue la présence d'amiante dans l'immeuble vendu ;

de juger que Monsieur [Y], exerçant sous le nom commercial Bureau d'études LM Conseil, a commis une faute en lien direct de causalité avec le préjudice éprouvé par la SCI Doun et la SA Francare en ne signalant pas la présence d'amiante dans son rapport de mission de repérage des matériaux et produits contenant de l'amiante du 21 mars 2006, et en s'abstenant de préconiser des investigations et des mesures complémentaires ;

de juger que la SCI Doun et la société Francare sont en droit d'obtenir la réparation de l'intégralité de leur préjudice, quelle que soit la répartition des fautes adoptée par la cour et l'issue des appels en garantie formés par les appelants.

- Sur les préjudices

Au titre des préjudices matériels :

de confirmer le jugement en ce qu'i1 a :

- condamné la société Sevilo à payer à la SCI Doun la somme de 274.634,45 € HT à titre de dommages-intérêts ;

- condamné Monsieur [Y], exerçant sous l'enseigne LM Conseil, et la SA Covea Risks à payer à la SCI Doun la somme de 202.526,68 € HT ;

- condamné Monsieur [Y], exerçant sous l'enseigne LM Conseil, et la SA Covea Risks à payer à la SA Francare la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts ;

- .jugé que ces sommes, hormis celle due à la société Francare, seront assorties de la TVA en vigueur au jour du jugement et de la variation de l'indice BT 01 du coût de la construction entre le 26 février 2010 et le jugement,

- condamné in solidum la SCI Sevilo et Monsieur [Y], exerçant sous l'enseigne LM Conseil, et son assureur, la société Covea Risks, au paiement de la somme de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, du droit proportionnel dû à l'huissier de justice en application de l'article 10 du décret du 12/12/1996 modifié par décret du 8 mars 2001, des dépens et frais d'expertise.

Si par impossible la cour faisait droit à 1'appe1 de la SCI Sevilo vis-à-vis de la SCI Doun :

de constater que la SCI Sevilo a demandé à la cour de juger que Monsieur [Y] était responsable du fait de son erreur de diagnostic pour la totalité des zones décrites par l'expert,

en conséquence, de condamner Monsieur [Y] in solidum avec son assureur, la société Covea Risks, à payer à la SCI Doun la somme de 482.172,10 € HT correspondant au coût du désamiantage complet, outre la TVA et l'indexation en fonction de la variation de l'indice BT 01 du coût de la construction entre le 26 février 2010 et la date du jugement.

Au titre des préjudices immatériels :

de condamner in solidum la SCI Sevilo, Monsieur [Y] et son assureur, la société Covea Risks, à payer :

- à la SA Francare, la somme de 156.555,55 € H'I`,

- à la SCI Doun, la somme de 57.830,60 € HT ;

Vu le jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nanterre du 4 avril 2014, de déclarer irrecevable et mal fondée la demande de la société Covea Risks au titre du plafonnement de sa garantie.

Subsidiairement, de condamner M. [T], exerçant sous l'enseigne Atelier Plein Cintre et son assureur, la société MAF, à garantir la SCI Doun et la société Francare de toutes les condamnations éventuellement prononcées à leur encontre ou de toute somme laissée à leur charge, et les condamner à payer à la SCI Doun le montant de ces sommes ainsi que les dépens comprenant les frais d'expertise.

Au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour, de condamner in solidum la SCI Sevilo, Monsieur [Y] et son assureur, la société Covea Risks, à leur verser la somme de 20.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et de les condamner aux entiers dépens d'appeI.

La SCI Doun fait notamment valoir que la SCI Sevilo est un professionnel de la vente immobilière qui connaissait la présence d'amiante dans les bâtiments vendus et ne peut donc pas se prévaloir de la clause de non garantie inopposable à la SCI Doun qui n'est pas un professionnel.

Elle indique que Monsieur [Y] aurait dû, sans même procéder à des sondages destructifs, constater la présence d'amiante dans les zones 1 et 3, puis se poser la question de la présence d'amiante dans les zones 2 et 4, situées au milieu des zones 1 et 3, et procéder à des investigations complémentaires dans ces zones.

