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15/05/2014 | FRANCE | N°12/03537

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 15 mai 2014, 12/03537


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 50A



3e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 15 MAI 2014



R.G. N° 12/03537







AFFAIRE :







[D] [L]



C/



[J] [T] Veuve [M]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Avril 2012 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 2

N° RG : 11/02031







Expédit

ions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Pascale GOUAILHARDOU-

CRUZEL

Me Véronique BERTHON

Me Corinne LEPAGE de la SELARL HUGLO LEPAGE et ASSSOCIES,Conseil









RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUINZE MAI DEUX MILLE QUATORZE,

La co...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 50A

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 MAI 2014

R.G. N° 12/03537

AFFAIRE :

[D] [L]

C/

[J] [T] Veuve [M]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Avril 2012 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 2

N° RG : 11/02031

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Pascale GOUAILHARDOU-

CRUZEL

Me Véronique BERTHON

Me Corinne LEPAGE de la SELARL HUGLO LEPAGE et ASSSOCIES,Conseil

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUINZE MAI DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [D] [Y] [I] [V] [U] [N] [L]

né le [Date naissance 3] 1956 à [Localité 4]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 6]

Représentant : Me Pascale GOUAILHARDOU-CRUZEL, Postulant, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 177

Représentant : Me Christine DIOP, avocat au barreau de NICE

APPELANT

****************

1/ Madame [J] [A] [T] Veuve [M]

née le [Date naissance 1] 1938 à [Localité 11] (75)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

2/ Monsieur [X] [Q] [S] [M]

né le [Date naissance 2] 1959 à [Localité 5] (94)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

agissant en sa qualité d'héritier de [U] [S] [M]

3/ Mademoiselle [BM] [E] [M]

née le [Date naissance 5] 1974 à [Localité 9] (92)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

agissant en sa qualité d'héritier de [U] [S] [M]

4/ Madame [H] [M] épouse [K]

née le [Date naissance 4] 1963 à [Localité 10] (93)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 1]

agissant en sa qualité d'héritier de [U] [S] [M]

Représentant : Me Véronique BERTHON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 233

Représentant :Me Alexandra PERQUIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS substituant Me Dominique BENATTAR, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

5/ Monsieur [C] [R] [B] [W]

né le [Date naissance 7] 1959 à [Localité 7] (02)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]

6/ Madame [F] [O] [Z] [G] épouse [W]

née le [Date naissance 6] 1965 à [Localité 8] (53)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]

7/ SCI RIFA

[Adresse 3]

[Localité 6]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Corinne LEPAGE de la SELARL HUGLO LEPAGE et ASSOCIES, Conseil, Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0321 - N° du dossier 12222046

Représentant : Me Benoît DENIS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0316 substituant Me Corinne LEPAGE de la SELARL HUGLO LEPAGE et ASSOCIES, Conseil, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 27 Mars 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Annick DE MARTEL, Conseiller et Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller chargé du rapport,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Véronique BOISSELET, Président,

Madame Annick DE MARTEL, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Lise BESSON,

---------------

FAITS ET PROCÉDURE

Le 28 juin 1988, Monsieur et Madame [M] ont conclu au profit de Monsieur et Madame [L] une promesse synallagmatique de vente sous conditions suspensives portant sur leur propriété cadastrée G[Cadastre 1] située [Adresse 3] au prix de 1.000.000 francs. Deux jours plus tard, le 30 juin 1988, en présence de Monsieur [L], Monsieur et Madame [M] consentaient à Monsieur et Madame [W] un bail commercial de l'immeuble implanté sur la parcelle G[Cadastre 1].

Monsieur [L] souhaitant édifier un immeuble sur cette parcelle, il déposait et obtenait un permis de démolir et de construire, que le maire de [Localité 6] retirait par arrêtés du 21 décembre 1988, après avoir exercé, le 9 décembre 1988, le droit de préemption de la commune sur la parcelle G[Cadastre 1].

