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30/03/2011 | FRANCE | N°10/00756

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15ème chambre, 30 mars 2011, 10/00756


15ème chambre Renvoi après cassation

ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 30 MARS 2011
R. G. No 10/ 00756
AFFAIRE :
Maryse Y...

C/ S. A. S. SCIENCES-U FRANCE...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Avril 2005 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de PARIS No Section : E No RG : 04/ 3280

Copies exécutoires délivrées à :
Me Laëtitia SIMONIN-DARD Me Hubert MAZINGUE

Copies certifiées conformes délivrées à :

Maryse Y...
S. A. S. SCIENCES-U FRANCE, Société SISE, S. A. ATISREAL AUGUSTE-THOUARD

, S. C. A. GROUPE VENDOME ROME, ASSEDIC DE PARIS
le : REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE TRENTE MARS DEU...

15ème chambre Renvoi après cassation

ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 30 MARS 2011
R. G. No 10/ 00756
AFFAIRE :
Maryse Y...

C/ S. A. S. SCIENCES-U FRANCE...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Avril 2005 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de PARIS No Section : E No RG : 04/ 3280

Copies exécutoires délivrées à :
Me Laëtitia SIMONIN-DARD Me Hubert MAZINGUE

Copies certifiées conformes délivrées à :

Maryse Y...
S. A. S. SCIENCES-U FRANCE, Société SISE, S. A. ATISREAL AUGUSTE-THOUARD, S. C. A. GROUPE VENDOME ROME, ASSEDIC DE PARIS
le : REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE TRENTE MARS DEUX MILLE ONZE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

DEMANDERESSE ayant saisi la cour d'appel de Versailles par déclaration enregistrée au greffe social le18 Fevrier 2010 en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation du 20 Octobre 2009 cassant et annulant l'arrêt rendu le 28 Fevrier 2010 par la cour d'appel de Paris 18 eme chambre E
Madame Maryse Y... née le 27 mai 1953... 75016 PARIS comparant en personne, assistée de Me Laëtitia SIMONIN-DARD, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

****************
DEFENDERESSES DEVANT LA COUR DE RENVOI
S. A. S. SCIENCES-U FRANCE 10-12, rue Lyautey 75016 PARIS

représentée par Me Hubert MAZINGUE, avocat au barreau de PARIS
Société SISE 22, rue J. Ibert 92300 LEVALLOIS PERRET

représentée par Me Hubert MAZINGUE, avocat au barreau de PARIS
S. A. ATISREAL AUGUSTE-THOUARD 28 à 32 rue Jacques Ibert 92300 LEVALLOIS PERRET

représentée par Me Hortense DE SAINT REMY, avocat au barreau de PARIS
S. C. A. GROUPE VENDOME ROME 35 rue de Rome 75008 PARIS

représentée par Me Hubert MAZINGUE, avocat au barreau de PARIS
ASSEDIC DE PARIS Activités Centralisées-Contentieux 75603 PARIS CEDEX 12

non comparante
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 941-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Décembre 2010, les parties ne s'y étant pas opposées, devant :
Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,

chargés d'instruire l'affaire
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
Monsieur LIMOUJOUX Président ; Madame CALOT Conseiller Mme BURQUEL Conseiller

et que ces mêmes magistrats en ont délibéré conformément à la loi, dans l'affaire,

Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE

La cour est saisie sur renvoi après cassation partielle, le 20 octobre 2009, d'un arrêt rendu par la 18ème chambre E par la cour d'appel de Paris le 28 février 2008.

Cette juridiction avait statué sur un appel formé par madame Y... d'un jugement du conseil de prud'hommes de Paris, section encadrement, en date du 20 avril 2005, qui, dans le litige l'opposant aux sociétés SCIENCES-U FRANCE et SISE, avait :

- mis hors de cause la société SISE,- requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse,- condamné la société SCIENCES-U FRANCE à verser à madame Y... les sommes de : * 90. 000 euros au titre de l'indemnité de clause de non-concurrence, * 34. 459, 92 euros à titre d'indemnité de préavis, * 3. 445, 99 euros au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis, * 5. 097, 11 euros au titre de l'indemnité de licenciement conventionnelle, * 167, 55 euros à titre de remboursement de frais, Avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation,- rappelé qu'en vertu de l'ancien article R. 516. 37 (actuel R. 1454-28) du code du travail, ces condamnations sont exécutoires de droit à titre provisoire, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire,- fixé cette moyenne à 11. 486, 64 euros,- débouté madame Y... du surplus de ses demandes, notamment celle au titre de l'intéressement contractuel, du fait que la salariée n'avait pas atteint ses objectifs-condamné la société SCIENCES-U FRANCE aux dépens ;

