COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 51C
1re chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 07 OCTOBRE 2014
R.G. N° 13/04899
AFFAIRE :
[P] [U]
C/
[M] [J]
...
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendu(e) le 20 Juin 2013 par le Juge de la mise en état de PARIS
N° Chambre : 3
N° Section : 4
N° RG : 12/4536
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Franck LAFON,
Me Véronique BUQUET-ROUSSEL
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE SEPT OCTOBRE DEUX MILLE QUATORZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [P] [U]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représenté par Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20130359
assisté de Me Vincent CANU, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0869 -
APPELANT
****************
Monsieur [M] [J]
né le [Date naissance 2] 1915 à [Localité 3] (ALLEMAGNE)
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 46613
assisté de Me Serge BEYNET de la SELURL SERGE BEYNET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0482
Madame [S] [X] épouse [J]
née le [Date naissance 1] 1927 à [Localité 4]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 46613
assisté de Me Serge BEYNET de la SELURL SERGE BEYNET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0482
INTIMES
***************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Juin 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant M. Serge PORTELLI, Président chargé du rapport, et Madame Sylvie FETIZON, conseiller,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Serge PORTELLI, Président,
Madame Sylvie FETIZON, Conseiller,
Madame Isabelle ORSINI, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Pierre QUINCY,
FAITS ET PROCEDURE,
Le 13 octobre 1981, la société Selectpierre Lamblardie et la société d'assurances Abeille Paix-vie ont loué à M. et Mme [J] un appartement au [Adresse 1]. Le bail, conclu pour une durée de trois ans, a été reconduit par tacite reconduction. Ce bien a été vendu à la société Margaux Développement qui l'a cédé à M. [U] le 28 septembre 2007.
Par acte d'huissier du 1er avril 2011, M. [U] a donné congé pour reprise personnelle à M. et Mme [J] à effet au 14 novembre 2011. Des offres de relogement étaient faites aux locataires tous deux âgés de plus de 70 ans et ayant des revenus inférieurs à une fois et demi le SMIC annuel.
Les locataires sont restés dans les lieux.
M. [U] et Mme [N] ont saisi le tribunal d'instance de Paris 12ème. Ils sollicitaient en dernier lieu de :
- valider le congé et constater que, suite aux offres de relogement signifiées le 26 octobre 2011 et le 2 novembre 2011 le bail a pris fin le 15 novembre 2011 et que les défendeurs sont occupants sans droit ni titre,
- ordonner leur expulsion avec l'assistance de la force publique sous astreinte journalière de 150€ à défaut de libération des lieux dans le délai de 8 jours à compter de la signification de la décision et dire que le tribunal se réservera le contentieux de la liquidation de l'astreinte,
- condamner solidairement M. et Mme [J] à payer à M. [U] une indemnité d'occupation égale au montant du loyer majoré de 50% augmenté des charges jusqu'à la libération effective des lieux,
- condamner M. et Mme [J] à laisser M. [U] faire réaliser par les entreprises désignées par lui les travaux de sécurisation de l'installation électrique de l'appartement et ce, sous astreinte de 150€ par jour de refus après communication du calendrier des opérations au moins huit jours avant le début des travaux,
- condamner M. et Mme [J] à justifier dans le délai de 15 jours à compter de la signification du jugement de la vérification des brûleurs de la gazinière et de la remise en état de marche de la ventilation mécanique contrôlée (VMC) sous astreinte de 150€ par jour de retard passé le délai de 15 jours à compter de la signification du jugement,
- condamner solidairement M. et Mme [J] à payer à M. [U] et Mme [N] une somme de 4.000€ à titre de dommages intérêts pour préjudice moral et 2.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner l'exécution provisoire.