Saisi par Monsieur [L], le tribunal administratif de Paris dans un jugement du 6 février 1992 annulait l'arrêté de préemption, ainsi que les arrêtés rapportant le permis de démolir et le permis de construire. Cette décision n'était notifiée qu'en septembre 1997 et ne faisait l'objet d'aucun recours. Mais, saisi par les riverains, dont Monsieur et Madame [W], le tribunal administratif de Paris dans un jugement du 10 décembre 1999 relevait d'office la caducité du permis de construire et jugeait qu'il n'y avait donc pas lieu de statuer sur la demande d'annulation de ce permis et que les riverains n'étaient pas fondés à attaquer l'arrêté du 1er septembre 1988 accordant un permis de démolir à Monsieur [L]. Cette décision était confirmée par la cour administrative d'appel par arrêt du 27 novembre 2001.

Le 30 août 2010, Monsieur [L] s'est rapproché de Monsieur et Madame [M] afin d'authentifier par acte notarié la promesse de vente du 28 juin 1988 alors que la parcelle objet de la promesse de vente avait été cédée à la SCI Rifa par acte notarié en date du 26 octobre 2006.

Par acte d'huissier des 24 janvier et 3 février 2011, Monsieur [D] [L] a assigné Madame [P] [T] veuve [M], Monsieur [X] [M], Madame [H] [M] épouse [K], Mademoiselle [BM] [M] (ci-après les consorts [M]), la SCI Rifa, Monsieur [C] [W] et Madame [F] [G] épouse [W] devant le tribunal de grande instance de Nanterre en vue d'obtenir, notamment, l'annulation de l'acte de vente du 26 octobre 2006, la radiation des inscriptions hypothécaires liées à la vente annulée sous astreinte de 500 € par jour de retard à l'expiration du délai d'un mois suivant la signification du jugement, la réitération de la vente de la parcelle G[Cadastre 1] par les époux [M] à son profit, devant notaire dans le mois qui suivra la signification de la décision au prix fixé dans l'acte, soit 152 449,016 euros déduction faite de l'acompte déjà versé et sous astreinte et la condamnation des défendeurs à lui verser diverses sommes au titre de la perte de loyers, du manque à gagner et de son préjudice moral.

Par jugement en date du 13 avril 2012, le tribunal a :

déclaré Monsieur [D] [L] recevable en ses demandes,

débouté Monsieur [D] [L] de sa demande tendant au prononcé de la nullité de la vente conclue le 26 octobre 2006 entre Monsieur et Madame [M] et la SCI Rifa,

dit que la vente conclue entre Monsieur et Madame [M] et la SCI Rifa le 26 octobre 2006 est parfaite,

débouté Monsieur [D] [L] du surplus de ses demandes,

ordonné la publication du jugement aux frais de Monsieur [D] [L] au Bureau des hypothèques de Vanves,

condamné Monsieur [D] [L] à régler à Madame [P] [T] veuve [M], Monsieur [X] [M], Madame [H] [M] épouse [K] et Mademoiselle [BM] [M] une somme de 1.500 € de dommages et intérêts pour procédure abusive,

condamné Monsieur [D] [L] à régler à la SCI Rifa, Monsieur [C] [W] et Madame [F] [G] épouse [W] une somme de 1.500 € de dommages et intérêts pour procédure abusive,

condamné Monsieur [D] [L] à régler une somme de 2.500 € à Madame [P] [T] veuve [M], Monsieur [X] [M], Madame [H] [M] épouse [K] et Mademoiselle [BM] [M] ainsi qu'une somme de 2.500 € à la SCI Rifa, Monsieur [C] [W] et Madame [F] [G] épouse [W] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné Monsieur [D] [L] aux dépens,

prononcé l'exécution provisoire,

débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Le tribunal a jugé qu'après prorogation le 12 février 1989 du terme de la promesse de vente (trois mois à compter du jour où serait devenue définitive la décision judiciaire vidant le contentieux relatif à l'annulation des autorisations administratives de démolir et de bâtir et à l'exercice par la commune de [Localité 6] du droit de préemption urbain), soit à la date du 27 avril 2002, ni la condition d'obtention de prêt ni la condition d'obtention de permis de construire n'étaient réalisées et que conformément aux dispositions contractuelles chacune des parties était en droit de reprendre sa pleine et entière liberté.

Le tribunal a en outre jugé la procédure initiée par Monsieur [L] manifestement abusive.

