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27/09/2012 | FRANCE | N°11/01138

France | France, Cour d'appel de Versailles, 5ème chambre, 27 septembre 2012, 11/01138


COUR D'APPELDE VERSAILLESCode nac : 80AJ.M.5ème Chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 27 SEPTEMBRE 2012
R.G. No 11/01138
AFFAIRE :
SAS CAROLE FRANCK en la personne de son représentant légal

C/François X...

POLE EMPLOI ILE DE FRANCE INSTITUTION NATIONALE PUBLIQUE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Mars 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ST GERMAIN EN LAYESection : EncadrementNo RG : 10/00197

Copies exécutoires délivrées à :
Me Stéphane BONINMe Benoît PELLETIERMe Catherine ROIG
Copies certifiÃ

©es conformes délivrées à :
SAS CAROLE FRANCK en la personne de son représentant légal
François X...
POLE EMPLO...

COUR D'APPELDE VERSAILLESCode nac : 80AJ.M.5ème Chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 27 SEPTEMBRE 2012
R.G. No 11/01138
AFFAIRE :
SAS CAROLE FRANCK en la personne de son représentant légal

C/François X...

POLE EMPLOI ILE DE FRANCE INSTITUTION NATIONALE PUBLIQUE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Mars 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ST GERMAIN EN LAYESection : EncadrementNo RG : 10/00197

Copies exécutoires délivrées à :
Me Stéphane BONINMe Benoît PELLETIERMe Catherine ROIG
Copies certifiées conformes délivrées à :
SAS CAROLE FRANCK en la personne de son représentant légal
François X...
POLE EMPLOI ILE DE FRANCE INSTITUTION NATIONALE PUBLIQUE
le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE DOUZE,La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SAS CAROLE FRANCK en la personne de son représentant légal134 rue Chanzy78800 HOUILLESreprésentée par Me Stéphane BONIN de la ASS TORIEL JOHANNSEN ROUILLON BONIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R118

APPELANTE

****************

Monsieur François X......92190 MEUDONreprésenté par Me Benoît PELLETIER de la SELARL DELLIEN Associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R260

INTIMÉ

****************POLE EMPLOI ILE DE FRANCE INSTITUTION NATIONALE PUBLIQUEImmeuble Pluton3, rue Galilée93884 NOISY LE GRAND CEDEXreprésentée par Me Catherine ROIG, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : PB 105

INTERVENANT VOLONTAIRE

*****************

Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Juin 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Jeanne MININI, Président chargé(e) d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé(e) de :
Madame Jeanne MININI, Président,Monsieur Hubert LIFFRAN, conseiller,Madame Catherine ROUAUD-FOLLIARD, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Mme Sabrina NIETRZEBA-CARLESSO,