Elle ajoute qu'elle n'avait pas l'obligation de procéder à un repérage plus poussé de l'amiante dès lors que les travaux n'emportaient pas une démolition structurelle de l'immeuble, que l'expert a d'ailleurs exclu qu'ils relèvent de l'article R 1334-19 du CSP. Si sa faute était retenue, elle sollicite la garantie de M. [T] et de son assureur puisque le maître d'oeuvre et coordonnateur SPS devait l'alerter sur la nécessité de procéder à des sondages complémentaires.

Dans des conclusions du 1er août 2012, Monsieur [T], exerçant sous l'enseigne Atelier Plein Cintre, demande à la cour :

de débouter Monsieur [Y] et son assureur, la société Covea Risks, de leur appel,

de constater que ni Monsieur [Y] et son assureur, la société Covea Risks, ni la société Sevilo ne rapportent la preuve d'un manquement de sa part,

de confirmer par conséquent le jugement des premiers'juges en ce qu'il l'a mis hors de cause' et de rejeter tout appel en garantie présenté à son encontre.

Subsidiairement, au visa des articles 1382 et 1383 du code civil, il prie la cour de condamner Monsieur [Y], exerçant sous le nom commercial «'Bureau d'études [Q]'», et son assureur, la société Covea Risks, ainsi que la SCI Sevilo au titre de son obligation de délivrance, à le relever et garantir de toutes condamnations qui pourraient être mises à sa charge.

En tout état de cause, il demande la condamnation de Monsieur [Y], la société Covea Risks ou la société Sevilo à lui verser la somme de 4.000'€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Par conclusions du 8 août 2012, la MAF prie la cour :

de juger que la responsabilité de Monsieur [T] n'est pas engagée, de le mettre hors de cause et de dire en conséquence la mise en cause de la MAF sans objet,

de constater qu'au mépris des obligations de sa police d'assurance, Monsieur [T] n'a pas déclaré ce chantier à son assureur au titre des exercices 2006 et 2007, période au cours de laquelle il a oeuvré, ni payé la moindre cotisation à cette occasion, que ce soit au titre de son activité de maîtrise d'oeuvre ou de coordonnateur SPS, et, en conséquence, de la juger bien fondée à se prévaloir du mécanisme de la réduction proportionnelle de l'indemnité éventuellement due conformément à l'article L 113-9 du code des assurances,

de dire en l'espèce que l'indemnité qu'elle aurait pu devoir se trouve réduite à néant,

de la mettre hors de cause sur les demandes en garantie,

à titre subsidiaire, de limiter les prétentions de la SCI Doun conformément aux préconisations de l'expert judiciaire et de dire que le recours de la SCI Doun ne pourra s'exercer que sur cette base, pour la seule part qui viendrait à rester à sa charge et sous réserve de justificatifs probants en ce qui concerne les immatériels,

de confirmer le jugement en ce qu'il lui a alloué la somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles à la charge de la SCI Sevilo, de Monsieur [Y] et de la société Covea Risks et en ce qui concerne les dépens,

de condamner la SCI Doun, la SCI Sevilo, Monsieur [Y] et la société Covea Risks in solidum à lui payer la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en appel et à supporter les dépens.

Pour un exposé plus ample des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 26 juin 2014.

MOTIFS

Il convient de préciser que la recevabilité de l'action de la SCI Doun, en ce qu'elle a la qualité de crédit-preneur et celle de la société Francare, sous-locataire de la SCI Doun, ne sont plus discutées.

L'expert judiciaire a classé en quatre zones différentes les endroits où a été détectée la présence d'amiante :

zone 1 : l'amiante (flocage) est classée 3 et était visible sans investigations destructrices lors du repérage vente

zone 2 : l'amiante (flocage) est classée 3 et n'était pas visible sans investigations destructrices lors du repérage vente

zone 3 : l'amiante (flocage) est classée 1 (ou 2) et était visible sans investigations destructrices lors du repérage vente

zone 4 : l'amiante (flocage) est classée 1 (ou 2) et n'était pas visible sans investigations destructrices lors du repérage vente.

Lorsque le flocage est classé 3, les travaux d'enlèvement doivent être réalisés dans un délai de trois ans après la diffusion du repérage.