Monsieur [L] a interjeté appel de cette décision et, aux termes de conclusions du 17 janvier 2014, demande à la cour, au visa des articles 1134, 1147, 1589 al.1, 1179 et 2272 du code civil d'infirmer le jugement attaqué, et statuant à nouveau :

de déclarer irrecevables les époux [W] et la SCI Rifa en leurs demandes par application de la règle de l'Estoppel et subsidiairement les dire mal fondées,

en conséquence, de débouter les époux [W], la SCI Rifa et les consorts [M] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

d'annuler avec toutes conséquences de droit l'acte de vente notarié du 26 octobre 2006 passé entre les consorts [M] et la SCI R.I.F.A. (dont les seuls associés sont les époux [W]) en fraude de ses droits,

d'ordonner par voie de conséquence, la radiation des inscriptions hypothécaires liées à la vente annulée aux frais exclusifs des défendeurs et sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de l'expiration du délai d'un mois à compter de la signification du jugement à intervenir,

de juger que la vente de la parcelle cadastrée G[Cadastre 1] par les époux [M] à Monsieur [L] sera réitérée par devant Maître [VT], notaire à [Localité 6], ou tout notaire de son choix, dans le mois qui suivra la signification au vendeur du jugement définitif à intervenir, au prix fixé dans l'acte sous seing privé, soit la somme de 152.449,01 € (1.000.000 F.), déduction faite de l'acompte de 7.622,45 € (50.000 Francs) déjà versé entre les mains dudit notaire, sous astreinte de 1.000 € par jour de non faire à compter de l'expiration du délai d'un mois à compter de la signification du jugement définitif à intervenir,

de condamner solidairement Madame [J] [T], Veuve [M], Monsieur [X] [M], Madame [H] [M], épouse [K], Mlle [BM] [M], la SCI Rifa, prise en la personne de sa gérante en exercice Madame [F] [G], épouse [W], Monsieur [C] [W] et Madame [F] [G], épouse [W], ès nom et ès qualité de gérante de la SCI Rifa, auteurs d'un concert frauduleux, à lui payer, les sommes suivantes en réparation de ses préjudices :

253.473,35 € au titre des pertes de loyers arrêtées au 31/12/2011,

2.453.435 € au titre du manque à gagner résultant de la non réalisation du projet immobilier, objet du permis de construire accordé à Monsieur [L] le 25 octobre 1988,

10.000 € au titre du préjudice moral ;

d'ordonner la compensation entre d'une part, la somme de 46.154,80 € et celles que les consorts [M] et les époux [W]/SCI Rifa resteront lui devoir au titre du jugement à intervenir ; et d'autre part, entre la somme qu'il devra régler au titre de l'acquisition du bien immobilier et celle, de même montant, tirée du montant global des condamnations prononcées à l'encontre des consorts [M],

de condamner solidairement Madame [J] [T], Veuve [M], Monsieur [X] [M], Madame [H] [M], épouse [K], Mlle [BM] [M], la SCI Rifa, prise en la personne de sa gérante en exercice Madame [F] [G], épouse [W], Monsieur [C] [W] et Madame [F] [G], épouse [W], ès nom et ès qualité de gérante de la SCI Rifa, à payer à Monsieur [L] la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance, et 5.000 € pour les frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux dépens.

Dans des conclusions en date du 24 août 2012, les consorts [M] demandent à la cour :

de confirmer le jugement entrepris,

de débouter Monsieur [L] de sa demande d'annulation de la vente du 26 octobre 2006 et de dire que cette vente est parfaite,

de débouter Monsieur [L] du surplus de ses demandes,

d'ordonner la publication de la décision aux frais de Monsieur [L] au Bureau des hypothèques de Vanves,

de les dire recevables en leurs demandes reconventionnelles et de condamner Monsieur [L] à leur payer la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

de le condamner à leur payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de conclusions en date du 28 janvier 2013, la SCI Rifa et Monsieur et Madame [W] demandent à la cour :

de juger que Monsieur [L] ne saurait être admis à se contredire au détriment d'autrui,