Par son arrêt susvisé, la cour d'appel de Paris a :
- déclaré la mise en cause des société ATISREAL AUGUSTE-THOUARD et GROUPE VENDOME ROME pour la première fois en cause d'appel irrecevable,- confirmé le jugement déféré, sauf en ce qu'il a requalifié le licenciement en cause réelle et sérieuse et a condamné la société SCIENCES-U FRANCE à payer à madame Y... les sommes de : * 90. 000 euros au titre de la clause de non-concurrence, * 34. 459, 92 euros au titre du préavis, * 3. 445, 99 euros au titre des congés payés y afférents, * 5. 097, 11 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, Statuant à nouveau de ces chefs,- condamné la société SCIENCES-U FRANCE au paiement à madame Y... de la somme de 37. 000 euros au titre de la clause de non-concurrence,- rejeté toutes les autres demandes, notamment de sa demande de dommages-intérêts pour perte de chance de bénéficier de la prime d'intéressement, par confirmation du jugement entrepris-dit que la présente décision constitue ouvrant droit à restitution des sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement,- condamné madame Y... aux dépens de première instance et d'appel

Dans son arrêt du 20 octobre 2009, la Cour de Cassation a cassé et annulé partiellement l'arrêt d'appel, mais seulement en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour perte de chance de percevoir une prime d'intéressement ; elle a remis, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.
La Cour de Cassation a également :
- condamné la société SCIENCES-U FRANCE aux dépens,- condamné la société SCIENCES-U FRANCE à payer à madame Y... la somme de 2. 500 euros, vu l'article 700 du code de procédure civile ; Elle a estimé, sur le second moyen, que la cour d'appel n'avait pas répondu aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile en retenant, pour débouter la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour perte d'une chance de bénéficier de la prime d'intéressement, que sur les trois objectifs fixés à l'intéressée pour 2002, elle n'a pas réalisé le troisième, et en conclut que l'employeur n'était pas tenu contractuellement au versement de la prime et que le paiement d'une somme à ce titre ne pouvait valoir engagement de sa part d'effectuer des versements complémentaires, alors qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen soutenu par la salariée tiré de la faute de l'employeur qui l'aurait privée d'une chance de percevoir la prime, la cour d'appel avait méconnu les exigences du texte susvisé.

Elle a estimé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur le premier moyen, fondé sur la contestation de l'appréciation faite par les juges de la cour d'appel du licenciement de madame Y..., en ce qu'il ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi.
La saisine de la cour est régulière et résulte d'un courrier adressé par le conseil de madame Y..., reçu au greffe le 18 février 2010.
***
Madame Maryse Y..., née le 27 mai 1953, a été engagée par la société GROUPE ENGEU, devenue la société SCIENCES-U FRANCE, qui a une activité de formation et d'enseignement, par contrat à durée indéterminée, le 14 novembre 2001 en qualité de directeur général avec la qualification " Executive President ", statut cadre, niveau 1, coefficient 600. La société SCIENCES-U FRANCE appartenait à la société GROUPE VENDOME ROME, devenu URBANIA, moyennant un salaire mensuel brut de 61. 538, 46 francs, soit 9. 381, 47 € mensuels, la gratification dite de 13ème mois qui sera perçue au mois de décembre, égale à son salaire de base.
La convention prévoyait une clause de non-concurrence, la perception d'un intéressement qui inclut de façon forfaitaire, l'indemnité de congés payés, ainsi que le montant du 13ème mois correspondant à la partie variable de la rémunération. Les sommes dues au titre de l'intéressement sont payables avant la fin des quatre premiers mois de l'année civile suivant la clôture de l'exercice social servant de base de calcul.

Il était prévu à l'article 6 que la salariée peut prétendre si les objectifs définis en pages 2 et 3 sont atteints, pour l'exercice 2001/ 2002, à une première prime d'intéressement versée avant la fin du mois d'avril 2003 et calculée au prorata de son temps de présence durant l'exercice de référence. La prime d'intéressement pourra, après accord exprès et écrit de l'employeur, être transformée partiellement ou totalement en parts de capital " Engeu " à la demande de Mme Y....

