COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
17e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 08 OCTOBRE 2014
R.G. N° 13/01779
AFFAIRE :
[Z] [H] épouse [U]
C/
SAS ASTELLAS PHARMA
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Février 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE
Section : Encadrement
N° RG : 09/03627
Copies exécutoires délivrées à :
Me Alina PARAGYIOS
Me Etienne PUJOL
Copies certifiées conformes délivrées à :
[Z] [H] épouse [U]
SAS ASTELLAS PHARMA
le : 09 octobre 2014
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE HUIT OCTOBRE DEUX MILLE QUATORZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [Z] [H] épouse [U]
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentée par Me Alina PARAGYIOS, avocat au barreau de PARIS,
vestiaire : A0374
APPELANTE
****************
SAS ASTELLAS PHARMA
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Etienne PUJOL, avocat au barreau de PARIS,
vestiaire : P0014
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Juin 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle LACABARATS, Président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Isabelle LACABARATS, Président,
Madame Clotilde MAUGENDRE, Conseiller,
Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Christine LECLERC,
Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre (section Encadrement) du 13 février 2012 qui a :
- dit que le licenciement pour faute grave était justifié,
- condamné la société ASTELLAS PHARMA à verser à Madame [H] épouse [U] les sommes de :
. 3 500 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure,
. 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté Madame [H] épouse [U] du surplus de ses demandes,
- débouté la société ASTELLAS PHARMA de ses demandes,
- laissé les dépens à la charge des parties pour ce qui les concerne,
Vu la déclaration d'appel adressée au greffe le 13 mars 2012 pour Madame [Z] [H] épouse [U],
Vu l'ordonnance de radiation prononcée le 10 avril 2013, les parties n'étant pas en état et la réinscription de l'affaire au rôle de la cour le 24 avril 2013,
Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil pour Madame [Z] [H] ex-épouse [U] qui demande à la cour, infirmant le jugement, de :
- constater les faits de harcèlement moral qu'elle a subis,
- constater la nullité de son licenciement,
- condamner la société ASTELLAS PHARMA au paiement des sommes de :
. 2 568,72 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté,
. 18 000 euros à titre de rappel de prime de résultats,
. 14 280,84 euros au titre du préavis non effectué et 1 428,08 euros au titre des congés payés y afférents,
. 211,57 euros de rappel de salaire,
. 2 888,67 euros au titre du pécule de vacances,
. 9,21 jours de RTT,
. 15 708,92 euros au titre 'des indemnités conventionnelles de licenciement',
. 71 500 euros à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement,
. 57 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct,
. 3 500 euros pour non-respect de la procédure disciplinaire,
- dire que les intérêts au taux légal courent à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation pour les créances salariales et à compter de la décision pour les dommages-intérêts,
- condamner la société ASTELLAS PHARMA à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil pour la SAS ASTELLAS PHARMA qui entend voir :
à titre principal,
- confirmer partiellement le jugement en ce qu'il a considéré qu'il n'y avait pas de harcèlement moral et que le licenciement pour faute grave était justifié,
- infirmer le jugement en ce qu'il a considéré que la procédure de licenciement n'avait pas été respectée,
en conséquence,
- débouter la salariée de l'intégralité de ses demandes,
- la condamner aux dépens et au paiement d'une somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
subsidiairement,
- réduire le montant de l'indemnité compensatrice de préavis à hauteur de 11 019,51 euros et les congés payés afférents à 1 101,95 euros,
- réduire le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement à hauteur de 13 328,78 euros,
- réduire le montant des dommages-intérêts pour licenciement nul à hauteur de 22 039,02 euros,
LA COUR,