Lorsqu'il est classé en 2 et 1, des constats périodiques d'état sont à réaliser ainsi que des mesures d'empoussièrement dans le cas de classement 2.

- Sur la responsabilité du vendeur

Il était indiqué dans l'acte de vente : 'l'acquéreur (la société Sogefimur) fera son affaire personnelle des conclusions et prescriptions contenues dans les diagnostics, repérages, constats et Dossier Technique Amiante ci-dessus relatés ainsi que des obligations qui en résultent pour le propriétaire, le tout sans recours contre le vendeur ainsi que l'acquéreur s'y oblige expressément. Le vendeur subroge l'acquéreur dans tous ses droits à l'encontre des diagnostiqueurs ayant procédé aux audits ci-dessus visés'.

Une clause plus large de non garantie des vices cachés était également contenue dans l'acte.

Au regard de ces dispositions contractuelles, il ne peut être soutenu que la SCI Sevilo avait pris l'engagement de livrer à l'acquéreur un immeuble exempt d'amiante. La seule circonstance qu'elle se soit engagée dans la promesse de vente à retirer les dalles plastiques dont la colle était amiantée selon le 1er rapport de LM Conseil du 19 juillet 2005, et qu'elle ait fait réaliser ces travaux ne modifie en rien la teneur des obligations contractées lors de la vente.

La SCI Doun a, dans l'article 38 de l'acte de vente, pris connaissance de celui-ci et notamment 'des droits, obligations et conditions particulières qu'il comporte'.

Dans le contrat de crédit-bail du 23 mai 2006, sous le titre 'A- Etat des lieux', il est indiqué que le crédit-preneur ne pourra intenter aucun recours contre le crédit-bailleur à raison de vices cachés, mais qu'il se voit conférer les pouvoirs pour exercer à ses frais 'tout recours contre les entreprises, contre le maître d'oeuvre ou tout autre tiers concerné'.

Il en résulte que l'action de garantie peut être exercée directement par l'utilisateur, même s'il n'est pas immédiatement acheteur et propriétaire du bien loué, dès lors que le bénéfice de la garantie lui a été transféré par la société de crédit-bail.

La société Sogefimur est à l'évidence, en sa qualité de société pratiquant le crédit-bail dans le domaine de l'immobilier, une professionnelle.

Or, c'est bien elle qui est titulaire de l'action en garantie exercée par la SCI Doun, à laquelle elle l'a transmise.

A supposer qu'il faille, pour évaluer l'opposabilité des clauses d'exclusion de garantie contenues dans l'acte de vente, se pencher sur la qualité, non pas du crédit-bailleur, qui est pourtant l'acquéreur, mais sur celle du crédit-preneur exerçant en ses lieu et place, l'action en garantie, force est de constater à la seule lecture de l'objet social de la SCI Doun, que celle-ci ne se présente pas comme une SCI familiale créée pour financer l'acquisition de la maison d'habitation de ses associés, puisque cet objet est ainsi défini : 'l'acquisition, la gestion, la location et l'administration d'immeubles et de toutes opérations financières mobilières ou immobilières se rattachant directement ou indirectement à cet objet et susceptibles d'en favoriser la réalisation à condition toutefois d'en respecter le caractère civil'.

Quant à la SCI Sevilo, la seule lecture de son objet social ('la prise en crédit-bail immobilier, l'acquisition de quelle que nature que ce soit (achat, échange, apport), la prise à bail avec ou sans promesse de vente, la gestion, l'administration, l'exploitation par bail ou location de tous biens immobiliers ou tous droits sociaux donnant vocation à la jouissance et à l'attribution de tous biens immobiliers, la souscription de tous emprunts pour la réalisation de ces opérations et la fourniture de toutes garanties et généralement toutes opérations quelconques pouvant se rattacher directement ou indirectement à l'objet social pourvu que ces opérations ne modifient pas le caractère civil de la société' suffit à asseoir sa qualité de professionnelle, sans qu'il soit nécessaire de se pencher sur les compétences de ses associés.

Il apparaît donc que la vente est intervenue entre professionnels.

Lorsque l'acquéreur est de la même spécialité que le vendeur, il est de principe que les conventions restreignant ou écartant la garantie contre les vices cachés doivent produire leurs effets.