L'article 6 bis relatif aux modalités de calcul de l'intéressement précise que l'attribution de cet intéressement sera fonction des résultats constatés sur le chiffre d'affaires et les charges de l'ensemble des structures du Pôle Engeu de la manière suivante :
-2, 5 % de l'évolution des produits d'exploitation entre deux exercices consécutifs-1, 5 % de l'évolution des charges d'exploitation et financières entre deux exercices consécutifs

Mme Y... a fait l'objet le 16 janvier 2004 d'une convocation, assortie d'une mise à pied conservatoire, à un entretien préalable au licenciement, fixé le 30 janvier 2004.
Elle a été licenciée le 3 février 2004 pour faute grave, pour non-atteinte d'aucun des objectifs contractuels mettant gravement en péril l'avenir de la société et manquement à son devoir de compte-rendu et d'alerte de ses responsables. Elle contestait son licenciement par courrier du 13 février 2004

L'entreprise au moins onze salariés ; la convention collective applicable est celle des organismes de formation.

Le salaire mensuel brut moyen était de 9. 555, 72 euros, d'après la société SCIENCES-U FRANCE.
***
Madame Y..., par écritures visées par le greffier et soutenues oralement, demande à la cour de :
- constater les manquements de la société SCIENCES-U FRANCE et l'absence de mise à disposition des moyens nécessaires à la réalisation des objectifs fixés ayant empêché madame Y... d'atteindre lesdits objectifs,- constater la perte de chance de bénéficier d'un intéressement,

En conséquence,
- condamner la société SCIENCES-U FRANCE à lui verser 105. 920, 35 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance de bénéficier de l'intéressement contractuel, En tout état de cause,- condamner la société au paiement de la somme de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- dire que les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal avec anatocisme à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,- condamner la société aux entiers dépens

Madame Y... demande à la cour de constater que son employeur, par son attitude et ses décisions, l'a privée de ses chances de bénéficier de son intéressement contractuel, qu'elle n'entend pas maintenir ses demandes à l'encontre des sociétés SISE, ATISREAL AUGUSTE-THOUARD et GROUPE VENDOME ROME et sollicite leur mise hors de cause. Elle fait valoir qu'elle avait fait part dès le 12 septembre 2001 de ses inquiétudes concernant la situation économique de la société Sciences U France (pièce 29), alors qu'elle avait été débauchée du groupe HEC. Elle soutient qu'elle a été victime en 2003 d'un changement d'orientation stratégique global du groupe Vendôme ayant des incidences directes sur le pôle enseignement : mise en place d'une nouvelle organisation et arrivée en février d'un nouveau dirigeant et futur actionnaire : M. Sami A... (en remplacement de M. Z...), que ses prérogatives, ses missions et attributions lui ont été peu à peu retirées, qu'elle a été déchargée de ses fonctions opérationnelles pour ne devenir que chargée de mission en octobre 2003, situation lui provoquant une extrême inquiétude (courrier du 30 octobre 2003), par modification unilatérale de son contrat de travail, qu'elle a démissionné de son mandat social de Président de la société Sciences U France le 16 janvier 2004. Elle expose que la cour devra constater l'enjeu particulièrement important pour elle, si l'entreprise voulait qu'elle puisse atteindre ses objectifs, d'avoir à sa disposition, les moyens adaptés et le soutien requis pour prétendre à la prime d'intéressement, dès lors que les objectifs de l'année 2001/ 2002, fixés dans le contrat de travail, étaient atteints, que ses interventions et actions ont été nombreuses, que la société lui a versé en avril 2003 un montant brut de 13. 729, 65 € à titre d'acompte sur intéressement pour l'exercice 2001/ 2002, que ce versement vaut reconnaissance par la société de l'atteinte de ses objectifs contractuellement fixés, que ces résultats ont été atteints dans un contexte délicat, subissant les aléas et changements de stratégies et de politique des dirigeants du groupe, qu'en février 2002, elle apprenait que la société Atisreal Auguste-Thouard, pôle immobilier Vendôme, modifiait sa stratégie, que le groupe décidait de cesser de rechercher des opérations de croissance externe, mais recherchait des alliances et/ ou des partenaires financiers, qu'ainsi, la société Sciences U l'empêchait de réaliser ses objectifs, que dès l'origine, les objectifs qui lui étaient assignés étaient irréalistes. Elle souligne qu'elle n'avait pas les moyens nécessaires à la réalisation des objectifs arrêtés, qui devaient être réalisés sur 3 ans, alors qu'elle a été licenciée au bout de deux ans, que la somme réclamée sur l'exercice 2003 aurait dû lui être versée à la fin du mois d'avril 2003.

