COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
6e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 09 SEPTEMBRE 2014
R.G. N° 13/02278
AFFAIRE :
[Q] [T]
C/
Société CHAPELIER
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Mai 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de RAMBOUILLET
Section : Commerce
N° RG : 12/00292
Copies exécutoires délivrées à :
Me Claude LEGOND
SCP LMC PARTENAIRES
Copies certifiées conformes délivrées à :
[Q] [T]
Société CHAPELIER
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [Q] [T]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Comparant
Assisté de Me Claude LEGOND, avocat au barreau de VERSAILLES
APPELANT
****************
Société CHAPELIER
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Gildas LE FRIEC de la SCP LMC PARTENAIRES, avocat au barreau de VERSAILLES
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Mai 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine BÉZIO, président, et Madame Mariella LUXARDO, conseiller, chargées d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine BÉZIO, président,
Madame Mariella LUXARDO, conseiller,
Madame Pascale LOUÉ WILLIAUME, conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE,
EXPOSE DU LITIGE
M. [T] a été engagé par la société CHAPELIER en contrat à durée déterminée à partir du 16 février 1987 pour une durée de trois mois en qualité de magasinier. Les relations contractuelles se sont ensuite prolongées en contrat à durée indéterminée sans qu'un contrat écrit ne soit établi.
M. [T] a été vendeur puis vendeur itinérant chargé de démarcher la clientèle.
La société CHAPELIER vend et loue des véhicules et effectue l'entretien de ces véhicules. Elle est distributeur réparateur agréé RENAULT TRUCKS. L'entreprise compte plus de cent salariés et a deux établissements situés à [Localité 3] et à [Localité 4].
La convention collective applicable est celle du commerce et de la réparation de l'automobile du cycle et du motocycle et des activités connexes ainsi que du contrôle technique automobile.
Le 16 novembre 2011 M. [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Rambouillet aux fins de voir prononcer la nullité d'un avertissement prononcé le 19 octobre 2011 et d'une mise à pied du 28 juin 2012 et condamner la société CHAPELIER à lui payer le salaire non versé en raison de cette mise à pied soit deux fois 595,14 euros retiré du salaire d'août et de celui de septembre 2012, un rappel de commissions pour les années 2009 à décembre 2012 soit 8 490 euros et les congés payés afférents, des dommages-intérêts pour travail dissimulé en application de l'article L 8 221-5 du code du travail d'un montant de 21 174 euros et pour harcèlement moral d'un montant de 20 000 euros outre 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. La société CHAPELIER s'est opposée aux demandes et a sollicité 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement en date du 16 mai 2013 le conseil de prud'hommes de Rambouillet a annulé la mise à pied prononcée le 28 juin 2012 et condamné la société CHAPELIER à payer à M. [T] le salaire non versé en raison de cette mise à pied soit 595,14 euros et 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et l'a débouté de ses autres demandes.
La cour est régulièrement saisie d'un appel principal formé contre cette décision par M. [T] sauf sur la somme allouée de 595,14 euros et d'un appel incident de la société CHAPELIER.
Le 13 septembre 2013, M. [T] a été licencié pour motif disciplinaire avec paiement d'une indemnité compensatrice de préavis.
Par écritures visées par le greffier et soutenues oralement, M. [T] conclut :
- à l'infirmation du jugement,
- à la condamnation de la société CHAPELIER à lui verser les sommes suivantes :
* indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 100 000 euros,
* rappel de commissions : 12 652,86 euros,
* congés payés afférents : 1 265 euros,
* rappel de salaire pour la période du 15 juillet au 2 août 2013 : 1 785,42 euros,
* travail dissimulé : 21 174 euros,
* harcèlement moral : 20 000 euros,
* à l'allocation de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- et à l'annulation de l'avertissement du 19 octobre 2011.
