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15/05/2014 | FRANCE | N°13/04862

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 15 mai 2014, 13/04862


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



11e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 15 MAI 2014



R.G. N° 13/04862



VJD/CA



AFFAIRE :



SAS LENOVO FRANCE SAS





C/

[U] [R]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Janvier 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Encadrement

N° RG : 09/03180





Copies exécutoires délivrées à :



Me Sophie BINDER

Me Nicolas LÉGER





Copies certifiées conformes délivrées à :



SAS LENOVO FRANCE SAS



[U] [R]







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUINZE MAI DEUX MILLE QUATORZE,

La co...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 MAI 2014

R.G. N° 13/04862

VJD/CA

AFFAIRE :

SAS LENOVO FRANCE SAS

C/

[U] [R]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Janvier 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Encadrement

N° RG : 09/03180

Copies exécutoires délivrées à :

Me Sophie BINDER

Me Nicolas LÉGER

Copies certifiées conformes délivrées à :

SAS LENOVO FRANCE SAS

[U] [R]

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUINZE MAI DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SAS LENOVO FRANCE SAS

[Adresse 1]

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Sophie BINDER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0449

APPELANTE

****************

Monsieur [U] [R]

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Nicolas LÉGER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0115

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Mars 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Véronique JACOB-DESJARDINS, Vice-Présidente placée chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Noëlle ROBERT, Président,

Madame Marie-Hélène MASSERON, Conseiller,

Madame Véronique JACOB-DESJARDINS, Vice-Présidente placée,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,

EXPOSE DU LITIGE

M. [U] [R] était embauché à compter du 17 mars 2008 par la société Lenovo (France) SAS, dénommée ci-après Lenovo, selon contrat de travail à durée indéterminée en qualité de directeur commercial.

La société Lenovo employait plus de 10 salariés.

Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

Au cours du mois d'avril 2009, une procédure de rupture conventionnelle est engagée entre les parties qui aboutit, le 5 juin 2009, au virement au profit de M. [U] [R] d'une indemnité spécifique pour rupture conventionnelle. Le 8 juin 2009 la direction départementale du travail refusait l'homologation de la convention. M. [U] [R] ne restituait pas l'indemnité perçue et ne reprenait pas son poste.

La société Lenovo engageait une procédure de licenciement pour faute grave du fait du refus de M. [U] [R] de reprendre son poste malgré deux mises en demeure adressées les 12 août 2009 et 9 septembre 2009.

Contestant le licenciement, M. [U] [R] saisissait le conseil de prud'hommes de Nanterre, le 28 septembre 2009 aux fins d'obtenir la condamnation de la société Lenovo à lui verser :

A titre principal :

- constater que la rupture est intervenue le 5 juin 2009 et faire produire à celle-ci les effets d'un licenciement irrégulier et dénué de cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, condamner la société Lenovo à lui payer les sommes suivantes, avec intérêts légaux à compter du 6 juin 2009 et anatocisme : :

- 5 907,79 euros à titre de reliquat d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents ;

- 2 365,01 euros d'indemnité de licenciement ;

- 8 868,81 euros de dommages et intérêts pour procédure de licenciement irrégulière ;

- 88 000,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 34 500,00 euros d'indemnité au titre de la privation du congé de reclassement ;

- 67 964,62 euros à titre d'exécution de la clause de non-concurrence,

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le conseil retiendrait que la rupture n'est pas intervenue le 5 juin 2009 mais le 19 octobre 2009, par l'effet du licenciement pour faute grave prononcé à son encontre:

- dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et constater qu'il repose sur une cause économique,

- condamner la société Lenovo à lui payer les sommes suivantes, avec intérêts légaux à compter du 19 octobre 2009 et anatocisme :

- 5 907,79 euros à titre de reliquat d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents ;

- 2 365,01 euros d'indemnité de licenciement ;

- 88 000,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 34 500,00 euros d'indemnité au titre de la privation du congé de reclassement ;

outre la remise des documents sociaux conformes sous astreintes de 200 euros par jour de retard et document à compter du 10ème jour suivant la décision, l'exécution provisoire et 4 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que la condamnation de la société Lenovo aux dépens.