La société SCIENCES-U FRANCE et la société GROUPE VENDOME ROME, par écritures visées par le greffier et soutenues oralement, demandent à la cour de :
- mettre la société GROUPE VENDOME ROME hors de cause-confirmer le jugement s'agissant de la société SCIENCE-U FRANCE-débouter Mme Y... de ses demandes-condamner Mme Y... au paiement de la somme de 5. 000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC et aux entiers dépens

La société SCIENCE-U FRANCE et la société GROUPE VENDOME ROME répliquent que l'appelante n'a pas atteint les objectifs contractuellement fixés dans son contrat de travail, que le paiement de la somme de 13. 729, 65 € n'a jamais constitué une quelconque avance sur intéressement en application de l'article 6 ou 6 bis de son contrat de travail, qu'elle a pris appui sur la rémunération annuelle brute du collaborateur de la salariée (M. B..., directeur du groupe Engeu en région Rhône-Alpes ayant une ancienneté depuis le 1er juillet 2001) et lui a octroyé une prime représentant un écart de 10 % supérieur à cette rémunération (pièces 3 et 4), que la somme versée a été calculée en fonction de paramètres étrangers à l'article 6 bis du contrat de travail de la salariée. Elles font valoir que c'est la salariée qui a assuré sur le plan opérationnel, de la date de son engagement à son licenciement, la direction du Pôle dit " Engeu " ultérieurement dénommé Pôle Sciences U, que les objectifs n'étaient en rien irréalistes, ni unilatéralement proposés, alors qu'ils ont été négociés plus de deux mois avant la signature du contrat de travail, que la salariée s'est engagée sans réserves, que les fonctions de la salariée n'ont pas changé au mois de février ou d'octobre 2003 jusqu'à la date de notification de son licenciement, que celle-ci ne démontre pas qu'un changement du périmètre économique soit intervenu au cours de l'exercice 2003, que de nouvelles orientations auraient été décidées au cours de cet exercice avec effet lors de celui-ci, qui aurait eu une incidence sur le contrat de travail et les activités de la salariée. Elles objectent que contrairement à ce que soutient la salariée, M. A... n'a en rien modifié l'organisation opérationnelle et fonctionnelle du pôle Engeu, qu'elle n'a fait l'objet d'aucune réduction de ses fonctions, ni de ses responsabilités opérationnelles, rappelant que la perte de chance se fonde sur une probabilité, que la salariée ne s'est jamais plainte ou inquiétée de n'avoir pas les moyens de réaliser ses objectifs.

La société BNP PARIBAS REAL ESTATE TRANSACTION FRANCE, venant aux droits de la société ATISREAL AUGUSTE-THOUARD, par écritures visées par le greffier et soutenues oralement, demande à la cour de :
- prononcer la mise hors de cause de la société BNP PARIBAS REAL ESTATE TRANSACTION FRANCE venants aux droits de la société ATIS REAL AUGUSTE-THOUARD,- laisser l'ensemble des dépens à la charge de madame Y... ;

Le courrier adressé à la société SISE est revenue avec la mention : " boîte non identifiable ".

MOTIFS DE LA DECISION

-Sur la demande de mise hors de cause des sociétés SISE, ATISREAL AUGUSTE-THOUARD et GROUPE VENDOME ROME