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
La société Carole Franck assure la fabrication de parfums et de produits cosmétiques, occupe habituellement plus de dix salariés (23 salariés en 2010) et applique la convention collective des industries chimiques. Elle a embauché M. François X... en qualité de directeur technique, position cadre, selon contrat de travail à durée indéterminée en date du 1er septembre 2004 et lui a versé une rémunération mensuelle brute de 3 702 euros.
Le 2 juillet 2008 la société Carole Franck a convoqué M. François X... à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement fixé au 10 juillet 2008. Après entretien, la société Carole Franck a, selon courrier remis en main propre le 29 octobre 2008 mais daté du 27 septembre 2008, renoncé à la rupture du contrat de travail et a notifié à M. François X... un avertissement après avoir pris en considération les engagements pris par ce salarié pour l'avenir. M. François X... a porté sur ce courrier la mention "bon pour accord" suivie de sa signature.
A nouveau le 8 janvier 2010, la société Carole Franck a convoqué M. François X... à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement fixé au 19 janvier suivant et lui a notifié une mise à pied conservatoire. Puis, selon lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 22 janvier 2010, la société Carole Franck a notifié à M. François X... son licenciement pour faute grave lui reprochant, malgré l'avertissement notifié le 27 septembre 2008 et le rappel des obligations contractuelles selon courrier en date du 16 février 2007, de n'avoir pas respecté son obligation de surveillance de la réglementation et de n'avoir pas exécuté les instructions données par les fournisseurs, ces manquements étant apparus lors d'une communication effectuée récemment concernant l'utilisation dans le laboratoire d'un composant (le nonylphenol) dans 8 produits fabriqués par l'entreprise alors que ce composant était interdit en cosmétique par la directive 2005/80/CE transposée en droit français le 7 avril 2006 ayant entraîné son interdiction à compter du 22 août 2006, l'information sur cette interdiction d'utiliser ce composant dans les produits cosmétiques ayant été transmise par le fournisseur dès le début de l'année 2005 et confirmée au mois d'avril 2009.
* * *
Contestant le motif du licenciement et estimant ne pas avoir été rempli de ses droits, M. François X... a fait convoquer la société Carole Franck le 16 avril 2010 devant le conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye afin d'obtenir le paiement des indemnités conventionnelles de rupture du contrat de travail et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse outre le règlement des heures supplémentaires effectuées entre 2005 et 2008 et laissées impayées. Il a sollicité en outre la condamnation de la société Carole Franck pour travail dissimulé et enfin a demandé l'annulation de l'avertissement notifié par courrier du 27 septembre 2008 en raison du non respect de la procédure disciplinaire.
Par jugement en date du 14 mars 2011, le conseil de prud'hommes a :- rejeté les demandes présentées par M. François X... au titre des heures supplémentaires et de l'avertissement,
- dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse du fait de la prescription des faits fautifs,- condamné la société Carole Franck à verser à M. François X... les sommes de :* 11 698,32 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,* 11 106 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents,* 37 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,* 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- dit que ces sommes portent intérêts au taux légal à compter du jugement,- ordonné la remise, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, d'un bulletin de paie, d'un certificat de travail et d'une attestation destinée au Pôle emploi rectifiés,- ordonné le remboursement par la société Carole Franck des indemnités de chômage versées à M. François X... dans la limite de six mois,- débouté M. François X... du surplus de ses demandes,- condamné la société Carole Franck aux dépens.
La société Carole Franck a régulièrement relevé appel de cette décision.