Par suite, ce n'est que si la preuve est faite de ce que le vendeur, la SCI Sevilo, avait connaissance du vice en cause, que l'application de la clause de non garantie pourrait être écartée.

La SCI Doun prétend que la venderesse lui a vendu cet immeuble en sachant qu'il contenait de l'amiante, nonobstant le diagnostic négatif établi par LM Conseil.

Pour accréditer cette accusation, elle s'appuie sur le rapport de la société Coteba de 1997 et la convention de vérification technique conclue le 11 octobre 2010 entre la SCI Sevilo et la société Socotec.

Ce second document ne constitue qu'un devis que la SCI Sevilo a sollicité de la société Socotec pour évaluer le coût d'un contrôle de l'amiante (vérification de l'absence de dispersion), et était destiné à démontrer que ce type de vérification à réaliser tous les trois ans n'était pas coûteux (400 € HT). Il ne prouve donc nullement une déloyauté contractuelle de la SCI Sevilo.

S'agissant du rapport de la société Coteba, il a été établi près de deux ans avant que la SCI Sevilo n'acquière le bien en cause et portait sur la totalité de l'ensemble immobilier, dont la SCI Sevilo n'a acquis que certains lots. Or, s'agissant des locaux en cause en l'espèce, la société Coteba n'avait pas repéré la présence d'amiante.

En conséquence, la SCI Doun ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que la SCI Sevilo ait eu connaissance de la présence d'amiante dans les locaux vendus.

Ainsi, le vendeur avait pour seule obligation de faire procéder aux diagnostics prévus par la loi s'agissant de la présence d'amiante. Il s'en est remis à un professionnel sur cette question éminemment technique. En conséquence, dès lors qu'il s'est acquitté de cette obligation, les clauses exonératoires de garantie ont vocation à s'appliquer.

La SCI Doun sera donc déboutée de toutes ses demandes dirigées à l'encontre de la SCI Sevilo et le jugement infirmé de ce chef.

- Sur la responsabilité de M. [Y] ([Q])

La responsabilité de l'expert en diagnostic ne peut être recherchée par la SCI Doun et la société Francare que sur le fondement de l'article 1382 du code civil puisque seule la SCI Sevilo a contracté avec LM Conseil.

La SCI Doun et la société Francare critiquent les premiers juges en ce qu'ils ont limité la responsabilité de M. [Y] aux seules zones dans lesquelles l'amiante pouvait être détectée sans sondage destructif, considérant qu'il aurait dû émettre des réserves et attirer l'attention de son client sur la nécessité d'investigations complémentaires dans les zones où l'amiante n'était pas visible.

M. [Y] ne conteste pas sa faute en ce qui concerne l'absence de repérage de l'amiante dans les zones 1 et 3.

S'agissant des zones 2 et 4, l'expert a clairement indiqué que dans ces zones centrales, le repérage nécessitait des investigations destructrices, puisque l'amiante était en sous-face des faux-plafonds en plâtre, ce qui ne pouvait se détecter que dans le cadre d'un diagnostic avant travaux, lequel s'effectue sur la base de sondages destructifs.

Il n'y a donc pas lieu de reprocher une faute à M. [Y] s'agissant des zones 2 et 4, pas plus qu'un manquement à son obligation de conseil, le texte réglementaire régissant sa mission ne prévoyant l'émission de réserves et la préconisation d'investigations complémentaires que lorsque 'certains locaux ne sont pas accessibles', ce qui ne correspond nullement au cas d'espèce, les zones 2 et 4 étant visibles et accessibles.

Il était d'ailleurs indiqué dans le diagnostic de LM Conseil, sous le titre 'limite de la technique de repérage' : l'attention est attirée sur le fait que la recherche de matériaux et produits contenant de l'amiante a été limitée aux parties du bâtiment accessibles et visibles sans utilisation d'équipements spécifiques tels que nacelle ou échafaudage. Cette recherche ne comporte aucun démontage hormis le soulèvement de plaques de faux plafonds ou trappes de visite, ni investigations destructives à l'exclusion des prélèvements de matériaux. En conséquence, notre responsabilité ne saurait être engagée en cas de découverte ultérieure de matériaux amiantés dans les endroits non accessibles ou hermétiquement clos lors de la visite.