Considérant que Madame [H] a été engagée à compter du 8 mars 1998, en qualité de déléguée médicale exclusive, groupe 5, niveau B, par la société YAMANOUCHI PHARMA, devenue ASTELLAS PHARMA, qui a pour activité la fabrication et la vente de produits pharmaceutiques et l'exploitation de médicaments et de spécialités pharmaceutiques et applique la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique ;
Qu' à compter du 1er septembre 2005, Madame [H] a été nommée déléguée médicale hospitalière, groupe 6 niveau B, statut cadre ;
Que Madame [H] a été convoquée à un entretien préalable à sanction le 12 octobre 2006 à la suite duquel un avertissement lui a été notifié, le 16 octobre 2006, pour utilisation abusive de la messagerie internet ;
Que, le 25 octobre 2006, à la suite d'un malaise sur le lieu du travail, elle a été placée en arrêt maladie ;
Qu'elle a contesté cet avertissement par lettre du 26 octobre 2006 en dénonçant le harcèlement dont elle était victime ;
Que, le 26 novembre 2006, elle a alerté l'inspection du travail ;
Que, le 5 janvier 2007, dans le cadre d'une visite de reprise, le médecin du travail a émis l'avis suivant : ' Apte à reprendre mais envisager aménagement de poste. A revoir dans six mois ' ;
Que, le 11 janvier, Madame [H] a écrit à la DRH pour faire observer que son poste n'avait pas été aménagé et rappeler que rien n'avait non plus été fait pour mettre un terme au harcèlement qu'elle avait évoqué ;
Que, les 11 et 12 janvier, elle a saisi l'inspecteur du travail et les délégués du personnel de sa situation ;
Que Madame [H] a été à nouveau placée en arrêt de travail du 13 janvier au 28 février ;
Que, le 9 mars, le médecin du travail l'a déclarée ' apte à reprendre un poste aménagé hiérarchiquement (à l'hôpital ou en ville) ' ;
Que, le 16 mars, les délégués du personnel ayant demandé à la direction de faire une enquête sur la plainte pour harcèlement moral, la direction leur a répondu qu'une enquête était en cours depuis octobre 2006 et qu'elle était en attente de pièces étayant ces dires ;
Que, le même jour, la DRH a adressé à Madame [H] une liste des postes qui lui étaient ' ouverts au titre du reclassement dans le cadre de l'aménagement hiérarchique ' préconisé par le médecin du travail ; que la salariée les a refusés par lettre du 29 mars en raison de leur éloignement ou de la perte de salaire qu'ils entraîneraient et qui constituaient une modification de son contrat de travail ;
Que, par lettre recommandée avec avis de réception du 21 mars, la DRH a indiqué à Madame [H] être dans l'attente de sa communication de faits précis étayant ses allégations ;
Que, le 11 avril 2007, dans le cadre d'une visite réalisée à la demande de l'employeur, le médecin du travail a conclu : ' apte au poste actuel en attendant. Aménagement hiérarchique si nécessaire en fonction des résultats de l'enquête sur la réalité des faits ' ;
Que, le 11 avril 2007, le conseil de Madame [H] a saisi le conseil de prud'hommes aux fins, notamment, d'expertise en vue d'une enquête dont elle a saisi son employeur pour harcèlement ;
Que Madame [H] a été à nouveau en arrêt de travail du 14 avril au 13 mai 2007 ;
Que, convoquée par courrier du 4 juin 2007 à un entretien préalable fixé au 8 juin 2007, Madame [H] a été licenciée pour faute grave par lettre du 14 juin 2007 énonçant :
' Cela fait plusieurs mois à présent que vous prétendez faire l'objet d'un harcèlement moral de la part de Monsieur [T] [Y], votre supérieur hiérarchique. Vous avez ainsi indiqué, dans votre courrier du 26 octobre 2006, que l'avertissement que vous veniez de recevoir était ce que Monsieur [Y] voulait. Pourtant, Monsieur [Y] n'avait rien à voir avec votre envoi intempestif de courriels aux salariés sur les discussions en cours avec nos représentants du personnel. Dans ce même courrier, vous me promettiez de revenir vers moi dès que vous le pourriez avec des explications plus précises au sujet de votre prétendu harcèlement moral, ce que vous n'avez jamais fait.
Par courrier daté du 13 décembre, vous me demandiez d'intervenir ou de vous apporter une réponse concrète pour régler cette question de représailles, sans plus de détails sur ce que cela recouvrait.