Vu les conclusions déposées et développées oralement à l'audience du 28 juin 2012 par lesquelles la société Carole Franck sollicite l'infirmation du jugement déféré en ce qui concerne les condamnations prononcées au titre de la rupture du contrat de travail. Elle fait observer que les faits reprochés à M. François X... ne sont pas atteints par la prescription dès lors qu'elle n'a eu connaissance exacte de la réalité et de l'ampleur des négligences commises par son salarié que le 7 janvier 2010 lorsqu'elle a reçu le rapport du Cabinet Essential Consulting. Concernant les faits reprochés à M. François X..., la société Carole Franck fait valoir qu'ils sont particulièrement démontrés puisqu'en sa qualité de directeur technique ce salarié avait une connaissance de la réglementation applicable aux produits utilisés pour la préparation des produits cosmétiques et qu'en outre il avait reçu en janvier 2005 et en avril 2009 les informations du fournisseur concernant la présence dans le solubilisant 2428 de nonylphenol, produit interdit à compter du 22 août 2006. La société Carole Franck indique en conséquence qu'après les avertissements notifiés à M. François X..., après les contrôles opérés en 2006 et 2007 par l'AFSSAPS ayant entraîné le retrait de plusieurs produits et une perte financière importante, elle n'avait pu, après avoir eu connaissance des nouveaux manquements révélés en novembre 2009 et confirmés par la consultation juridique réalisée en janvier 2010, conserver ce salarié dans l'entreprise. Elle précise enfin que postérieurement à la notification de la rupture du contrat de travail, elle a été informée d'un autre manquement de M. François X... à ses obligations (absence de mise à jour de certaines fiches techniques des produits fabriqués).
La société Carole Franck a par contre conclu à la confirmation du jugement ayant débouté M. François X... de ses demandes au titre de l'annulation de l'avertissement et au titre des heures supplémentaires. A cet égard, elle fait observer que M. François X... a accepté l'avertissement notifié par le courrier en date du 27 septembre 2008 en y apposant la mention "bon pour accord" suivie de sa signature alors par ailleurs que la procédure mise en oeuvre a été régulièrement observée. Elle précise enfin que M. François X... a toujours été informé de l'obligation affichée dans l'entreprise de solliciter l'exécution d'heures supplémentaires avant de pouvoir en demander le paiement, cette obligation ayant été rappelée lors du courrier en date du 27 septembre 2008 par lequel ce salarié a accepté de renoncer au paiement sollicité pour des heures supplémentaires prétendument effectuées au cours des trois années antérieures sans aucune demande préalable.Enfin la société Carole Franck a sollicité la condamnation de M. François X... au paiement d'une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. François X... a conclu à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a dit que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison de la prescription des faits fautifs. Il a précisé par ailleurs qu'il n'avait jamais été informé, avant la fin de l'année 2009, de la présence du nonylphenol dans les produits utilisés et fournis par la société Gattefossé. Il fait observer par ailleurs que dès la connaissance de cette information, il a procédé au remplacement du solubilisant 2428 contenant l'ingrédient interdit par la réglementation par un autre solubilisant n'en contenant pas, alors que de son côté la société Carole Franck n'a jamais fait procéder au rappel des produits fabriqués qui contenaient le produit incriminé.M. François X... a formé appel incident afin de voir porter à 44 424 euros le montant des dommages-intérêts réparant l'important préjudice subi du fait de la rupture injustifiée de son contrat de travail alors qu'à ce jour il est toujours sans emploi.
M. François X... a formé également appel incident afin d'obtenir :- l'annulation de l'avertissement notifié le 29 octobre 2008 sans respect de la procédure imposant à l'employeur la notification d'une sanction disciplinaire dans le mois de l'entretien réalisé,- le paiement de la somme de 30 633,80 euros au titre des heures supplémentaires effectuées et non payées au cours de la période d'avril 2005 à juin 2008, outre les congés payés afférents, alors que son employeur a toujours eu connaissance de l'exécution de dépassements des horaires fixés en raison de l'importance des tâches confiées et a refusé de les payer en invoquant en septembre 2008 l'obligation de solliciter une autorisation préalablement à tout dépassement des horaires et en retirant la pointeuse,- la condamnation de la société Carole Franck au paiement de la somme de 22 212 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,- la fixation des intérêts à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,- la condamnation enfin de la société Carole Franck au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pôle emploi Ile-de-France est intervenu à l'instance afin d'obtenir la condamnation de la société Carole Franck au paiement des sommes de :- 12 724,20 euros au titre des indemnités de chômage versées à M. François X... d'août 2010 à janvier 2011,- 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé plus complet des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience du 28 juin 2012.