La société CHAPELIER, par écritures visées par le greffier et soutenues oralement, conclut :
- à l'infirmation du jugement en ce qu'il a annulé la mise à pied du 28 juin 2012 et alloué à M. [T] la somme de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- à la condamnation de M. [T] à lui restituer la somme de 595,14 euros,
- à la confirmation du jugement sur le surplus et au rejet des demandes de M. [T],
- et à l'allocation de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues l'audience.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande relative aux commissions
M. [T] demande le paiement d'un rappel de rémunération en soutenant qu'il lui est dû pour la période 2009/2013 la somme de 950 euros mensuels correspondant à des commissions attribuées par décision de l'employeur de façon constante et régulière et qui constituent un complément de salaire. De son côté la société CHAPELIER considère qu'il s'agit de primes mais qui ont un caractère de libéralité en l'absence d'usage et d'engagement de l'employeur, ajoutant que le montant de celles-ci a toujours varié.
Il est constant que M. [T] n'a jamais eu de contrat à durée indéterminée écrit y compris depuis qu'il exerce les fonctions de vendeur itinérant. Aucun avenant n'a été établi s'agissant également de sa rémunération.
En l'absence de preuve que la somme qu'il reçoit intitulée 'commissions' est versée à l'ensemble des salariés ou à tout le moins à une catégorie d'entre eux, il n'est pas démontré qu'il existe un usage à défaut de généralité. En revanche il n'est pas discuté que depuis 1996 le salarié perçoit en plus de son salaire fixe une somme à titre de commissions. M. [T] n'est pas contredit lorsqu'il expose que cette somme été versée régulièrement en complément de son salaire depuis cette date.
La société CHAPELIER ne conteste pas le caractère constant de cette somme ainsi versée. Elle a d'ailleurs reconnu dans un courrier en réponse à l'avocat de M. [T] de juillet 2011, devoir cette somme sur la base de 900 euros mensuels. Elle critique essentiellement le caractère fixe de son montant mais ne fournit pas à la cour les bulletins de salaires antérieurs à 2009 ni le mode de détermination du montant de la somme ainsi versée. De son côté M. [T] produit les bulletins de salaires sur la période 2009 à 2013.
Il en ressort que c'est une somme de 900 euros au moins qui est due chaque mois.
La constance de la somme ainsi versée depuis plusieurs années de façon régulière et forfaitaire en complément du salaire fixe exclut qu'il se soit agi d'un avantage individuel consenti de façon purement discrétionnaire par la société CHAPELIER. C'est pourquoi il est fait droit à la demande de rappel de complément de salaires sur la base de 900 euros mensuels mais seulement à partir de l'année 2010, étant donné le montant des versements intervenus en 2009, et jusqu'au 13 décembre 2013 qui s'élève à la somme de 9 610,28 euros outre les congés payés afférents de 961,03 euros. Le jugement qui a rejeté cette demande sera donc infirmé.
Sur la demande pour travail dissimulé
Le seul fait que la société CHAPELIER a reconnu devoir des compléments de salaires et qu'elle n'a pas mentionné sur les bulletins de salaires ni versé la totalité de ceux-ci ne suffit pas à démontrer la volonté délibérée de l'employeur de commettre une dissimulation d'emploi salarié telle que prévue à l'article L 8221-5 du code du travail. Le jugement qui a débouté M. [T] de sa demande de ce chef sera par conséquent confirmé.
Sur les sanctions disciplinaires précédant le licenciement
M. [T] demande l'annulation de la sanction prononcée le 19 octobre 2011.
Contrairement à ce qu'indiquent les parties il ne s'est pas agi d'un avertissement mais d'une mise à pied de trois jours. M. [T], sans contester les propos qui lui sont reprochés dans la lettre de sanction ('casse-toi de mon bureau') à l'adresse de son directeur, les explique dans un contexte de relations professionnelles conflictuelles dont l'employeur est à l'origine. La société considère qu'elle a exercé son pouvoir de direction, en demandant des compte rendus d'activité au salarié que celui-ci se refusait de remettre, et que les propos du salarié sont fautifs.