Considérant qu'il sera fait droit à cette demande au regard des dispositions de l'arrêt de la cour de cassation du 20 octobre 2009 qui n'a pas cassé l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 28 février 2008 en ce qu'il juge irrecevable la mise dans la cause des sociétés ATISREAL AUGUSTE-THOUARD et GROUPE VENDOME ROME ;
Que par ailleurs, la mise hors de cause de la société SISE sera également prononcée ;- Sur la demande de dommages-intérêts de Mme Y... pour perte de chance de bénéficier de la prime d'intéressement
Considérant qu'il résulte de l'arrêt du 20 octobre 2009, que la chambre sociale a dit sur le premier moyen de cassation fondé notamment sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'il n'y pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Qu'il résulte de l'arrêt en date du 28 février 2008, que la cour d'appel de Paris a infirmé le jugement du CPH en ce qu'il avait requalifié le licenciement pour faute en licenciement pour cause réelle et sérieuse ;
Que par voie de conséquence, s'agissant d'une cassation partielle, le licenciement de Mme Y... est fondé sur une faute grave, en ce que, selon la cour d'appel de Paris, la salariée n'avait pas informé son employeur de la dégradation de la situation financière de la société, au regard de son poste à responsabilité ;
Considérant que le contrat de travail prévoyait la perception d'un intéressement qui inclut de façon forfaitaire, l'indemnité de congés payés, ainsi que le montant du 13ème mois correspondant à la partie variable de la rémunération, les sommes dues au titre de l'intéressement étant payables avant la fin des quatre premiers mois de l'année civile suivant la clôture de l'exercice social servant de base de calcul ;
Qu'il était stipulé à l'article 6 que la salariée peut prétendre si les objectifs définis en pages 2 et 3 sont atteints, pour l'exercice 2001/ 2002, à une première prime d'intéressement versée avant la fin du mois d'avril 2003 et calculée au prorata de son temps de présence durant l'exercice de référence ;
Que Mme Y... devait assurer pour l'année 2002 la bonne réalisation des objectifs suivants :
- mise en place du diagnostic Analyse produit et plus généralement, la synergie et la construction du Pôle Engeu-élaboration du Business Model-réalisation de l'équilibre financier du Pôle

Que le contrat ajoutait : Par ces moyens et toute mesure utile, Mme Y... devra :
- assurer la présence et le développement d'Engeu dans l'ensemble des opérations décrites, vers l'International-porter en trois ans le chiffre d'affaire du pôle Engeu de 120. 000. 000 F à 250. 000. 000 F HT, en assurant un résultat net d'exploitation de 15 %, ceci étant entendu croissance externe comprise-mettre en place, promouvoir et développer un M. BA au sein d'Engeu-mettre en oeuvre et favoriser toute alliance avec le CPA de la chambre de commerce et d'industrie de Paris notamment

Considérant qu'il convient de rechercher, comme le prétend l'appelante, si l'employeur l'a empêchée de réaliser ses objectifs, si dès l'origine, les objectifs qui lui étaient assignés étaient irréalistes, si l'employeur lui avait donné les moyens nécessaires à la réalisation des objectifs arrêtés, dont dépend le versement de la partie variable de sa rémunération et si celui-ci a commis une faute délictuelle, dont résulterait le droit pour Mme Y... de solliciter des dommages-intérêts pour perte de chance de réaliser les objectifs et de pouvoir bénéficier de la partie variable de sa rémunération ; Considérant que pour justifier que l'employeur a seulement versé un acompte sur la prime contractuelle d'intéressement, Mme Y... produit le courrier daté du 28 mars 2003 signé par M. A..., PDG de la société Siences U, mentionnant : Objet : Acompte Intéressement, ainsi libellé :
" Madame, Par la présente, nous vous informons qu'avec le virement de votre rémunération du mois de mars 2003, un acompte vous a été versé pour un montant de 10. 434, 53 €. Votre intéressement sera déclaré sur votre bulletin de paie du mois d'avril 2003 pour un montant brut de 13. 729, 65 € " ;

Que le terme " acompte " est également repris sur le bulletin de paie du mois d'avril 2003 et le terme " intéressement prévisionnel " à hauteur de 13. 729, 65 € est utilisé dans le document " Intéressement Top Management " établi par la direction le 18 mars 2003 ;
Considérant qu'avant de signer son contrat de travail le 14 novembre 2001, la salariée avait adressé un courrier daté du 12 septembre 2001 à M. Z..., " Chief Operational Officer " (qui a cosigné son contrat de travail), mentionnant :
" Pour finir, je suis une pro de la formation, mais pas des miracles, donc je pense qu'il ne faut pas que tu aies des illusions sur l'impact au moins en année 1 de mon arrivée sur les résultats (voire partiellement en année 2, il n'y a pas vraiment aujourd'hui dans ce cas que j'analyse de moyens immédiats pour faire du RN (résultat net) à la hauteur de ce que tu souhaites et en + il faut développer du transverse qui coûte de l'argent et ne rapporte pas immédiatement. Pour reprendre ton propos-si ce n'est pas le cas 15 % de RN (résultat net)- (pas de temps ni d'argent pour ces investissements interne), je pense qu'il vaut mieux vendre tout (sauf Efab et encore ! ! !) Et investir ailleurs " ;