La société Lenovo sollicitait la condamnation de M. [R] à lui payer les sommes suivantes :

- 71 282,80 euros net au titre de la restitution de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle indûment perçue, majorée des intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 9 septembre 2009, avec exécution provisoire,

- 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 18 janvier 2012, le conseil de prud'hommes de Nanterre a jugé le licenciement de M. [U] [R] abusif et :

- condamné la société Lenovo à verser à ce dernier les sommes de :

- 5 907,79 euros à titre de reliquat d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents ;

- 2 365,01 euros d'indemnité de licenciement ;

- 8 868,81 euros de dommages et intérêts pour procédure irrégulière ;

- 8 868,81 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 67 964,62 euros à titre d'exécution de la clause de non-concurrence ;

- 1 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

assorties de l'exécution provisoire de droit,

- condamné M. [U] [R] à restituer à la société Lenovo la somme de 71 282,80 euros perçue au titre de la rupture conventionnelle, montant pouvant venir en compensation des sommes dues par la société Lenovo à M. [R].

La société Lenovo a régulièrement fait appel de la décision. L'affaire radiée par ordonnance en date du 22 novembre 2013 pour communication tardive des conclusions était réinscrite au rôle de la 11ème chambre et convoquée à l'audience du 31 mars 2014.

La société Lenovo demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement et en conséquence :

- de dire que le licenciement pour faute grave de M. [R] est bien fondé et que la renonciation par la société à l'obligation de non-concurrence est régulière et valable

- de condamner M. [U] [R] à lui restituer, sous astreinte, les sommes versées en application de la décision de première instance,

- de condamner M. [U] [R] à lui verser la somme de 7 500 euros au titre de l'article

700 du code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions elle fait valoir que l'absence d'homologation de la rupture conventionnelle a privé celle-ci d'effet et que M. [U] [R] ne s'étant pas présenté à son poste malgré deux mises en demeure avait commis une faute grave justifiant son licenciement. Par ailleurs, elle explique qu'ayant renoncé à se prévaloir de la clause de non-concurrence elle ne pouvait être condamnée à lui verser une contrepartie financière.

Par conclusions du 12 mars 2014, M. [U] [R] sollicite la confirmation du jugement entrepris mais une condamnation à hauteur de 88 688,81 euros au titre des dommages et intérêts pour rupture abusive.

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour retiendrait que la rupture n'est pas intervenue le 5 juin 2009 mais le 19 octobre, par l'effet du licenciement pour faute grave prononcé à son encontre, il soutient que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et sollicite la condamnation de la société Lenovo à lui verser les sommes de:

- 5 907,79 euros à titre de reliquat d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents ;

- 2 365,01 euros d'indemnité de licenciement ;

- 88 000,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 34 500,00 euros d'indemnité au titre de la privation du congé de reclassement ;

outre les intérêts légaux et anatocisme, remise des documents sociaux conformes (certificat de travail, attestation destinée à Pôle emploi, solde de tout compte) sous astreintes de 200 euros par jour de retard et document à compter du 10ème jour suivant la décision,

- 7 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

outre la condamnation de la société Lenovo aux dépens.

A l'appui de ses prétentions, M. [U] [R] constate que la société Lenovo en lui versant l'indemnité de rupture et en lui remettant les documents sociaux le 5 juin 2009 avait rompu le contrat de travail malgré le défaut d'homologation intervenu le 8 juin 2009 et de ce fait la rupture devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience.

EXPOSE DES MOTIFS

Sur la rupture conventionnelle

Considérant qu'en application de l'article L 1237-14 du code du travail la validité de la convention est subordonnées à son homologation ; que tant que la convention n'est pas homologuée, le contrat de travail produit tous ses effets et que dès lors M. [U] [R] ne saurait se prévaloir d'une attestation ASSEDIC et d'un solde de tout compte délivrés irrégulièrement pour invoquer la rupture de son contrat de travail ; qu'il ne produit par ailleurs aucun document établissant un licenciement verbal et qu'il faisait l'objet d'une mise en demeure de reprendre son poste par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 19 août 2009 ;

Considérant par ailleurs que M. [U] [R] était directement destinataire du courrier du 4 juin 2009 portant refus d'homologation par la DDTEFP ; qu'il n'engageait pas de procédure de contestation de ladite décision ;

Que c'est donc à tort que M. [U] [R] soutient que le défaut d'homologation de la rupture conventionnelle produit les effets d'une licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Que la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle condamne M. [U] [R] à rembourser à la société Lenovo les sommes perçues au titre de la rupture conventionnelle ;

Sur le licenciement pour faute grave

Considérant que M. [U] [R] faisait l'objet d'un licenciement pour faute grave selon courrier en date du 19 octobre 2009 qui relève l'abandon de poste de celui-ci malgré les mises en demeure des 12 août 2009 et 9 septembre 2009 de reprendre son poste ;