Les propos de M. [T] ont eu un caractère déplacé et injurieux. Les réclamations du salarié à propos du paiement du complément de salaire ne permettent pas de l'exonérer de cette faute. En effet les demandes formulées par l'employeur de façon répétée afin que M. [T] lui adresse des compte rendu d'activité avaient un caractère légitime étant donné les fonctions de ce salarié. La société CHAPELIER prouve d'ailleurs que la convention collective met à la charge du vendeur itinérant ce type de missions. M. [T] ne rapporte pas la preuve qu'il était le seul vendeur ainsi sollicité. Il ne démontre pas les faits qu'il allègue lorsqu'il évoque un entretien avec le directeur en présence d'un représentant du personnel, selon lequel les autres salariés ne remettaient pas ces comptes rendus régulièrement lesquels n'étaient pas utilisés par l'entreprise. Il ne produit pas en effet d'attestation de ce représentant du personnel. Les premiers juges doivent donc être approuvés lorsqu'ils ont débouté M. [T] de sa demande d'annulation de cette sanction.
Le jugement sera aussi confirmé s'agissant de l'annulation de la mise à pied prononcée le 28 juin 2012. C'est à juste titre en effet qu'il a été rappelé que le salarié a contesté l'ensemble des propos et des gestes qui lui ont été reprochés dans cette lettre de sanction. M. [T] au surplus a soutenu qu'il était seul avec le directeur M. [N] au moment des faits et que ce dernier l'avait traité de 'petit con'.La société CHAPELIER ne rapporte pas la preuve des faits reprochés, la cour estimant que les attestations de MM [N] et [V] ne sont pas probantes. Le témoignage de M. [N] qui expose qu'il était présent dans le bureau ne donne aucune précision sur le contexte dans lequel les propos auraient été tenus, alors que la lettre de mise en pied en fait état. En outre, cette lettre ne cite pas la présence d'un autre salarié.
Sur le licenciement
La lettre de licenciement pour faute qui fixe les limites du litige, porte sur les griefs suivants : une absence injustifiée du salarié du 15juillet au 2 août 2013, une mauvaise foi en invoquant des propos mensongers, le non respect des procédures s'agissant des avantages consentis de sa propre initiative à un client.
En cas de litige le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués forme sa conviction au vu des éléments fournis pas les parties. Si un doute subsiste il profite au salarié, conformément aux dispositions de l'article L 1235-1 du code du travail.
S'agissant du premier grief, M. [T] considère que son absence était justifiée dès lors qu'il était en congés payés et que la procédure de demande de ces congés a été selon lui respectée. La société répond que le salarié doit prouver qu'il existe un motif valable à son absence ce qui n'est pas le cas en l'absence de preuve de ce qu'il avait informé ses supérieurs de ses congés et de réception de sa demande de congés.
Mais en l'espèce M. [T] n'est pas contesté quand il indique que la procédure de demande de congés dans l'entreprise consistait seulement à déposer une demande sans avoir à recueillir l'accord express de l'employeur. Il indique avoir adressé sa demande en même temps qu'une autre demande qui était jointe pour un solde de congés qu'il a pris au mois de mai 2013 et qui lui ont été payés. La société fait état de ce qu'elle a reçu seulement cette dernière demande adressée au mois d'avril 2013. Le salarié n'a pas été contredit non plus lorsqu'il fait état que tous les ans il prenait des congés payés à la même période estivale. Il est constant au surplus que le salarié n'a pas été en congés à un autre moment au cours de l'été 2013. Dans ces conditions le doute doit profiter au salarié, la société ne rapportant pas la preuve qu'elle n'a jamais reçu cette demande de congés.
La société CHAPELIER ne rapporte pas la preuve de la mauvaise foi de M. [T] lorsqu'il écrit le 1er août 2013 avoir été dans l'impossibilité de retirer les recommandés en raison de la fermeture du bureau de poste. En effet les photographies d'un panneau d'affichage indiquant que ce bureau était fermé plus tard durant le mois d'août ne suffisent pas à prouver que ce bureau était effectivement ouvert le 1er août.
