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29/06/2011 | FRANCE | N°10/00429

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15ème chambre, 29 juin 2011, 10/00429


Code nac : 80A
15ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 29 JUIN 2011
R. G. No 10/ 00429
AFFAIRE :
Isabelle Maria X...
C/ S. A. CECA

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 18 Novembre 2009 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de NANTERRE
No RG : 08/ 3129
Copies exécutoires délivrées à :
Me Jean-Michel PERARD Me Sabine ANGELY-MANCEAU

Copies certifiées conformes délivrées à :
Isabelle Maria X...
S. A. CECA
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : >Madame Isabelle Maria X... née en à ...75019 PARIS comparant en personne, assistée de Me Jean-Michel PERARD, avocat au...

Code nac : 80A
15ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 29 JUIN 2011
R. G. No 10/ 00429
AFFAIRE :
Isabelle Maria X...
C/ S. A. CECA

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 18 Novembre 2009 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de NANTERRE
No RG : 08/ 3129
Copies exécutoires délivrées à :
Me Jean-Michel PERARD Me Sabine ANGELY-MANCEAU

Copies certifiées conformes délivrées à :
Isabelle Maria X...
S. A. CECA
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame Isabelle Maria X... née en à ...75019 PARIS comparant en personne, assistée de Me Jean-Michel PERARD, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE
****************
S. A. CECA 89 Boulevard National 92250 LA GARENNE COLOMBES représentée par Me Sabine ANGELY-MANCEAU, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue le 16 Mai 2011, en audience publique, devant la cour composé (e) de :
Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller, Madame Isabelle OLLAT, Conseiller,

qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE
Mme Isabelle X... a été engagée par la société CECA en qualité de gestionnaire administrative suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 29 août 2003 à effet au 1er septembre suivant moyennant le paiement d'une rémunération mensuelle brute de 2000 €, une prime de vacances et un treizième mois ; elle avait travaillé au sein de la société en qualité d'intérimaire du 14 mai au 31 août 2003 ; en sa qualité de gestionnaire administrative, il lui incombe notamment de saisir et contrôler les éléments variables de paie, de gérer les badges et de gérer l'horaire variable ainsi que cela ressort de l'annexe à son contrat de travail.
La convention collective nationale des industries chimiques et l'accord du 10 août 1978 sont applicables aux relations contractuelles.
Le 18 octobre 2006, elle a été mise à pied à titre conservatoire et convoquée à un entretien préalable fixé au 27 octobre 2006.
Elle a été licenciée pour faute grave par lettre recommandée datée du 3 novembre 2006 au motif qu'elle était intervenue à plusieurs reprises, manuellement sur son compteur d'heures sans autorisation de sa hiérarchie, en modifiant ses heures d'entrée et de sortie ou en ajoutant des heures à son crédit d'heures.
Au dernier état de la relation contractuelle, elle percevait une rémunération mensuelle brute de 2538, 20 € en ce compris l'incidence du treizième mois.
Soutenant avoir été victime d'un harcèlement moral et contestant la mesure de licenciement, Mme X... a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre le 21 octobre 2006 d'une demande dirigée à l'encontre de la société tendant à la voir condamner au paiement de diverses sommes.
Par jugement en date du 18 novembre 2009, le conseil de prud'hommes de NANTERRE a débouté Mme X... de l'ensemble de ses demandes, débouté la société de sa demande et a condamné Mme X... aux dépens.
Mme X... a régulièrement interjeté de la décision. Vu les conclusions datées du 16 mai 2011 reprises oralement tendant à l'infirmation du jugement et à la condamnation de la société à lui payer les sommes suivantes : * 832, 12 € à titre de rappel de salaire du 20 au 27 octobre 2006, * 4576, 66 € à titre d'indemnité de préavis, * 457, 66 € au titre des congés payés afférents, * 2792, 02 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, * 30 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, * 1373, 84 € à titre de rappel du treizième mois de l'année 2006 ou subsidiairement la somme de 1041, 56 €, * 50, 16 € au titre du treizième mois 2007 prorata temporis, * 20 000 € à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, * 4000 € à titre d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et à lui remettre les documents de fin de contrat sous astreinte de 150 € par jour de retard et par document. Au soutien de son recours, elle fait essentiellement valoir que :- elle a expliqué, pour chaque journée concernée, les raisons pour lesquelles elle n'avait pas badgé et d'autres salariées, notamment Mme A... n'a pas badgé pendant les séances de formation,- elle a appliqué pour elle-même les procédures qu'elle appliquait aux autres salariés,- la procédure de licenciement a été mise en oeuvre uniquement par ce qu'elle s'est plainte de harcèlement moral à M. Y..., délégué syndical, ces agissements remontant au mois de novembre 2005 lorsqu'elle avait indiqué à son supérieur hiérarchique qu'il bénéficiait de 29 jours de congés payés et non 30 jours, ce qui a entraîné la colère de ce dernier ; par la suite, elle a été empêchée d'évoluer dans sa carrière, brimée par M. Z... auquel elle demandait de lui fournir un siège plus adapté dans la mesure où elle souffrait d'une sciatique ; elle a également subi des insultes.