En conséquence, c'est à raison que le tribunal a considéré que la faute de M. [Y] était limitée aux zones 1 et 3 et que sa responsabilité n'était pas en cause pour les zones 2 et 4.

S'agissant des conséquences de cette faute, le préjudice imputable à M. [Y] ne peut s'analyser que comme une perte de chance pour la SCI Doun de négocier un meilleur prix compte tenu de la présence d'amiante dans les zones 1 et 3.

Il convient d'examiner les éléments qui auraient pu être retenus pour obtenir une diminution du prix, si le diagnostic de M. [Y] n'avait pas été erroné.

S'agissant de la zone 1 (flocage classé 3, les travaux d'enlèvement doivent être réalisés dans un délai de trois ans après la diffusion du repérage), puisque la SCI Doun avait obtenu de la SCI Sevilo, sur la base du premier rapport de LM Conseil, la réalisation de travaux destinés à retirer les matériaux (colle de dalles) qui avaient été repérés comme contenant de l'amiante, elle pouvait envisager de faire la même demande pour cette zone, dont le coût du désamiantage et de la remise en état a été évalué par l'expert (frais annexes inclus) à la somme de 64.103,87 € HT.

S'agissant de la zone 3, le flocage est classé 1 ou 2, ce qui signifie que l'amiante n'est pas dégradée mais qu'il est nécessaire de réaliser des contrôles périodiques et des mesures d'empoussièrement. La SCI Doun se permet de citer l'expert comme suit (page 29 de ses écritures)'la nécessité de faire effectuer des mesures régulières pour les flocages de classe 1 ou 2 diminue l'usage des lieux' obligation qui 'rend la gestion de ce bien plus difficile et plus onéreuse' (page 35 du rapport), alors que la citation exacte est : 'la présence d'amiante classe 1 (souligné par la cour) ... rend la gestion de ce bien plus difficile et plus onéreuse'. Il apparaît donc que la nécessité de surveiller l'évolution du flocage dans la zone 3 ne compromet nullement l'usage du bien et constitue seulement une contrainte, assez peu coûteuse comme le montre le devis de la société Socotec produit par la SCI Sevilo (400 € HT/an). Il n'y a donc pas lieu d'évaluer la perte de chance de négocier une baisse du prix de vente à l'aune du coût des travaux de désamiantage et de remise en état de cette zone 3 (124.144,08 € HT). Il sera ainsi considéré que l'acquéreur pouvait solliciter la prise en charge par le vendeur de cinq campagnes de mesures d'empoussièrement, nécessaires pour s'assurer de l'absence de dispersion de l'amiante.

L'expert a précisé que les travaux dans la seule zone 1 ne nécessitaient pas le déménagement du mobilier. Il n'y a donc pas lieu de tenir compte des frais 'liés à la nécessité d'évacuer les locaux pendant la durée des travaux' évalués à 20.043 € HT par la SCI Doun dans le préjudice imputable à la faute de M. [Y].

La SCI Doun a dû exposer des frais pour 4.940 € HT afin de faire réaliser une étude pour le dossier technique amiante et des prélèvements ou analyses d'air, dépense validée par l'expert.

Il en sera tenu compte dans l'évaluation du préjudice imputable à M. [Y].

Les autres préjudices allégués par la SCI Doun ('indisponibilité de son dirigeant' et coût de désamiantage et de remise en état des zones 2 et 4) ne sauraient être pris en compte dès lors qu'ils ne présentent pas de lien de causalité direct et certain avec la faute de M. [Y].

Il en est de même des préjudices allégués par la société Francare (loyers exposés et 'amortissement des travaux').

En l'état des éléments dont dispose la cour, la perte de chance pour la SCI Doun de négocier une réduction du prix de vente sera estimée à 90 %.

En conséquence, M. [Y] sera condamné à payer à la SCI Doun la somme de 64.000 €.