M. [T] ne peut pas soutenir que le non respect des procédures d'octroi d'avantages à un client avait déjà été sanctionné par la mise à pied prononcée le 11 juillet 2013, cette sanction visant des faits distincts. Le salarié ne conteste pas avoir accordé ces avantages sans autorisation de son employeur.Il ne peut pas s'exonérer de sa faute, n'ayant pas respecté les instructions, en invoquant les conditions avantageuses de cette vente. Si la société CHAPELIER a pu faire état dans la lettre de licenciement du rappel des précédentes sanctions qui, à l'exception de celle du 28 juin 2012, ont été justifiées, celles-ci se rapportaient uniquement aux relations professionnelles entre le salarié et son directeur. Or l'agissement fautif visé dans la lettre de licenciement se rapporte exclusivement à la relation avec la clientèle, pour laquelle aucun reproche n'avait jamais été adressé jusqu'ici à M. [T] dont les résultats commerciaux étaient bons. C'est pourquoi cette seule faute n'est pas susceptible de justifier le prononcé du licenciement qui est donc jugé sans cause réelle et sérieuse.
Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse
M. [T] sollicite le paiement des salaires qui ne lui ont pas été versés pour la période du 15 juillet au 2 août 2013. La société CHAPELIER n'est pas fondée pour s'y opposer à faire état d'une mise à pied de trois jours prévue durant cette période. En effet, il n'est pas prouvé d'absence injustifiée de M. [T] sur cette période du 15 juillet au 2 août 2013, seul motif, à l'exclusion de toute mise à pied, pour lequel l'employeur n'a pas versé ce salaire. La société CHAPELIER est pas conséquent condamnée à lui payer la somme de 1 785,42 euros.
Au moment de la rupture de son contrat de travail, M. [T] avait au moins deux années d'ancienneté et la société CHAPELIER employait habituellement au moins onze salariés. En application de l'article L. 1235-3 du code du travail, M. [T] peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure au montant des salaires bruts qu'il a perçus pendant les six derniers mois précédant son licenciement. Au-delà de cette indemnisation minimale, il justifie d'un préjudice supplémentaire notamment en raison des circonstances du licenciement qui sera réparé par l'allocation de la somme de 50 000 euros.
Sur le harcèlement moral
Aux termes de l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Lorsque survient un litige relatif à l'application des dispositions précitées, le salarié, conformément aux dispositions de l'article L 1154-1 du même code, établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné en cas de besoin toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Il résulte de l'article L 1152-1 précité que le harcèlement moral est constitué, indépendamment de l'intention de son auteur, dès lors que sont caractérisés des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
En l'espèce, M. [T] fait état des lettres recommandées adressées par l'employeur au cours des trois années avant le licenciement et considère qu'elles étaient devenues en quelque sorte une méthode de gestion vis à vis de lui contrairement à ce qui se passaient pour les autres salariés. Cependant il est démontré que toutes ces lettres concernaient l'exercice du pouvoir disciplinaire de l'employeur (convocations à des entretiens et notification de sanctions) ou son pouvoir de direction (rappel des horaires de réunions et de travail du salarié, information adressée au salarié sur le recours à la géolocalisation du véhicule de travail).
En effet, M. [T] ne démontre pas que l'avertissement du 9 mars 2011, ni celui du 19 mars 2012 et plus généralement les demandes de remise de compte rendus d'activité avaient un caractère discriminatoire et injustifié. La société CHAPELIER n'a jamais reconnu en effet que ces compte rendus n'étaient pas utiles puisqu'elle a au contraire insisté pendant deux ans afin que le salarié les remette comme le prévoit la convention collective pour les vendeurs itinérants.
De même, M. [T] ne prouve pas que des réunions commerciales lui ont été imposées en dehors de son temps de travail et sans rémunération puisque la société a rappelé dans une lettre du 6 décembre 2011 qu'en application de son pouvoir de direction elle fixait les horaires de ces réunions payées en heures supplémentaires. Si M. [T] n'a pas reçu de rémunération c'est tout simplement qu'il a toujours refusé de s'y rendre.