de constater par ailleurs que Monsieur [L] ne rapporte pas la preuve de la publication, qui lui incombait, de ses dernières conclusions d'appel,

en conséquence, de déclarer Monsieur [L] irrecevable en son appel et en ses demandes,

de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de débouter Monsieur [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Subsidiairement, au fond :

de juger que la promesse de vente en date du 28 juin 1988 est inopposable à la SCI Rifa et aux époux [W], en tant qu'elle porte sur un bien non clairement identifié,

de juger que la promesse de vente en date du 28 juin 1988 est au surplus inopposable à la SCI Rifa et aux époux [W], faute d'avoir été publiée à la conservation des hypothèques,

de constater que la promesse de vente en date du 28 juin 1988, prorogée le 12 février 1989 est caduque, à tout le moins depuis le 27 avril 2002,

de constater enfin que les conditions suspensives de ladite promesse de vente ne se sont pas réalisées,

de constater surabondamment que, par son comportement postérieur Monsieur [L] a montré qu'il considérait lui-même ladite promesse comme caduque, avant de se raviser très récemment,

en conséquence, de juger que Monsieur [L] est sans aucun droit ni titre sur l'immeuble litigieux sis [Adresse 3] et que la SCI Rifa en est seule, unique et légitime propriétaire,

de juger que Monsieur [L] ne justifie aucunement ni du principe ni du montant des demandes indemnitaires formées à l'encontre de la SCI Rifa, de sa gérante et des époux [W],

en conséquence, de débouter Monsieur [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

En tout état de cause, y ajoutant :

sur le caractère abusif de l'action, de juger les concluants recevables et bien fondés en leur demande reconventionnelle à l'encontre de Monsieur [L], de juger que la demande et l'appel de Monsieur [L] ne reposant sur aucun moyen sérieux et ayant été initiés dans le seul but de nuire aux concluants revêtent un caractère abusif, et de le condamner à leur payer la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral,

sur les dépens et les frais irrépétibles, de condamner Monsieur [L] à payer aux concluants la somme de 20.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel,

sur la publication à la conservation des hypothèques, d'ordonner la publication de l'arrêt à intervenir à la conservation des hypothèques de Vanves 2, à la diligence de la SCI Rifa et aux frais de Monsieur [L].

Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 13 mars 2014.

MOTIFS

- Sur la recevabilité

S'il est exact que Monsieur [L] s'est prévalu devant les juridictions administratives du fait qu'il s'était trouvé dans l'impossibilité d'acquérir le bien objet du présent litige, sollicitant notamment la condamnation de la commune de [Localité 6] et de l'Etat à l'indemniser des préjudices causés par 'l'impossibilité de réaliser un immeuble à usage de logements et commerces au 197/197bis' et visant expressément le fait que 'la commune de [Localité 6] l'a directement contraint à ne pas acquérir le terrain cadastré G[Cadastre 1]", alors qu'il soutient dans le cadre de cette instance que la vente est parfaite, il est de principe que pour que le principe de l'estoppel trouve à s'appliquer, les actions précédemment engagées doivent être de même nature, fondées sur les mêmes conventions et opposer les mêmes parties.

En conséquence, c'est à juste titre que le tribunal a écarté la fin de non recevoir tirée de la violation du principe de cohérence et de bonne foi et déclaré recevables les demandes de Monsieur [L], les différentes décisions de justice produites par les intimés ne concernant ni les mêmes parties, ni les mêmes conventions.

Enfin, la question de la recevabilité de l'appel relève de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état en application des dispositions de l'article 914 du code de procédure civile et les époux [W] et la SCI Rifa sont donc irrecevables à contester devant la cour la recevabilité de l'appel de Monsieur [L].

Monsieur [L] prétend quant à lui que les premiers juges n'ont pas répondu à sa demande tendant à faire déclarer irrecevables les demandes des intimés pour s'être contredits à son détriment en se prétendant tiers à la promesse de vente, s'agissant des époux [W] et de la SCI Rifa.