Vu les conclusions de la société CECA datée du 16 mai 2011 soutenues oralement tendant à la confirmation du jugement et à la condamnation de Mme X... à lui verser la somme de 1500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Elle explique que :- la mission confiée à Mme X... exigeait une rigueur et une probité exemplaire puisque ses tâches consistaient précisément dans le calcul du temps de travail des salariés soumis à l'horaire variable,- elle a constaté des anomalies pendant la période du 10 juillet au 4 octobre 2006, soit pendant 46 jours, la salariée n'ayant pas badgé à l'occasion de la pause-déjeuner avec une fréquence de l'ordre d'un jour sur trois ; elle a rectifié manuellement à six reprises les informations sur les horaires enregistrés par le système sans en informer sa hiérarchie,- le fait d'être en formation sur le lieu de travail ne donne pas le droit de ne pas badger à la pause-déjeuner,- les agissements de harcèlement moral ne sont pas prouvés.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience du 16 mai 2011.
SUR CE :
Sur le harcèlement moral :
Considérant qu'aux termes des articles L. 1152-1 et L. 1152-2 du code du travail aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
Que selon l'article L. 1154-1 du même code, en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement,
Considérant au cas présent que Mme X... met aux débats le témoignage de M. Y...daté du 30 novembre 2006 lequel expose avoir assisté la salariée lors de l'entretien préalable et avoir entendu M. Z... dire qu'il craignait un procès pour harcèlement moral, les courriels adressés par la salariée à M. Z... le 2 novembre et 14 novembre 2005 concernant ses congés payés et ses entretiens individuels d'évaluation ; que le témoignage de M. Y...ne fait état d'aucun agissement de harcèlement moral dirigé à l'encontre de la salariée, les entretiens d'évaluation ne font état d'aucune mention particulière et l'échange de courriels parfaitement anodins ne constituent pas des éléments permettant de présumer l'existence d'un harcèlement ; que le certificat médical établi par le docteur B... le 7 décembre 2006, soit après le licenciement ne fait pas état de harcèlement moral mais des difficultés rencontrées avec sa hiérarchie ; que c'est à juste titre, au regard de ces éléments, que le conseil de prud'hommes a débouté Mme X... de ce chef ; que le jugement doit être confirmé sur ce point ;
Sur le licenciement :
Considérant selon l'article L. 1232-6 du Code du travail que l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs de licenciement dans la lettre de notification du licenciement ; que les faits invoqués et les griefs articulés à l'encontre du salarié doivent être exacts et établis et enfin suffisamment pertinents pour justifier le licenciement ; que le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que la preuve d'une telle faute incombe à l'employeur ;
Considérant enfin que si un doute subsiste, il profite au salarié ;
Considérant au cas présent que Mme X... a été licenciée pour faute grave par lettre recommandée datée du 3 novembre 2006 au motif qu'elle est intervenue à plusieurs reprises, manuellement sur son compteur d'heures sans autorisation de sa hiérarchie, en modifiant ses heures d'entrée et de sortie ou en ajoutant des heures à son crédit d'heures ; que la lettre de licenciement est parfaitement motivée en ce qu'elle fait état de l'absence d'utilisation du badge au moins à quinze reprises ; que la salariée qui ne conteste pas avoir omis de badger à certains moments, s'étonne que les contrôles aient été réalisés pendant son absence pour maladie, soutient que l'employeur a essayé à tout prix de trouver un motif de licenciement et explique, à titre d'exemple, que les journées du 10, 11 et 12 juillet 2006, elle était en formation à l'intérieur de l'immeuble de la société avec l'ensemble du personnel du département des relations humaines de la société Arkerma et des filiales de celle-ci, que les salariés peuvent sortir sans pointer et que d'autres salariés ont agi de la même manière sans être inquiétées ; qu'elle a oublié de badger le 21 juillet 2006, le 4 août 2006, le 5 septembre 2006, le 18 septembre 2006 et le 19 septembre 2006 ; que si elle a effectué des manipulations manuelles le 15 septembre 2006, c'est parce que la badgeuse était en panne, ou qu'elle avait mal fonctionné notamment le 26 septembre 2006 ;