A propos du système de géolocalisation, M. [T] ne peut pas soutenir qu'il a été le seul salarié concerné. En effet la société démontre qu'elle avait d'abord prévu de mettre en place ce système sur le véhicule de deux vendeurs à titre expérimental pour une durée de six mois avant de le généraliser à toute la flotte de ces véhicules. M. [T] a été informé de ce dispositif dans plusieurs courriers de mai à septembre 2012. En outre la société CHAPELIER avait régulièrement consulté le Comité d'Entreprise sur la mise en place de cette géolocalisation, destinée d'une part à la sûreté des véhicules pour prévenir les vols dont ils étaient l'objet et d'autre part à améliorer les moyens pour l'emploi des véhicules (rationalisation de la répartition des secteurs par vendeur, optimisation de la prospection). Ces objectifs ont fait partie de la déclaration qu'elle a effectuée à la CNIL sur le recours à la géolocalisation de ses véhicules. M. [T] peut soutenir qu'un système de géolocalisation ne peut être utilisé pour contrôler la durée du travail d'un salarié qui comme lui, disposait d'une liberté dans l'organisation de son travail dès lors qu'un autre moyen permettait ce contrôle, en l'occurrence la remise des comptes rendus d'activité que son employeur lui réclamait légitimement et qu'il avait d'ailleurs fini par adresser. Mais il ne démontre nullement que le système de géolocalisation a été en l'espèce utilisé à d'autre fins que celles déclarées à la CNIL et qui ont été portées à sa connaissance. Dans ces conditions il ne prouve pas le caractère illicite du recours à la géolocalisation de son véhicule de travail.
M. [T] soutient à juste titre qu'il n'a pas bénéficié de l'augmentation générale de salaire décidée par l'employeur à partir du 1er janvier 2012, sans qu'il soit démontré une raison objective à cette carence. Néanmoins la cour constate que le salarié n'a adressé aucune réclamation au cours de l'exécution de son contrat de travail contrairement aux compléments de salaires s'agissant des commissions et qu'il ne forme d'ailleurs pas non plus de demande en justice. Il justifie aussi par la production de plusieurs attestations de salariés de la société COLAS que la lettre dans laquelle l'employeur lui a reproché l'avoir dénigrée auprès de membres du personnel de cette société cliente ne repose sur aucune preuve. Mais cette lettre ne comporte aucune sanction à l'égard du salarié. Elle n'a donc pas eu pour effet de dégrader les conditions de travail et de remettre en cause la poursuite du contrat de travail. Le salarié ne justifie pas non plus que ces deux agissements pris dans leur ensemble ont eu des répercussions sur son état de santé ou sur ces conditions de travail. En effet ils ont eu lieu au cours du premier trimestre 2012 alors que M. [T] ne justifie avoir été à nouveau en arrêt de travail qu'à partir du mois d'octobre 2012, les précédents arrêts de maladie datant de plusieurs mois auparavant (du 20 septembre 2011 jusqu'au 30 octobre 2011. Le jugement qui a débouté M. [T] de sa demande pour harcèlement moral devra par conséquent être confirmé.
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile
L'équité commande de mettre à la charge de la société CHAPELIER, elle-même déboutée de ce chef, une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [T] au titre de l'instance d'appel en plus de la somme allouée de ce chef par le conseil de prud'hommes.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
STATUANT contradictoirement, en dernier ressort et par arrêt mis à la disposition des parties au greffe,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions SAUF en ce qu'il a débouté M. [T] de sa demande de rappel de salaires au titre des commissions ;
STATUANT à nouveau dans la limite de l'infirmation de ce jugement ;
CONDAMNE la société CHAPELIER à verser à M. [T] à titre de rappel de salaires au titre des commissions la somme de 9 610,28 € (NEUF MILLE SIX CENT DIX EUROS ET VINGT HUIT CENTIMES) outre les congés payés afférents de 961,03 € (NEUF CENT SOIXANTE ET UN EUROS ET TROIS CENTIMES) sur la période de 2010 au 13 décembre 2013 ;
Y AJOUTANT,
CONDAMNE la société CHAPELIER à verser à M. [T] :
- à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse la somme de 50 000 € (CINQ MILLE EUROS) ;
- à titre de rappel de salaires du 15 juillet au 2 août 2013 la somme de 1 785,42 € (MILLE SEPT CENT QUATRE VINGT CINQ EUROS ET QUARANTE DEUX CENTIMES) ;
DÉBOUTE la société CHAPELIER de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société CHAPELIER à payer à M. [T] la somme de 2 000 € (DEUX MILLE EUROS) en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais en appel ;
CONDAMNE la société CHAPELIER aux dépens d'appel.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Catherine BÉZIO, président, et par Sabine MARÉVILLE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,