Par conclusions en défense, M. et Mme [J] ont formulé les demandes suivantes:
- constater l'irrecevabilité de la demande de Mme [N] qui n'est pas propriétaire, ni bailleresse,
- constater la nullité des congés indiquant notamment que les offres de relogement émises par le bailleur ne répondent pas aux conditions posées par l'article 15-III de la loi du 6 juillet 1989 applicables aux locataires âgés de plus de 70 ans, dont les ressources annuelles sont inférieures à une fois et demi le montant annuel du salaire minimum de croissance,
- débouter M. [U] du surplus de ses demandes et le condamner à leur payer la somme de 2.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 16 février 2012, le tribunal d'instance du 12ème arrondissement de Paris a :
- déclaré Mme [N] irrecevable en sa demande de dommages intérêts,
- déclaré nuls et de nul effet les congés signifiés par M. [U] à M. et Mme [J] à effet au 14 novembre 2011,
- débouté M. [U] de sa demande en validation de congés ainsi que de ses demandes connexes d'expulsion, de fixation d'une indemnité d'occupation et de paiement de dommages intérêts,
- enjoint à M. et Mme [J] de laisser libre accès au logement aux entreprises désignées par M. [U] afin de procéder aux travaux de sécurisation de l'installation électrique, après avoir eu communication du calendrier des opérations au moins huit jours avant le début des travaux,
- dit qu'à défaut de laisser cet accès, M. et Mme [J] seront condamnés au paiement pendant une durée de trois mois d'une astreinte fixée à 40€ par jour de retard à compter de la première date d'intervention fixée,
- dit que le tribunal se réserve le contentieux de la liquidation de l'astreinte,
- condamné M. [U] à payer à M. et Mme [J] la somme de 800€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs autres demandes,
- condamné M. [U] aux dépens,
- ordonné l'exécution provisoire.
M. [U] a relevé appel du jugement. Dans ses dernières conclusions, il formule les demandes suivantes:
- infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré nul et de nul effet le congé signifié aux époux [J] le 1er avril 2011 à effet du 14 novembre 2011 et, y ajoutant,
- débouter les époux [J] de l'ensemble de leurs demandes,
- valider le congé et constater que les époux [J] sont occupants sans droit ni titre depuis le 14 novembre 2011 à minuit,
- ordonner l'expulsion de chacun des époux [J] et de tous occupants de leur chef et ce, avec l'assistance de la force publique sous astreinte journalière de 150€ à défaut d'exécution volontaire passé un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt,
- condamner solidairement M. et Mme [J] à payer à M. [U] une indemnité d'occupation égale au dernier loyer majoré de 50% augmentée des charges jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clés,
- condamner solidairement M. et Mme [J] à payer à M. [U] une somme de 10.000€ à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'inexécution délibérée de leurs obligations contractuelles de tenir informé leur bailleur de leur intention quant à leur départ et de répondre aux offres de relogement,
- les condamner solidairement au paiement de la même somme de 10.000€ sur le fondement de l'article 1382 du code civil pour attitude déloyale et abusive,
- confirmer le jugement dans toutes ses autres dispositions relatives à l'exécution des travaux de sécurisation par la mise en conformité de l'installation électrique,
- pour le surplus, condamner les époux [J] au paiement à M. [U] d'une somme de 3.000€ pour résistance abusive à exécuter une décision de justice, ayant entraîné pour M. [U] des frais supplémentaires,
- condamner les époux [J] au paiement à M. [U] d'une somme de 5.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me Lafon, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Les époux [J], intimés, dans leurs dernières conclusions, formulent les demandes suivantes:
- confirmer partiellement le jugement,
- dire que le contrat de bail viendra à échéance le 23 juin 2013 à minuit,
- dire que les 5 offres de relogement ne remplissent pas les conditions légales,
- déclarer nuls et de nul effet les congés signifiés,
- débouter M. [U] de sa demande de validation de congé ainsi que de ses demandes connexes d'expulsion, de fixation d'indemnité d'occupation et de paiement de dommages intérêts,
- subsidiairement et avant dire droit, désigner un expert médical afin de dire si le déménagement de M. [J] présente un risque important pour sa santé,
- plus subsidiairement, fixer le montant de l'indemnité d'occupation au montant du loyer contractuel hors charges locatives,
- vu l'article 1724 du code civil, vu la mise en sécurité de l'installation électrique, infirmer le jugement dans ses dispositions relatives à l'exécution des travaux de sécurisation par la mise en conformité de l'installation électrique,
- débouter M. [U] de sa demande de versement d'une somme de 3.000€ pour résistance abusive à exécuter une décision de justice,
- condamner M. [U] à verser à M. et Mme [J] une somme de 5.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par la SCP Buquet Roussel de Carfort, avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur l'échéance du bail
Le tribunal a considéré qu'en application de l'article 10 alinéa 3 de la loi du 6 juillet 1989 ('En cas de reconduction tacite, la durée du contrat reconduit est de trois ans pour les bailleurs personnes physiques'), le bail avait été reconduit pour 3 ans à compter de la dernière reconduction, soit du 14 novembre 2008 au 14 novembre 2011.
Pour M. [U], les dispositions des lois du 22 juin 1982, 23 décembre 1986 et 6 juillet 1989 ont bien été respectées.