Que M. [U] [R] ne saurait exciper de sa bonne foi à faire produire ses effets à la convention de rupture dès lors qu'il était informé du refus d'homologation et mis en demeure de reprendre son poste dès le 12 août 2009, date de son retour de congés, quand bien même dans le laps de temps intermédiaire la société Lenovo avait tenté d'obtenir une homologation par la DDTEFP ;

Considérant que l'abandon de poste malgré mises en demeure constitue une faute grave et qu'il y a lieu d'infirmer la décision entreprise et de condamner M. [U] [R] à restituer les sommes perçues en exécution de la décision de première instance au titre des indemnités de rupture, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, étant observé que cette dernière était sollicitée par le salarié dans la cadre de sa demande principale tendant à voir juger que la rupture de son contrat de travail était intervenue le 5 juin 2009, en dehors de toute procédure de licenciement ;

Sur la clause de non-concurrence

Considérant qu'une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable aux intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives ;

Considérant qu'il est constant que la clause de non-concurrence contenue dans le contrat de travail de M. [U] [R] n'est assortie d'aucune contrepartie financière au profit de ce dernier ; que la clause litigieuse est donc entachée de nullité ;

Considérant que si la société Lenovo a indiqué dans la lettre de licenciement que M. [U] [R] était libéré de son obligation de non-concurrence, la présence dans le contrat de travail de ce dernier d'une clause nulle lui a nécessairement causé un préjudice ; qu'il convient en conséquence, compte tenu des éléments du dossier, d'allouer à M. [U] [R] la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts, laquelle somme viendra en déduction de la restitution de la somme allouée par les premiers juges ;

Sur l'astreinte

Considérant que la société Lenovo ne justifie pas de circonstances particulières nécessitant la condamnation de M. [U] [R] à restituer les fonds perçus sous astreinte ;

Sur les documents sociaux, les intérêts légaux et l'anatocisme

Considérant que la demande de M. [U] [R] portant sur la condamnation de la société Lenovo à lui remettre sous astreinte les documents sociaux conformes est sans objet ;

Qu'il y a lieu de le débouter de sa demande ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de M. [U] [R] au titre des intérêts légaux et de l'anatocisme ;

Sur les dépens et l'indemnité de procédure

Considérant que M. [U] [R] qui succombe pour l'essentiel dans la présente instance, doit supporter les dépens et qu'il y a lieu de le débouter de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant qu'au regard de la situation respective des parties, il apparaît équitable de laisser à la charge de la société Lenovo les frais irrépétibles par elle exposés ;

PAR CES MOTIFS

La COUR,

Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE,

Infirme partiellement le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre en date du 18 janvier 2012 et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

Dit que la rupture du contrat de travail de M. [U] [R] n'est pas intervenue le 5 juin 2009 mais le 19 octobre 2009, consécutivement à son licenciement pour faute grave ;

Dit que le licenciement pour faute grave de M. [U] [R] est justifié ;

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a alloué à M. [U] [R] les sommes suivantes :

- 5 907,79 euros à titre de reliquat d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents ;

- 2 365,01 euros d'indemnité de licenciement ;

- 8 868,81 euros de dommages et intérêts pour procédure irrégulière ;

- 8 868,81 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 67 964,62 euros au titre de la clause de non-concurrence illicite ;

Déboute M. [U] [R] de ses demandes en paiement d'un reliquat d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, d'une indemnité de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'une indemnité pour procédure de licenciement irrégulière ;

Condamne la société Lenovo (France) SAS à payer à M. [U] [R] la somme de 5 000,00 euros (cinq mille euros) au titre de la clause de non-concurrence illicite ;

Confirme pour le surplus les dispositions non contraires du jugement entrepris ;

Y ajoutant :

Condamne M. [U] [R] à restituer à la société Lenovo (France) SAS les sommes perçues en exécution de la décision infirmée, sous déduction de la somme de 5 000 euros qui lui est allouée au titre de la clause de non-concurrence illicite ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Déboute M. [U] [R] et la société Lenovo (France) SAS de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne M. [U] [R] aux dépens.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Mme Marie-Noëlle ROBERT, président, et Mme Claudine AUBERT, greffier.

Le GREFFIER Le PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11e chambre
Numéro d'arrêt : 13/04862
Date de la décision : 15/05/2014

Références :

Cour d'appel de Versailles 11, arrêt n°13/04862 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-05-15;13.04862 ?
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