Cependant, et même si la lecture des conclusions de Monsieur [L] ne permet pas de comprendre en quoi les intimés se seraient contredits, il sera observé qu'une simple contradiction, dans des écritures, sur la date de la caducité de la promesse, ne constitue pas une violation du principe de l'estoppel et que le fait que les époux [W] et la SCI Rifa se déclarent tiers à la promesse de vente litigieuse, qualité que leur dénie l'appelant, ne constitue nullement une atteinte au principe de cohérence. La demande de Monsieur [L] de ce chef sera donc rejetée.

- Sur le fond

Contrairement à ce que prétendent Monsieur et Madame [W] et la SCI Rifa, le bien objet de la promesse de vente, puis de la vente à la SCI Rifa est parfaitement identifié et le moyen soulevé au titre d'une prétendue indétermination de ce bien est mal fondé, les consorts [M], signataires de la promesse, n'ayant d'ailleurs invoqué aucune difficulté de ce chef.

Aux termes des dispositions de l'article 1176 du code civil, lorsqu'une obligation est contractée sous la condition qu'un événement arrivera dans un temps fixé, cette condition est censée défaillie lorsque le temps est expiré sans que l'événement soit arrivé.

La promesse synallagmatique de vente conclue le 28 juin 1988 comportait plusieurs conditions suspensives :

l'obtention par Monsieur [L] d'un prêt de 1.053.000 francs, étant observé que la convention prévoyait que l'acquéreur avait la possibilité de renoncer à cette condition stipulée dans son seul intérêt,

le fait que Monsieur [L] soit co-signataire du bail de location entre M et Mme [W] et M et Mme [M] (condition remplie dès le 30 juin 1988),

la non opposition du locataire à la construction de l'immeuble,

l'obtention d'un permis de construire.

Il était prévu que si l'une des conditions n'était pas réalisée, chacune des parties reprendrait sa pleine et entière liberté.

Monsieur [L] devait en outre verser au compte du notaire, Maître [XF], choisi comme séquestre, la somme de 50.000 francs par caution bancaire de l'UCB.

Il n'a pas fourni cette caution.

Il est constant que les époux [M] et Monsieur [L] ont signé le 12 février 1989 un acte ainsi rédigé :

'connaissance prise du contentieux qui s'est noué quant à la renonciation par la ville de [Localité 6] à son droit de préemption urbain, (Monsieur et Madame [M]) prorogent nonobstant les termes de la vente sous condition suspensive en date à [Localité 6] du 28 juin 2008 de Monsieur [L], ladite vente qui lui a été consentie pour l'immeuble situé [Adresse 3] et [Adresse 4] de trois mois, à compter du jour où sera devenue définitive la décision judiciaire, vidant le contentieux relatif à l'annulation des autorisations administratives de démolir et de bâtir et à l'exercice par la commune de [Localité 6] du droit de préemption urbain. Il était en outre 'expressément' prévu dans ce même acte que 'Monsieur [L] sera tenu de rapporter la caution prévue à ladite vente sous conditions suspensives, en date du 28 juin 1988, dans le délai d'un mois à compter également du jour où la décision judiciaire susvisée sera devenue définitive'.

Cet acte n'a eu pour effet que de proroger le terme de la promesse (initialement fixé au 1er janvier 1989), sans remettre en cause ses autres dispositions, ce qui signifie que pour que la vente soit parfaite, il était toujours nécessaire que les conditions suspensives soient réalisées.

Il va de soi que si, à la date initialement prévue, toutes les conditions avaient effectivement été remplies, ou si Monsieur [L] entendait y renoncer, alors il aurait régularisé l'acte authentique.

Par ailleurs, la promesse de vente prévoyant expressément que si l'une des conditions n'était pas réalisée, chacune des parties reprendrait sa pleine et entière liberté, la renonciation de l'acquéreur au bénéfice des conditions suspensives devait intervenir avant la date d'expiration de la promesse telle qu'elle résultait de la prorogation.

Les parties s'accordent pour considérer, comme l'a fait le tribunal, que la date d'expiration de la promesse est le 27 avril 2002, soit trois mois après que l'arrêt de la cour administrative d'appel du 27 novembre 2001, qui a confirmé la caducité du permis de construire, soit devenu définitif. Le permis a été jugé caduc car Monsieur [L] n'avait pas débuté les travaux dans les deux ans ayant suivi la notification, qui n'est intervenue qu'en septembre 1997, de la décision administrative du 6 février 1992 qui a annulé les arrêtés de préemption et de retrait des permis de construire et de démolir.