Les époux [J] considèrent, eux, que le bail est un bail à période et qu'il doit dès lors être considéré comme un bail à durée indéterminé qui s'est renouvelé pour une durée de 3 ans à compter du 23 juin 1983. Ils estiment en conséquence que le bail arrivait à échéance au 23 juin 2013 et que le congé délivré par M. [U] est nul pour avoir été délivré à une mauvaise date.
Aux termes de l'article 51 de la loi du 23 décembre 1986, les contrats de location en cours qui n'ont pas été mis en conformité avec les dispositions de la loi n° 82-526 du 22 juin 1982, contrairement aux dispositions du troisième alinéa de l'article 71 de cette loi, sont réputés avoir été renouvelés dans les conditions de cet article par périodes de trois années à compter de leur date d'expiration contractuelle lorsqu'il s'agit de contrats de location à durée déterminée et par périodes de trois années à compter du 24 juin 1983 lorsqu'il s'agit de contrats de location à durée indéterminée conclus avant cette date.
Le contrat passé le 13 octobre 1981 entre d'une part la société Selectpierre Lamblardie et la société d'assurances Abeille Paix-vie et d'autre part M. et Mme [J] a été conclu à effet au 15 novembre 1981 pour une durée de trois ans puis reconduit par tacite reconduction d'année en année. Il s'agissait donc d'un contrat à durée déterminé. Il n'a pas été mis en conformité avec la loi du 22 juin 1982. Il venait donc à expiration à compter du 14 novembre 1984 et a été renouvelé, conformément à la loi de 1986, de trois ans en trois ans, soit jusqu'au 14 novembre 1990.
La loi du 6 juillet 1989 s'est alors appliquée. Elle prévoit dans son article 10 qu'en cas de reconduction tacite, la durée du contrat reconduit est de six ans pour les bailleurs personnes morales. Le bailleur étant alors une personne morale, le bail a donc été reconduit par période de six ans jusqu'au 14 novembre 2008. M. [U], personne physique, ayant acheté le bien le 28 septembre 2007, le bail n'a plus été reconduit que pour 3 ans, conformément à l'article 10 de la loi du 6 juillet 1989 qui prévoit qu'en cas de reconduction tacite, la durée du contrat reconduit est de trois ans pour les bailleurs personnes physiques. Le bail venait donc à expiration le 14 novembre 2011. Le congé pour reprise personnelle donné le 1er avril 2011 à M. et Mme [J] à effet au 14 novembre 2011 respecte donc bien les dispositions légales, s'agissant de la date à laquelle il devait être délivré. Il y a donc lieu de confirmer le jugement sur ce point.
Sur la validité des offres
Le tribunal a relevé que deux des cinq offres ont été faites dans des arrondissements de Paris non limitrophes soit dans le 14ème et le 15ème arrondissements et qu'une autre offre a été signifiée le 14 novembre 2011 pour un congé à effet au 14 novembre 2011 à minuit.
M. [U] fait valoir que les deux premières se situaient dans deux arrondissements centraux de la capitale et très recherchés des parisiens pour leur qualité de vie. S'agissant de l'offre signifiée le 14 novembre 2011, il affirme qu'une offre est toujours valable dès lors qu'elle est effectuée pendant la période de préavis.
M. et Mme [J] ont demandé la confirmation du jugement, reprenant son argumentation.
Deux autres offres ont été faites dans des arrondissements ou villes limitrophes: l'une a été faite le 26 octobre 2011 pour un appartement de 2 pièces situé [Adresse 5]; le 26 octobre 2011, une offre a été faite pour un appartement de 3 pièces au [Adresse 6].
Le tribunal a relevé que les locataires étaient âgés de 96 et 84 ans et qu'ils justifiaient par la production de diverses pièces et de certificats médicaux de leurs problèmes de santé et d'une autonomie limitée; tous deux bénéficient d'une allocation personnelle d'autonomie à domicile. Le tribunal a retenu que le logement du [Adresse 5] était limité à deux pièces dont une seule chambre. Quant à l'appartement de [Localité 2], il était éloigné de leur environnement habituel; de plus la salle de bains était équipée d'une baignoire dont M. et Mme [J] ne pouvaient faire usage en raison de leur âge.
Le tribunal en a conclu que ces offres de relogement ne correspondaient pas aux besoins spécifiques des locataires.
M. [U] fait valoir que l'appartement de [Adresse 6], d'une surface de 64m², est composé de deux chambres et qu'il est situé à proximité de nombreux commerçants. Il fait remarquer que celui du boulevard Poniatowski fait 52m², qu'il a fait l'objet de travaux de rénovation au cours desquels M. et Mme [J], dont l'appartement actuel est équipé d'une baignoire, n'ont pas demandé l'installation d'une douche qu'il correspond aux besoins objectifs du couple.