Nous avons donc eu un long entretien le 8 janvier. Au cours des trois heures qu'il a duré, je vous ai demandé de m'apporter des preuves de vos allégations et vous ai également proposé d'organiser une réunion tripartite en ma présence avec Monsieur [Y] pour mener mon enquête contradictoire au plus vite.
Par courrier du 11 janvier, vous m'informiez de ce que vous entendiez saisir les délégués du personnel pour qu'ils interviennent. J'ai bel et bien évoqué votre situation avec le CHSCT en janvier et les délégués du personnel le 16 mars.
Nous nous sommes vues à plusieurs reprises en avril et mai au sujet de ce prétendu harcèlement, en présence du Directeur Général de notre société qui attache, vous le savez, la plus grande importance aux faits de harcèlement pour éviter qu'ils ne se produisent. A chaque fois vous avanciez une raison pour vous soustraire à cette demande. Nous n'avons toujours, à ce jour, aucun moyen de vérifier la véracité de vos propos.
En dernier lieu, vous m'avez produit lors de notre entretien du 8 courant trois e-mails, rédigés et visiblement envoyés par vous à Monsieur [Y], datés du 1er semestre 2006... Vous en conviendrez, cela ne suffit pas à démontrer un harcèlement de sa part. Vous avez indiqué, lors de cet entretien que vous étiez mal et que vous subissiez une pression réelle qui n'était pas justifiée, mais sans apporter aucun élément ou fait au débat.
Votre refus systématique de nous fournir le moindre document ou la moindre explication à l'appui d'accusations particulièrement graves portées contre Monsieur [Y] nous conduit à la conclusion de ce que vous entendez, par là, porter atteinte à la réputation de celui-ci, ce que nous ne pouvons tolérer. Ceci est proprement inacceptable. On ne peut accuser quelqun de faits de harcèlement à la légère.
Ainsi, votre comportement porte gravement atteinte à l'esprit d'équipe que Monsieur [Y] s'attache à entretenir avec enthousiasme auprès de ses collaborateurs.
Au surplus, compte tenu de votre activité de promotion de nos produits vers le milieu hospitalier auprès de leaders d'opinion, dans un marché où la concurrence est très âpre, vous comprendrez aisément que nous ne pouvons compter sur une personne qui porte des accusations extrêmement graves et malveillantes sur son supérieur hiérarchique.
Ce comportement est d'autant plus regrettable de votre part que vous étiez jusque récemment considérée par Monsieur [Y] et par la direction de notre société comme une de nos meilleures déléguées.
Vous comprendrez aisément que vous ne nous laissez pas d'autre choix que celui de mettre fin à notre relation contractuelle, y compris au cours du préavis afin que vos médisances cessent de nuire à nos équipes et à la réputation de Monsieur [Y].
A compter de la date de première présentation de cette lettre, votre licenciement sera effectif, sans indemnités ni préavis ' ;
Considérant, sur la nullité du licenciement, que Madame [H], qui invoque la dégradation de ses conditions de travail résultant des agissements répétés de la société ASTELLAS PHARMA ayant porté atteinte à sa dignité et à son état de santé, caractéristique d'un harcèlement moral, invoque la nullité du licenciement motivé exclusivement par la dénonciation qu'elle a faite de ces faits de harcèlement sur le fondement des articles L. 1152-2 et L. 1134-4 du code du travail ;
Considérant que l'article L. 122-49 (devenu L. 1152-2) du code du travail, dans sa rédaction applicable à la date du licenciement, énonce : ' Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir subi ou refusé de subir les agissements définis à l'alinéa précédent ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés. Toute rupture du contrat qui en résulterait, toute disposition ou tout acte contraire est nul de plein droit ' ;
Qu'il s'en déduit que le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis ;
Qu'en l'espèce, Madame [H] fait valoir à juste raison que la faute grave qui lui est reprochée dans la lettre de licenciement est exclusivement tirée de la relation par elle des faits de harcèlement moral dont elle s'estimait victime de la part de son supérieur hiérarchique ;