La société Covea Risks sera condamnée in solidum avec lui, sous déduction de sa franchise, laquelle est parfaitement opposable à la SCI Doun en application des dispositions de l'article L 112-6 du code des assurances. La circonstance que la société Covea Risks n'ait pas poursuivi devant le juge de l'exécution la procédure qu'elle avait introduite pour contester la saisie-attribution pratiquée le 4 janvier 2013 par la SCI Doun n'ayant aucune incidence sur les limites contractuelles qu'elle est en droit de lui opposer.

Sur la demande de restitution des sommes versées en exécution du jugement entrepris, il sera constaté que le présent arrêt en ce qu'il infirme la décision de première instance, constitue un titre suffisant pour obtenir le remboursement des sommes indûment perçues par la SCI Doun et la société Francare.

- Sur la responsabilité de M. [T]

C'est à raison que le tribunal a écarté la responsabilité du maître d'oeuvre auquel il est reproché de ne pas avoir fait établir de diagnostic amiante avant la réalisation des travaux dans les locaux.

En effet, et ainsi que l'expert l'a clairement rappelé, en l'état des textes applicables à l'époque, le diagnostic avant travaux n'était obligatoire qu'en cas de travaux consistant en une démolition. Or, parfaitement informé de la nature des travaux réalisés par la SCI Doun et la société Francare, l'expert a considéré que ceux-ci ne s'apparentaient pas à des travaux de démolition, et que le maître d'oeuvre ne pouvait se voir imputer une faute de ce chef. La cour partage cette analyse, les travaux réalisés, qui n'ont pas eu pour conséquence de porter atteinte à la structure de l'immeuble, ne pouvant être assimilés à des travaux de démolition.

En conséquence, il n'y a pas lieu de retenir à l'encontre de M. [T], maître d'oeuvre et coordonnateur SPS, une faute à l'origine des préjudices allégués par la SCI Doun et la société Francare. Il peut être ajouté, de manière surabondante, qu'à supposer qu'un diagnostic avant travaux eût été obligatoire, M. [T] n'aurait pas été responsable de la présence d'amiante dans les locaux et la SCI Doun aurait dû exposer le coût des travaux de désamiantage et de remise en état des lieux. Tout au plus M. [T], s'il avait commis une faute, n'aurait pu se voir imputer que les préjudices résultant du retard dans la découverte des matériaux amiantés.

- Sur les demandes de garantie

Compte tenu du sens de la présente décision, les demandes en garanties formées par M. [Y] et son assureur contre le vendeur, la SCI Doun et M. [T] sont sans objet.

En l'absence de faute de M. [T], la demande en garantie formée à son encontre par la SCI Doun et la société Francare doit être rejetée.

- Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement étant infirmé en toutes ses dispositions, il convient de condamner M. [Y] et la société Covea Risks à supporter les dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais de l'expertise.

Il convient de préciser que selon l'article 32 alinéa 1er de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991, les frais d'exécution forcée sont en principe à la charge du débiteur, à l'exception des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement mis à la charge des créanciers dans les conditions fixées par décret en Conseil d'état.

Ces droits proportionnels sont donc toujours à la charge du créancier.

Enfin, M. [Y] et la société Covea Risks seront également condamnés in solidum à payer à la SCI Doun et la société Francare la somme de 6.000 €, à la société Sevilo la somme de 6.000 €, à M. [T] la somme de 4.000 € et à la MAF la somme de 4.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

Déboute la SCI Doun et la société Francare de toutes leurs demandes à l'encontre de la SCI Sevilo,

Condamne in solidum M. [Y] et la société Covea Risks, cette dernière sous déduction de la franchise contractuelle, à payer à la SCI Doun la somme de 64.000 € à titre de dommages-intérêts,

Déboute la SCI Doun et la société Francare du surplus de leurs demandes indemnitaires et de leur demande de garantie,

Déboute M. [Y] de ses demandes de garantie,

Condamne in solidum M. [Y] et la société Covea Risks au paiement des dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise,

Condamne in solidum M. [Y] et la société Covea Risks à payer à la SCI Doun et la société Francare la somme de 6.000 €, à la société Sevilo la somme de 6.000 €, à M. [T] la somme de 4.000 € et à la MAF la somme de 4.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 12/00301
Date de la décision : 09/10/2014

Références :

Cour d'appel de Versailles 03, arrêt n°12/00301 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-09;12.00301 ?
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