Il soutient plus généralement que le logement proposé ne doit pas nécessairement offrir les mêmes prestations que le précédent et que l'offre est censée répondre aux simples besoins et non aux besoins spécifiques des locataires, non plus qu'à leur convenance personnelle. Il souligne que M. et Mme [J] n'ont pas répondu à ses offres le mettant dans l'impossibilité d'en proposer d'autres.
M. et Mme [J] font valoir que [Adresse 6] est géographiquement très éloignée de la petite ceinture longeant le 12ème arrondissement et que l'appartement proposé est situé à plus de cinq kilomètres de leur domicile actuel à vol d'oiseau. Ils soutiennent que leur état de santé doit être pris en compte. Au vu de plusieurs certificats médicaux il est soutenu que M. [J] présente une situation particulièrement grave qui nécessite une stabilité de vie et de repères et qu'un déménagement le mettrait en danger.
Aux termes de l'article 15 III de la loi du 6 juillet 1989, le bailleur ne peut s'opposer au renouvellement du contrat en donnant congé dans les conditions définies au paragraphe I ci-dessus à l'égard de tout locataire âgé de plus de soixante-dix ans et dont les ressources annuelles sont inférieures à une fois et demie le montant annuel du salaire minimum de croissance, sans qu'un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités lui soit offert dans les limites géographiques prévues à l'article 13bis de la loi du 1er septembre 1948, soit dans le même arrondissement ou les arrondissements limitrophes et communes limitrophes à l'arrondissement où se trouve le bien occupé si celui-ci est situé dans une commune divisée en arrondissement.
Le logement occupé par M. et Mme [J] se situe [Adresse 1]. Les arrondissements limitrophes sont les 11ème, 13ème et 20ème arrondissements. Quels que soient les avantages d'un appartement situé hors de ces limites, il ne respecte pas les exigences légales. Il y a donc lieu de confirmer le jugement concernant les appartements situés dans le 14ème et le 15ème arrondissements.
S'agissant du délai dans lequel le bailleur doit formuler les offres, si l'article 15 III de la loi du 6 juillet 1989 n'oblige pas le bailleur à présenter au locataire protégé une offre de relogement en même temps qu'il lui délivre le congé et s'il peut présenter l'offre pendant toute la période de préavis, encore faut-il qu'il la présente dans un délai raisonnable permettant au locataire de procéder aux recherches ou vérifications nécessaires. En adressant une offre le dernier jour du préavis à des locataires âgés et présentant des problèmes de santé sérieux, le bailleur, en l'occurrence, n'a pas respecté les exigences légales. Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qui concerne cet appartement situé [Adresse 4].
Seuls deux offres respectent les critères légaux en matière de délai et de zone géographique: celles concernant l'appartement sis [Adresse 5] et celui situé [Adresse 6]. Il convient d'examiner si elles correspondent aux autres exigences légales.
S'agissant des besoins des locataires cette notion ne peut être interprétée de façon abstraite et exige du bailleur qu'il soit informé ou s'informe de leur situation matérielle et personnelle exacte. En créant cette catégorie spécifique de locataires protégés le législateur n'a pas souhaité que le bailleur se plie à leurs convenances personnelles mais qu'il propose des offres de logement adaptées, le premier des besoins à prendre en compte étant, compte tenu de l'âge, la santé et le respect des exigences médicales.
En l'espèce, M. [J] présente des troubles psychiques et physiques importants et anciens. S'ils ne peuvent impliquer un maintien permanent dans les lieux, ils imposent que les offres soient conformes à des capacités d'adaptation limitées et à des possibilités de déplacements mesurées.
Il apparaît que l'appartement sis [Adresse 5] ne dispose que d'une seule chambre alors que les époux [J], en raison de leur grand âge et de leur état de santé, dorment dans des chambres séparées.
Quant à l'appartement de [Adresse 6], en dehors de la question de la salle de bains qui aurait pu faire l'objet d'un aménagement, il apparaît qu'il n'y a dans les environs immédiats aucun commerce de proximité, les commerces les plus proches étant situés à environ 1 kilomètre.
Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré nuls et de nul effet les congés signifiés par M. [U] à M. et Mme [J] à effet au 14 novembre 2011et débouté M. [U] de sa demande en validation de congés ainsi que de ses demandes connexes d'expulsion, de fixation d'une indemnité d'occupation et de paiement de dommages intérêts et de rejeter ses demandes en réparation du préjudice subi du fait de l'inexécution délibérée de leurs obligations contractuelles par M. et Mme [J] et pour attitude déloyale et abusive.