Considérant qu'il convient de rappeler que Mme X... a été engagée en qualité de gestionnaire administrative avec notamment pour mission de saisir et contrôler les éléments variable de paie, de gérer les badges et de gérer l'horaire variable des salariés du siège social, ce système ayant été mis en place au sein de la société aux termes de l'accord-cadre du 21 juin 2000 ; que cet accord dispose que l'utilisation du badge est obligatoire ; que le contrôle opéré par l'employeur pendant l'absence de la salariée est parfaitement régulier ;
Considérant que Mme X... ne conteste pas avoir omis de badger au moins à huit reprises entre juillet et septembre 2006 ; qu'elle fait état d'oublis ou de dysfonctionnement du système pour expliquer ses interventions manuelles ; que les oublis répétés sur une courte période ne sont pas excusables de la part d'une salariée qui a précisément pour mission de gérer les horaires variables des salariés de la société et que les explications apportées ne remettent pas en cause l'obligation de badger et le fait que la salariée a manqué à cette obligation ; qu'elle est ensuite intervenue manuellement pour corriger ses oublis ; que Mme X... ne justifie pas des dysfonctionnements de la badgeuse les 15, 21 et 27 septembre 2006, les pièces produites concernant des dysfonctionnements relevées en juillet 2004, février 2005 et mai 2005 ; que la circonstance que d'autres salariés ont omis de badger n'est pas de nature à atténuer la faute de la salariée qui avait la responsabilité de la gestion de l'horaire variable ; que ces faits constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'ils ne rendaient cependant pas impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise pendant le préavis ; qu'il convient en conséquence d'écarter la faute grave et de condamner la société à payer à Mme X... les salaires pendant la mise à pied et les indemnités de rupture dont les montants ne font l'objet d'aucune critique ;
Sur le rappel de treizième mois :
Considérant que le contrat de travail prévoit le versement d'un treizième mois ; que la salariée qui devait percevoir la somme de 1956, 06 € en 2006 compte tenu de la rupture du contrat de travail survenu le 8 novembre 2006, n'a reçu que la somme de 914, 50 € ; qu'il lui reste dû la somme de 1041, 56 € ; qu'il lui est dû la somme de 50, 16 € pour l'année 2007, la cour ayant écarté la faute grave ;
Sur la remise de documents :
Considérant qu'il convient d'ordonner à l'employeur de remettre à la salariée un certificat de travail et une attestation Assedic dans les conditions prévues au dispositif de l'arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette obligation d'une astreinte ;
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :
Considérant que l'équité commande de faire application de cette disposition uniquement au profit de l'appelante ;
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Statuant publiquement par ARRÊT CONTRADICTOIRE,
INFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de NANTERRE le 18 novembre 2009 uniquement en ses dispositions ayant retenu la faute grave, rejeté la demande en paiement des salaires et indemnités de rupture et mis les dépens à la charge du demandeur,
Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
DIT le licenciement de Mme X... fondé sur une cause réelle et sérieuse mais non sur une faute grave,
CONDAMNE en conséquence la société CECA à lui payer les sommes suivantes : * 832, 12 € à titre de rappel de salaire du 20 au 27 octobre 2006, * 4576, 66 € à titre d'indemnité de préavis, * 457, 66 € au titre des congés payés afférents, * 2792, 02 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, * 1041, 56 € à titre de solde de treizième mois pour l'année 2006, * 50, 16 € à titre de treizième mois prorata temporis pour l'année 2007, avec intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2008, date de réception par la société CECA de sa convocation devant le bureau de conciliation,

ORDONNE à la société CECA de remettre à Mme X... un certificat de travail et une attestation destinée au pôle emploi conforme au présent arrêt dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette obligation d'une astreinte,
DÉBOUTE Mme X... du surplus de ses prétentions et déboute la société CECA de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société CECA à payer à Mme X... la somme de 3000 € à titre d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société CECA aux dépens afférents aux procédures de première instance et d'appel.
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du Code de procédure civile.
Signé par M. Jean-Michel LIMOUJOUX, Président et par Monsieur Pierre-Louis LANE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15ème chambre
Numéro d'arrêt : 10/00429
Date de la décision : 29/06/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2011-06-29;10.00429 ?
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