Il s'agit donc d'une appréciation favorable à Monsieur [L], la juridiction administrative ayant quant à elle observé que la promesse de vente était susceptible d'avoir expiré en décembre 1997 soit trois mois après la notification de cette décision du 6 février 1992.

En tout état de cause, si Monsieur [L] justifie de ce qu'il a bien versé la somme de 50.000 francs entre les mains de Maître [VT] le 18 décembre 1997, soit dans le délai prévu par l'acte de prorogation, ce n'est que par un courrier en date du 30 août 2010 qu'il a cru pouvoir informer les vendeurs de ce qu'il entendait réitérer la vente 'passée le 28 juin 1988", précisant qu'il renonçait au bénéfice des '3èmes et 4èmes conditions suspensives', à savoir celles relatives à la non opposition du locataire (les époux [W]) à la construction de l'immeuble et celle afférente à l'obtention du permis de construire.

La promesse ayant été prorogée, il prétend aujourd'hui qu'il avait obtenu le prêt prévu dans la promesse de vente dès avant sa prorogation, Cependant, à supposer que ce financement ait toujours été disponible en 2002, ou en admettant même qu'il ait finalement renoncé à cette condition stipulée dans son seul intérêt, il lui appartenait alors d'en justifier auprès des vendeurs dans le délai de la promesse, tel qu'il résultait de la prorogation précitée du 12 février 1989.

Or, Monsieur [L] ne justifie pas du moindre acte positif tendant à faire savoir aux vendeurs soit qu'il avait obtenu le financement, soit qu'il renonçait au prêt. La promesse est donc devenue caduque à la date du 27 avril 2002.

Elle est également devenue caduque du fait de la non réalisation de la condition suspensive d'obtention du permis de construire, puisqu'il est constant que la juridiction administrative a définitivement jugé que le permis de construire obtenu par Monsieur [L] était devenu caduc le 17 septembre 1999 et que Monsieur [L] n'a pas non plus fait savoir à la date d'expiration de la promesse qu'il renonçait à cette condition. Or, lorsqu'une promesse a été conclue sous la condition suspensive de l'obtention d'un permis de construire dans un certain délai, le dépassement du délai imparti sans obtention dudit permis équivaut à une défaillance.

Les dires de Monsieur [L] selon lesquels la condition suspensive d'obtention du permis de construire était réalisée le 25 octobre 1988 sont dénués de toute portée puisque les parties ont conclu un acte de prorogation, précisément en raison du contentieux relatif au permis de construire, et que cet acte est devenu la loi des parties.

Le raisonnement de Monsieur [L], qui consiste à considérer que les engagements souscrits dans la promesse de vente lieraient sans limitation de temps les consorts [M], frappant ainsi leur bien d'une indisponibilité totale, se heurte en outre à la prohibition des engagements perpétuels.

Enfin, les allégations de l'appelant relatives à l'interposition 'frauduleuse' de la SCI Rifa aux lieu et place de Monsieur et Madame [W], qui en sont les associés, sont dénuées de toute portée dès lors que sa demande principale d'annulation de la vente du bien nécessite au préalable qu'il soit statué sur la caducité de la promesse de vente. Or, ladite promesse étant jugée caduque, rien ne justifie d'annuler la vente intervenue au profit de la SCI Rifa. Par ailleurs, si Monsieur [L] entendait se prévaloir du fait que les époux [W] (qui sont les associés de la SCI Rifa) n'auraient pas respecté l'engagement qu'ils ont pris dans le bail conclu le 30 juin 1988 (soit deux jours après la signature de la promesse qui érigeait pourtant en condition suspensive l'absence d'opposition des époux [W] à la construction de l'immeuble que Monsieur [L] souhaitait réaliser) de ne pas 'empêcher l'édification de l'immeuble ou pavillon sur la propriété' en suite de la vente objet du présent litige, il lui appartenait de le faire mais il ne saurait en tirer le moindre argument utile dans le cadre du débat relatif à la caducité du compromis de vente qu'il a signé avec les époux [M] et à la validité de la vente intervenue entre ces derniers et la SCI Rifa.