Sur les travaux
Le tribunal, au vu du rapport d'inspection des installations électriques effectué le 8 septembre 2011 a considéré qu'il était nécessaire de procéder à la remise en conformité de l'installation afin d'assurer la sécurité des occupants. Injonction avait été faite en ce sens à M. et Mme [J].
M. et Mme [J] font valoir que les travaux prévus par M. [U] ne présentaient aucun caractère d'urgence et qu'ils ont eux-mêmes pour un coût bien moindre fait effectuer des travaux de mise en conformité.
M. [U] soutient que les travaux entrepris par M. et Mme [J] l'ont été sans son autorisation et demande la confirmation du jugement assorti de l'exécution provisoire ainsi que la condamnation de M. et Mme [J] à la somme de 3.000€ pour n'avoir pas exécuté un jugement assorti de l'exécution provisoire.
Aux termes de l'article 1724 du code civil, si, durant le bail, la chose louée a besoin de réparations urgentes et qui ne puissent être différées jusqu'à sa fin, le preneur doit les souffrir, quelque incommodité qu'elles lui causent, et quoiqu'il soit privé, pendant qu'elles se font, d'une partie de la chose louée.
Il apparaît que M. [U] lors de l'audience de première instance, en janvier 2012, avait produit un rapport du Bureau Véritas qui imposait, selon lui, des travaux urgents de sécurisation de l'installation électrique. Il a également versé aux débats le devis d'une société STTB chiffrant les travaux à la somme de 24.448,79€. Le calendrier des travaux a été signifié aux occupants et devait s'étaler sur une durée de cinq semaines du lundi au vendredi sur des plages horaires de 9H15 à 12H et de 14H15 à 18H.
M. et Mme [J] ont produit de leur côté une facture d'une société ASE Technologie pour des travaux de mise en sécurité électrique d'un montant de 2.654,88€. Ils ont fait réaliser ces travaux à l'automne 2013 et produisent une attestation de conformité soumise à l'appréciation de l'association Consuel qui a accordé son visa le 4 mars 2014.
Il apparaît dès lors que, si des travaux de mise en conformité de l'installation électrique étaient nécessaires en raison de plusieurs défectuosités, ils ne présentaient pas une urgence et une ampleur telles qu'il faille ordonner sous astreinte à M. et Mme [J] de laisser libre accès au logement aux entreprises désignées par M. [U] afin de procéder aux travaux nécessaires, après avoir eu communication du calendrier des opérations au moins huit jours avant le début des travaux.
Il y a donc lieu d'infirmer le jugement sur ce point et de rejeter les demandes de M. [U] notamment sur le fondement d'une résistance abusive.
Sur les frais et dépens
Le jugement ayant été confirmé partiellement sur ses dispositions principales concernant le congé délivré, il le sera également en ce qu'il a condamné M. [U] à payer à M. et Mme [J] la somme de 800€ en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
M. [U] ayant succombé dans ses demandes en cause d'appel, les dépens exposés devant la cour seront à sa charge et pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
S'agissant de la procédure d'appel, il apparaît équitable de condamner M. [U], tenu aux dépens, à payer, conformément à l'article 700 du code de procédure civile, à M. et Mme [J] la somme de 2.000€ au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
* confirme le jugement en ce qu'il a :
- dit, dans sa motivation, que le bail avait été régulièrement reconduit pour 3 ans à compter de la dernière reconduction, soit du 14 novembre 2008 au 14 novembre 2011,
- déclaré nuls et de nul effet les congés signifiés par M. [U] à M. et Mme [J] à effet au 14 novembre 2011,
- débouté M. [U] de sa demande en validation de congés ainsi que de ses demandes connexes d'expulsion, de fixation d'une indemnité d'occupation et de paiement de dommages intérêts,
- condamné M. [U] à payer à M. et Mme [J] la somme de 800€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs autres demandes,
- condamné M. [U] aux dépens,
* rejette la demande de M. et Mme [J] aux fins de dire que le contrat de bail viendra à échéance le 23 juin 2013 à minuit,
* infirme le jugement en ses autres dispositions,
* rejette l'ensemble des demandes de M. [U], notamment ses demandes indemnitaires,
* condamne M. [U] à payer à M. et Mme [J] la somme de 2.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamne M. [U] aux dépens d'appel qui seront recouvrés par les avocats dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Serge PORTELLI, Président et par Madame QUINCY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,