Que la société ASTELLAS PHARMA réplique, d'une part, que les éléments apportés par Madame [H] tant avant son licenciement que devant le conseil de prud'hommes puis devant la cour ne permettent pas de constater l'existence d'un harcèlement, d'autre part, que la faute grave qu'elle invoque à l'appui de son licenciement est justifiée ;
Que, ce faisant, la société ne caractérise pas la mauvaise foi de la salariée qu'elle se borne à évoquer comme résultant de ce qu'elle n'aurait pas fourni d'éléments laissant présumer le harcèlement moral allégué ;
Que le grief énoncé dans la lettre de licenciement tiré de la relation d'agissements de harcèlement moral par la salariée dont la mauvaise foi n'est pas établie emporte à lui seul la nullité de plein droit du licenciement ;
Qu'infirmant le jugement, il y a lieu de dire le licenciement nul ;
Considérant, sur les conséquences de la nullité du licenciement, que le salarié, victime d'un licenciement nul et qui ne réclame pas sa réintégration, a droit, d'une part, aux indemnités de rupture, d'autre part à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à celle prévue par l'article L. 122-14-4 devenu L. 1235-3 du code du travail ;
Qu'au moment du licenciement Madame [H] était âgée de 35 ans et comptait plus de neuf ans d'ancienneté dans l'entreprise ; qu'elle est mère d'un enfant et justifie de sa prise en charge prolongée par Pôle emploi ainsi que des difficultés financières qu'elle rencontre ;
Qu'il lui sera alloué la somme de 35 000 euros en réparation du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement ;
Considérant que Madame [H] a également droit à l'indemnité conventionnelle de licenciement, à l'indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés afférents dont elle a été indûment privée ;
Qu'en application de la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique,
le montant de l'indemnité de licenciement est calculé, jusqu'à quinze ans d'ancienneté, à raison de trois dixièmes de mois par année de présence dans l'entreprise à compter de la date d'entrée dans celle-ci ;
Que les parties s'accordant sur le salaire de base de 4 760,28 euros, incluant les primes de résultat et d'ancienneté ainsi que les avantages en nature et Madame [H], engagée le 8 mars 1998 et licenciée le 14 juin 2007, comptant 9 ans et 6 mois d'ancienneté à l'expiration de son préavis, l'indemnité conventionnelle de licenciement qui lui est due s'élève à 13 566,80 euros ;
Que l'inexécution du préavis ne devant entraîner pour le salarié aucune diminution des avantages qu'il aurait perçus s'il avait continué à travailler, y compris les congés payés, primes et avantages en nature, Madame [H] est fondée à solliciter une indemnité compensatrice de préavis calculée sur la même base de 4 760,28 euros ;
Qu'elle sera en conséquence suivie en ses demandes de ce chef ;
Considérant, sur le préjudice moral, que Madame [H] sollicite, sur le fondement de l'obligation de sécurité de résultat qui pèse sur l'employeur, réparation du préjudice moral, distinct de la perte de son emploi, lié aux actes de harcèlement subis ;
Que, soutenant avoir été accusée à tort d'être responsable du débrayage des salariés de la société lors d'un séminaire à [Localité 3] au mois de mai 2006, Madame [H] justifie de plusieurs courriels adressés à son supérieur hiérarchique les 1er juin et 21 juillet 2006 rappelant les reproches qu'il lui avait fait à ce sujet sans que ce dernier le démente ou que la société apporte la preuve du bien fondé de cette accusation ;
Que, se plaignant d'avoir été agressée physiquement par son supérieur à l'occasion d'un séminaire à l'hôtel [1] à [Localité 4] le 25 octobre 2006, elle fournit plusieurs attestations de collègues relatant l'altercation ainsi que le certificat médical délivré par le médecin de ' SOS médecin ', appelé sur les lieux, qui a constaté un état de détresse psychologique ainsi qu'un état anxio-dépressif et l'arrêt de travail pour syndrôme anxio-dépressif réactionnel qu'il lui a prescrit ;