MOTIFS DE LA DÉCISION
1- sur les heures supplémentaires et le travail dissimulé
Considérant qu'aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif au nombre d'heures effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ;
Considérant que s'il résulte de ces dispositions que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, il appartient cependant au salarié de fournir préalablement tous éléments de nature à étayer sa demande et à permettre à l'employeur de pouvoir les contester utilement ;
Considérant qu'il convient enfin de rappeler que les heures supplémentaires sont des heures accomplies à la demande explicite ou non de l'employeur et sur lesquelles celui-ci peut exercer son contrôle ;
Considérant au cas présent que la société Carole Franck ne conteste pas l'exécution par M. François X... d'heures supplémentaires effectuées entre avril 2005 et juin 2008 à partir des relevés de la pointeuse installée dans l'entreprise faisant état de la présence de ce salarié hors des horaires contractuellement convenus ; qu'en outre M. François X... a précisé, ce qui est admis par la société Carole Franck, qu'en 2006 et 2007 l'entreprise a connu des difficultés du fait des contrôles effectués par l'AFSSAPS sur les produits fabriqués ayant entraîné la nécessité d'assurer la mise à jour des fiches techniques et donc d'augmenter le travail fourni par les salariés affectés à ces tâches, dont le travail assuré par M. François X... embauché justement en qualité de directeur technique en charge de la responsabilité du laboratoire, de la formulation et des mises à jour des fiches techniques des produits fabriqués ;
Considérant que M. Christian Y..., président-directeur général de la société Carole Franck, n'a pas contesté la réalité des heures supplémentaires effectuées par M. François X... lorsqu'il s'est entretenu avec lui le 10 juillet 2008, préalablement à la notification de l'avertissement en date du 27 septembre 2008, se contentant à cette période d'opposer au salarié l'absence d'accord préalable obtenu pour effectuer ces dépassements d'horaires en l'état d'une note de service affichée dans les locaux le 22 avril 2004 mais à une date bien antérieurement à l'embauche de M. François X... auquel elle n'a jamais pas été notifiée ; qu'il convient de relever en outre que M. François X... n'a pas accepté de renoncer au règlement de ces heures supplémentaires lorsqu'il a apposé la mention "bon pour accord" sur la lettre lui notifiant un avertissement en date du 27 septembre 2008, cette mention se rapportant exclusivement à l'accord pris par le salarié de respecter les engagements énoncés en page deux du courrier et ayant trait à la mise en place de mesures de contrôle de son activité, au respect de la réglementation portant sur les mises à jour des fiches techniques des produits et à l'exécution des contrôles avec davantage de rigueur ; qu'en conséquence la société Carole Franck ne peut en aucune hypothèse soutenir que les heures supplémentaires ont été effectuées à son insu voire même contre sa volonté ;Considérant qu'en l'état des relevés détaillés des dépassements des horaires convenus et des relevés concordants de la présence de M. François X... dans l'entreprise matérialisée par la pointeuse (celle-ci n'ayant été retirée qu'en septembre 2008), la cour fait droit à sa demande en paiement de la somme de 30 633,80 euros représentant les heures supplémentaires effectuées d'avril 2005 à juin 2008 outre les congés payés afférents ; qu'ainsi le jugement déféré doit être réformé ;
Considérant que la dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L.8221-5 du code du travail n'est caractérisée que si l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de salaire un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; qu'au cas présent, M. François X... n'établit pas la volonté manifestée par la société Carole Franck de dissimuler une partie de son activité professionnelle alors qu'au cours de la période d'avril 2005 à juin 2008 il n'avait pas réclamé le paiement des dépassements d'horaires qui n'ont fait l'objet d'une demande en paiement qu'au moment du conflit avec son employeur relatif aux critiques portant sur la qualité du travail réalisé et à l'origine de la première procédure de licenciement ensuite abandonnée ; qu'ainsi M. François X... ne peut prétendre au paiement de l'indemnité prévue par l'article L.8223-1 du code du travail ;
2- sur l'avertissement en date du 27 septembre 2008
Considérant tout d'abord qu'en portant, lors de la notification de cet avertissement le 29 octobre 2008, la mention "bon pour accord ", M. François X... n'a pas entendu acquiescer à la sanction prononcée mais a simplement pris l'engagement de suivre les instructions données et détaillées dans le même courrier ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que cet avertissement a été notifié plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien (entretien réalisé le 10 juillet 2008), en méconnaissance des dispositions prévues par l'article L.1332-2 alinéa 4 du code du travail ;
Considérant qu'ayant choisi de convoquer M. François X... selon les modalités de la procédure disciplinaire telles que fixées par l'article L.1332-2 du code du travail, la société Carole Franck était tenue d'en respecter tous les termes, quelle que soit la sanction finalement notifiée au salarié (avertissement à l'issue d'une procédure introduite en vue d'un licenciement) ;
Considérant en conséquence qu'en l'état de l'irrégularité affectant la sanction prononcée, il convient d'en ordonner l'annulation ; qu'ainsi également de ce chef le jugement déféré doit être réformé ;
3 - sur la rupture du contrat de travail
Considérant qu'aux termes de l'article L.1332-4 du code du travail "aucun fait fautif ne peut, à lui seul, donner lieu à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales"; qu'il convient toutefois de relever que le point de départ du délai n'est constitué que par le jour où l'agissement fautif est personnalisé, c'est-à-dire au jour où l'employeur a une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés au salarié ;