Qu'elle avait adressé un courrier le 30 octobre 2003 au Président de la société, s'inquiétant d'être déchargée de ses fonctions opérationnelles pour ne devenir que chargée de mission en octobre 2003 ;
Que dans son courrier par lequel elle conteste la mesure de licenciement (13 février 2004), elle rappelle que : " Peu de semaines après mon arrivée, je comprenais que ces objectifs étaient plutôt du domaine de l'incantatoire que du réalisable, mais là encore, on me rassurait en m'indiquant de faire confiance et que la croissance externe permettrait rapidement d'atteindre les résultats " ;
Mais considérant que le licenciement de la salariée prononcée pour faute grave, n'empêche pas Mme Y... de prétendre à des dommages-intérêts pour perte de chance de bénéficier de l'intéressement contractuel sur la période 2001/ 2002, dès lors que les objectifs fixés par l'employeur étaient dès l'origine peu réalistes et très difficilement réalisables, ainsi que le relevait la salariée dans son courrier précité du 12 septembre 2001 et au regard de la situation objectivement difficile de la société au vu des pièces produites ;
Que pour fonder sa demande d'indemnisation pour perte de chance à hauteur de 105, 920, 35 € déduction faite de l'acompte versé en avril 2003, Mme Y... produit la pièce 211 : " tableau récapitulatif détaillant l'évolution des produits d'exploitation ainsi que des charges d'exploitation et financière pour les exercices 2001 et 2002, calculé au prorata temporis du temps de présence au sein de la société Sciences U France ", en appliquant les règles de calcul mentionnées dans l'article 6 bis du contrat de travail, précisant que l'attribution de cet intéressement sera fonction des résultats constatés sur le chiffre d'affaires et les charges de l'ensemble des structures du Pôle Engeu de la manière suivante :
-2, 5 % de l'évolution des produits d'exploitation entre deux exercices consécutifs-1, 5 % de l'évolution des charges d'exploitation et financières entre deux exercices consécutifs

Considérant que si ce document est admis à titre d'élément de preuve, toutefois, la salariée ne précise pas comment elle a pu obtenir les donnés figurant sur ce tableau, non daté et non signé ;
Qu'à la lecture des pièces produites, la perte de chance de percevoir la prime d'intéressement sur la période 2001/ 2002 subie par la salariée, du fait que l'employeur a commis une faute délictuelle en lui fixant des objectifs peu réalistes et très difficilement réalisables et en ne lui fournissant pas les moyens nécessaires à la réalisation de tous ses objectifs arrêtés, qui devaient être réalisés, pour certains sur une période de 3 ans, alors qu'elle a été licenciée au bout de deux ans, sera évaluée à la somme de 50. 000 €, étant rappelé qu'une perte de chance, qui s'analyse en la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable, ne peut aboutir qu'à la réparation partielle du dommage, s'agissant d'un préjudice éventuel qui ne peut correspondre qu'à une fraction du préjudice subi ;
- Sur l'article 700 du CPC
Considérant qu'il convient d'allouer à Mme Y... une indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort
Statuant sur renvoi après cassation partielle, de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 28 février 2008
Vu l'arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation, en date du 20 octobre 2009, cassant et annulant l'arrêt déféré, mais seulement en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour perte de chance de percevoir une prime d'intéressement
Prononce la mise hors de cause des sociétés ATISREAL AUGUSTE-THOUARD et GROUPE VENDOME ROME et de la société SISE
INFIRME le jugement prononcé le 20 avril 2005 en ce qu'il a débouté Mme Y... de sa demande d'intéressement contractuel
Statuant à nouveau de ce chef,
Dit que Mme Maryse Y..., par la faute de l'employeur, a perdu la chance de bénéficier de l'intéressement contractuel
En conséquence,
Condamne la société SCIENCES-U FRANCE à verser à Mme Maryse Y... la somme de 50. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance de bénéficier de l'intéressement contractuel,
Y ajoutant,
Condamne la société SCIENCES-U FRANCE à verser à Mme Y... la somme de 2. 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Dit que les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal à compter de la date du présent arrêt
Rejette toute autre demande
Condamne la société SCIENCES-U FRANCE aux entiers dépens
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
et signé par Monsieur Jean Michel LIMOUJOUX Président et par Monsieur LANE Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15ème chambre
Numéro d'arrêt : 10/00756
Date de la décision : 30/03/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2011-03-30;10.00756 ?
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