Que, déplorant des vérifications anormalement pointilleuses de ses dépenses, Madame [H] produit trois courriels dont celui, demeuré sans réponse, qu'elle a adressé à son supérieur hiérarchique, le 10 février 2006, pour s'expliquer point par point sur les griefs qui lui étaient faits et souligner le sentiment d'humiliation qu'elle avait ressenti devant cette mise en cause ;
Que, dénonçant le non respect par l'employeur des avis du médecin du travail, elle justifie de ce que, alors que celui-ci l'avait déclarée apte à son poste dont il avait seulement préconisé l'aménagement, la société lui a proposé des postes de 'reclassement' emportant un éloignement ou un déclassement professionnel ;
Que Madame [H] fournit également divers arrêts de travail et certificats médicaux attestant de la dégradation de son état de santé et les différents courriers par lesquels elle avait, à plusieurs reprises, alerté sa hiérarchie, les délégués du personnel la médecine du travail et l'inspecteur du travail sur sa situation ;
Que, la société ASTELLAS PHARMA, tenue envers ses salariés d'une obligation de sécurité de résultat et informée de la situation de Madame [H], ne justifie d'aucune mesure de protection, de prévention ni même d'évaluation du danger qu'elle encourait ; que, loin de rechercher une solution, la société a refusé les demandes de mutation présentées par la salariée ; que, se bornant à arguer de ce qu'elle n'aurait jamais produit d'éléments à l'appui de ses accusations, à l'instar de sa DRH déclarant au CHSCT qu'elle serait ' ravie d'exposer pourquoi une enquête n'a aucun sens sur le sujet ' la société ne produit pas l'enquête à laquelle la DRH prétendait pourtant par la suite avoir procédé ;
Qu'en réparation du préjudice moral résultant pour elle du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, il convient d'allouer à Madame [H] la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
Considérant, sur l'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement, qu'en application de l'article L. 122-14 (devenu L. 1232-2) du code du travail, dans sa rédaction applicable à la date du licenciement, ' l'employeur ou son représentant qui envisage de licencier un salarié doit, avant toute décision, convoquer l'intéressé par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge en lui indiquant l'objet de la convocation. L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation... ' ;
Que Madame [H] établit que la lettre recommandée avec avis de réception de convocation à l'entretien préalable, datée du 1er juin 2007, ne lui a été remise que le 4 juin suivant, soit moins de cinq jours ouvrables avant la date de l'entretien fixée le 8 juin ; que la société ASTELLAS PHARMA, à qui cette preuve incombait, ne justifie pas de la date de présentation de la lettre ; que le non-respect du délai de cinq jours constitue une irrégularité qui ne peut être couverte par le fait que la salariée était assistée lors de l'entretien préalable par une déléguée du personnel qui connaissait sa situation ;
Que la salariée a droit à ce titre à une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire et qu'il y a lieu de fixer à la somme de 2 000 euros ;
Considérant, sur le rappel de salaire au titre de la journée du 18 juin 2007, que Madame [H], dont le bulletin de salaire du mois de juin 2007 porte sur une période arrêtée au 15 juin, réclame le paiement de la journée du 18 juin 2007 durant laquelle elle affirme avoir travaillé, ce dont elle veut pour preuve deux tableaux d'activité et de visites ;
Que, pour s'y opposer, la société ASTELLAS PHARMA soutient que la lettre de licenciement, datée du 14 juin 2007 et reçue le 15 juin par la salariée, précisait que le licenciement prenait effet à compter de la date de sa 1ère présentation ;
Que, cependant, faute par la société de justifier de la date de 1ère présentation de la lettre de licenciement, il convient d'accueillir Madame [H] en sa demande de ce chef ;
Considérant, sur le solde de RTT, que ses bulletins de salaire mentionnant, en janvier 2007, un solde de jours RTT de 20,04 jours et n'indiquant, pour l'année 2007, aucun jour RTT pris, Madame [H] affirme en avoir acquis 14,17 au titre de l'année 2007 et n'en avoir pris aucun ; que n'ayant reçu paiement que de 25 jours, elle réclame le paiement de 9,21 jours de RTT ;