Considérant au cas présent que la société Carole Franck a notifié à M. François X... la rupture de son contrat de travail pour faute grave lui reprochant, malgré l'avertissement notifié le 27 septembre 2008 et le rappel de ses obligations fait selon courrier en date du 16 février 2007, de n'avoir pas respecté son obligation de surveillance de la réglementation et de n'avoir pas exécuté les instructions données par les fournisseurs, ces manquements étant apparus lors d'une communication effectuée récemment concernant l'utilisation dans le laboratoire d'un composant (le nonylphenol) dans 8 produits fabriqués par l'entreprise alors que ce composant était interdit en cosmétique par la directive 2005/80/CE transposée en droit français le 7 avril 2006 ayant entraîné l'interdiction à compter du 22 août 2006 d'utiliser ce composant, l'information sur cette interdiction d'utiliser ce composant dans les produits cosmétiques ayant été transmise par le fournisseur dès le début de l'année 2005 et confirmée au mois d'avril 2009 ;
Considérant que M. François X... a soulevé la prescription des faits fautifs ; qu'il résulte en effet des documents produits aux débats que la société Carole Franck avait été informée dès le 6 novembre 2009, par le rapport établi par M. Gaël Z..., ingénieur, que 8 produits fabriqués dans l'entreprise contenaient du solubilisant 2428 commercialisé par la société Gattefossé, solubilisant contenant du nonylphenol alors que selon la directive 2005/80/CE du 22 novembre 2005 ce produit ne devait plus être mis sur le marché à compter du 22 août 2006 ; qu'il convient en outre de préciser qu'au cours du mois de novembre 2009 M. Z... a régulièrement informé la société Carole Franck de la substitution du solubilisant 2428 par le solubilisant 2429 identique mais ne contenant pas de nonylphenol ;
Considérant ainsi qu'à la date du 6 novembre 2009 le rapport très complet de M. Z..., ingénieur, responsable de la formulation au sein du laboratoire, a donné aux dirigeants de la société Carole Franck toutes les informations sur l'utilisation d'un produit dont la commercialisation avait été interdite à compter du 22 août 2006, sur les raisons d'une telle utilisation et sur l'abandon immédiat de ce produit et son remplacement par un autre ;
Considérant que la société Carole Franck, qui n'a introduit la procédure disciplinaire de licenciement à l'encontre de M. François X... que le 8 janvier 2010, ne peut soutenir que seule la consultation transmise le 7 janvier 2010 par le Cabinet Essential Consulting lui a permis de prendre connaissance de la réalité et de l'ampleur des faits fautifs reprochés à son salarié dès lors que cette consultation n'a eu pour but que de confirmer la date d'entrée en application le 22 août 2006 de la directive 2005/80/CE interdisant l'utilisation du nonylphenol en cosmétique, élément déjà donné par M. Z... dans son rapport en date du 6 novembre 2009 alors par ailleurs qu'aucune enquête interne n'a été diligentée par la société Carole Franck aux fins d'établir l'existence de la faute reprochée à M. François X... puisque cette faute, selon la lettre de licenciement, n'était constituée que par l'utilisation d'un produit interdit ;
Considérant en conséquence qu'il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a justement dit que le licenciement de M. François X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse dès lors qu'il était fondé sur une faute prescrite ;Considérant qu'il convient également de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a accordé à M. François X... le règlement des indemnités conventionnelles de rupture du contrat de travail justement calculées à partir d'une rémunération mensuelle brute de 3 702 euros ; que de même le montant des dommages-intérêts a été justement apprécié par les premiers juges après avoir pris en considération les circonstances de la rupture et les difficultés rencontrées par M. François X... pour retrouver un nouvel emploi;
Considérant que le jugement sera confirmé également en ce qu'il a condamné la société Carole Franck au remboursement à Pôle emploi des indemnités de chômage versées à M. François X... et qui sont chiffrées devant la cour à la somme de 12 724,20 euros correspondant à six mois d'indemnités conformément aux dispositions prévues par l'article L.1235-4 du code du travail ;
Considérant qu'il convient enfin :- de dire que les condamnations au paiement des heures supplémentaires et des indemnités conventionnelles de rupture du contrat de travail portent intérêts au taux légal à compter du 21 avril 2010, date de convocation de la société Carole Franck devant le bureau de conciliation,- de dire que l'astreinte prendra effet deux mois après la notification de la présente décision, la cour se réservant le contentieux de la liquidation,- d'allouer à M. François X... la somme complémentaire de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel,- d'accorder à Pôle emploi la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS
Statuant par mise à disposition au greffe et par décision contradictoire,
INFIRME le jugement rendu le 14 mars 2011 par le conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye en ce qu'il a rejeté les demandes présentées par M. François X... au titre des heures supplémentaires et de l'irrégularité de l'avertissement et en ce qu'il a limité le cours des intérêts pour toutes les condamnations à la date du jugement,
ANNULE l'avertissement en date du 27 septembre 2008 notifié le 29 octobre 2008,
CONDAMNE la société Carole Franck à verser à M. François X... la somme de 30 633,80 euros outre 3 063,38 euros au titre des congés payés afférents représentant les heures supplémentaires non payées d'avril 2005 à juin 2008, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 21 avril 2010,
CONFIRME le jugement pour le surplus,
DIT toutefois que les sommes allouées à M. François X... au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité conventionnelle de licenciement portent intérêts au taux légal à compter du 21 avril 2010,
DIT que la créance de Pôle emploi s'établit à la somme de 12 724,20 euros,
DIT que l'astreinte provisoire court deux mois après la notification de la présente décision, la cour se réservant la liquidation de cette astreinte sur simple requête présentée par l'une ou l'autre des parties,
CONDAMNE la société Carole Franck à verser au titre de l'article 700 du code de procédure civile :- à M. François X... : la somme complémentaire de 2 000 euros,- à Pôle emploi : la somme de 300 euros,
DÉBOUTE M. François X... du surplus de ses demandes,
DÉBOUTE la société Carole Franck de sa demande au titre des frais de procédure,
CONDAMNE la société Carole Franck aux entiers dépens et aux frais d'exécution de la présente décision.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et signé par Madame Jeanne MININI, président et Madame Céline FARDIN, greffier auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 11/01138
Date de la décision : 27/09/2012
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2012-09-27;11.01138 ?
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