Il apparaît en outre que les époux [W] n'ont pas été les seuls à solliciter en 1998 l'annulation du permis de construire qui avait été obtenu par Monsieur [L], d'autres riverains s'étant joints à eux dans cette action.

Enfin, la promesse de vente étant caduque, c'est à tort que Monsieur [L] sollicite la condamnation de tous les intimés à lui payer diverses sommes au titre de la perte de loyers, du manque à gagner et du préjudice moral, la vente n'ayant pas eu lieu à son profit non pas en raison de la faute de ses cocontractants ou des locataires devenus acquéreurs via une SCI, mais en raison de la caducité du compromis due à sa propre carence.

C'est donc à juste titre que le tribunal a débouté Monsieur [L] de sa demande d'annulation de la vente conclue le 26 octobre 2006, déclaré parfaite ladite vente, débouté Monsieur [L] du surplus de ses demandes et ordonné la publication de sa décision.

Il conviendra en outre d'ordonner la publication du présent arrêt au service de la publicité foncière de Vanves (92) aux frais de Monsieur [L].

Alors que Monsieur [L] n'avait, depuis avril 2002, nullement manifesté, ni son intention de mener à bien son projet d'acquisition, ni son opposition à la vente consentie à la SCI Rifa, qu'il n'est venu contester que plus de quatre ans après sa signature, alors qu'il n'a cessé d'affirmer devant les juridictions administratives qu'il n'avait pas pu acquérir le bien, qu'il demande l'annulation de ladite vente sans justifier de l'obtention du permis de construire, et entend obtenir la réitération de la vente à son profit au même prix que celui fixé plus de vingt ans auparavant, ainsi que la condamnation solidaire des intimés à lui verser au total la somme de 2.716.908 € au titre des pertes de loyers, manque à gagner et préjudice moral, il apparaît qu'il a agi avec malice et mauvaise foi, commettant ainsi un abus du droit d'agir en justice qui a généré pour les consorts [M], les époux [W] et la SCI Rifa un préjudice distinct de celui résultant de l'obligation dans laquelle ils se sont trouvés d'assurer leur défense.

La décision des premiers juges sera donc confirmée s'agissant des sommes allouées aux intimés à titre de dommages-intérêts, du sort des dépens et des indemnités allouées au titre des frais irrépétibles.

En appel, les intimés ne justifient pas subir un préjudice qui s'ajouterait à celui d'ores et déjà réparé par le tribunal et qui serait distinct de celui résultant de l'obligation d'exposer des frais pour se défendre devant la cour.

Les demandes de dommages-intérêts formées à titre reconventionnel par les intimés seront donc rejetées.

Monsieur [L] qui succombe en appel sera condamné aux dépens et au paiement, aux consorts [M], de la somme de 3.000 €, et à Monsieur et Madame [W] et la SCI Rifa la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Rejette la demande de Monsieur [L] tendant à faire déclarer irrecevables Monsieur et Madame [W] et la SCI Rifa en leurs demandes,

Déclare irrecevables Monsieur et Madame [W] et la SCI Rifa à contester la recevabilité de l'appel de Monsieur [L],

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Ordonne la publication du présent arrêt au service de la publicité foncière de Vanves (92) aux frais de Monsieur [L],

Déboute Madame [P] [T] veuve [M], Monsieur [X] [M], Madame [H] [M] épouse [K], Mademoiselle [BM] [M], Monsieur et Madame [W] et la SCI Rifa de leurs demandes reconventionnelles de dommages-intérêts pour appel abusif,

Condamne Monsieur [L] à payer à Madame [P] [T] veuve [M], Monsieur [X] [M], Madame [H] [M] épouse [K], Mademoiselle [BM] [M] la somme de 3.000 € et à Monsieur et Madame [W] et la SCI Rifa la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en appel,

Condamne Monsieur [L] aux dépens d'appel.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 12/03537
Date de la décision : 15/05/2014

Références :

Cour d'appel de Versailles 03, arrêt n°12/03537 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-05-15;12.03537 ?
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