Que la société ASTELLAS PHARMA ne s'expliquant pas sur cette demande, il y sera fait droit à hauteur d'une somme de 1 496,38 euros ;
Considérant, sur le pécule de vacances, que Madame [H] sollicite le paiement du pécule de vacances représentant environ 80% du salaire fixe qu'elle percevait chaque année au mois de juin et qui ne lui a pas été versé au mois de juin 2007 ainsi qu'en attestent ses bulletins de paie ;
Qu'il y a lieu d'accéder à sa demande sur laquelle la société ASTELLAS PHARMA ne formule aucune observation ;
Considérant, sur la prime d'ancienneté, que Madame [H] réclame le paiement de la prime d'ancienneté de 116,76 euros par mois qui ne lui a plus été versée à compter du mois de septembre 2005 ; que la société ASTELLAS PHARMA réplique qu'étant devenue cadre à compter du mois de septembre 2005, elle n'était plus éligible à la prime d'ancienneté en application de la convention collective et que la prime avait été intégrée dans son salaire de base ;
Que l'article 22-9 de la convention collective stipule :
' a) Il est attribué aux salariés classés dans les cinq premiers groupes de classification ainsi qu'aux salariés classés dans le groupe 6 lorsqu'ils bénéficient des dispositions de l'article 4 bis de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, une prime d'ancienneté, fonction de l'ancienneté dans l'entreprise ;
(...)
c) ces primes d'ancienneté sont indépendantes du salaire proprement dit et s'ajoutent, dans tous les cas, au salaire réel. Elles feront l'objet d'un décompte spécial et leur versement sera effectué lors de chaque paie ' ;
Que, si Madame [H] est devenue cadre du groupe 6 au mois de septembre 2005, la société, qui n'avait pas répondu à sa demande d'explication sur la disparition de la prime, ne prétend ni ne justifie de ce qu'elle ne bénéficierait pas de l'article 4 bis de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 et ne peut, au regard de la disposition conventionnelle c) susvisée, se prévaloir de ce que la prime d'ancienneté aurait été intégrée à son salaire de base ;
Que Madame [H] sera, en conséquence, suivie en sa demande, de ce chef ;
Considérant, sur la prime de résultats, que Madame [H] affirme que les tableaux de résultats de son secteur communiqués par la société ASTELLAS PHARMA pour le 4ème trimestre 2006 sont erronés et sollicite un rappel de prime de 18 000 euros en fonction des résultats de son secteur pour le 4ème trimestre 2006 et le 1er trimestre 2007 ; qu'elle ne fournit cependant aucun document étayant ses dires ni aucune explication sur les erreurs que comporteraient les tableaux produits ni encore sur les modalités de calcul du rappel de prime sollicité ;
Qu'elle sera, en conséquence, déboutée de ce chef de demande ;
PAR CES MOTIFS
STATUANT PUBLIQUEMENT ET CONTRADICTOIREMENT,
INFIRME le jugement,
DIT le licenciement nul,
CONDAMNE la SAS ASTELLAS PHARMA à payer à Madame [Z] [H], ex-épouse [U] les sommes de :
. 35 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement illicite,
. 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,
. 2 000 euros à titre d'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement,
ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
. 13 566,80 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
. 14 280,84 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1 428,08 euros au titre des congés payés afférents,
. 211,57 euros à titre de rappel de salaire,
. 2 888,67 euros au titre du pécule de vacances,
. 1 496,38 euros au titre des jours RTT,
. 2 568,72 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté,
ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes,
DEBOUTE Madame [Z] [H] de sa demande au titre des primes de résultats,
DEBOUTE les parties de toutes leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
CONDAMNE la SAS ASTELLAS PHARMA aux dépens de première instance et d'appel et au paiement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Clotilde Maugendre, conseiller, en l'absence de Madame Isabelle Lacabarats, président, régulièrement empêchée et par Madame Christine Leclerc, greffier.
Le greffierLe président